FACTEURS DE VARIATION DE L’HÉMATOCRITE DES BOVINS
II. HÉMATOCRITE DES FEMELLES ADULTES
J.
CHARPENTIER, D. BONHOMME Laboratoire de Recheyches sur laViande,
Centre national de Recherches
zootechniques,
78 -Jouy-en-Josas
Institut national de la Recherche
agronomique
École nationale
d’Ingénieur
des Travauxagricoles,
33 - BordeauxSOMMAIRE
Le but de cette étude était de
préciser
l’influence de divers facteurs sur la valeur de l’hématocrite des bovins adultes. Cette étude aporté
sur 1z76 vaches deplusieurs
racesfrançaises
etd’âge compris
entre 4 et 12 ans.
Ces 1
z 7 6
animauxprovenaient
de 240exploitations réparties
dans i3régions
différentes et dont les natures de solpouvaient
se classer en 5catégories.
Les teneurs en fer et cuivre d’échantillons defourrage
dechaque exploitation
étaient déterminées parabsorption atomique.
Les influences de larace et de la
région
sontsignificatives.
Par contre,l’âge
ne semble pas être un facteurresponsable
de la variabilité de l’hématocrite. Les résultats de
l’analyse hiérarchique
de la variance de l’héma- tocrite montrent que les parts de la variance totale de l’hématocrite dues à larégion,
àl’exploitation
et à la variabilité individuelle
intra-exploitation
sontrespectivement
de r3,r p. ioo, 14,7 p. 100et 72,
2p. 100. Les teneurs en cuivre et en fer des
fourrages
ne diffèrentpassignificativement
selon lesrégions.
L’existence d’unegrande
variabilité individuelle de l’hématocrite dans des conditions de milieuidentique
laisse supposerqu’un
déterminismegénétique
est àl’origine
de cette variabilité.INTRODUCTION
L’hématocrite
des veaux à la naissanceprésente
uneimportante
variabilité dont nous nous sommes efforcésd’expliquer
les causes lors d’une étude antérieure(CHARPENTIER, BONHOMME, i 9 67).
Nous avons ainsi pu mettre en évidence l’existence d’une liaisonsignificative
entre l’hématocrite des veaux et celui de leurs mères. Aucours de cette
étude,
il nous estégalement
apparu que l’hématocrite des bovins adultespouvait
être souvent très faible sans que,d’ailleurs,
les animauxprésentent
pour autant dessignes cliniques particuliers.
Il semblelogique
de supposer que cette varia- bilité de l’hématocrite est due à des facteursgénétiques
ou à des facteursnutritionnels,
en l’occurence un déficit alimentaire en
oligo-éléments indispensables
à l’hémato-poïèse.
Aussi le but de notre étudeest-il,
sinon depréciser
lapart
relative de ces deuxfacteurs,
du moins de considérer les influencesrespectives
des causes de variationimputables
éventuellement aux facteurs de milieu et aux différences individuelles.MATÉRIEL
ETMÉTHODES
Cette étude a
porté
sur 1276 vachesd’âge compris
entre 4 et rz ans, dont le tableau suivantprécise
les races, ainsi que les effectifs par race.Ces 1276 animaux
provenaient
de 240exploitations réparties
dans les 13secteursgéographiques
suivants :
La nature dominante des terres de ces
exploitations
était classée dans l’une descatégories
suivantes :
i.
calcaire,
z.
argilocalcaire,
3
.
argilosableux, 4 . boulbène, 5. sableux.
Une goutte de sang était
prélevée
à l’oreille des animaux directement dans un tubecapillaire
àmicrohématocrite. L’hématocrite était déterminé par
centrifugation
des microtubes à 3 ooo tours/mi-nute
pendant
15minutes dans unecentrifugeuse Jouan
G 57 munie d’unplateau
à microhématocrites.La teneur en fer d’échantillons de foin de
prairie
naturelle outemporaire
était déterminée parabsorption atomique
au moyen d’unspectrophotomètre
Perkin-Elmer.L’analyse statistique
a été conduite selon la méthode del’analyse hiérarchique
de variance.RÉSULTATS
ET DISCUSSIONr.
Influence
de la raceLes résultats de
l’analyse
de variancefigurant
au tableau i montrent que l’in- fluence de la race sur la valeur de l’hématocrite est hautementsignificative.
Toutefoisquelle
que soit la raceconsidérée,
la variabilité de l’hématocrite demeureimportante,
et une étude ultérieure devra
préciser
cepoint.
