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Le traitement comptable du risque de crédit et la question de l adoption d IFRS 9

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Le traitement comptable du risque de crédit et la question de l’adoption d’IFRS 9

I - La question du choix du référentiel comptable

A la suite de l’expérience sud-africaine, plusieurs pays d’Afrique anglophone comme le Kenya, le Nigeria ou le Ghana ont fait le choix, d’adopter le référentiel IFRS comme standard comptable unique pour l’ensemble des entreprises et tous les types de comptes.

La préexistence en Afrique francophone d’un référentiel différent qui est utilisé de longue date par l’ensemble des acteurs économiques, et répond à d’autres besoins, fiscaux ou statistiques monétaires par exemple, rend difficile l’adoption généralisée des IFRS pour les comptes sociaux. Il ressort que le changement de référentiel pour l’ensemble des comptes (individuels et consolidés) des établissements de crédit entraînerait des retraitements pouvant être très contraignants, aussi bien pour les banques que pour l'administration fiscale des pays concernés. En outre, l’application à de petites unités pourrait aussi soulever des difficultés liées à la complexité des normes, dont la mise en œuvre nécessiterait des moyens importants tant en termes humains que de système d’information et de gestion et générerait des charges disproportionnées pour ces acteurs.

Une alternative consiste à adopter les IFRS pour certaines catégories d’entreprises ou de comptes. C’est ce choix qui a été fait en Europe ou au Maroc qui les ont rendues obligatoires pour les sociétés cotées et pour les établissements de crédit (pour leurs comptes consolidés uniquement).

L’adoption d’un cadre comme celui des IFRS impose de fixer des délais raisonnables aux parties prenantes et un délai de plusieurs années est généralement prévu entre la publication des textes et leur application. En Europe, l’application des IFRS pour les sociétés cotées a ainsi été décidée par un règlement européen de 2002 pour une application effective à partir de 2005.

Dans ce contexte, le champ d’application des IFRS peut être limité aux comptes consolidés pour les groupes qui doivent en produire, aux institutions reconnues systémiques ainsi qu’aux sociétés cotées sur les marchés financiers. Le passage au référentiel IFRS implique, en premier lieu, de définir des modèles d’états financiers et de reporting périodiques à adresser au superviseur. En effet, le standard IFRS prévoit le type d’états financiers à produire (bilan, compte de résultat, variation des capitaux propres et flux de trésorerie) mais ne fournit pas de modèles d’états de synthèse lesquels peuvent toutefois être définis par les différentes juridictions dans le but i) de standardiser les règles de présentation et de rendre comparable l’information financière produite et ii) de prendre en compte la réalité des opérations effectuées au sein des juridictions respectives.

II - Le provisionnement du risque de crédit

La crise financière de 2008 a mis en lumière, notamment en Europe du Sud, l’importance de la normalisation comptable pour les banques dans la mesure où l’absence de déclassement et de provisionnement des créances en souffrance peut conduire à ne pas fournir une vision correcte de la situation de solvabilité des banques.

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2 La correcte mesure du risque de crédit est fondamentale pour apprécier la solvabilité d’une banque et au-delà évaluer la sécurité du système bancaire. Dans ce contexte, il est important que les règles applicables en matière de déclassement et de provisionnement des créances soient pertinentes et correctement appliquées. Sur le plan international, la notion la plus répandue est celle de créances non performantes (Non Performing Loans-NPL) pour qualifier les actifs dont le recouvrement n’est pas assuré et pour lesquels un risque de perte existe. La notion de créances en souffrance présente dans de nombreux pays francophones peut être considérée comme équivalente à celle de créances non performantes.

Nombre de pays francophones se singularisent par le fait que la définition des règles comptables applicables au secteur bancaire est du ressort du régulateur bancaire qui est toujours la banque centrale. Cette situation inspirée du modèle français perdure alors même que, depuis 1996, la Banque de France a perdu le pouvoir de régulation comptable lequel a été transféré au Comité de Règlementation Comptable devenu aujourd’hui Autorités des Normes Comptables (ANC) qui est compétente pour l’ensemble des secteurs économiques. Au contraire, l’acte uniforme en matière de comptabilité (OHADA) en Afrique qui regroupe 17 pays francophones a confirmé le fait que les dispositions générales comptables ne s’appliquaient pas à certains secteurs qui relevaient de dispositions spécifiques (outre les établissements de crédit, sont concernés les institutions de microfinance, le secteur du marché financier, les sociétés d’assurance ainsi que les fonds de pension et les sociétés de prévoyance).

