• Aucun résultat trouvé

Pour une approche sociodidactique de l’hétérogénéité du profil socio-culturel des apprenants Le cas de l’enseignement-apprentissage du FLE

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Pour une approche sociodidactique de l’hétérogénéité du profil socio-culturel des apprenants Le cas de l’enseignement-apprentissage du FLE"

Copied!
13
0
0

Texte intégral

(1)

259

POUR UNE APPROCHE SOCIODIDACTIQUE DE L’HÉTÉROGÉNÉITÉ DU PROFIL SOCIO-CULTUREL DES

APPRENANTS

LE CAS DE L’ENSEIGNEMENT-APPRENTISSAGE DU FLE ---

FOR A SOCIODIDACTIC APPROACH TO THE HETEROGENEITY OF THE SOCIO-CULTURAL PROFILE OF LEARNERS

THE CASE OF TEACHING-LEARNING FRENCH AS FLE

TAKASSA Mohamed Université Ibn Tofaïl, Kénitra, Maroc

takassamed@hotmail.fr Résumé:

L’objectif de ce travail est de mettre en avant le rôle majeur que peut jouer la sociolinguistique dans l’explication des difficultés d’enseignement-apprentissage du français rencontrées par les élèves marocains et de les réduire. Ces difficultés ne s’expliquent pas exclusivement par les aspects scolaires, techniques, formels et systémiques mais également par des facteurs extrascolaires tels que le contexte socio-économique et culturels des apprenants.

Pour le montrer, nous avons mené une recherche de terrain auprès de 147 élèves de la sixième année du cycle primaire issus de deux milieux contrastés. Après leur avoir passé un test de français, nous avons collecté, à l’aide d’un questionnaire, leurs caractéristiques socio- économiques et culturelles afin de les croiser avec leurs résultats, les analyser et les interpréter.

Cette analyse montre une forte corrélation entre les conditions extrascolaires de l’élève et ses résultats. De là, nous constatons que plus les apprenants sont issus de milieu favorisé plus leurs notes au test sont relativement meilleures aux élèves issus de milieux défavorisés et inversement.

Mots-clés : analyse sociolinguistique ; contexte familial; facteurs extrascolaires; hétérogénéité Abstract:

The objective of this work is to highlight the major role that sociolinguistics can play in explaining the difficulties in teaching and learning for French encountered by Moroccan pupils and to reduce them. These difficulties cannot be explained exclusively by scholastic, technical, formal and systemic aspects, but also by extracurricular factors such as the socio-economic and cultural context of the learners. To show this, we conducted field research with 147 pupils from two contrasting backgrounds. After giving them a French test, we used a questionnaire to collect their socio-economic and cultural characteristics in order to cross-reference, analyse and interpret their results. This analysis shows a strong correlation between the students' extracurricular conditions and their results. From this, we find that the more advantaged the background of the learners, the better their test scores are relatively to students from disadvantaged backgrounds and vice versa.

Keywords: sociolinguistic analysis; family context; extra-curricular factors; heterogeneity.

Introduction

Il semble aujourd’hui plus que nécessaire de donner une grande importance à la sociolinguistique dans l’explication des difficultés d’apprentissage du F.L.E. et inciter, par conséquent, les chercheurs à instaurer une approche qui met en avant des variables

(2)

260

sociolinguistiques permettant de mettre le doigt sur les facteurs expliquant ces difficultés. Il est donc primordial de revoir la question des difficultés d’apprentissage du F.L.E. à partir d’une approche socioculturelle qui prend en compte beaucoup plus le contexte familial de l’élève puisque la langue est avant tout une affaire sociale et culturelle, au lieu de s’intéresser uniquement aux aspects scolaires, techniques, formels et systémiques pour résoudre ces difficultés.

La famille constitue le premier système social où les enfants acquièrent les compétences cognitives et sociales nécessaires pour pouvoir postérieurement s’insérer dans la société et faire face aux défis de l’école. Dans cet égard, Lugo-Gil et Tamis-LeMonda (2010) démontrent que l’éducation familiale permet aux enfants de développer les rudiments de la communication, les compétences organisationnelles et comprennent les attentes de la famille pour leurs avenirs.

De sa part, la neuroscience met en évidence la corrélation entre le cerveau humain dans son apprentissage et la mémoire. Barbara Schneider et al (1999) interpellent l’étude de Duyme, Dumaret et Tomkiewiez qui affirment que le manque d’interaction sociale pendant la petite enfance peut altérer la chimie cérébrale de l’individu et que la fluidité et la perméabilité entre les enfants et leur contexte social semblent être les deux composantes les plus importantes dans leur développement cognitif et social.

