M ATHÉMATIQUES ET SCIENCES HUMAINES
L EONARD J. S AVAGE
Difficultés de la théorie de la probabilité personnelle
Mathématiques et sciences humaines, tome 21 (1968), p. 5-9
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DIFFICULTÉS DE LA THÉORIE DE LA PROBABILITÉ PERSONNELLE*
par
Leonard
J. SAVAGE,
YaleUniversity 1 (traduit
par G.Morlat)
Nous, statisticiens, qui
nous occupons toutspécialement
del’incertitude,
sommesplus
que d’autressusceptibles
de rencontrer laphilosophie,
que cela nousplaise
ou non.Pour ma part,
je
m’en accommode assez bien. C’estpourquoi
l’honneur m’est échu d’ouvrir cetteséance de
discussion,
bien que mespréoccupations
habituelles rendent mes connaissances et monlangage quelque
peu différents des vôtres.La théorie de la
probabilité personnelle
formalise unefaçon
de voir la nature del’incertitude, qui
a été découverte
indépendamment
par FrankRamsey
et par Bruno de Finetti. Cettefaçon
de voir nes’est pas
beaucoup répandue
ni en,philosophie
ni enstatistique,
bienqu’elle
ait récemmentgagné
duterrain dans ces deux
disciplines.
Lesstatisticiens,
chose assezcompréhensible,
se montrent aisémentpassionnés
dans la controverse sur la nature de l’incertitude.Nous,
statisticienspersonnalistes,
sommesheureux de voir
grossir
nos rangs, mais nous sommesimpatients
vis-à-vis de lamajorité, qui
n’est pasencore venue à nous. Et la
majorité
ne peut pascomprendre pourquoi
unepoignée
de statisticiensqui
ont fait preuve de
compétence
dans lepassé
se consacrent maintenant à lapropagande
d’une doctrineindéfendable et
pernicieuse.
Nous
qui
défendons lepoint
de vuepersonnaliste,
nousregardons
naturellement comme illusoiresquelques-unes
des difficultés lesplus frappantes qui
nous sontopposées. Je parlerai
ici non pas de celles inhérentes aupoint
de vuepersonnaliste
queje
peux aisémentlever,
au moins pour ma propre satisfac-tion,
mais de cellesqui
megênent
ou m’embarrassentparticulièrement.
Enconséquence,
vous entendrezbeaucoup
dequestions
vagues et peu depropositions
claires.Presque
toute difficulté àlaquelle
se heurteune
opinion
semble donner naissance à uneobjection
et permettre de marquer unpoint
à l’une ou l’autredes
opinions
concurrentes. Comme vouspourriez l’imaginer d’après
maposition,
les difficultésqui
metroublent ne me semblent pas tellement
plaider
contrel’opinion personnaliste
en faveur de ses adver-saires,
lesopinions fréquentiste
etlogicienne (ou nécessitariste),
mais me semblentplutôt suggérer qu’il
il y a lieu de modifier et d’améliorer le
point
de vuepersonnaliste
lui-même. Enfait,
lepoint
de vuepersonnaliste
est en réalité un ensemble depoints
de vueplus
ou moins reliés entre eux, dont l’un setrouve
davantage présent
à monesprit
que les autres, etquelques
formes dupoint
de vuepersonnaliste
ont été
développées précisément
pouréchapper
à l’une ou l’autre des difficultés en cause.J’aborderai mon affaire avec une
esquisse
-n’ayant
pas le temps pour une véritabledescription,
voire un
développement
- de la théorie de laprobabilité personnelle
dans la forme queje préfère
pour des discussionscritiques,
sinon pour unexposé
scolaire ou un usagepratique.
* Texte d’une conférence pour la Section occidentale de l’Association américaine de Philosophie, Chicago, 4-6 mai 1967.
L’article original a été publié dans« Philosophy of Science, vol. 34, no 4, décembre 1967.
Nous remercions la rédaction de cette revue, ainsi que l’auteur lui-même, pour nous avoir autorisé à en publier la traduction.
1. « This research was supported in part by the Army, Navy, Airforce, and the National Air and Space Administration of the United States under a contract administered by the o~ce of Naval Research. » Je suis très reconnaissant de la patience et de
la sensibilité dont G. Morlat a fait preuve dans la traduction de cet ouvrage. (Note de l’auteur.)
