UTILISATION DE FACTEURS MENDÉLIENS EN ÉLEYAGE :
L’EXEMPLE DE LA POULE ( 1 )
P. MÉRAT
Laboratoire de Génétique factorielle,
Centre national de Recherches Zootechniques, I. N. R. A., 78-Jouy-en-Josas
RÉSUMÉ
Quelques possibilités typiques d’utilisation de facteurs mendéliens en sélection aviaire sont
présentées:
- Gènes montrant un polymorphisme, décelés par voie sérologique ou biochimique, avec avantage de certains génotypes hétérozygotes, utilisable en croisement.
- Gènes à effet visible, généralement fixés dans les populations commerciales, et pour
lesquels l’introduction d’un allèle nouveau présentant quelque avantage quantitatif est souvent impossible ou risquée, à l’heure actuelle, mis à part des cas particuliers : effet quantitatif vrai-
ment important (crête en rose), ou effets maternels associés, suggérant un choix orienté entre croisements réciproques.
- Mutants rares, produisant des phénotypes modérément anormaux mais possédant cer-
tains caractères intéressants pour des cheptels commerciaux (gènes de nanisme). Un avantage éventuel associé à l’état hétérozygote pour une anomalie ou un gène létal récessif poserait une question analogue.
Des gènes aux effets quantitatifs liés relativement peu considérables pourront valoir la peine
d’être pris en considération à mesure que la sélection pour un caractère tendra à plafonner.
Un exemple comme celui du gène dw de nanisme montre la complexité des effets, et par voie de conséquence du « mode d’emploi n pratique, d’un nouveau gène.
Un problème de prospection prolonge nécessairement ceux de sélection : recherche d’avantages pouvant être apportés par des gènes absents des souches commerciales actuelles, pour des carac- tères non encore sélectionnés intensément (rendement alimentaire « résiduel n des pondeuses, comportement...), pour un mode d’utilisation particulier, ou dans un milieu (alimentaire, clima- tique...) nouveau.
INTRODUCTION
Pour
beaucoup
dechercheurs,
l’utilisation de facteurs mendéliens dans la sélection des animauxdomestiques représente
unproblème
sans réelleimportance pratique,
étant donné son caractèreexceptionnel.
( 1
) Rapport présenté à la Réunion annuelle de la Fédération européenne de Zootechnie, Commission de
Génétique, Versailles, France, le 17juillet 1971.
Il est de fait que les
gènes
identifiés à l’heure actuelle ne constituentqu’un
échantillon extrêmement restreint de l’ensemble du
génome
desespèces
d’intérêtéconomique.
Deplus,
comme lesouligne
parexemple
RoB>~xTSOrr(rg 7 o),
dans despopulations
sélectionnéesdepuis longtemps,
des facteurs mendéliensayant
un effetquantitatif
considérable ontdû,
leplus
souvent, êtredéjà
fixés à l’étathomozygote.
Enfin, l’expérience
montre que,jusqu’ici,
peu degènes simples
ont faitl’objet
d’uneutilisation
pratique
effective dans l’amélioration des caractèreszootechniques.
Pourtant,
nous voudrions montrer que,malgré
ceslimites,
il est souhaitable de ne pasnégliger
cetaspect
de l’améliorationgénétique.
C’est surl’exemple
de laPoule que nous nous
appuierons.
Parmi les
espèces domestiques,
elle est laplus apte
à une telleinvestigation,
de par sa facilité
d’élevage
et desélection,
mais aussi à cause du nombre assezgrand
des
facteur
mendéliens connus et de leur variété : facteurssérologiques,
variants deprotéines, d’enzymes,
mutants decoloration, morphologiques
ou même létaux.CAS
TYPIQUES D’UTILISATION
DE FACTEURS
MENDÉLIENS
ENSÉLECTION
Nous mentionnerons d’abord
quelques
situationstypiques
pour l’insertion d’un facteur mendélien dans un programme desélection, d’après
son mode d’action etles contraintes
imposées
par desimpératifs économiques.
m Le cas le
plus
souvent cité est celui desgènes
déceléspar
voiesérologique (groupes sanguins)
oubiochimique (variants
deprotéines) présentant
unpolymor- phisme fréquent
à l’intérieur despopulations.
Chez la Poule comme chez d’autresespèces,
il ne semble pas y avoir très souvent d’effets « additifs » considérables atta- chés à cesgènes, mais,
au moins au locus B de groupesanguin,
on a noté unesupé-
riorité assez
générale
de l’étathétérozygote (BRIBES, 10 6 0 ; Gm,MOUx, ig6o).