L’examen des données
bibliographiques
montre que l’influence de la race sur la valeur de l’hématocrite est très controversée.Ainsi,
selon McKAY(z 93 r)
et LONG et al.( 1952
),
l’hématocrite des bovins estindépendant
de la race, alors que des différencessignificatives
entre races ont été mises en évidence par RUSOFF et al.( 1954 ),
McDo-NALD et al.
(i956).
2
.
Influence
desfacteurs géographiques
21
.
Influence
de larégion.
L’analyse
de lapart
de la variance totale due au facteur «région o (tabl. 3 )
montre l’influence
significative
de ce facteur. Les valeurs moyennes de l’hématocrite sontparticulièrement
faibles dans lesrégions
3 et 10,(tabl. 4 ).
Dans cette dernièrerégion,
le nombre d’animaux( 14 )
est toutefoistrop
limité pour que la valeur de l’héma- tocrite soitprise
en considération. Les causessusceptibles
d’être àl’origine
des diffé-rences
régionales
de l’hématocrite des bovins sont en effetmultiples.
Parmi celles-ciil semble
logique d’envisager
une éventuelle variabilitérégionale
des teneurs enoligoéléments indispensables
àl’hématopoïèse,
en l’occurence le fer et le cuivre.Or,
en
fait,
commel’indiquent
les résultats del’analyse
de variance du tableau 5 et les valeurs moyennes des teneurs en fer et cuivre desfourrages
des différentesrégions
(tabl. 6),
une tellehypothèse
nepeut
être valablement retenue.22
.
Influence de La
nature du sol.Aussi,
pourpallier
cette insuffisance derigueur
dans le choix des zonesgéogra- phiques,
il nous est apparuindispensable
de ne considérer à l’intérieur de ces zonesque les
exploitations présentant
dupoint
de vuepédologique
unehomogénéité
satis-faisante.
L’analyse
de la variance de l’hématocrite montre que les différences que l’on constate nepeuvent
être attribuées à la diversité de la nature des sols. Les teneursen fer des
fourrages
ne diffèrent d’ailleurs passignificativement
selon lestypes
de sols(tabl.
7et8).
Si les teneurs en fer des
fourrages peuvent
effectivement êtreplus
faibles dans les zones àprédominance calcaire,
dans aucun cascependant, compte
tenu des quan- titésingérées,
elles nepeuvent
être àl’origine
d’un état de carence martiale. Nousrejoignons
làl’opinion
de de VUYSTet al.(rg 59 ),
selonlaquelle,
chez les bovinsadultes,
les cas de carence alimentaire en fer sontpratiquement
inexistants.Les résultats de
l’analyse hiérarchique
de la variance(tabl. 9 )
montrent que lesparts
de la variance totale de l’hématocrite dues à larégion,
àl’exploitation
et à lavariabilité individuelle
intra-exploitation
sontrespectivement
de 13,1 p. 100, 14,7 p. 100 et 72,2 p. 100.La
part
relativementimportante
de la variance due à larégion
confirme le résul- tat obtenu antérieurement selonlequel
l’influencerégionale
s’avéraitsignificative.
Compte
tenu des observations effectuées lors de notreétude,
la causalité de l’influencerégionale
nepeut
faire quel’objet d’hypothèses.
Nous avons montré que les faibles variations des teneurs en fer et cuivre desfourrages produits
dans cesdiverses
régions
nepouvaient
être considérées commeresponsables
de la variabilité de l’hématocrite.Comme nous avons mis en évidence l’existence d’une influence
significative
dela race, il est
possible
que des différences dans larépartition géographique
des racessoient,
enpartie,
àl’origine
de la variabilitérégionale
de l’hématocrite.Enfin,
la seule considération du fer et du cuivre est vraisemblablement insuffisante et il estpossible
que des carences en d’autres éléments
indispensables
àl’hématopoïèse puisse
éven-tuellement exister dans certaines
régions.
A cetégard,
une étudecomplémentaire
limitée à la
région
n° 3permettrait peut-être
d’élucider les causes de l’infériorité de l’hématocrite des animaux de cetterégion.
La variance due aux facteurs
d’exploitation peut
vraisemblablements’expliquer
par une
répartition
différente des races au sein des diversélevages,
ainsi que par l’absence ou non d’unecomplémentation
alimentaire enoligoéléments.
La variance résiduelle est nettement
supérieure
aux variances dues à larégion
ouà
l’exploitation.
Cette variance résiduelle estimputable
aux différencesintrinsèques
de l’hématocrite des animaux d’une même
exploitation,
ainsiqu’aux
variations enquelque
sorte strictementexpérimentales, qui dépendent
d’ailleurs essentiellement de la réaction de l’animal lors de laprise
de sang. Unedécharge
d’adrénaline par lesglandes
surrénalespeut
en effet provoquer une contraction de la ratequi augmente
ainsi transitoirement le nombre des hématies circulantes et, parconséquent,
la valeurde l’hématocrite.
