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Fusion anisotrope. Lubréfiants idéaux
Marcel Brillouin
To cite this version:
LE
JOURNAL
DE
PHYSIQUE
ET
LE
RADIUM
FUSION ANISOTROPE. 2014
LUBRÉFIANTS IDÉAUX.
par M. MARCEL BRILLOUIN
SÉRIE VI. AocT 1920 :1T° 2
Les traités de
Physique
théorique
ne connaissent que deux états de lamatière
isotrope :
l’état fluide et l’état solideélastique plus
ou moinsvisqucux.
Ces deux états diffèrent par l’élasticité. Dans le fluide en
équilibre,
le
potentiel
therul0dynalnique
est fonction du volume seul et de latempé-rature ; dans le ’solide
isotrope,
lepotentiel thermodynamique dépend
des sixcomposantes
de la déformation(dilatations
etglissements)
par leurs troisinvariants,
et méme par deuxseulement,
pour lespetites
défornla-tions,
outre latempérature.
Dans la fusion
isotrope,
le caractèreprincipal
p«s. comme on yinsiste à tort dans tous les ouvrages de
thormodyiiamicl-Lie,
1(’changement
devolume;
c’est lepassage’ de
l’état solide à l’étatliquide,
c’cst ladispari-tion de toute résistance aux
glissei>ients;
de touterigidité.
J’aidéjà
discutéce
point
il y alongtemps
(’).
’
Je veux
appeler,
ouplutôt rappeler aujourd’hui
l’attention sur lcs, apropriétés
correspondantes
dans les solides(2).
A
température
constante, lespetites
déformations d’un solide aniso’trope
sont liées aux forcesélasticlues.
par 21 coefficients d élasticité :(~) ÇA. et Phys., 1898, t. xiii, p. 264: : Théorie de la fusion complète et de la fusion
pâteuse.
’ ’
’
!2) Stip., 1890, t. vii, p. 345 : Principes généraux d’une théorie élastique de la plasticité et de la fragilité des corps solides.
-
C. 7., 1891, t. p. 105S : Théorie élastique de la plasticité et de la fragilité des corps ,
solides.
LE JOURNAL DE PHYSIQUE ET LE RADIUM. - SÉRIE - AOUT 1020. - ~2. 3
34
Le
potentiel
thermodviiaiiii(lue
est :Les indices 1, J.
.correspondent
auxglissements, qui
entrent comme,-nl’iabJcs
J. Do.
Dans le court mémoire
rappelé plus
hauLj’ni
sLll’tOLltparle
des chan":ements
quepeuvent
subir les coefficients sous 1 influence depressions
de
plus
c11plus
grandes,
et rattacllé lecliynp:p
auxclmyements (mi
fontdisparadre
dupolentiel thermodynami(me
(ntatation linéaireenannu-kmt tous les coeffi(’iellls
cori’esi>oi>tlai>ls.
et laplasticité
auxchangements
qui
fontdisparaître
glissement.
Le cal’aeLèL’e es,,,entiel. nouveau (’11 t’t 1)1’est[tle aiilani en
1920,
c’est la
possibilité
de ladisparition
seule des dilatations, ouseul des
glissements
dans te[lie riiio tie
d’un corps nalu-l’(BllPJnClll ou rendu tel parI«a[)I)Iic,-I[ioli
de fortespressions
très différentes dans tlifl’orc’ntus tlivectt()IIS.
Depuis
lors, lespropriétés coi’i’osponlanios
ont été observées manière entièrementindépendante) dans
les cristaux lmous. etsous le nom de translations. Elles ont été
paeticulièrenlenl
éliidiéPx. ,,,ansmesures
dynamiques,
par lelminéralogiste Mnggc
(1).
-kujoiii>tl’Iitii, je
YCUX décrire sommaii-emenl les effets des yarialionsde
température,
auvoisinage
de l’élat nalueel.Commençons
par lc solide sonpotentiel thermodynamique
n’a que deux coefficients distincts.
fusion
correspond
à ladispariLion
de tous lesgliss;iiiciils
il la ivis. parce que làrigililé y.
devient nulle. La fusionpeut
êtrepàLcusc.
lorsque
larigidiLé [Jo
décroît lentement sans yariationbrus(Iue
de l’élasticitécubique
À; la fusionpeut être
1>i’usijiie.
lorsque
l’flaxli’1°ilécubique
subitLino tiscoiiliiiiiili’ aux
qui
annulcnllarigidité.