Onpeut
alors penser à orienter le choix d’allèlesparticuliers
dans deslignées parentales,
en vue d’obtenir en croisement les
génotypes hétérozygotes
lesplus
favorables. Ceci entraîne des difficultéspratiques,
euégard
à la diversité des allèles existant dans despopulations différentes,
et à la difficulté de reconnaissance desgénotypes
en croi-sement. De ce
point
de vue, c’estpeut-être paradoxalement
unavantage
pour le locus Hi decomporter
seulement deux allèlesidentifiés, présence
et absence d’unantigène
décelé par des extraits degraines (S CHEINBERG
et RECELEE,ig6i).
Noussoupçonnons en effet pour ce
gène
une situation d’ « overdominance », du moins pour laponte
despremiers
mois dans lapopulation
étudiée par nous(DuxaND
etMÉ RA T, 1971
).
Si ce fait étaitplus général,
sanscontrepartie
défavorable parailleurs,
il serait aisé d’en tirerparti
encroisement,
par fixation de l’un ou de l’autre allèle danschaque lignée parentale ( 1 ).
Nous rangerons dans la même
catégorie
des facteurs mendéliens de résistance à certains virus ducomplexe leucosique (G OODWIN , zg66 ; CRiTT!ErrD!N, ig68 ;
(’) GILMOUR et Moxrorr, cités par GILMOUR (1969), distinguent schématiquement, parmi les loci polymorphiques, ceux à nombreux allèles et overdominance appréciable et ceux à peu d’allèles avec
faible overdominance globale mais interactions entre loci ou avec le milieu. L’utilisation que nous évo- quons peut concerner le premier groupe de loci, mais éventuellement aussi le second dans des conditions
particulières.
DICx!ItsoN,
I g68). Malgré
ce caractère favorable derésistance,
lesgènes
enquestion
ne semblent fixés dans aucune
population,
et, dans des souches «ponte
», leur fré-quence n’est pas très
élevée, suggérant peut-être
l’existence d’autres effets associés moinsfavorables. Le problème
del’usage pratique possible
de cesgènes
vaut au moinsla
peine
d’êtreexaminé, compte
tenu bien entendu des autrespossibilités
éventuelles deprophylaxie.
La situation d’un
polymorphisme équilibré intra-population
serait vraisembla- blement aussi celle degènes
que l’on identifierait à l’aide de méthodesstatistiques appropriées,
par leur effet direct sur uneperformance quantitative,
car par de tellesméthodes on n’arrivera
guère
à déceler que desgènes
d’effet relativement considé-rable,
nepouvant
se maintenir non fixés enprésence
d’une sélectionprolongée
que si leureffet,
« non additif »,s’oppose précisément
à cette fixation.2° Une deuxième situation
typique
concerne desgènes à effet
visible(coloration, morphologie).
Pour cesderniers, généralement,
iln’y
a pas depolymorphisme
intra-population,
du fait de leur fixation par les éleveurs pour assurerl’homogénéité
d’unerace. A
!riori,
il ne semble donc paspossible
de tenircompte
en sélection des effetsquantitatifs
éventuellement associés à cesgènes, puisque
leur choix estimposé
dansune
population
donnée. Cettepossibilité peut cependant
seprésenter. Parfois,
de telsgènes
ne sont pas totalement fixés etposent
en mêmetemps
certainsproblèmes.
D’autre
part,
le « standard » extérieurpeut
êtresujet
àrévision ;
la connaissance des effets secondaires desgènes
en cause sera alorsutilisable,
même s’il est difficile d’introduire un allèle nouveau dans une souche sélectionnée. Cette connaissancepeut
enfin orienter le choix des croisements.Le cas d’un
gène
non fixé à effet visible a ététypique
de la raceWyandotte
il y aune
vingtaine
d’années. Cette race est caractérisée par une crête en rose, mais legène responsable (R) n’y
étaitjamais
fixé à l’étathomozygote
par sélection individuelle,malgré
les efforts des éleveurs. COCHEZ( I95I ) s’aperçut
que la cause en était unefertilité de 2o à 30 p. Ioo inférieure pour les coqs
homozygotes RR ;
l’anomalie semblese localiser au niveau de certains caractères des
spermatozoïdes
CRAWFORD etS
MI T H
, 19 6 4 PET ITJ E AN
etCOCHEZ, 19 66).
L’avantage
« commercial » de conserverl’image
de marque d’une race connue et de fournir des croisements extérieurementhomogènes
nepeut
donc êtreacquis qu’au prix
d’une baisse de fertilité dans la raceparente.
Bienentendu,
lejour
oùle « standard » extérieur de la race
perd
sonimportance,
la connaissance de l’effet défavorable dugène
Rprend
toute savaleur,
et l’onpeut
fixer l’allèler (crête
«
simple »)
dans les souches enquestion.