La théorie vise à
distinguer
entre le comportement cohérent et labévue,
ou l’incohérencequ’on
peut faire
apparaître
enprésence
d’incertitude. Pourcela,
elleimpose
des conditions auxpréférences
de
quelqu’un
entre les actes. La relation depréférence, «
n’est paspréféré à»,
estsupposée
constituerun
préordre complet
sur les actes. Un acte est défini comme une fonction ou un tableau de correspon-dance,
associant uneconséquence
pour la personnequi choisit,
àchaque
étatpossible
du monde.D’une manière non
formelle,
lesconséquences représentent
tout ce que la personneéprouve,
ouce pour
quoi
elle a despréférences,
mêmequand
iln’y
a pas d’incertitude. Cette idée del’expérience
pure du bon ou du
mauvais,
semblephilosophiquement
suspecte, et n’est certainement pasopératoire.
Dans les
applications,
le rôle deconséquence
est tenu par des choses comme unpaiement
comptant ouune journée
depêche,
dont les« conséquences
réelles » peuvent être trèsincertaines,
maisqui
sont néan-moins bien
adaptées
au rôle deconséquences
sûres dans le contexte de certainesapplications.
Un desmérites de la théorie
personnaliste
de RichardJeffrey
estd’échapper
à ce concept suspect.Un état du monde sera,
toujours
defaçon
nonformelle,
une listepossible
deréponses
à toutes lesquestions qui pourraient
êtrepertinentes
dans leproblème
de décisionenvisagé.
Les états n’ont pas besoin d’être conçus comme absolumentatomiques,
mais seront considérés commeatomiques
pour tel contexte ; encore cetemploi
d’atomes est-ildidactique plutôt
que nécessaire. Doncl’énigme philosophique
de
propositions
véritablementatomiques
n’entre pas essentiellement dans la théorie de lapréférence,
comme cela semble être le cas dans la théorie de
Carnap.
Certains
postulats, qu’on
ne peut malheureusement pasrépéter ici,
sont attribués à la relation depréférence
entre les actes.Quelque
chose du caractère de cespostulats
peuts’exprimer
par cettehypo-
thèse : si deux actes ont les mêmes
conséquences
pour certainsétats,
lapréférence
entre ces deux actesne sera pas
changée
si on leur donne de nouvellesconséquences
communes pour les états où ils avaientdéjà
les mêmesconséquences,
chacun de ces actes restantinchangé
par ailleurs.Portons l’attention pour un moment sur deux
conséquences quelconques,
dont l’une est effective- mentpréférée
àl’autre ;
nousappellerons
laconséquence préférée
«larécompenseo
et l’autre « le statuquo ».
Quand
un acte ne peut procurer que ces deuxconséquences,
il en résultequ’on
obtient la récom-pense
lorsque
seproduit
un certain ensemble d’états(nous
dirons : unévénement)
etqu’on garde
lestatu quo sinon. La
préférence
d’un tel acte à un autre peut biens’exprimer
enlangage ordinaire,
endisant que la personne tient l’événement entraînant la
récompense,
avec lepremier
acte, pourplus
pro- bable que l’événement entraînant larécompense
avec le second acte. Selon uneproposition
déduite despostulats,
il existe une fonctionunique qui
associe un nombre nonnégatif
àchaque événement,
etqui
satisfait aux trois conditions suivantes.
e
Primo,
si et seulement si la personne tient un événement pourplus probable qu’un
autre, lenombre associé au
premier
seraplus grand
que le nombre associé au second.e
Ensuite,
le nombre associé à la réunion de deux événementsdisjoints
est la somme des nombres associés à chacun de ces événements.e
Enfin,
etaccessoirement,
le nombre associé à l’événementuniversel,
ensemble de tous lesétats,
est
égal
à l’unité.Les mathématiciens
appellent
toute fonction d’événements(ou d’ensembles)
dans l’ensemble des nombresnon-négatifs,
ayant les deux dernièrespropriétés (additivité finie)
une mesure deprobabilité,
sans se référer nécessairement à
quelque
autre aspect ouinterprétation
de laprobabilité,
tel que croyance,fréquence
ousymétrie.
