Vulnérabilité Psychique et Cancer.
Melle SCHREDER Laure,
Psychologue Clinicienne & Psycho-Oncologue.
Centre de Coordination en Cancérologie (3C).
laure.schreder@chu-dijon.fr
« Accompagner quelqu’un ce n’est pas le précéder, lui indiquer
la route, lui imposer un itinéraire, ni même connaître la
direction qu’il va prendre. C’est marcher à ses côtés en le
laissant libre de choisir son chemin et le rythme
rythme rythme
rythme de son pas. » Patrick Verspieren
La psycho-oncologie participe donc d'un modèle interdisciplinaire ; elle cherche, au-delà de la simple prise en compte des aspects psychologiques de la maladie, à développer une approche intégrative du sujet malade avec tous les acteurs de la cancérologie, dans le respect de la spécificité de chacun.(Approche « globale »)
L’affaire de tous les soignants: être attentif aux malades et pas seulement/uniquement à la maladie
La recherche en Psycho-Oncologie s’adresse à étudier les conséquences de la maladie néoplasique sur le plan subjectif.
Nicole Alby : « Le cancer reste ce qu’un médecin n’a pas envie de dire à un patient qui n’a pas envie de l’entendre »
C’est du côté de la représentation de cette maladie, ce que nous appelons l’imaginaire de la maladie, que se situe cette spécificité.
Représentations personnelles: (histoire, deuil, personnalité…)
Représentations collectives: cancer=fléau
« calamité redoutable qui s’abat de façon incontrôlable», «mauvaise mort»
(lente,inéluctable,dégradante,mutilante,invalidant e,douloureuse,solitaire) VS archétype de la « Belle mort »(ex: crise cardiaque)
Temps? Entre rupture et continuité de vie Temps? Combien de temps?
Temps? « maladie au long cours », chronicité Temps? Structuration du temps par
l’institution (latence, attentisme, urgence) Temps? Temporalité psychique VS rythme médical
Temps? A offrir, à gagner…
« Je n’entendais plus juste ce mot cancer résonnait»
« J’ai cru que le ciel me tombait sur la tête »
« C’est comme si il m’avait annoncé ma propre mort ! »
Sidération psychique (incapacité momentanée à pouvoir réaliser ce qui arrive à la suite d’un choc)
Vécu empli d’irréalité pouvant aller jusqu’au déni Détresse intense (passage à l’acte suicidaire sous- estimé),repli sur soi, dépression.
Sépare la vie en « un avant » et « un après »=
rupture biographique, rupture identitaire
Fantasme d’immortalité et d’invulnérabilité s’effondre
Le temps se fige ou morcellement du temps
Sentiment de colère ou d’injustice « pourquoi moi ? »,
Culpabilité et remise en question : « j’ai jamais eu de chance depuis tout petit », « c’est peut-être à cause de mon boulot, on m’avait dit de lever le pied… »
Dans ce contexte les équipes doivent permettre aux patients et à leurs familles de se construire des repères pour dépasser cette précarité psychique.
Orientation psychologue ou soins de support : le psychologue vient proposer un autre temps que le temps médical, il propose de prendre le temps d’une mise en mots et d’une mise en sens à cet évènement cancer pour mieux lier l’angoisse et aider le patient à s’approprier sa maladie.
Formation ++++ soignants/médecins car l’annonce doit soutenir une réflexion éthique (qu’est-ce que le patient veut savoir, qu’est-il en mesure d’entendre ? De quelle « vérité » sommes nous vraiment détenteur?):bienveillance et prudence sont de mises Concept d’incertitude.
Le terme d’adaptation renvoie à l’idée d’une temporalité, d’une réorganisation psychique nécessaire pour intégrer la représentation bouleversante de la maladie
Processus dynamique, évolutif.
Coping (capacités à faire face)
Facteurs multiples (plan physique, psychologique, social)
Sentiment de trahison
Le corps perd de sa contenance, le patient perd confiance en son corps à tous les niveaux
(compétence, puissance, estime)
Le patient voudrait mais ne peut plus: corps réel vs corps fantasmé
Perte définitive d’une partie de soi nécessite un travail de deuil
Par conséquent, le rapport au corps propre et le rapport à l’autre sont d’emblée profondément
perturbés. Secondairement, le rapport à soi-même
(image du corps, représentation de soi, estime de soi, etc.) ne peut plus être maintenu tel quel, car il résulte des deux autres et en est tributaire.
L'information sur le cancer s'accompagne de projets médicaux qui situent la personne dans l'action, action qui, le plus souvent, met entre parenthèses les réactions d'angoisse ou de désarroi : il y a quelque chose à faire et ce principe mobilise les énergies du patient afin de « faire face »
Représentations négatives des ttts (efficacité, toxicité)=déni, refus de ttt, mauvaise observance possible!
L’annonce de l’échec d’un traitement:
Déception, angoisse, désespoir, colère Impression d’un retour en arrière
Réactive les angoisses de l’annonce (mort, envahissement)
L’annonce de la récidive:
Parfois plus violente sur le plan psychique que l’annonce de la maladie elle-même.
Vécue comme un échec personnel/culpabilité
Projection difficile dans les ttts que l’on connait trop bien à un moment où l’on se sent très vulnérable (Cf remission)
Soins palliatifs=
moment de la maladie? Espace propre?
Démarche soignante?
Lieu de fin de vie?
Une philosophie du bien mourir?
La démarche de soins palliatifs vise à éviter les investigations et les traitements déraisonnables tout en refusant de provoquer intentionnellement la mort. Selon cette approche, le patient est considéré comme un être vivant et la mort comme un processus naturel
« Il n’y a plus rien à faire » (sentiment d’échec, chute de la toute-puissance médicale)
Un statut de « mourant » (impensable) Une rupture:
-Des soins (sentiment d’abandon / échec) -Identitaire
-Temporelle
Rendre tolérable la menace existentielle générée par l'annonce. Diminuer l’intensité des symptômes
anxieux et/ou dépressifs pour retrouver un niveau de fonctionnement physique et psychologique satisfaisant.
Permettre au patient de penser ce qui lui arrive sur plusieurs plans: identitaire,
narcissique, historique, par rapport à ses relations, à ses projets…
Culpabilité et sentiment d’impuissance chez le soignant: renoncer à ses propres
projections identificatoires et à son idéal du
« bien mourir »
Annonce =rupture vs rémission =reprise?
Et pourtant….
Effondrement psychologique possible
Sentiment d’abandon (Kaës décrit l’institution comme mère contenante)
« syndrome de Damoclès », « liberté
conditionnelle »:insécurité et projection dans l’avenir impossible
Paradoxe, et ambiguïté du terme rémission ne permet pas de chasser l’angoisse ultime et
aliénante de la mort
Qui suis-je, ou vais-je?
Le temps de la rémission est un temps d’élaboration, de maturation de ce qui s’est joué hier et de ce qui adviendra demain. Le sujet a besoin de ce temps pour cheminer vers un nouveau statut qui ne semble pas encore bien défini : « un malade sans cancer
» et qui est surtout propre à chacun en fonction de son histoire et de l’histoire de sa maladie.