Un autre
exemple
concerne la coloration. Un taux d’éclosion inférieur enpré-
sence du duvet « tout noir » est la
plus
ancienne observation dans ce domaine(HuTT, I
g5 I
).
Parla suite,
divers chercheurs ont noté unelégère
réduction de croissanceassociée à chacun des
gènes
I(blanc
« dominant»)
et c(blanc
« récessif» (SM y TH, I
g6g ; M!ItAT, 1970 ). L’importance
des effets sur la croissance sembleparallèle
àcelle des différences de
pigmentation.
Buss( I9 6 0 )
observe aussi un retard de crois-sance en
présence
d’un « blanc récessif » chez le dindon. Un effetpléiotropique paraît
donc
l’explication
laplus
satisfaisante. D’autrepart,
nous avonsobservé,
associésà la coloration blanche
produite
par les deux mêmesgènes,
unelégère
réduction dupoids
del’oeuf,
une diminution de l’ordre de 5 p. Ioo de la consommation alimen-taire et du
gain
depoids
despondeuses
àpoids
etproduction
d’oeufséquivalents (MÉ
RA
T
etP ROD ’ HOMM E, 19 68 ; Mf; R n’r,
données nonpubliées). I,’effet
voisin chez deuxgènes
suppresseurs de lapigmentation
duplumage
et lerapprochement
avec lesrésultats de croissance
suggèrent
ici encore une actionpléiotropique.
Dans ces conditions on
pourrait
penser, en sélection « chair », à réaliser ungain
de I ou 2 p. IOO sur le
poids
enproduisant
despoulets
colorésplutôt
que blancs : Ceci n’est pasnégligeable
dans les conditions actuelles de la sélectionavicole,
en terme de « limites de la sélection ». Il sepeut (S M y ’ rx, ig6g)
que l’effet défavorable associé à l’absence depigmentation
soitcompensable
par la sélection degènes
suppresseurs de ceteffet,
mais on n’en a pas la certitude et le choix de l’allèle apriori
favorableserait une sorte d’assurance.
Une contrainte
empêche,
actuellement et sur nosmarchés,
d’utiliser cette solu- tion : lapréférence
commerciale souvent accordée auxpoulets
blancs aplus d’impor-
tance
qu’un léger avantage
de croissance.L’introduction
d’allèles « colorés » dans les souches blanches améliorées depoulets
de chairpourrait,
parailleurs,
causer unretard momentané dans la sélection. On
pourrait imaginer,
par contre, de tirerparti
de la moindre consommation alimentaire des
pondeuses blanches,
en réalisant le croisement d’une souche maternelle blanche par une souchepaternelle colorée, plutôt
que leréciproque, lorsqu’on produit
despoulets
blancs àpartir
d’une souche à blanc dominant et d’une souchepigmentée.
Dans le domaine de laponte,
lespoules
blanches devraient avoir aussi un rendement
global supérieur
auxcolorées,
leur croissance inférieuren’ayant
pas icid’importance,
et l’onpeut
se demander alors sice n’est pas une sélection inconsciente
qui
a conduit dans lepassé
les éleveurs àutiliser essentiellement les variétés blanches chez des races de
pondeuses
comme laLeghorn
et laWyandotte.
C’est aussi un choix orienté des croisements
réciproques
quesuggère
l’existence d’effets maternels attachés à certainsgènes
connus.Ainsi,
nos résultats mettent enquestion l’emploi
d’une mèrepossédant
l’allèle Kd’emplumement
tardif pour sexer lespoussins
d’unjour
dans un croisement « chair », car nous trouvons dans 8 popu- lations différentes une descendance de croissancesignificativement
inférieure pour les mères de cegénotype indépendamment
dugénotype
propre deszygotes (Ml; R aT, zg6!).
Lapossibilité
de sexage étant unavantage économique,
ce résultatn’implique
pas nécessairement l’abandon de cette formule de
croisement,
mais ilpermet
d’en dresser un bilanglobal plus précis.