La mesure de
probabilité
associée aux événements par l’intermédiaire desrécompenses
est inti-mement liée à l’attitude et au comportement
potentiel
de la personne enprésence
d’événements incer- tains. Pour unpersonnaliste
commemoi,
elle estsous-jacente
à la meilleureanalyse qui ait jamais
étédonnée de la notion ordinaire de
probabilité.
Convenablementinterprétée,
elle contient les aspects valables des autresanalyses, fréquentiste
etlogicienne
parexemple.
Mais leprésent exposé
porte en réalitédavantage
sur la théorie de lapréférence
entre les actesqui
conduit à laprobabilité personnelle,
que sur laprobabilité personnelle
elle-même.Logiquement, j’aurais
presque pu passer sur laprobabilité
person- nelle commeje passerai
en fait sur une autre fonction(celle-ci
de l’ensemble desconséquences
dansl’ensemble des nombres
réels) appelée utilité, qui
est finalement aussi essentielle à la théorie de lapréfé-
rence que la
probabilité personnelle
elle-même.La théorie de la
préférence
ne semble pas concerner ou contenir leproblème
de l’induction dans le sens :si,
comment et avecquelle justification,
nous en venons à croire auxpropositions
universelles.Cependant,
elle contient un modèle de lafaçon
dont uneopinion
est modifiée à la lumière del’expérience
-- un
phénomène
d’unegrande importance
-qu’on pourrait
aussiappeler
induction. La théorie de laprobabilité personnelle
semble être de mêmedégagée,
et pas forcément paraccident,
de certains autres concepts difficilesqui
sont traditionnellement associés à laphilosophie
de laprobabilité,
tels que lasimplicité
et le rasoird’Occam,
lespropositions atomiques (déjà mentionnées),
le temps, la cause, la permanence de la nature dansl’espace
et le temps, et naturellement la notion de limite. Lapossibilité réelle,
ou même apparente,d’échapper
à cequi
a étéquelquefois regardé
comme desquestions
fondamen-tales,
éclaire le rôle de cesquestions,
d’unefaçon dont j’espère parler
à une autre occasion 1.La théorie de la
préférence pourrait
être étudiée comme unsystème axiomatique dépourvu d’interprétation ;
mais pour les mathématiciens elle n’aqu’un
intérêt limité. Elle peut êtreinterprétée
comme une théorie de la
façon
dont lesindividus,
les collectivités ou autresorganismes,
se comportentréellement ;
mais comme unchapitre
de lapsychologie,
elle a un domaine de validité etd’emploi
trèslimité.
L’interprétation
pourlaquelle
elle a étédéveloppée
est uneinterprétation normative,
selonlaquelle
une personne peut veiller sur la cohérence de ses propres décisions
potentielles.
Pour faire une telle
application,
il nous faut structurer leproblème
de décision devantlequel
vousvous trouvez en termes d’états du monde
(chaque
état étant une liste deréponses possibles
à toutes lesquestions pertinentes),
deconséquences (qui pourraient
vousarriver)
et d’actespossibles (les
choses quevous pouvez
faire,
décrites à l’aide desconséquences qui
vous affectent danschaque
état dumonde).
Alafois en
pratique
et en théorie le choix d’un tel cadre soulève desproblèmes.
Il ne faut pas attendre un choixunique,
ne serait-ce que parcequ’il
est enprincipe
indifférentd’ajouter
des choses nonpertinentes
à la liste des
questions qui
déterminent les états. Enpratique,
il est souvent- j e
dirais presquetoujours
-
possible
de faire un choixqui marche,
c’est-à-dire pourlequel
lespostulats
semblent raisonnablement bien satisfaits. Et on peut, dans une certaine mesure, montrer que différents choixqui
marchent nepeuvent
pas conduire à des comportements différents.Pourtant,
dans la notion même de ce choix d’uncadre,
il y a des difficultésimpressionnantes.
Est-ilbon,
ou même est-ilpossible, d’exiger,
comme cettethéorie de la
préférence
lefait,
que les actes soient sans influence sur les événements et lesévénements,
sans influence sur les satisfactions ? On peut
s’arranger
pour que de telles conventions marchent mieuxqu’on
nepourrait
croire àpremière
vue, et elles apportent des avantages considérables à lathéorie ;
mais elles ont été mises en cause à
plusieurs reprises
defaçon sérieuse,
etpeut-être
avecjuste raison ;
par
exemple,
parJ.