Les textes comptables des pays d’Afrique francophone, qui sont assez proches entre les différentes juridictions, ont été mis à jour ces dernières années (2016 pour l’UMOA, 2018 pour la CEMAC) afin de converger vers les pratiques internationales. La notion de créance restructurée et la nécessité de suivre pendant une certaine durée les encours ayant fait l’objet d’aménagements sous la forme, par exemple, d’un allongement de la maturité, d’une réduction de taux ou de montant à rembourser a été introduite. De même, le déclassement vers les encours en souffrance survient à l’issue de trois impayés (contre généralement six auparavant) à l’exception des créances sur l’Etat qui font généralement l’objet de règles particulières (passage en encours en souffrance plus tardif et/ou provisionnement facultatif).

Concernant le provisionnement, les règles comptables prévoient généralement des taux de provisionnement forfaitaires dépendant de la durée depuis laquelle la créance est en souffrance et des garanties disponibles. Les textes comptables de la plupart des pays d’Afrique francophone sont très conservateurs en matière de provisionnement et prévoient des taux élevés dans des délais généralement courts (une créance non garantie doit souvent être provisionnée à l’issue d’un délai d’un an). Cette approche pose cependant la question de son application concrète par les banques qui peuvent avoir tendance à ne pas appliquer les règles de déclassement de façon rigoureuse ou faire valoir l’existence de garanties dont la réalité est discutable. Dans ce domaine, la convergence des règles prudentielles et comptables peut être utile dans la mesure où les critères d’éligibilité des garanties étant précisément définies dans Bâle III, leur reprise dans le domaine comptable pourrait permettre de réduire les possibilités d’arbitrage et d’interprétation de la part des banques en matière de provisionnement.

III - Le cas de la norme relative aux instruments financiers : IFRS 9

Concernant les instruments financiers, la convergence des référentiels comptables et prudentiels intervenue au niveau international avec la parution d’IFRS 9 peut contribuer au renforcement de la stabilité financière. Alors qu’IAS 39 avait mis l’accent sur la prévention du lissage des résultats par les banques par la politique de provisionnement en subordonnant les

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3 dotations à des évènements réellement observables, la crise financière de 2008 a mis en lumière la nécessité de mettre en place un provisionnement plus précoce et de mettre fin à la situation consistant à accumuler dans les résultats des primes de risque prélevées aux emprunteurs sans simultanément constituer de provisions des lors que ne survient aucun sinistre et ce même en cas de montée significative des risques.

Les régulateurs bancaires, au premier rang desquels le Comité de Bâle, ont accueilli favorablement ces évolutions qui permettent une reconnaissance plus précoce du risque de crédit.

Cette convergence des référentiels comptables et prudentiels rend désormais plus opportune l’adoption d’un référentiel comptable qui prévoit d’intégrer la notion de pertes attendues comme c’est le cas aujourd’hui avec la norme IFRS 9 qui couvre une part essentielle des activités bancaires.

La prise en compte des modèles d’activité (business model) concourt également à limiter la procyclicité des normes internationales remises en cause par les sommets du G20 en 2009 et ne pas avoir un recours systématique à la Fair Value.

Les principales dispositions d’IFRS 9

Les discussions intervenues entre 2009 et 2014 concernant l’élaboration de la nouvelle norme IFRS 9 ont abouti à un modèle à trois niveaux qui prévoit :

- de comptabiliser dans un premier temps les pertes susceptibles de survenir à un horizon de 12 mois qui viennent ainsi compenser les primes de risque collectées lors de la période ;

- de calculer la perte probable à terminaison pour les prêts dont le risque s’est accru depuis la mise à disposition. Dans ce cas, il est probable que la prime de risque perçue par le prêteur ne permettra pas de couvrir la perte économique susceptible de survenir et qu’il convient de provisionner une partie du principal de la créance ;

- le provisionnement de la perte attendue pour les dossiers pour lesquels un risque de non- recouvrement a été identifié ; la perte probable est alors évaluée en fonction des flux de recouvrement attendus qu’il convient d’actualiser (au taux d’intérêt effectifs).