3° La
perspective
est encore différente pour des mutants rares,générateurs de phénotypes
s’écartant de la norme. La frontière avec lesgènes
considérés comme« normaux » n’est pas
toujours
évidente : legène
« crête en rose »,malgré
son effetsur la fertilité
mâle,
caractérise certaines races. Parmi desgènes responsables
d’ano-malies
modérées,
l’onpeut espérer
trouver un élément deprogrès,
dans la mesureoù l’anomalie est
compensée
par d’autres caractères intéressants. Tels sont des facteurs de réduction de taille.Le
gène
dw de « nanisme » découvert par HuTT( I959 )
et retrouvéindépen-
damment en France
(MÉ RAT , 19 6 9 b)
n’existait vraisemblablement à unefréquence appréciable
dans aucunepopulation
connue. Ils’accompagne
d’une réduction de la taille de l’ordre de 30 p. ioo, et,corrélativement,
d’une diminutionimportante
des besoins d’entretien des
poules adultes,
de l’ordre de 20 à 25 p. ioo. De nom-breux effets secondaires ont été
notés, parmi lesquels
une réduction modérée dela
ponte (—
io à i5p.ioo)
du moins dans les souches «légères
», dupoids
des oeufs(—
5 à 10p.1 0 0 ),
unléger hypothyroïdisme probable (V AN
TIENHOVEN etal., ig66 ;
MÉ
RAT et
GUILLAUME, 19 6 0 ).
Aucune influence défavorable à la survie ou à l’éclo- sion n’a été observée.L’apport possible
de cegène
à la sélection a été étudié dans deux directions. Sonemploi
pour obtenir despondeuses
depetite
taille a été examiné par BERNIERet ARSCOTT(ig6o, 19 68) :
Le bilan semble au totalpositif,
la réduction du taux deponte
et dupoids
des oeufs étantgénéralement plus
quecompensée
par l’économie réalisée sur la nourriture
( 1 ).
Peut-être faut-il d’ailleurs nuancerles conclusions suivant les conditions
climatiques,
car les « naines» paraissent
secomporter légèrement
moins bien auxtempératures basses, comparativement
aux « normales », mais mieux aux
températures
élevées.Un second schéma d’utilisation consiste à introduire le
gène
dw dans les souches« maternelles » utilisées en croisement « chair ». Le croisement de souches «
pères
»homozygotes
Dw Dw avec une femelle nainedw,
tireavantage
du caractère lié ausexe et presque entièrement récessif de l’allèle dw
(les poussins
femelles sont nor-maux, les mâles ne
présentent qu’un
faiblehandicap
de croissance de l’ordre de 3 p.ioo)
et de l’économie réalisée sur la consommation alimentaire de la souche maternelle. Ce schéma a été réalisé par COCHEZ(communications personnelles) ;
il est
également
étudié parJ AAP ( 19 68).
Ces chercheurs estiment que l’économieglobale apportée
ainsi par legène
dw est de l’ordre de 5 à io centimes parpoussin produit.
Ce
gène représente, semble-t-il,
lapremière
utilisation en sélection chez lapoule
d’une anomalie relativement
importante.
Il existe un autre facteur de nanisme lié au sexe(J A nr, 10 6 0 ),
non entièrementrécessif, qui pourrait peut-être
être utiliséen vue de la
production
d’oeufs. Parailleurs,
des anomalieslégères
comme cellesréduisant le
plumage,
en influant sur leséchanges énergétiques
avec le milieuambiant,
ne
pourraient-elles
êtreavantageuses
dans certaines conditionsclimatiques ?
Même des
gènes
létauxpourraient
unjour
ou l’autre poser unproblème
d’inser-tion dans un programme
pratique
de sélection : il semble que lapossibilité
d’ « over-dominance »
globale
ou relative à certainscaractères,
associée à de telsgènes,
n’aitjamais
été recherchée chez lapoule.
Citons un résultatanecdotique
dans la mesureoù il
suggère
une tellepossibilité :
dans une soucheexpérimentale
de la Station duMagneraud
sélectionnée pour laproduction
d’oeufs est apparu il y aquelques
annéesun létal récessif
accompagné
de malformations des membres(COCHEZ,
communi- cationspersonnelles) :
enquelques générations,
lafréquence
de cegène
a considé-rablement
augmenté,
sans sélection consciente en sa faveur.Malgré
l’absence de preuvesrigoureuses,
uneexplication possible
est évidemment unesupériorité
deshétérozygotes,
soit pour lavitalité,
soit pour les caractères deproduction
sélectionnés dans la souche.L’exploitation
d’une situation de ce genrepourrait impliquer
l’obten-tion en croisement d’une certaine
proportion d’hétérozygotes avantageux,
en entre-tenant dans une
lignée parentale
mâle une certainefréquence
du létal enquestion,
au
prix
d’une mortalitéembryonnaire
accrue dans cettelignée,
si un bilan écono-mique global
révélait la rentabilité d’une telleopération.
( 1
) De plus, d’après RICARD et COCHEZ (x972), les poules naines dw, en cages, ont moins d’oeufs cassés que celles de taille normale, vraisemblablement par suite d’une hauteur de chute plus faible de l’oeuf, leurs tarses étant plus courts, car nos observations et celles d’autres chercheurs montrent que les coquilles de leurs œufs ne sont pas plus épaisses.