Sur le niveau culturel, Murat (2009, p106) souligne que si l’impact de la profession des parents sur le niveau d’études de l’enfant est mineur, ces compétences sont nettement influencées par leurs niveaux intellectuels notamment celui de la mère qui a le rôle le plus déterminant. Les travaux relatifs à l’impact du milieu sur la transmission des codes linguistiques mettent l’accent sur l’existence d’interactions verbales évidentes entre mères de milieux contrastés et leurs enfants. D’après Duru-Bellat et van Zanten (2006, p125) : il existe un handicap socioculturel qui fait que les mères issues de milieux favorisés visent essentiellement pendant les échanges verbaux avec leurs enfants des objectifs pédagogiques, tandis que les mères appartenant aux milieux défavorisés n’ont avec leurs enfants que des échanges informatifs plutôt que pédagogiques. Lorsque l’enfant grandit dans un environnement familial où la communication est privilégiée, celui-ci a plus de chance à apprendre, notamment si ses parents lui expliquent nettement leurs attentes en matière d’apprentissage et les adaptent en fonction de sa personnalité et ses besoins. Des pratiques éducatives encouragées par les parents telles que la compétition, l’indépendance, l’endurance et la persévérance, etc., semblent être en relation avec les résultats scolaires des enfants. L’accompagnement parental aux devoirs est l’un des comportements qui ne se limite pas à la simple consolidation et approfondissement des acquis à l’école, mais c’est un acte qui doit montrer aux enfants les attitudes et les comportements nécessaires à la réussite scolaire. Selon Bernstein (1975) et Hoff (2003), le statut socioéconomique de la mère et l’utilisation du langage sont responsables des différences dans la parole maternelle adressée à l’enfant. Les jeunes enfants élevés au sein de familles riches en ressources tendent à développer un vocabulaire plus étendu et élaboré comparativement aux enfants issus de milieux dépourvues desdites ressources. Au fil du temps ces différences ne cessent de s’accroître et les enfants nés dans des familles disposant de faibles ressources économiques apprennent moins de mots en raison du code restreint véhiculé pendant les échanges avec leurs familles ce qui mène par conséquent à une acquisition lente du vocabulaire. Un autre aspect de la structure familiale, c’est celui de la fratrie. Par une série d’analyses, Bigras (1994) et Gayet (1993) affirment que les enfants n’ont pas les mêmes chances de réussite selon la taille de la fratrie, le rang et le sexe. Dans ce cadre, les enfants d’une fratrie nombreuse obtiennent des résultats plus faibles et des troubles de l’adaptation psychologique et sociale plus important que ceux qui ont une fratrie modeste. Concernant le rang, les aspirations des parents au sein d’une fratrie nombreuse diminuent en fonction de la

(3)

261

position de l’enfant.

1.

Méthodologie de l’enquête

Pour mener notre enquête, nous avons retenu deux établissements scolaires publics de la ville de Marrakech. Il s’agit de l’école " Al Imam As-souhayli " située au quartier Sidi Youssef Ben Ali et l’école " Ibn Habous " au quartier Daoudiate. L’étude a porté sur un échantillon de 147 élèves des deux sexes âgés de 11 ans à 16 ans (dont 72 filles et 75 garçons) de la sixième année du cycle primaire. Les informations recueillies auprès des directeurs et des deux établissements nous ont incité à choisir l’établissement Al Imam As-souhayli vu que les affluents des élèves sont dans leur majorité issus de milieux défavorisés alors que les élèves d’Ibn Habous sont pour la plupart issus de milieux relativement favorisés. Pour le choix du niveau, nous estimons que les élèves de la sixième année ont accumulé suffisamment de compétences. Il s’agit également d’un niveau qui revêt une grande importance dans leur cursus scolaire puisqu’il représente une année transitoire et l’ébauche d’un nouvel apprentissage qui est le secondaire collégial.

Pour recueillir des informations sur les caractéristiques socioéconomiques et culturelles des élèves et étudier leurs effets sur le niveau des élèves en FLE, nous avons pensé à élaborer un questionnaire et leur faire passer un test de français. Regroupant trois axes, notre questionnaire qui se compose de 21 questions fermées et semi-fermées porte sur (i) l’appartenance socioprofessionnelle des apprenants et les niveaux d’instruction des familles (ii) l’accompagnement parental (iii) les ressources culturelles et éducatives disponibles en familles. Par souci d’objectivité et fiabilité, nous avons décidé de mettre en place l’examen unifié à l’échelle de la province d’Al-Haouz. Il s’agit d’un examen d’une durée d’une heure et demie, composé au total de vingt questions et recouvre les trois domaines de compétences en l’occurrence, la compréhension de l’écrit, les activités réflexives sur la langue et la production de l’écrit.

