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villes souterraines: un monde qui fourmille

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Academic year: 2022

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villes souterraines: un monde qui fourmille

FALL, Juliet Jane

FALL, Juliet Jane. villes souterraines: un monde qui fourmille.

La Cité

, 2013

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:46624

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Villes souterraines, un monde qui fourmille

La Cité / Genève / Suisse / 26.05.2013 JULIET FALL ET NICOLAS SENN Photos ALBERTO CAMPI

La ville est le lieu de vie de plus de la moitié de la population mondiale, mais il est rare qu’on fasse référence explicitement au sous-sol. Lorsque l’aménagement du territoire fait l’objet d’un débat public en Suisse, c’est surtout en termes de révisions de lois, de déclassements de zones, ou encore d’initiatives sur le paysage. La question du visible, les choix des perspectives, des hauteurs et des densités sont au centre des discussions. On parle surtout de ce que l’on voit. Pourtant, dans le contexte tendu actuel, dans lequel le sol est une ressource rare et limi- tée, sous pression constante et croissante, le sous-sol apparaît pour certains comme le pro- chain espace à développer. On regarde ainsi les souterrains de Montréal, de Helsinki ou de Tokyo, pour voir à quoi pourrait ressembler notre avenir, entre utopies et dystopies.

Préfigurant de grands changements, les projets de développement territorial sont souvent sources d’inquiétudes. Certains sursautent, par exemple, en voyant des images simulées d’une rade de Genève couverte de gratte-ciels. Densifier une ville, se dit-on, c’est construire plus haut. Si on pointe souvent du doigt cette extension verticale des villes suisses, peu par contre est dit de leur enfouissement. On oublie souvent que densification, villes compactes, et ré- seaux de villes sont autant de modèles qui se pensent non seulement dans la verticalité et l’horizontalité, mais aussi dans la profondeur.

Mais nos villes sont déjà le théâtre de vies et de pratiques souterraines quotidiennes, sous nos pieds. Dans le cadre d’une collaboration pédagogique entre le Département de géographie et environnement de l’Université de Genève et les Studios Médias Unis des Activités culturelles de l’Université, nous sommes partis à la rencontre de cette ville invisible.

En parallèle à cette démarche de géographe, les étudiants ont aussi cheminé à la découverte de l’écriture filmique et des techniques de réalisation documentaire en suivant des cours spéci- fiques de tournage et de montage numérique. Les images des pratiques quotidiennes souter- raines qui en résultent sont autant de témoignages visuels et sonores d’un nouveau monde troglodyte en devenir. Nous ne recherchions pas a priori à rendre compte d’une Suisse fortifiée et souvent mythifiée, ou des restes d’un réduit national rendu exotique par sa disparition.

Nous nous sommes au contraire intéressés aux pratiques ordinaires proches de nous, aux prémisses d’une nouvelle manière pragmatique et quotidienne de vivre la ville dans sa profon- deur.

Faire un film documentaire implique avant tout de voir, de saisir des images du réel. Notre première surprise fut de découvrir à quel point le monde souterrain est un monde verrouillé.

S’il est relativement facile de filmer des lieux et des pratiques dans l’espace public, peu d’espaces souterrains échappent au contrôle. Demandes d’accès, autorisations, négociations souvent longues pour pouvoir accéder au monde souterrain: nous étions bien loin des con- quêtes audacieuses des nouveaux explorateurs urbains qui se dérobent aux regards pour plon- ger dans les tunnels abandonnés. La Genève souterraine est un monde de permissions, de clés, de serrures et de surveillance, et, dans plusieurs cas, de refus d’accès.

Mais c’est aussi le monde du détournement, des choix individuels et collectifs de la dissimula- tion et de la discrétion, le monde des lieux qui offrent une forme de liberté par le secret. Les

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étudiants ont réalisé trois films1 de ces voyages géographiques jusqu’au fond de la ville, pour montrer le quotidien de ceux qui vivent ou travaillent sous la surface.

Lumières sous la ville

L’image filmée est intelligible en premier lieu grâce à la lumière. Dans les fonds souterrains, l’écran noir guettait, vide. Paradoxe? Pourtant, la première chose qui saute aux yeux dans ces images rapportées de ces voyages est l’omniprésence de la lumière, qui tient autant au talent des apprentis-cinéastes qu’à la vivacité des témoignages et des personnes rencontrées. Vivre sousterre est éprouvant, mais s’apprivoise aussi au quotidien au travers d’habitudes person- nelles, de liens sociaux et de métiers généralement méconnus qui donnent du sens dans un monde qui pourrait n’être qu’obscurité.

Nous avons visité, en groupe, la soufflerie et les laboratoires de la Haute Ecole du paysage, de l’ingénierie et d’architecture de Genève (HEPIA) dans la colline en face du Pont Butin, guidés par des ingénieurs aussi accueillants qu’habitués à leur quotidien sans fenêtres, ni sortie de secours. De cet ancien stand d’essai de tirs d’Hispano-Suiza, reconverti en lieu pour la science et la technique, nous sommes partis visiter les tunnels abandonnés du Bois de la Bâtie, réper- toriés au patrimoine de la ville. Les fantômes des anciennes cultures de champignons, et les traces de soirées déjantées désormais interdites, nous ont hantés sous des voûtes vertigi- neuses creusées dans la molasse au XIXe siècle. Interrogeant notre guide sur les raisons de la disparition de cette activité locale et la destinée future de ces galeries méconnues, nous avons perçu une géographie humaine souterraine qui se transforme et se réinvente sans cesse, loin du cliché préhistorique ou funéraire.

Après ces aventures collectives, les étudiants sont partis en groupes. Certains ont choisi de passer des nuits dans les souterrains de la station de pompage de Saint-Jean et dans les égouts, accompagnés de professionnels ravis de raconter, l’espace de quelques heures, une dimension de leur travail. D’autres ont décidé de filmer leurs soirées dans les abris de la pro- tection civile avec les derniers usagers des abris d’urgence hivernaux, entre parties de cartes et repas. Ils sont retournés quelques jours plus tard filmer ces lieux redevenus déserts, hantés à leur tour par les témoignages individuels. Un dernier groupe, enfin, a investi les parkings sou- terrains, nouveaux espaces de vie et de rencontres nocturnes pour les jeunes, entre vidéosur- veillance, écrans de contrôle et liberté.

5. Les étudiants Ian Florin et Awa Konaré

1 La projection des trois films a eu lieu le 3 juin 2011, Fonction Cinéma, Maison des Arts du Grütli, Genève: Egouts-dégoûts, Claire Camblain, Ian Florin, Awa Konaré; Un hiver sous terre, Mattia Petrini, Laurène Stauffer, Gabrielle Bernasconi; Au détour d’un parking, Christophe Pisteur, Youssef Youssef, Saul Brossard.

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