Enfin,
onpourrait imaginer
que desgènes responsables
d’anomalies servent de « testeurs o del’aptitude
desgénotypes
àsupprimer
leur effet ou à s’en accommo-der,
parexemple
si cesgènes
« anormaux n miment l’effet de conditionsparticulières
de milieu. A titre
purement
illustratif et sansqu’il s’agisse
bien entendu d’une propo- sition d’ordrepratique,
ungène
causant une structure anormale duplumage
telque F
(«
friséu) peut
être considéré d’un certainpoint
de vue comme mimant leseffets d’une
température basse,
du faitqu’il augmente
considérablement lesdéper-
ditions
caloriques
des animaux. Dansquelle
mesure l’utilisation d’unelignée
« tes-teur n à
plumage frisé, permettant,
par sélectionrécurrente,
d’accumuler dans unelignée
« normale » desgènes
réduisant enF I
l’effet défavorable desdéperditions
excessives liées au
gène F,
n’entraînerait-elle pas uneréponse
liée dans le sens d’uneadaptation
à un climat froid?QUELQUES RÉFLEXIONS GÉNÉRALES
1
. -
Quand
ungène
vaut-il lapeine
d’être considéré individuellement en sélection
intra-!o!ulation ?
pUne
question préliminaire
essentielle pour desgènes
d’effetquantitatif
observérelativement modeste est d’être sûr de la réalité de cet effet. Ceci est
plus
difficilequ’il n’y paraît,
mais une assurance raisonnablepeut
être fournie par des indices conver-gents :
résultats de même sens dansplusieurs populations,
voire dans desespèces
différentes ou pour des loci distincts
ayant
un effetqualitatif analogue,
en attendantune certitude
plus complète qui
seraitpermise
par lacompréhension
du moded’action du
gène.
Concernant l’intérêt de la
prise
en considération individuelle degènes simples
en sélection
intra-souche,
SMITH( 19 6 7 )
montre que, pour un caractère d’héritabilité moyenne ou élevée cet intérêtapparaît faible,
à moins que lesgènes
enquestion
n’aient un effet assez considérable. Par contre, il
peut
valoir lapeine
deprêter
attention à desgènes
d’effetquantitatif
faible oumodéré,
même de l’ordre d’une fractiond’écart-type,
pour un caractère de faible héritabilité.Pratiquement,
onpeut
en conclure
qu’en
début de sélection il sera leplus
souventsuperflu
d’identifier desgènes
un par un ; par contre,lorsqu’on
atteint unplafond,
comme c’est le cas parexemple
pour le nombre d’oeufs(C LAYTON , 19 68),
desgènes
considérés isolémentpeuvent
gagner del’importance.
Ces considérations concernent d’ailleurs essentiellement la
rapidité
desgains
obtenus par la sélection dans
l’hypothèse
d’ungène
à effets additifs.Or, l’expérience
montre que les effets
quantitatifs
associés à ungène
sont très souventnon-additifs, parfois
defaçon complexe, qu’il s’agisse
d’un facteur de groupesanguin (B RILES , ig6o ; Gm.MOUR, ig6o)
ou d’ungène
à action visible(MÉ RAT , 1970 ) :
effets mater-nels,
influence sur la variance d’uncaractère,
interactionimpliquant plusieurs loci,
voire même sélection
gamétique...
En situation
d’équilibre,
de tels effets ne donnentplus prise
à lasélection,
alors même quel’application
de cette dernièrepeut
laisser subsister une variancegénétique
nonnégligeable
associée augène
étudié(MÉ RAT , 19 6 9 ) :
la sélection surles
performances
a alors atteint seslimites,
et seule la connaissance détaillée des effets dugène permettra
de réaliser encore ungain génétique.
On
peut
noter aussi que les considérationsthéoriques
de SMITHs’appliquent
à la sélection
individuelle ;
dans un choix sur des moyennes defamilles,
l’effet d’ungène particulier
seraplus important
enregard
de la variancerésiduelle,
celle-ci étant diminuée. En d’autres termes, legène
enquestion
seraplus
«majeur
», et saconsidération pourra revêtir alors
plus d’importance.
2
. -
Complexité
du « moded’emploi
» d’ungène
Le
petit
nombred’exemples
oùl’usage
d’un nouveaugène
pour améliorer lesperformances
estpossible
ou estpratiqué
laisseapparaître
le caractère engénéral complexe
de cetteutilisation, conséquence logique
de lacomplexité
des effets quan- titatifs. Ceci est vrai de certainsgénotypes
de groupesanguin, avantagés
ou désa-vantagés
suivant le stade considéré de la vieembryonnaire (B RIL ES
etA LLEN , zg6i).