2. Résultats de l’enquête

Si plusieurs études sociolinguistiques ont mis en évidence l’existence des liens significatifs entre les caractéristiques sociales et culturelles des apprenants et leur réussite scolaire, notre recherche vise à déterminer si ces caractéristiques déterminent également le niveau des élèves de notre échantillon en test de langue française sachant qu’une étude nationale, celle du Conseil Supérieur de l’Enseignement (2008) confirme la faiblesse du niveau des apprenants marocains en cette langue.

2.1 Les notes au test en fonction du sexe

Nous commençons par croiser le genre des élèves avec les moyennes inscrites au test pour vérifier si le fait d’être un garçon ou une fille influence les moyennes. Il convient de signaler au début que les filles et les garçons sont équitablement représentés dans les deux établissements et dans l’ensemble de l’échantillon et ils représentent approximativement 50% pour chacun d’eux.

(4)

262

Avec un écart-type significatif (z =2,13) dans les trois cas, le graphique ci-dessus confirme que les résultats des filles en matière de l’apprentissage de la langue française sont significativement supérieurs à ceux des garçons. En effet, les moyennes des filles sont relativement plus élevées que celles des garçons dans tous les établissements et bien que les résultats des élèves de Ibn Habous soient très élevés par rapport à ceux de Al Imam As-souhayli, les filles maintiennent toujours leur supériorité face aux garçons. Il est à noter dans ce contexte que nos données se croisent pareillement avec les résultats du rapport préparé par le conseil supérieur de l’enseignement (2008) qui ont montré que les performances des filles en langue française dépassent celles des garçons dans les deux niveaux, la quatrième et la sixième année de l’enseignement primaire.

Nous pouvons donc conclure que nos résultats obtenus à l’aide de ce test confirment ceux d’une autre étude (Mortamet ,2003,p321) et qui montrent que les filles ont des résultats significativement supérieurs à ceux des garçons en matière des langues. En absence de toute étude scientifique qui prouve la supériorité d’un sexe sur l’autre, nous ne pouvons affirmer que les filles enregistrent les taux de réussite les plus élevés dans toutes les matières scolaires.

Cependant, ladite étude a confirmé que les niveaux des acquis des filles dans tous les niveaux d’enseignement en matière de la langue arabe et de la langue française sont significativement supérieurs à ceux des garçons.

2.2 Les notes au test en fonction de l’âge

L’intégration de la variable « âge » revêt une grande importance dans la mesure où elle ne nous permettra pas uniquement de savoir l’âge de l’enfant mais plutôt d’avoir une idée sur le nombre de redoublement que cela suppose et si ce retard en cas d’existence influence ou non les compétences en langue française. D’après le graphique ci-après, il est clair que les élèves qui n’ont jamais redoublé (douze ans) ou ceux qui ont un an d’avance (onze ans) n’ont pas entre eux des différences significatives et ils ont mieux réussi le test que les élèves redoublants.

À l’opposé, les redoublants (treize, quatorze, quinze et seize ans) ont des résultats significativement très faibles par rapport à la catégorie des non-redoublants. En plus nous remarquons que plus le nombre de redoublements supposés augmente plus les moyennes sont faibles et inversement.

Sidi youssef

ben Ali daoudiate les deux

établissements

Féminin 5,52 12,91 8,43

masculin 4 10,76 6,83

5,52

12,91

8,43 4

10,76

6,83 0

2 4 6 8 10 12 14

moyennes des notes

Féminin masculin

Figure 15 : sexe et moyennes des notes au test

(5)

263 Figure 16 : Moyennes des notes au test selon l'âge

À la base de ces résultats, nous pouvons parler de trois groupes d’élèves:

• Ceux qui n’ont jamais redoublé et qui ont eu les meilleures moyennes au test

• Ceux qui ont redoublé une fois et dont la moyenne est inférieure à la première catégorie mais qui est significativement supérieure à celle de ceux qui ont redoublé plus qu’une fois

• Ceux qui ont redoublé plus qu’une fois et qui ont les résultats les plus faibles.

Ces constats confirment que plus l’élève n’a jamais redoublé plus il a les chances d’assurer non seulement la réussite scolaire mais également le développement des compétences en langue française. Nous déduisons donc qu’il y’a une corrélation significative entre, d’une part, l’âge de l’élève et le nombre de redoublement supposé, et d’autre part, l’âge et les compétences en langue française.

2.3 Les notes au test en fonction du nombre d’enfants

Par l’intermédiaire de l’analyse des moyennes des élèves en fonction de la taille de la fratrie et leur classement au sein d’elle, nous tenterons de savoir dans quelle mesure ces deux variables sont en corrélation. Nous signalons tout d’abord que 88% des enquêtés appartiennent à des familles qui ont moins de trois enfants, alors que le reste appartient à des familles de

quatre enfants ou plus.