Drèze et R.Jeffrey.
Dans
quel
sens cette théorie est-elle normative ? Elle vise à cequ’une
personne réfléchiequi
setrouve sur le
point d’agir
en contradiction avec lathéorie,
reconsidère saposition,
et des personnesréfléchies ont effectivement trouvé que la
théorie, prise
avec ungrain
desel,
étaitcontraignante. Je
sens,mais
je
necomprends
pasclairement,
cette contrainte dont une bonneanalyse pourrait
être une contri-bution
philosophique
intéressante.Jusqu’à quel point
une telleanalyse
serait-elle liée à laphilosophie
du contrafactuel ? En outre, la
philosophie
du libre arbitre semble avoirquelque
lien avecl’interprétation
de toute théorie
normative ;
dans le casprésent,
ce rapport est-ilimportant, académique,
ou illusoire ?L’analyse
devraitprendre
soin de ne pas trop prouver ; car certains écarts à la théorie sont inévi-tables,
et certains sont louables. Parexemple,
une personne àqui
on demande deparier
del’argent
surune décimale de rang élevé de 7r
devrait,
pour satisfairepleinement
à lathéorie,
calculer cettedécimale,
bien que cela dût être en réalité ruineux si le coût du calcul était
plus
élevé que larécompense promise.
Car les
postulats
de la théorieimpliquent
que vous devriez vous comporter en accord avec les consé- quenceslogiques
de tout ce que vous savez. Est-ilpossible
d’améliorer la théorie à cetégard,
en faisantplace
au coût de laréflexion,
ou bien cela entraînerait-il unparadoxe, comme j’ai
tendance à le croire touten restant
incapable
de le démontrer ? 2 Si le remède n’est pas dans une modification de la théorie maisplutôt
dans lafaçon
dont nous avons àl’utiliser,
il reste encore à rendre les chosesplus
claires.L’exemple
de 7rn’exprime
pas convenablementl’impossibilité
absolue de connaître nos propres idées dans le sens voulu par la théorie. Vous ne pouvez pas être assuré d’avoircomposé
letélégramme
dedix mots
qui
vous satisfait lemieux,
bien que la liste despossibilités
soit finie etqu’un grand
nombre depossibilités puissent
être éliminéesimmédiatement ; après
tous vosefforts, quelqu’un
peutsuggérer
uneamélioration évidente
qui
ne vous était pas apparue.1. « Implications of personal probability for induction», Journal of philosophy, 64 (1967), 593-606. Une traduction de cet autre essai de L. J. Savage paraîtra dans un prochain numéro de « Mathématiques et Sciences Humaines».
2. A cette question, Ian Hacking répond dans un essai publié dans le même numéro de Philosophy of Science (décembre 1967).
Un aspect
particulièrement
évident de notreincapacité
à connaître nos propres idées(et
donc àpouvoir
satisfaire à lathéorie)
tient à ce que nous ressentons defaçon incertaine,
ou vague, nospréférences
pour des choix relativement
simples
telsqu’entre
dix dollars ou deux billets de théâtre. Certains ontessayé
dereprésenter
ce caractère vague dans lathéorie, cependant
que d’autres pensent que, bienqu’il
faille reconnaître de
quelque façon
ce caractère vague, sa nature défie toute formalisation.Voici une
importante
illustration tirée de lastatistique. L’emploi
d’échantillons auhasard,
sicaractéristique
de lastatistique moderne,
n’est pascompatible
avec la théorie de lapréférence,
du moinsappliquée
au comportement d’unorganisme simple.
Même si la « randomisation » n’est pas aussi efficace que les statisticiens l’ontquelquefois pensé,
elle n’enparaît
pas moins utile etimportante.
La valeur dela
randomisation, qui échappe
à la théorie strictementinterprétée,
peut être rattachée dans unelarge
mesure au caractère vague de nos idées et à d’autres
incapacités
intellectuelles à satisfaireparfaitement
à la théorie de la
préférence
- etpeut-être
aussi à notre interaction avec d’autres personnes.Supposez
que vousacceptiez
l’idée que votre comportement devrait se conformer raisonnablement bien à lathéorie ;
est-ce que la théorie aquelque
valeur pour vous ? etpourquoi ?