C’est aussi le cas des effets limités mais divers associés à des
gènes
inhibant la colo-ration du
plumage.
C’est encoreplus
vrai pour ungène
d’effet considérable commedw,
l’énumération faiteplus
haut de son influence sur des caractères variés étant loin d’être exhaustive.Face au caractère souvent contradictoire de ces
effets,
certainspositifs,
d’autresdéfavorables,
le sélectionneur devra utiliser legène
enquestion
dans les conditionsparticulières
où ses effets favorables auront leplus d’importance
et où ses effets défa- vorables seront minimisés.Ainsi,
pour dw en sélection « chair », croisement avecspécialisation
deslignées parentales (lignée paternelle normale, lignée
maternellenaine) ; ajustement
de la ration aux besoinsparticuliers
des animauxnains ; peut-
être usage
préférentiel
despoules
naines à destempératures
ambiantes suffisammenttempérées
ou chaudes... I,eproblème
se pose aussi de sélectionner le reste dugénome,
avec des
objectifs partiellement
nouveaux visant à réduire parexemple
les inconvé- nients dugène introduit,
et en tenantcompte
d’autrepart
de ce que laprésence
dece dernier
peut
modifier certainsparamètres génétiques,
corrélations entre caractères notamment, et infléchir ainsi la marche de la sélection( 1 ).
Il y a un « mode
d’emploi
» conditionnant la « réussite » d’ungène
nouveau, et, par contraste, cettecomplexité
des effetsgéniques
individuels et de leur utilisationpratique
illustre les limites de lagénétique quantitative, qui
nepermet
pas de saisirtous ces
aspects
et des’y adapter
en connaissance de cause.3. -
L’aspect
«prospection»
»Dans
quels
domainespeut-on
rechercher unapport bénéfique
de facteursmendéliens non encore
exploités ?
On nepeut trop espérer
extraire despopulations
actuellement en sélection des
gènes
individuelsaugmentant
defaçon
trèsimportante
la « valeur
adaptative
»globale («
fitness»),
ou des caractères deproduction
sélec-tionnés de
longue
date(vitesse
decroissance,
intensité deponte).
Par contre, lesquelques
réalisations connues font entrevoir despossibilités
restantes :(’) Ainsi, la présence du gène dw introduit dans une population de type « ponte une corrélation rela- tivement importante entre nombre d’oeufs et poids des poules adultes (MÉRAT, ig6g b), au niveau phéno- typique, mais peut-être aussi génétique.
-
Quant
au mode d’utilisation d’ungène,
à un stadeparticulier
de l’ensembledu schéma de sélection et
d’élevage,
parexemple
au stadeparental
mais non à celuidu
produit
final(dw),
ou pour utiliser un effet maternel...-
Quant
aux caractères pourlesquels
ungain
substantiel estpossible :
compor- tement et rendement alimentaire desadultes, propension
àl’engraissement, dépenses énergétiques ; adaptation
à des conditionsparticulières d’environnement, peut-être
aussi à des
composants particuliers
de laration ; qualités technologiques
des pro-duits ; caractéristiques
decomportement
pour uneadaptation
à l’évolution des tech-niques d’élevage...
- Un autre
aspect prospectif
consiste à savoirquels gènes
chercher et où leschercher. Les
exemples
citéssuggèrent
despossibilités
d’ « overdominance », donc de croisementsorientés,
du côté desgènes polymorphiques
décelés par voie biochi-mique ( 1 ) ;
desperspectives
aussi en se tournant vers desgènes
à action visible non encore soumis àinvestigation ; enfin, plus
rare maispeut-être plus importante,
l’utilisation de
gènes
modérément « anormaux », à condition de dresser un bilanprécis
de leurs effets.De tels
gènes, parmi
ceux connus à l’heureactuelle,
n’existent certainement pas en trèsgrand
nombre.Cependant,
toutes lespossibilités
sont loin d’être exami-nées,
à condition de penser non seulement auxgènes
identifiés dans les souches« commerciales », relativement peu
nombreuses,
mais à ceux contenus dans despopulations
moins sélectionnées. Si l’on tientcompte
encore de lapossibilité
d’inter-actions entre
gènes
à des locidifférents,
les combinaisons nouvellesexplorables
sontplus
nombreusesqu’il n’y paraît.
L’idée
d’extraire un allèle d’une souche àproduction
médiocre et de l’introduire dans un contextegénétique
amélioré dansl’espoir
d’obtenir ungain
pour un certain caractère esthypothétique, compte
tenu duhandicap apporté
audépart
par l’introduction dequelques reproducteurs
àperformances
médiocres dans une souche hautementsélectionnée ; pourtant
un seul allèle favorablepeut justifier
aposteriori
l’ensemble d’une telle recherche.