En effectuant le test de Student sur les résultats des familles à deux enfants, nous avons trouvé que la différence avec les moyennes des familles ayant un enfant n’est pas significative

1 2 3 4 5 6 8

Moyennes 6,9 9,59 8,17 6,98 5,4 4,42 4,41

6,9 9,59 8,17 6,98

5,4 4,42 4,41

0 5 10 15

Moyennes

Figure 17 : Moyennes des notes au test selon le nombre d'enfants

11 12 13 14 15 16

Moyennes 9,68 8,24 5,22 2,62 2,43 2,4

9,68 8,24

5,22

2,62 2,43 2,4

0 2 4 6 8 10 12

Moyennes

Age

Moyennes

(6)

264

(z=0,78) et peu significative (z=1,01) avec ceux qui ont trois enfants.

Généralement, nous pouvons dire que les résultats de ces familles sont très proches les uns des autres. À l’opposé, dès que la famille est composée de quatre enfants et plus les moyennes deviennent de plus en plus faibles. D’après ces constats, nous nous apercevons que plus le nombre d’enfants augmente plus leurs performances diminuent en langue française et inversement, c'est-à-dire plus la taille de la famille diminue plus les moyennes des enfants augmentent. Les différences élevées entre ces élèves trouvent leur interprétation dans les conditions socioéconomiques et culturelles de la famille comme nous le prouverons plus tard dans le croisement du niveau d’instruction des parents, leurs professions, l’accompagnement scolaire et les ressources culturelles disponibles au sein de la famille avec les moyennes au test.

En conclusion, nous pouvons dire que plus la taille de la famille augmente plus cela ne permet pas aux parents d’assurer l’implication nécessaire dans les études de leurs enfants et de mettre à leur disposition les ressources culturelles et financières dispensables pour leurs réussites scolaires. Il est clair que nous sommes ici devant une variable qui est en corrélation évidente non seulement avec le niveau des performances en matière de la langue française, mais également avec l’échec ou la réussite scolaire.

2.4 Les notes au test en fonction de l’ordre de l’enfant

L’intérêt de cette question réside dans le fait d’établir une relation entre l’ordre de l’élève au sein de sa fratrie et ses notes au test de langue. Nous tentons par ce croisement d’examiner à quelle échelle l’apprenant bénéficie des expériences scolaires de ses frères aînés et quelles sont les limites de cette influence. Si l’on regarde le graphique de la figure

4 ci-dessous, il apparaît que les élèves qui sont issus de familles composées d’un enfant à trois n’ont aucune différence significative entre eux et ils ont les meilleurs résultats par rapport aux résultats de ceux qui vivent dans des fratries de quatre ou plus et qui ont obtenu des résultats significativement inférieurs des moyennes de la première catégorie. Nous remarquons également que dans l’ensemble, les moyennes se dégradent au fur et à mesure que le rang dans la fratrie s’accroît.

Les résultats de la figure 4 nous montrent que cette variable et la précédente, à savoir, la taille de la famille, ne sont pas distinctes mais elles constituent une seule détermination

complexe dans la mesure où la position dans la fratrie est en effet indissociable de la taille de la fratrie. Concernant la première catégorie qui a obtenu les meilleures moyennes, nous remarquons que les élèves qui sont uniques ou aînés d’une fratrie ont une moyenne élevée.

Ceci est dû principalement aux ressources économiques et culturelles mises à la disposition des enfants, l’intérêt accordé par les parents, le degré élevé d’implication dans les études vu la taille

1 2 3 4 5 6 8 9

Moyennes 8,01 7,69 8,19 6,9 4,79 4,5 3,41 2,74

8,01 7,69 8,19

6,9

4,79 4,5

3,41 2,74

0 2 4 6 8 10

Moyennes

Figure 18 : Moyennes des notes au test selon l'ordre de l'élève

(7)

265

de la famille permettant plus de temps. Quant aux élèves du deuxième et du troisième rang, nous estimons qu’outre les raisons précitées, ces élèves sont motivés par les expériences de leurs frères ainés, le soutien que ces derniers pourraient leur assurer et les représentations positives qu’ils pourraient faire des études grâce à leurs frères aînés.

Si nous regardons les moyennes de la deuxième catégorie, ceux qui appartiennent à une fratrie de quatre et plus, nous concluons que ces élèves ne bénéficient plus des expériences de leurs frères aînés, mais c’est plutôt cette taille qui influence négativement leurs performances.

Pour justifier les scores obtenus par cette catégorie, nous pensons que les conditions économiques de ces familles ne leur permettent pas de disposer leurs enfants des ressources financières et culturelles indispensables pour réussir et que l’accompagnement pédagogique de chaque enfant devient de plus en plus difficile, voire impossible.