Une nouveauté importante d’IFRS 9 réside dans le fait que les établissements doivent identifier lors de chaque arrêté les dossiers dont le risque s’est significativement accru depuis leur mise en place. C’est le point clé du nouveau cadre qui constitue le facteur déclenchant le passage d’un régime de provisionnement des pertes à un horizon d’un an à celui de l’enregistrement des pertes a terminaison. La norme cite un certain nombre de facteurs non exhaustifs tels des changements de tarification du spread de crédit, des baisses de prix de marché d’instruments relatifs au débiteur, la dégradation des ratings externes et internes, la détérioration d’indicateurs financiers, la suppression d’un support financier important, l’inscription en Watch List. En revanche, le caractère non linéaire du risque associé aux différents niveaux de probabilités de défaut n’est pas pris en compte alors que la détérioration significative du risque devrait logiquement s’apprécier plus strictement pour les crédits de moins bonne qualité que pour les crédits les mieux notés.

Un autre changement porte sur la prise en compte de l’état de la conjoncture économique et de l’éventualité d’une récession qui rapproche IFRS 9 du référentiel américain et abouti à devoir établir la corrélation entre défaut de crédit et contexte économique général ce qui n’est pas forcément aisé à établir.

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4 L’intégration des dispositions d’IFRS 9 est très novatrice et d’application potentiellement délicate dans des pays comme ceux de l’Afrique sub-saharienne. Dotées du pouvoir de normalisation comptable, les autorités des pays francophones ont la responsabilité de définir le cadre d’application de la norme IFRS 9 mais n’ont à ce stade pas pris d’initiative dans ce domaine. Au contraire, dans les pays anglophones qui appliquent déjà le cadre IFRS, l’adoption de la nouvelle norme a nécessité de revoir le format de l’état de calcul de l’exigence de fonds propres ainsi que les états financiers qui doivent être transmis à la banque centrale. Des Guidance notes fournissent de nouveaux états financiers et prudentiels prenant en compte des provisions sur les actifs non performants en distinguant ceux qui ont connu une dégradation significative depuis leur origination de ceux pour lesquels aucune dégradation significative n’est intervenue. Les textes réglementaires prévoient aussi un régime de transition visant à étaler sur le plan prudentiel sur une durée de cinq ans l’impact du montant additionnel de provisions enregistrées sur le plan comptable. Parfois, comme au Kenya (novembre 2017), l’institut des experts comptables a publié un document sur le nouveau cadre comptable et de reporting.

IFRS 9 s’inscrit dans une approche classique du risque de crédit dans laquelle les pertes attendues sont le produit de la probabilité de défaut, de la perte en cas de défaut et de l’exposition au moment du défaut (EL= PD*LGD * EAD). L’enjeu principal pour les banques concernées par la mise en œuvre d’IFRS 9 est donc de pouvoir estimer des probabilités de défaut ainsi que le niveau de pertes enregistrées lors de la survenance des défauts. Si les filiales des groupes bancaires actifs à l’échelle mondiale peuvent bénéficier des méthodologies internes ainsi que des potentialités permises par des systèmes de gestion la plupart du temps sophistiqués, les banques locales et même celles appartenant à des groupes bancaires africains sont inévitablement confrontées à des difficultés de disponibilité des données pour estimer les paramètres nécessaires. Des travaux importants sont donc nécessaires dans ce domaine sachant qu’ils peuvent contribuer à améliorer très sensiblement le mode de gestion des banques. Pour ces raisons, l’adoption des normes IFRS par les groupes bancaires pour leurs seuls comptes consolidés paraît plus réaliste et devrait poser moins de difficultés (en particulier pour les entités des groupes qui établissent déjà des comptes en IFRS pour les besoins de leur groupe d’appartenance.

