Classe préparatoire BL – Concours Blanc – Composition de Sciences sociales 23 mai 2018
Sujet 2 (avec dossier documentaire, durée : 6 heures) :
Y a-t-il des limites à l’extension des échanges marchands ? (ENS, 2009)
Cerner le sujet, réfléchir sur ses termes 1) Les termes, leurs définitions
- échanges marchands
- l’échange marchand est un échange qui repose sur la détermination d’un prix découlant de la rencontre entre des offreurs et des demandeurs.
- par opposition, des échanges reposant sur des obligations morales ou sociales, ou sur la décision d’une autorité (légitime ou non) ne sont pas des échanges marchands.
- remarques :
- la distinction entre production marchande (vendue à un prix couvrant plus de 50% des coûts de production) et production non marchande pouvait contribuer à éclairer la frontière entre les sphères marchande et non marchande.
- de même, et plus largement, pour la distinction de Polanyi entre échanges marchands, réciprocité et redistribution.
- remarque : l’échange marchand n’est pas nécessairement monétaire, de même qu’un transfert monétaire entre des individus ne relève pas nécessairement d’un rapport marchand.
- extension
- principalement : extension à des biens et services relevant habituellement de la sphère non marchande
- éventuellement : extension géographique ; cependant, il ne faut pas faire de la mondialisation le cœur du sujet, ni même lui accorder une place importante (sauf en en faisant le symbole d’une « marchandisation du monde »)
- limites
- « Le jury a ainsi apprécié les copies dans lesquelles les candidats ont tenté de distinguer, plus ou moins adroitement, différents types de « limites » (de droit/de fait, endogènes/exogènes, matérielles/morales, etc.) ».
- une classification possible des limites :
- en termes d’efficacité, lorsque le rapport marchand n’est pas le moyen le plus efficace pour fournir certains biens et services
- relativement à des considérations de justice sociale, le prix de marché posant la question des personnes privées de l’accès au bien ou au service du fait d’un pouvoir d’achat insuffisant.
- de nature sociologique, dans la mesure où le rôle de l’échange dans une société n’est pas uniquement, voire principalement pas, la satisfaction des intérêts des individus mais de créer du lien social, de permettre la cohésion sociale, d’affirmer la solidarité entre les membres d’un groupe social…
- morales, propres à chaque société, à chaque culture qui exclut de la sphère marchande certains biens ou services, cette interdiction morale pouvant éventuellement prendre une forme légale.
2) Approche positive ou approche normative de la question posée ?
- il est clair qu’il y a effectivement, dans la réalité, des limites à l’extension des rapports marchands ; et le sujet amène nécessairement à exposer ces limites
- cependant, le principal enjeu du sujet est de nature normative : doit-il y avoir des limites ? - quelles que soient les places relatives données aux approches positive et normative du sujet, le registre dans lequel on se trouve à un moment donné dans l’argumentation doit être clairement explicité. Trop de copies semblent passer indifféremment d’une description des limites (ou, au contraire, de l’extension) observées dans la réalité à une justification des limites (ou de l’extension) et inversement.
- remarque : rappelons que les frontières du positif et du normatif sont parfois discutables.
Ainsi, dans le rapport du jury, le fait que la théorie économique révèle l’inefficacité de la coordination marchande pure – et prescrive en conséquence d’autres modes d’allocation des ressources dans les cas concernés – est présenté comme une limite « positive » à l’extension des échanges marchands.
3) Une question qui appelle soit une réponse positive (oui) soit une réponse négative (non).
- « si la réponse à la question posée a été généralement positive, elle pouvait être également négative, au moins sur certains des aspects impliqués par la question, dès lors que des nuances et une argumentation justifiées étaient apportées. » (rapport de jury)
L’exploitation du dossier documentaire, les écueils à éviter
- « [L]es textes ont trop souvent donné lieu à la paraphrase (…). [R]appelons que les documents doivent être exploités de manière à mettre en perspective les arguments des auteurs et les
enseignements de la théorie sociologique, économique et de l’histoire économique et sociale le cas échéant. »
- « En outre, le statut des documents n’a pas toujours été bien identifié : texte à vocation scientifique, tableau repris d’un article issu de médias ou statistiques éclairant une problématique sur les
frontières des échanges marchands. »
- « Si le dossier documentaire a été bien utilisé, il l’a parfois été un peu trop… (…) [P]armi les copies les plus faibles, nous constatons une quasi absence de références théoriques que ce soit en sociologie ou en économie (…) »
Quelques plans possibles
I. Certains gains d’efficacité associés à l’extension des échanges marchands II. Des limites sociales et morales à cette extension
III. Le marchand et le non marchand : deux ordres qui ne s’opposent pas systématiquement I. Des limites à l’extension des échanges marchands, variables dans le temps et dans l’espace II. Des justifications de ces limites qui prennent elles-mêmes des places variables dans le temps et dans l’espace