2.5 Les notes au test en fonction du niveau d’instruction de la famille

Nous essayons à ce stade d’identifier le niveau d’instruction des parents, d’estimer le degré de soutien qu’ils pourraient assurer à leur enfant dans son apprentissage de la langue française, le degré d’implication que cela suppose dans ses études. Pour mettre en évidence l’existence ou non d’un lien entre les performances en langue française des élèves et le niveau d’instruction de la famille, nous proposerons ce graphique pour tester son existence.

Figure 5 : Les moyennes au test selon les niveaux d'études des parents et des frères ainés

Ce qui est très intéressant de la comparaison des trois courbes figurant sur le graphique ci-haut, c’est de constater qu’il existe un lien très significatif entre le niveau d’instruction des parents et des frères, d’une part et les moyennes obtenues au test d’autre part. Tout d’abord, nous constatons que les moyennes augmentent avec l’accroissement des niveaux d’instruction des membres de la famille. Ainsi, les élèves qui ont des parents ou des frères ayant des études supérieures ont toujours les meilleures moyennes, ceux qui sont issus de parents ou des frères ayant des études secondaires viennent au deuxième rang, alors que les élèves dont les parents et les frères ont le niveau collégial se placent au troisième rang. Enfin, nous trouvons les élèves

5,31 6,09 7,48 8,66 9,06

4,25 4,8

8,14

10,73 10,88

4,6 4,88

10,07

11,18 12,22

Ne savent ni lire ni écrire

Enseignement de base

Enseignement collégial

Enseignement secondaire

Etudes supérieures

M o y ennes

les moyennes selon le niveau d'études des mères les moyennes selon le niveau d'études des pères

(8)

266

qui appartiennent aux familles qui ne savent ni lire ni écrire ou celles qui ont un niveau d’étude de base se placent aux derniers rangs.

2.6 Les notes au test en fonction de la catégorie professionnelles du père

En nous appuyant sur les données statistiques du graphique ci-après, il apparaît que lorsque le père est un professeur universitaire, les moyennes réalisées par les élèves sont significativement très supérieures à toutes les autres catégories professionnelles. Après cette catégorie, nous constatons que la différence entre les moyennes réalisées par les élèves dont les pères sont des fonctionnaires, des propriétaires, des commerçants ou bien exerçants une profession libérale, n’est pas significative et les notes sont très proche de la moyenne sinon supérieures.

À l’opposé, nous remarquons que les élèves qui sont issus de familles dont les pères sont en chômage, des artisans, des salariés et des agriculteurs, ont obtenu les moyennes les plus faibles, respectivement 5,67 ; 5,39 ; 3,5 ; 2 et qui ne sont pas significativement différentes les unes des autres, tandis qu’elles sont significativement très différentes des résultats de la première et de la deuxième catégorie.

À la lumière de ce qui précède, nous pouvons déduire que globalement les élèves, qui se sont élevés par des personnes qui ont suivi des études supérieures et secondaires et qui ont par conséquent réussi grâce à l’école, ont obtenu les meilleurs scores au test de français. Nous sommes donc devant une reproduction non juste économique, mais également intellectuelle, qui fait que ces élèves réussissent le test non pas parce que les conditions économiques de leurs familles sont favorables, mais plutôt parce que leurs parents possèdent un capital intellectuel qui leur permet de s’engager dans l’accompagnement de leurs enfants.

Quant aux élèves issus de familles dont le chef est un commerçant ou exerçant une profession libérale, les moyennes sont dues en grande partie aux ressources financières et culturelles disponibles au foyer vu le capital économique de la famille qui facilite l’accès

Pères en chôma

ge

Agri- culteu

rs

Salari és

Artisa ns

Profes -sion libéral

e

Com- mer- çants

Propri étaires

Fon- ction- naires

profes -seurs univer

- sitaire

s Moyennes 2 3,5 5,39 5,76 9,03 9,78 9,89 11,32 15,63

2 3,5 5,39 5,76

9,03 9,78 9,89 11,32

15,63

02 46 108 1214 1618

Les moyennes

Les professions

Figure 6 : Les moyennes des notes au test selon la profession du père

(9)

267

auxdites ressources et non pas au niveau intellectuel de leurs parents vu que le croisement de la profession avec le niveau d’instruction nous a révélé que cette catégorie n’a pas les niveaux d’instruction les plus élevés.

À l’opposé, nous trouvons que ce sont les élèves dont les pères sont des artisans, des salariés, des agriculteurs et des chômeurs qui ont obtenu les résultats les plus faibles. Ceci est dû en grande partie à la situation économique précaire des parents et à leurs niveaux d’instruction qui n’ont pas eu l’occasion de réussir à l’école et qui sont dans leur grande majorité des personnes qui ont dans les meilleurs des cas un enseignement de base.