En tout état de cause, la mise en place d’IFRS 9 requiert que les superviseurs définissent des exigences minimales (définies au niveau international par le texte BCBS (Guidance on Credit Risk and Accounting for Expecting Credit Losses). On peut souligner ici que les dispositifs de provisionnement forfaitaires en fonction de l’ancienneté des encours non-performants s’éloignent sensiblement des dispositions des normes IFRS qui prévoient d’évaluer les dépréciations à partir des flux futurs de trésorerie. Dans un autre ordre d’idées, les superviseurs bancaires doivent adapter leurs exigences sur la gestion des risques pour les aligner sur l’approche des pertes attendues d’IFRS 9.

En général, peu de pays en 2020 avaient poussé la démarche à ce point et de nombreux textes restent à établir.

Les études d’impact quantitatif doivent évaluer les conséquences de l’introduction d’un modèle de pertes attendues. Sur la base des résultats obtenus, il peut être prévu l’instauration d’une période intérimaire pendant laquelle le surplus éventuel de provisions à imputer sur les fonds propres sera étalé dans le temps sur une période maximale de cinq ans comme le prévoit le texte du Comité de Bâle de mars 2017 (Regulatory treatment of accounting provisions – interim approach and transitional arrangement).

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5 Les développements qui suivent exposent les principales exigences introduites par la norme IFRS 9 pour les banques et les superviseurs et la mettent en perspective avec les dispositions prudentielles de Bâle II/Bâle III.

IV - Les principales exigences d’IFRS 9

Les dispositions d’IFRS 9 se rapprochent de celles de l’approche dite des notations internes de Bâle II/Bâle III. En effet, dans les deux cas, il s’agit de déterminer un montant de pertes attendues sur un montant d’expositions de crédit. Il est, pour cela, nécessaire de calculer des probabilités de défaut et des pertes en cas de défaut qui sont les paramètres permettant d’évaluer le montant des provisions à constituer (pour IFRS 9) et le montant minimum de fonds propres (pour Bâle II). Même si les deux démarches sont convergentes, des différences sensibles existent cependant concernant les modalités d’application de deux normes.

Les exigences quant à la qualité des données et la profondeur des historiques sont généralement moins exigeantes que pour les approches Notations Internes définies dans les accords de Bâle II/ Bâle III.

• Pour la détermination de la probabilité de défaut, IFRS 9 retient une approche de type « point in time » qui ne requiert pas forcément de prendre en compte des tendances longues

appréciées tout au long d’un cycle économique. Les exigences de profondeur des historiques de données peuvent donc être sensiblement allégées par rapport à ce qui existe sur le plan prudentiel. Ce point est essentiel car il permet, concernant les conditions préalables à respecter, de ne pas strictement conditionner l’adoption d’IFRS 9 à l’existence de modèles basés sur les Notations Internes pour déterminer les exigences de fonds propres.

• Pour la détermination de la perte en cas de défaut (LGD en anglais), IFRS 9 n’exige pas, non plus, formellement de prendre en compte la totalité de la longueur du cycle dans une

perspective de prudence alors que Bâle II, à travers la notion de LGD downtown recherche à ce que les valeurs les plus critiques observées au cours du cycle soient intégrées dans les estimations.

A contrario, certaines dispositions d’IFRS 9 sont novatrices et se démarquent du cadre de Bâle II/ Bâle III. La principale différence concerne l’approche prospective (forward looking).

Celle-ci a un biais conservateur dans les normes prudentielles ce qui n’est pas le cas dans le cadre IFRS. Cependant, il est essentiel que les approches adoptées soient documentées et dûment justifiées par l’établissement surtout si elles aboutissent à considérer que les taux de certains paramètres peuvent être améliorés au motif que l’on se situe en bas de cycle et que la dimension prospective justifie selon l’établissement d’être moins conservateur que certaines valeurs calculées.

Le tableau ci-après reprend quelques différences entre les approches règlementaires et comptables concernant la détermination des paramètres. D’autres différences pourraient être mentionnées mais dépassent, à ce stade, les enjeux de la présente mission.

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6 Cadre prudentiel (Bâle II/Bâle III) Cadre comptable (IFRS 9)

Probabilité de défaut

• Estimation de la probabilité de défaut pour chaque niveau de note.

• Définition précise du défaut (mais différences entre les approches standard et Notations Internes)

• Existence de valeur minimales (Floor) pour certains types d’expositions.