Dans l’un oul’UlltL’C cas. la fusion ne
peut
êtrequ isotrope.
Il en loul au} rement dans les cristaux non
cubiques.
Portonstt travaux 1h dont j’ai eu connaissance par M. AVallcranL sont en partie
le 1’, h> f de ce dernier Liv. 1, ch. net Liv.
.ii, JrB: premier- ii - Le mémoire le
notre attention sur les
glissements.
Dans lescristaux,
les coefficients des’
glissements
ne sont pas touségaux :
on doit admettre que laLCUlpérature
agit inégalement
sur chacund’eux,
etqu’ils
s’annuleront par élévation detempérature,
àLplllpératllres
différentes. ’Tant que les six coefficients d’un mêmeglissement C3
parexemple. si
les axes ont éténe se sont pas tous
annulés,
ceglissement
con[inue ilfigurer
dans lepotentiel
thermodynamique
et les forcesélastiques
endépendent.
Le
changement
designe
dequelques-uns
de ces coefficientspeut
produire
une instabilité de la forme cristalline, et provoquer uncl>angeiiienl
allotro-plique,
mais cechangement
conservc l’état solide en tous sens.Dès que l’élévation de
température
annule les six coefficients cclu, f’L21j"" d’un lèmeglissement
G3,
(sans
annuler en mcmetemps
les neuf f autres cLl, ...cr 5
ceglissement,
et ceglissement
seul,
disparait
du
potentiel thermodynamique.
Les forcesélastiques
nedépeii(leiii
lplus
de ce
glissement;
ceglissement
peut
acquérir
au repos unegrandeur
quelconque,
sans affecter les forcesélastiques.
Le cristal
peut
subir sous l’influellce d’un efforttangentiel 7’1,
trèsfaible
(en
tenantcompte
des résistancesvisqueuses)
maisprolongé,
(lesglissements
accompagnés
dechangements
de forme extérieure considé-rables(analogues
aux translations desminéralogistes);
c’est ce quej’appelle
la
fusion anisotrope.
Ilpeut
seproduire
en mêmetemps,
ou s’êtreproduit
.
auparavant
des variationsbrusques
de forme cristallille : un autrephénomène,
de méme que lechangement
brusque
de volume d’un solideisotrope
n’est pas la fusion.Un
cristal,
en état c’te fusionanisotrope,
est donc caractérisé par leséquations élastiques,
moyennant
un choix convenable des axes.C’est la fusion
anisotrope
un seulglissement
estment
arbitraire,
quand
les 5 forcesélastiques _lTl.... T2 §ont
donnéts : uneseule force
élastique 7~
reste nullequelles
que soient lespetites
déforma-t
lions
hi....
G,,,
et leglisseinent
illimitéG3.
36
cristal)
fasse aussidisparaître
les 5rigidités
~rl~, {[ ~5’ ... {! -¡~I’ Les deuxglisse-ments
G,. G,
seront arbitrairesquelles
que soient les 4 forces""’"1’
Ti ;
’
mais les forces
élastiques
T.,. T3
seronttoujours
nulles. Ce sera la fusiondouble,
accompagnée
on non dechangements allotropiques.
Dans le
plan
yz, la déformationD;3’ G1
restepurement
élastique ;
mais les
plans parallèles
à oyzpeu;ent
subir desglissements
d’orientationquelconque
et degraldeur
arbitraire(G~
et°3)
sans aucunchangement
dans les
propriétés statiques
du cristal.Enfin,
la fusion seracomplète,
si les 15 coefficients sonttous nuls eL les 6 autres convenablement réduits.
Il y a tout lieu de croire que bon nombre des
liquides
cristallisés de 0. Lellmann rentrent dans une de ces troiscatégories,
surtout dans laseconde ;
mais leur structurepeut
êtresupposée
plus complexe
encore,car ils contiennent
plusieurs
sortesd’atolnes,
etpossèdent
descoordon-nées
cachées,
caractéristiques
despositions
relatives des atomes de diffé-rentes sortes, en nombre assez considérable.Il reste une ou deux forces
tangentielles
nulles,
un ou deuxglisse-ments arbitraires
(pour
la fusionsimple
oudouble)
à l’état de repos. Maisau cours des déformations
lentes,
il est naturel de supposer que lesCOlllposantes
tangentielles qui
cessent d’être nulles sontéquilibrées
par des résistancesvisqueuses.
