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Les contradictions des discours sur l’intégration par le sport.

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KOEBEL, M. (2010). Les contradictions des discours sur l’intégration par le sport. Revue EPS1, 340, 22-23.

Les contradictions des discours sur l’intégration par le sport.

Le sport joue un rôle positif dans les dispositifs d’intégration et de remédiation sociale. Leur développement qualitatif nécessite une expertise universitaire renforcée.

Alors que depuis plus de 20 ans le sport est en première ligne dans les discours sur l’intégration, on peut s’étonner que le rapport de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles paru en décembre 2005, ne cite pas une seule fois le mot « sport ». Pas plus que la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1er août 2003 dont l’annexe définit les objectifs et indicateurs de la politique de la ville.

Une première explication de cette apparente contradiction serait le véritable hiatus qui semble exister entre une vision politique nationale (celle de la politique de la ville dans les quartiers sensibles) et une vision locale (celle des acteurs qui la mettent en œuvre). Quand un responsable national veut étudier les effets d’une politique globale, il ne s’intéresse pas dans le détail aux activités d’animation qui vont contribuer à réaliser un objectif de prévention de la délinquance, surtout si le sport est considéré comme l’un des outils, et de loin pas le seul, servant cet objectif. Inversement, quand des acteurs sont centrés sur le sport ou les APS, qu’ils soient éducateurs, animateurs, formateurs, acteurs politiques ou même chercheurs, ils focalisent leurs analyses et leurs discours et ont (ou donnent parfois) l’impression que celui-ci est plus important que tout le reste. S’ils ont toujours tendance à penser et à croire que leur activité est indispensable, c’est souvent qu’elle est indispensable à leur propre survie et à leur reconnaissance sociale. D’où une surévaluation des effets positifs du sport, et plus particulièrement de leur spécialité, et son intérêt pour résoudre toutes sortes de problèmes.

Une autre explication que l’on peut avancer est liée à la spécialisation des ministères. En consultant les lois

d’orientation successives de la politique de la ville, on s’aperçoit que le sport y était cité jusqu’au jour où le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative a pris à son compte le développement d’une notion proche de

l’intégration par le sport, « la fonction éducative et sociale du sport, qui vise en particulier l’accès de tous à la pratique sportive et en particulier les publics les plus en difficulté » [ce ministère a poursuivi dans cette voie, notamment depuis que ses services extérieurs, le 1er janvier 2010, ont intégré la thématique plus large de la « cohésion sociale »]. Le partage des compétences et des moyens entre ministères semble avoir eu pour effet connexe de déresponsabiliser le ministère chargé de la politique de la ville de cette « préoccupation sportive ».

Ce qui peut paraître plus étonnant, c’est que les colloques et journées d’études sur la question de l’insertion et de l’intégration par le sport qui ont été organisés depuis près de 30 ans ont laissé se développer des discours où l’engouement pour le sport a contribué à brouiller les messages en valorisant des analyses subjectives. Là aussi l’enracinement professionnel et l’appartenance institutionnelle peuvent être invoqués pour expliquer l’apparition de prises de position emphatiques ou critiques, plutôt que d’analyses étayées. Les approches scientifiques sur les effets de la pratique sportive sur l’intégration de populations en souffrance restent rares.

Ce constat conduit à relativiser les discours des acteurs. Pour tenter d’évaluer les effets des pratiques sportives dites intégratives, il serait nécessaire de prendre en compte de nombreuses variables liées à la pratique, à son encadrement et aux pratiquants eux-mêmes, tout en réalisant des suivis de cohortes sur des périodes longues. Ce type d’études requiert des mises en œuvre complexes et coûteuses et l’on se satisfait d’évaluations minimales des politiques publiques.

Les acteurs, politiques, techniciens et administratifs, des ministères ou des collectivités concernés par ces politiques restent pour la plupart empreints du mythe de l’intégration par le sport. Leurs discours, relayés par les médias,

demeurent dominants et d’autant plus satisfaisants qu’ils semblent faire preuve d’authenticité. Pourtant, ils ne peuvent continuer à faire croire que l’on peut s’abstraire d’une analyse scientifique des pratiques dont ils autorisent le

développement, quelles qu’en soient les conditions, quelle que soit la formation des acteurs professionnels que l’on engage dans la bataille.

Michel Koebel,

Maître de conférences à la faculté des sciences du sport de Strasbourg

Membre de l’équipe de recherche en sciences sociales du sport de l’Université de Strasbourg.

Ce texte est partiellement extrait de l’article de KOEBEL, M. (2008). Intégration par le sport : une idéologie tenace.

Paru dans la revue Terra cognita, 12-2008, p.54-57.

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