Ainsi,
unproblème
deprospection
et de conser-vation de
gènes
« rares » nepeut
être éludé. Il a d’ailleurs étéévoqué
à diversesreprises (V AN A LBADA , z g 6q. ;
BOYER,ig6 4 ; OROZCO, ig64 ; JAAP, rg65 ; ME N Z I , rg66).
Les
aspects « négatifs
» attachés à desgènes particuliers pourraient parfois
aussi revêtir
quelque
intérêtpratique.
Si les mauvaisesperformances
de certainespopulations
« non commerciales » étaientdues,
en tout ou enpartie,
à laprésence
de
gènes
« marqueurs » biendéfinis,
l’élimination de ces derniers faciliterait l’utili- sation de cespopulations
pour introduire certainescaractéristiques
nouvelles dansdes souches
plus
améliorées.CONCLUSION
Ce
qui précède
n’a eu pourprétention
que de montrerquelques possibilités
réelles de la
génétique
mendélienne dans le domaine de la sélection des caractèresquantitatifs.
Par là même ont été aussisoulignées
les limites de cespossibilités,
(’) Ou même par des observations plus simples, tel un facteur mendélien contrôlant en partie la consommation d’eau (DorrsoNet Buss, 1969).
qui
sont encore engrande partie
desespoirs
ou desvirtualités,
et ne sauraient bien entendu se substituer à la sélection directe des caractères deproduction.
Ces études« factorielles
» peuvent
du moinsapporter
dans des casparticuliers
une aide et uninfléchissement à cette sélection. Elles ont le mérite d’une certaine
précision,
et ausside faire réfléchir les
généticiens
théoriciens à lacomplexité
des situations que la réa- litépeut comporter,
notamment celles où desgènes
inconnus à effet relativementimportant
sontprésents, peut-être plus fréquentes qu’on
n’aurait pu le penser àl’origine.
Reçu pouv publication en octobre 1971.
SUMMARY
UTILIZATION Ob’ MENDELIAN FACTORS IN ANIMAL PRODUCTION
(POULTRY EXAMPLE)
Some typical possibilities of using mendelian factors in poultry breeding are presented :
- Polymorphic genes, detected by serological or biochemical methods, with superiority
of certain heterozygous genotypes, utilizable in crossbreeding.
- Genes with visible effect, mostly fixed in commercial stocks, for which the introduction of a new allele associated to some quantitative advantage is often at present impossible or has
some risks, except in particular cases : Considerable quantitative effect (e.g. rose comb) or asso-
ciated maternal effects, suggesting oriented choice between reciprocal crosses.
- Rare mutants, causing moderately abnormal phenotypes, possessing certain interesting
traits for commercial populations (dwarfing genes). A possible advantage to the heterozygous
state for an abnormality or a recessive lethal would pose a similar question.
Genes with relatively small associated quantitative side-effects will possibly be worth consi- deration as far as selection for a trait will tend to a plateau.
An example as that of the « dwarf a ! gene shows the complexity of effects, and conse- quently of pratical use, of a new gene.
A problem of prospect prolongs obviously those of selection : Research of possible advan- tages for genes absent from present commercial strains, for traits not yet intensely selected (e.g.
feed efficiency of laying hens, behaviour...), for a particular mode of utilization, or in a new environnement (feed, climate...). ).
ZUSAMMENFASSUNG
AUSNUTZUNG DER MENDELFAKTOREN IN DER TIERZÜCHTUNG
(BEISPIEL HÜHNER)
Es werden einige typische Möglichkeiten für die Anwendung der Mendelfaktoren in der
Geflügelzucht aufgeführt :
- Polymorphe Gene - auf serologische oder biochemische Art nachweisbar - bei denen der Vorteil gewisser heterozygoter Genotypen für die Kreuzung ausgenützt werden kann.
- Gene mit sichtbarem Effekt - im allgemeinen homozygot bei Gebrauchskreuzungen zu finden, bei denen die Einführung neuer Allele, die einen quantitativen Vorteil bringen würden,
im Augenblick oft noch unmöglich oder riskant ist. Ausgenommen sind die Sonderfälle : wirklich
wichtiger quantitativer Effekt (Rosenkamm), oder maternelle Begleiteffekte, die zu einer
zwischen reziproken Kreuzungen ausgerichteten Wahl anregen.
- Seltene Mutanten, die leicht anormale Phenotypen herstellen, dafür aber gewisse Merk-
male besitzen, die für Gebrauchsgeflügelbestände von Interesse sind (Zwergtum-Gene). Ein
eventueller Vorteil einer Anomalie oder eines rezessiven Letal-Gens, der mit dem heterozygoten
Zustand verbunden ist, würde ein ähnliches Problem darstellen.