Il y a donc lieu de mettre en évidence unefonction de
dissipation ;
celle-ci enprincipe
peut
dépendre
de toutes les vitesses(~)
de déformation.Dy....
Gy.
Mais pour les déformations nonoscillantes. il n’est utile de mettre en évidence que la déformation
élastique-ment arbitraire
C’ 3
(ou
6r’~ et C. 3
parex.).
Car les autresdéformations,
limitées,
mettent enjeu
des réactionsélastiques beaucoup plus
intensesque les viscosilés si la déformation est très lente
(~).
pour les déioriiialions non
oscillantes,
il est utile et suffisant deformer la fonction de
dissipation
avec les ternlesqui manqllent
dans lepotentiel thermodynamique.
oll écrira donc :(1, Le poiul (lésigne une déri;ée par rapport au temps
1’) C’est ainsi qu’on 11C met pas en évidence (depuis Stokes) de réaction visqueuse au
cllamYuumat cle volume (1,11ii fluide. Pour mouvement lents de sens constant, cela est pour Ie- (’lwlIg(’lnents yihratoil"es amhles et rapides. c’est probablen1ent
Les coefficients b
peuvent
être des constantes : ilspeuvent
auxdépendre
des déformationsélastiques,
ou des’forcesélastiques :
cesl’expérience qui
décidera.Pour les mouvements
lents,
les forcescomplètes
serontdonc,
(fusion
simple)
’
On écrira facilement les
équations
de la fusion double.Un corps défini par ces
équations
serait letype
du lubréfiant entre‘
deuxplans
y = 0 . ~~ = Iz,
dont l’ un estfixe,
et l’authe se meut avec une vitesse finie(constante
ou non) dans la direction Ox. Lesglissements
correspon-dants ne
provoquent qu’une
résistancevisqueuse ;
lnais lesglissements
transverses mettent en
jeu
une résistanceélastiques,
et sont parconséquent
limités ;
la dilatation (oucontraction) D~
de inème. le corps ne s’écrasedonc pas indéfiniment, il ne fuit pas latéralement. Avec un tel corps
(’ ),
on n’aurait pas à craindrel’expulsion
hors descoussinets ;
il n’estvisqueux
que pour les mouvements fermés sur
eux-iiiènies,
entourant le tourillon.Le corps le
plus
simple
de ce genre aurait pourpotentiel
thermodyna-mique.
en lesupposant
pratiquement incomprcssible
et pour fonction de
dissipation
b66 G’3~.
En
fait,
il semble bien clue ladissipation d’énergie
en chaleur aitplutôt
le caractère d’un frottement solide que d’une
viscosité ;
c’est cequ’on
obtien-drait dès que les vitesses ne sont pas très
petites,
enprenant
commefonction de
dissipation
,f6~
étant un coefficient de frottement(du type solide)
et y une trèsgrande
constantecaractéristique
du lubréfiant.C’est, èL mon avis. ce caractère de fluidité unilatérale ou au
plus
bila-térale. - et non
isotrope
-qui
doitcorrespondre
à l’o)iclttosilé deslubré-.
38
fiants. Les lubréfiants
qui
tiennent bien sous lapression
sont.
anisotropes ;
les li1lJréiiant;pratiques
sont des solutions trèsconcentrées d’un solide cristallin dans . une très
petite quantité
fluideisotrope
trèsvisqueux,
solutionsqui
suiyant ledegré
de concentration serontsolides,
fluidesanisotropes
ouliquides.
Soit par échauffement, soitpar addition clu
liquide,
on pourradéplacer
les limites de ces trois états.C’est l’état intermédiaire
qui
est lubréfiant.’
Pour terminer cet aperçu, ,
j’ajouterai
que leyoisinage
des surfacessolides
peut
aussi intervenir dans lespropriétés
du corps et que dans sescouclxes
superficielles
le lubréfiant estpeut-être
tout àfait
solide,
tout enétant
plastique anitrosope
dans .sa masse. Mais c’est là unproblème
théorique
distinct,
duej’ai
amorcé il y alongtemps
(1),
sans que cela aitd’ailleurs servi à rien.
J’y
reviendrai doncbientôt,
MARCEL BRILLOUIN.
(1) Ann. nh,ys., 1895, t. p. 340 : Tensions superficielles et formes cristallines.