2.7 Les notes au test en fonction du type d’accompagnement Le graphique ci-dessous fait apparaître qu’il existe une relation entre le type

d’accompagnement et les moyennes des notes au test. Nous constatons que les élèves dont les parents font uniquement des visites scolaires ou bien des visites et des réunions scolaires ont réalisé les meilleurs scores, respectivement 8,75 et 8,4 ; suivis par ceux dont les parents ne visitent l’école que si lorsqu’ils sont convoqués par l’administration ou par les professeurs.

Toutefois, les élèves qui ne bénéficient d’aucun type d’accompagnement ont réalisé le score le plus faible, à savoir 3,84.

2.8 Les notes au test en fonction de l’espace pour étudier

Les résultats du graphique de la figure 8 montent qu’il existe une corrélation significative entre l’espace réservé pour les études et les moyennes des notes au test de français. Nous remarquons que les élèves qui possèdent cet espace ont réalisé la moyenne la plus élevée (9,53).

Par contre, ceux qui ne l’ont pas ont eu la moyenne la plus faible (4,60). D’après ces chiffres, nous nous apercevons que plus les parents ont de bonnes conditions socio-économiques comme chez les fonctionnaires, les professeurs universitaires, etc., plus ils mettent à la disposition de leurs enfants les ressources favorisant leurs réussites scolaires, et en particulier, l’amélioration de leurs performances en français. Par contre, les conditions précaires comme chez les salariés, les artisans, les parents en chômage, les agriculteurs, etc., augmentent les chances de dispenser l’enfant des conditions nécessaires à la réussite et plus particulièrement à la maitrise du français dans le cadre de notre étude.

Réunions

scolaires visites scolaires Réunions et

visites scolaires aucun

Note final 7,93 8,75 8,4 3,84

7,93 8,75 8,4

3,84

0 2 4 6 8 10

Les moyennes des notes

Type d'accompgnement

Figure 7 : Moyennes des notes au test selon le type d'accompagnement

(10)

268

2.9 Ressources culturelles et profession des parents

En nous référant aux deux tableaux ci-après qui font la relation entre les ressources culturelles et éducatives disponibles dans les familles et le niveau d’instruction des parents, nous remarquons l’existence d’une corrélation entre ces deux variables. Ainsi, l’augmentation du niveau d’instruction fait augmenter les chances d’accéder aux différentes ressources culturelles. À l’exception du dictionnaire et de l’ordinateur bureau, qui sont approximativement deux outils à la portée des mains de tous les élèves quoiqu’il soit le niveau d’instruction de leurs parents, nous remarquons que les enfants dont les parents ont entamé les niveaux secondaires et postsecondaires ont l’exclusivité de la visite des musées et des bibliothèques.

Nous nous apercevons également que cette catégorie domine majoritairement, 72 % et 76 % respectivement pour les mères et les pères, la réservation d’un coin de lecture à la maison et la possession des outils NTICE, en l’occurrence la possession d’un ordinateur portable, une tablette et une connexion internet.

En conséquence, il s’avère que la fréquentation des musées et des bibliothèques augmente avec l’accroissement du niveau d’instruction. En effet, les élèves dont les parents ont les niveaux d’études les plus élevés, le secondaire et les études universitaires, dominent cette fréquentation pendant que les apprenants issus de parents non scolarisés ou ayant des niveaux d’études assez bas sont entièrement absents de ces endroits. Cela montre que les parents qui ont poursuivi un enseignement assez élevé ou élevé accordent une importance particulière à la visite de ces univers culturels et ils sont conscients que cela constitue non seulement une instance pour promouvoir les connaissances en matière d’art et de culture, mais plutôt une condition indispensable pour le développement des compétences cognitives de leurs enfants.

Les conditions socioéconomiques des familles qui sont en relation étroite avec le niveau d’instruction comme nous l’avons démontré au préalable, expliquent l’accès aux NTICE disponibles pour l’élève. Ces conditions particulièrement favorables pour les parents ayant un niveau d’instruction secondaire et universitaire les aident à consacrer à leurs enfants les outils indispensables au développement culturel.

Quant aux parents non scolarisés ou bien ceux qui ont un niveau d’étude assez bas, nous remarquons que leurs enfants n’ont jamais fréquenté des musées ou des bibliothèques. Le désengagement des parents de l’ouverture de leurs enfants sur ces espaces nous semble s’expliquer par deux raisons : l’inconscience de l’importance de ces univers pour le développement cognitif de leurs enfants et les contraintes liées à leurs situations socioéconomiques. Nous avons auparavant montré que la majorité des pères illettrés ou ayant un niveau d’instruction bas sont des salariés, des artisans ou des agriculteurs. Ceci nous fait penser qu’ils n’ont pas le temps suffisant pour accompagner leurs enfants de temps en temps à ces endroits ou bien encore parce que le temps des visites coïncide avec les horaires de leurs travaux. Concernant leurs conditions socioéconomiques, nous estimons que ces professions qualifiées à " bas revenus " ’ ne permettent pas aux parents d’assurer à leurs enfants des outils

9,53

4,60 Oui

Non

Figure 8 : Les moyennes des notes au test selon l'espace pour étudier

(11)

269

jugés inaccessibles comme un ordinateur portable, une tablette, une connexion internet, etc.