Un avantage de lathéorie,
à monavis,
est que touteapplication
de l’idée deprobabilité
peut defaçon
assez claire êtreregardée
comme uneapplication
de la théorie de lapréférence,
bien que naturellement il soit souventpossible
d’obtenir les bénéficespratiques
de cesapplications
de laprobabilité
sans lesregarder
commetels.
Employer
la théorie de lapréférence,
c’est rechercher l’incohérenceparmi
les décisionspossibles,
dont vous, l’utilisateur de la
théorie,
devez alors revoir une ouplusieurs.
La théorie elle-même ne dit pas dequelle façon
retrouver lacohérence,
et il ne faut pas,je
suppose, s’attendre à cela.Néanmoins,
cer-taines
préférences
sont manifestement pour vousplus
faciles à laisser tomber qued’autres ;
dans certains cas,l’analyse philosophique pourrait
tirer au clair les raisons.D’après
ceque j’ai dit,
la théorie de lapréférence,
bien que non exactementvalable,
estapproxi-
mativement valable. Comme tous les
philosophes
et mathématiciens le saventmaintenant,
toute contra-diction dans une théorie déductive rend la théorie sans valeur. Est-il réellement
possible
de donner unsens
rigoureux
à laproposition qu’une
théorieempirique
ou normative ne soit pasvalable,
mais soitpresque valable ? Avec ou sans
rigueur,
il nous faut vivre avec des théoriesapproximativement
valables.La
philosophie peut-elle
nous dire comment ?L’idée de faits connus est
implicite
dansl’emploi
de la théorie de lapréférence.
D’uncôté,
lapersonne doit savoir
quels
actes lui sont offerts. Si parexemple je
vous demandequelles
chances vousdonnerez que le
quatrième jet
de cettepièce
de monnaie donnepile
si les troispremiers
l’ontfait,
il estnormalement
implicite
non seulement que vous savez queje
mettrai ma part del’enjeu
si nousparions,
mais aussi que vous saurez
qu’il
y a eu trois foispile
si vous les voyez. Le statisticienparle toujours
dela réaction
qui
sellaitappropriée
à tel ou tel ensemble dedonnées,
ou d’observations.Cependant,
les don-nées ne
sont jamais
tout à faitdonnées,
parcequ’il
y atoujours quelque
doute sur ce que nous avons réel- lement vu.Naturellement,
dans touteapplication,
le doute peut êtrerepoussé plus
loin. Nous pouvonsremplacer
l’événement de trois foispile
par l’événement moins immédiat de trois relevésqui
nous sonttransmis,
etprendre
en compte dans notreanalyse
le fait que tous les relevés ne sont pas forcément cor-rects.
Néanmoins,
non seulement lespropositions universelles,
mais lespropositions
lesplus
concrèteset les
plus personnelles
nesont jamais
réellement hors de doute. Envérité,
comme vous le savez mieuxque
moi,
de telles apparentes déclarations de faits doivent réellement êtreregardées
comme desproposi-
tions universelles. Peut-on dès lors éviter le manque de clarté et de
rigueur,
dans notre allusion à desfaits connus ? On a avancé que
puisqu’il n’y
a pas de certitudeabsolue,
nous devrions entendre par« certitude »,
une certitude relativement forte.Cette recommandation est provocante mais semble
davantage souligner,
que résoudre laquestion présente.
Vous avez écouté un
long catalogue
de mes douleurs et de mespeines philosophiques. J’espère apprendre
au cours de la discussion que certaines sont seulement dans ma tête et que d’autres iront mieux d’elles-mêmes.Mais je
crains que nous ne tombions d’accord que même uneéthique
de l’incertitude aussi neutre et ouverte que la théorie de lapréférence
est inextricablement liée à bien d’autresparties
de la
philosophie.
BRÈVE
BIBLIOGRAPHIESUR LA PHILOSOPHIE DE LA
PROBABILITÉ
PERSONNELLELes références
qui
suivent portent sur lesujet
dans des sens trèsdivers,
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