Gene mit zusammenhängenden quantitativen Effekten, die relativ unwichtig sind, können
unter Umständen einer Untersuchung wert sein, vor allem, wenn man mit der Selektion für ein bestimmtes Merkmal keinen weiteren Fortschritt mehr erzielt.
An Hand des Beispiels der Gene für Zwergentum (dw) werden die vielseitigen Zusammen- hänge der Effekte und auch der praktischen « Gebrauchsanweisung » jene eines neuentstandenen Gens erläutert.
Die Problematik hinsichtlich der vorherigen Einschätzungen der bestehenden Möglichkeiten vergrössert notwendigerweise die Selektionsproblematik : Untersuchung der Vorteile, die durch z.Z. nicht vorhandene Gene bei den gegenwärtigen Gebrauchs-Stammtieren erreicht werden
könnten, und zwar sowohl unter Berücksichtigung jener Merkmale, für die noch nicht intensiv selektioniert wird (Verwertung der Nahrung bei Glucken, Verhalten, usw.), als auch einer bestimmten Verwendungsart oder neuer Umweltsbedingungen (Nahrung, Klima, usw.).
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
A
LBADA M. (VAN), 1964. Conservation of a gene pool. The situation in the Netherlands. Ilnd Congr.
Europ. W. P. S. A., Bologna.
B
ERNIER P. E., ARSCOTT G. H., 1960. Relative efficiency of sexlinked dwarf layers and their normal sisters. Poult. SCi., 39, 1234-1235.
B
ERNIER P. E., ARSCOTT G. H., 1968. Some economical and nutritional implications of mini-layers.
Proc. 3nd Pacific North western Animal Nutrition Conference, 47-53. B
OYER J. P., 1964. La création d’un Conservatoire national de races françaises. Ilnd Congr. Europ.
W. P. S. A., Bologna.
B
RILES W. E., 1960. Blood groups in chickens, their nature and utilization. World’s Poult. Sci. J.
16,223-242.
B
RILES W. E., ALLErr C. P., i96r. The B blood group system of chickens Il. The effectsof genotype on livability and egg production in seven commercial inbred lines. Genetics, 46, 1273-1293.
Buss E. G., 1960. The influence of genes affecting feather color on the 24week body weight of turkeys.
Poult. Sci., 39, 1238-1239 (Abstr.).
C
LAYTON G. A., 1968. Some implications of selection results in Poultry. World’s Poult. Sci. J., 24, 3
6-57.
COCHEZ L. P., 1951. Un facteur d’infertilité, équilibré par la sélection, chez la Wyandotte blanche.
Proc. IX World’s Poultry Congress, Paris, 1, 81-88.
Canw F
ORn R. D., SMiTa J. R., 1964. Studies of the relationship between fertility and the gene for
rose comb in the domestic fowl, 2. The relation between comb genotype and duration of fertility. Poult.
Sci., 43, 1018-1026.
C
RITTENDEN L. B., 1968. Avian tumor viruses : Prospects for control. World’s Poult. Sci. J., 24, 1
8- 3 6.
Dicx E
asorr G. E., 1968. Breeding for Leukosis resistance. World’s Poult. Sci. J., 24, 107-116.
Du N so
N W. A., Buss E. G., r968. Abnormal water balance in a mutant strain of chicken. Science, 161, 1
67-169.
D
URAND L., MÉRAT P., ry7i. Agglutinogène Hi et performances chez la poule. Ann. Génét. Sél.
anim., 3, 5-I5.
G
ILMOUR D. G., 1960. Blood groups in chickens. Brit. Poult. Sei., 1, 75-100. G
ILMOUR D. G., 1969. Blood group research in chickens. Agric. Sei. Rev., 7, 13-22. Goo
D
mN K., 1966. The environment and problems in selection for disease resistance in the fowl.
World’s Poult. Sci. J., 22, z99-3I5. H
UTT F. B., 1951. Lethal action of the gene for extension of black pigment in the fowl. Genetics, 36, 213-234.
H
UTT F. B., 1959. Sex-linked dwarfism in the fowl. J. Hered., 40, 209-212.
J
AAP R. G., 1965. Minimum population size and source of stock for gene pools. World’s Poult. Sci. J., 21, 172-174.
J
AAP R. G., 1968. Sex linked dwarfism and broiler production. Poult. Sci., 47, 1684(abstr.).
,J
AAP R. G., 1969. Phenotypic effects of sex-linked dwarfing genes in chickens. Poult. Sci., 48, 1826 (abstr.).
M ENZ
i M., 1966. Gene conservation. World’s Poult. Sci. J., 22, rgi-x$4.