2.10 Les notes au test en fonction des ressources culturelles

Le graphique infra fait apparaître dans quelle mesure la possession d’un ensemble de biens culturels au foyer familial et la visite des espaces culturels influencent les moyennes des notes enregistrées au test. Il ressort de ces résultats que les conditions culturelles de la famille impactent significativement le niveau des élèves en langue française. En effet, nous remarquons que lorsque l’élève dispose d’un bien qui reflète le niveau économique aisé de la famille ou le niveau d’instruction élevé des parents, il réalise les moyennes les plus élevées.

De cette manière, les élèves qui fréquentent des musées ou des bibliothèques ont réalisé respectivement 14,71 et 13,81 suivis par ceux qui ont des tablettes, des coins de lecture, une connexion internet et des ordinateurs portables qui ont réalisé respectivement 12,95 ;12,18 ; 11,91 ;10,87. À l’opposé, nous notons que les biens qui sont accessibles (les dictionnaires et les ordinateurs de bureaux) confirment le niveau économique modeste des familles des élèves qui ont réalisé les moyennes les plus faibles, à savoir 8,36 et 9,44.

Niveau d'instruction du père

Ressources culturelles et éducatives Visites des musées

visite des bibiothèques coin de lecture Dictionnaire Ordinateur bureau Ordinateur portable Tablette internet TOTAL

Ne sait ni lire ni

écrire Enseignement de base

Enseignement

collégial Enseignement secondaire

Etudes

supérieures TOTAL

0,0% 0,0% 0,0% 14,3% 85,7% 100%

0,0% 0,0% 0,0% 33,3% 66,7% 100%

4,0% 8,0% 12,0% 12,0% 64,0% 100%

12,9% 31,9% 11,2% 13,8% 30,2% 100%

9,4% 25,0% 7,8% 9,4% 48,4% 100%

9,1% 7,3% 9,1% 12,7% 61,8% 100%

0,0% 10,7% 7,1% 14,3% 67,9% 100%

4,4% 8,9% 8,9% 13,3% 64,4% 100%

15,9% 32,4% 10,3% 12,4% 29,0% 100%

Niveau d'instruction de la mère

Ressources culturelles et éducatives Visites des musées

visite des bibiothèques coin de lecture Dictionnaire Ordinateur bureau Ordinateur portable Tablette

internet TOTAL

Ne sait ni lire ni

écrire Enseignement de base

Enseignement

collégial Enseignement secondaire

Etudes

supérieures TOTAL

0,0% 0,0% 0,0% 57,1% 42,9% 100%

0,0% 16,7% 0,0% 50,0% 33,3% 100%

4,0% 8,0% 16,0% 36,0% 36,0% 100%

25,9% 25,9% 9,5% 23,3% 15,5% 100%

15,6% 25,0% 6,3% 28,1% 25,0% 100%

16,4% 7,3% 9,1% 32,7% 34,5% 100%

7,1% 3,6% 7,1% 39,3% 42,9% 100%

8,9% 11,1% 8,9% 37,8% 33,3% 100%

30,3% 26,9% 7,6% 20,7% 14,5% 100%

Tableau 1. Les ressources culturelles en fonction du niveau d'instruction des pères

Tableau 2. Les ressources culturelles en fonction du niveau d'instruction des mères

(12)

270

Il s’avère que les ressources intellectuelles disponibles au foyer familial et les pratiques culturelles sont importantes pour l’acquisition des compétences en matière de la langue française. Selon Murat (2009, 122) les pratiques qui sont plus proches de la vision "classique "

de la culture (lire, aller au cinéma, aller aux bibliothèques, visiter des musées, etc.) semblent avoir les résultats les plus positifs sur les compétences des élèves que les pratiques plus éloignées de cette vision (faire du sport, aller à la chasse, etc.). Nous observons également que les pratiques les plus distinctives (aller au musée par exemple) sont toujours les plus récompensées par l’école comparativement à celles que la majorité des élèves peut pratiquer comme l’écoute de la musique.

À l’heure des NTICE, devenues des ressources indispensables pour la réussite scolaire et l’apprentissage de la langue française en particulier, vu que la quasi-majorité de ces technologies incitent l’utilisateur à utiliser cette langue pour y accéder, les élèves issus de classes moyennes et supérieures sont privilégiés par les ressources financières de leurs parents qui leur consacrent, par exemple, une connexion internet, une tablette, ordinateur portable, etc.