Étant donné, toutefois,
que lesimple prélèvement
d’unegoutte
de sang ne nécessite aucune contention et n’entraîne donc aucune excitation de l’ani- mal et que, parailleurs,
comme dans une mêmeexploitation
lesprélèvements
étaienteffectués par un seul
opérateur,
ilparaît logique
d’attribuer laquasi-totalité
de lavariance résiduelle à la variabilité individuelle des animaux
intra-exploitation.
D’ailleurs,
il est trèsfréquent
de trouver dans une mêmeexploitation
des animaux dont les hématocrites varient dans unrapport
telqu’en
aucun cas la diversité des réactions de l’animal nepeut
êtreinvoquée.
Pour la raison
indiquée précédemment, l’âge
nepeut
être considéré comme un facteurresponsable
de la variabilité del’hématocrite,
cequi
confirme tout à fait lesrésultats de ScHUr,TZ!
( 19 6 0 ).
Selon cet auteur, l’hématocrite fluctue certesquelque
peu de
part
et d’autre d’une valeur moyennequi
demeure néanmoinspratiquement
constante
pendant plusieurs
années consécutives. Ce même auteur a pu observerégalement qu’à
l’intérieur d’un mêmeélevage,
des différencesimportantes
dans lavaleur de l’hématocrite se maintenaient sur une très
longue période.
La mise enévidence d’une
importante
variabilité de l’hématocrite des animaux d’un même éle- vage corrobore doncpleinement
les observations que nous avons pu effectuer au coursde cette étude.
Les valeurs extrêmes de l’hématocrite que nous avons
enregistrées
sont de i4et56
p. 100. Les animaux dont l’hématocrite est faible ne sedistinguent
par aucunsigne clinique
d’ordrepathologique qui
soitsusceptible
de leur êtrepréjudiciable.
A l’occa-sion d’une
enquête
réalisée lors de cetteexpérimentation,
nous avons pu constater que les vachessignalées
par les éleveurs commeproduisant régulièrement
des veaux« blancs o
présentaient précisément
des valeurs d’hématocrite inférieures à 25 p. 100. Ce résultat n’est d’ailleurs nullementsurprenant puisque,
dans une étudeantérieure,
nous avions mis en évidence l’existence d’une liaison entre l’hématocrite des veaux à la naissance et celui de leurs mères
(CHARPENTIER,
BONHOMME,r967).
CONCLUSION
En
conclusion,
les résultats de notre étude montrent que, si la race des animaux et les conditions de milieupeuvent
certes influencer la valeur del’hématocrite,
ilapparaît
néanmoins que la cause essentielle de la variabilité de l’hématocrite réside dans des différences individuelles entre animauxqui
sontparticulièrement
netteslorsque
les conditions de milieu sontidentiques.
Par suite de l’intérêt queprésente
lavaleur de l’hématocrite en tant que critère de
l’aptitude
à laproduction
du veau deboucherie,
en cequi
concerne du moins la coloration de laviande,
ilparaît
doncsouhaitable de
préciser
l’héritabilité de l’hématocrite et deprofiter
ainsi éventuelle- ment de la variabilité de cettecaractéristique
pour effectuer une sélectionplus
ration-nelle des
reproducteurs.
Reçu pour
j!ublication
enjuin
i968.REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier nos
collègues
RonviER et PouJnxmEU, de la Station centrale de Géné-tique
animale, pour leurssuggestions
dans l’élaboration du programmed’interprétation,
ainsi que le service demécanographie
de cette Stationqui
a effectué les calculs.SUMMARY
SOME FACTORS INFLUENCING IIAEMATOCRIT VARIATIONS IN BEEF CATTLE II. - HAEMATOCRIT OF ADULT COWS
This
investigation
into the factorsresponsible
for haematocrit variations in adult cows wascarried out on 1276, 4 to 12year old cows of various French strains from 240farms
from 5 soilcate- gories.
The iron and copper contents ofhay
samples from each farm were estimatedby
means ofatomic
absorption.
There were
significant
inter-strain and iiiter-district differences.The age of cows does not seem to have any effect on haematocrit value.
A hierarchical
analysis
of haematocrit variations shows that the percentages of variance due todistrict, farm, and individual intra-farm
variability
are 13.1, iq.7, 72.zrespectively.
There is no
significant
inter-district difference in the iron and copper contents ofhay.
A
high
individualvariability
of haematocrit values under the sameexperimental
conditionstend to support the
hypothesis
of agenetical
determinism.RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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