Les conditions socioéconomiques de la famille influencent incessamment les ressources culturelles disponibles au foyer, en l’occurrence les livres disponibles au foyer qui constitue un indicateur concret et pertinent sur les pratiques culturelles de la famille.

Conclusion

En conclusion, l’approche sociodidactique que nous avons adoptée pour étudier l’effet des facteurs extrascolaires tels que le milieu familial, sur le niveau des élèves en français nous a révélé l’existence d’une corrélation significative entre les deux. En croisant les différentes variables avec les résultats, nous sommes arrivé à conclure que les performances en langue française entretiennent un rapport étroit avec l’appartenance socioprofessionnelle des apprenants, les niveaux d’instruction des membres de leurs familles, l’accompagnement parental et les ressources culturelles et éducatives disponibles au foyer familial et qui sont elles aussi dépendantes à la classe socioprofessionnelle des parents. Ainsi, les scores des élèves issus de milieux favorisés sont majoritairement et significativement supérieurs à ceux des élèves issus de milieux défavorisés. Cependant, il ressort également de l’analyse des résultats que le niveau de l’ensemble des élèves varie dans l’ensemble entre un niveau « faible » et un niveau

« moyen ». Notons donc que le phénomène de la réussite ou de l’échec scolaire en général, et les performances en cette langue en particulier, ne devrait pas être expliqué exclusivement par un déterminisme social, mais plutôt par des facteurs scolaires et de politique linguistique en

Diction- naires

Ordinateu rs de bureau

Ordinateu rs portables

internet coins de

lecture Tablettes

visites des bibiothèq

ues

Visites des musées

Note final 8,36 9,44 10,87 11,91 12,18 12,65 13,81 14,71

8,36 9,44 10,87 11,91 12,18 12,65 13,81 14,71

0 2 4 6 8 10 12 14 16

Les moyennes

Figure 9 : Moyennes des notes au test selon les ressources

(13)

271

place.

Bibliographie

BERNSTEIN, B., & CHAMBOREDON, J. C. (1975). Langage et classes sociales. Paris : Les Éditions de Minuit.

BIGRAS, M. (1994). GAYET, D. (1993). Les relations fraternelles. Neuchâtel: Delachaux et Niestlé. Revue des sciences de l’éducation, 20(2), 398.

https://doi.org/10.7202/031724ar

Conseil Supérieur de l’Enseignement. (2008). État et Perspectives du Système d’Éducation et de Formation. Rabat.

DUMONT, H., ISTANCE, D., & BENAVIDES, F. (Éd.). (2010). Comment apprend-on ? La

recherche et l’innovation dans l’enseignement.

https://doi.org/10.1787/9789264086944-fr

DURU-BELLAT, M., FARGES, G., & VAN ZANTEN, A. (2018). Sociologie de l’école - 5e éd. (French Edition). Paris : Armand Colin.

DUYME, M., DUMARET, A.-C., & TOMKIEWICZ, S. (1999). How can we boost IQs of

« dull children »?: A late adoption study. Proceedings of the National Academy of Sciences, 96(15), 8790-8794. https://doi.org/10.1073/pnas.96.15.8790

HOFF, E. (2003). The Specificity of Environmental Influence: Socioeconomic Status Affects Early Vocabulary Development Via Maternal Speech. Child Development, 74(5), 1368-1378. https://doi.org/10.1111/1467-8624.00612

MORTAMET, C. (2003). La diversité à l’université, analyse sociolinguistique de copies et de discours d’étudiants entrant à la faculté de lettres et sciences humaines de Rouen, Thèse de doctorat sous la direction de Claude CAITUCOLI, Université de Rouen.

MURAT, F. (2009). Le retard scolaire en fonction du milieu parental : L’influence des compétences des parents. Économie et statistique, (424-425), 103-124.

Références

Documents relatifs

tâche des sujets sera des plus ardues : pénétrer un tel système, un tel univers, le comprendre, le saisir, le faire passer, le remplacer, paraît une «

Cependant, deux faits frappaient dès l’abord : d’une part le caractère surtout nocturne ou hypnagogique des phénomènes, rappelant le délire de rêve à rêve autrefois signalé

Pour ce faire, nous avons réservé le premier et le deuxième chapitre aux aspects théoriques de notre thème où nous nous sommes basées à la fois sur le français dans le

Nous avons présenté ensuite des grilles d’observation de séances de cours (avec mé- thode préconisée par le manuel et avec introduction d’activités ludiques) puis nous

Étant donné que les exercices de consolidation constituent une étape indéniable dans le processus d’enseignement/apprentissage, on y a consacré une procédure d’analyse

Dans un travail de recherche publié il y a quelques temps, et qui portait sur l’image de soi et de l’autre à travers les textes proposés dans le manuel de

- une activité dans laquelle les états mentaux comme les intentions, les représentations, les croyances, les différentes émotions des enseignants et des