• Prise en compte des moyennes de long terme (estimation Through the cycle)

• Pas de disposition explicite concernant la notation

• Définition harmonisée des actifs non performants est recherchée

• Pas de valeur minimum (Floor)

• Les tendances passées de long terme ne doivent pas être prises en compte si elles ne permettent pas d’appréhender le futur.

• Estimation courante (point in time)

• Prise en compte de la situation macroéconomique.

Perte en cas de défaut

• Garanties acceptées sont limitées,

• Coûts directs et indirects

• Existence de valeurs minimales (floor)

• Ajustements pour prendre en compte les effets de cycle (Downturn adjustment)

• Prise en compte de l’incertitude

• Tout type de garanties admissibles a priori

• Coûts directs seulement pris en compte

• Pas de palier minimum (floor)

• Pas d’ajustement au titre du cycle (pas de downturn adjustment)

• Pas de prise en compte de l’incertitude

V - La norme IFRS suppose la mise en œuvre d’un dispositif rigoureux de mesure interne des risques de crédit

La première condition pour mettre en œuvre la norme IFRS 9 réside dans l’existence d’un dispositif de mesure du risque de crédit permettant d’identifier différentes catégories de risque. Ce système de mesure des risques consiste, tout d’abord, à identifier des portefeuilles homogènes (segmentation). A minima, cette première étape doit aboutir à distinguer les activités avec les particuliers de celles liées aux entreprises et pourra déboucher, le cas échéant, sur des segmentations plus fines selon la taille et la complexité du modèle d’activité de la banque (par exemple, PME versus grandes entreprises, secteurs d’activité…). En termes de périmètre, la norme IFRS ne prévoit pas d’exemptions et toutes les activités de crédit des banques ont vocation à être couvertes par ce dispositif. Dans un second temps, les banques doivent ventiler leurs contreparties dans des classes de risque à l’intérieur d’un même segment. Le stade ultime d’un tel système de mesure des risques est un système de notation interne dit bâlois intégrant le calcul de probabilités de défaut (PD), pertes en cas de défaut (LGD) et expositions au défaut (EAD).

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7 Les systèmes de mesure des risques peuvent être répartis en trois catégories.

• L’utilisation exclusive de modèles statistiques est adaptée aux portefeuilles de grande taille pour lesquels des traitements de masse sont requis et qui ne nécessitent pas d’intervention humaine. Ces systèmes sont particulièrement utilisés sur les segments de clientèles personnes physiques voire PME qui se caractérisent par un volume important de contreparties aux comportements relativement homogènes.

• A l’opposé, se trouvent les modèles à dire d’expert purs où un analyste mesure le risque sur la base d’une approche multicritères de nature quantitative et/ou qualitative. Ces approches sont le plus souvent utilisées pour les portefeuilles de taille réduite et/ou à faible taux de défaut pour lesquels les techniques quantitatives rendent difficiles la discrimination des contreparties en termes solvabilité.

• Enfin, les modèles mixtes reposant sur un outil d’aide à la décision encadrant le dire d’expert combinent une approche quantitative et une intervention humaine à dire d’expert. Ces modèles sont assez largement utilisés pour les portefeuilles d’entreprises où à partir d’une note calculée, l’analyste a la faculté de modifier la classification initialement déterminée sur la base d’informations additionnelles (relatives à l’environnement, la stratégie, la position concurrentielle par exemple). L’intervention humaine dans un tel processus suppose une validation par un tiers relevant en principe d’une ligne hiérarchique différente.

Le nombre de classes de risque minimum est mentionné dans les accords de Bâle II/III mais n’est pas précisé dans IFRS 9. Alors que les banques doivent disposer d’un système de notation d’au moins sept classes pour les contreparties saines et une pour les contreparties en défaut dans Bâle II/III, IFRS n’impose pas d’exigences minimales en la matière. A cet égard, la mise en œuvre d’IFRS 9 nécessite que la BCEAO recueille des informations sur les pratiques de classification des risques de crédit dans la région et apprécie si la fixation d’un nombre minimum de classes de risques (selon les segments) est opportune, par exemple, dans la perspective à plus long terme de l’adoption d’une méthode de calcul des exigences de fonds propres basées sur les notations internes.

Les changements de catégories constituent un point d’attention majeur compte tenu de leur incidence sur le niveau de provisionnement. Ainsi, les établissements doivent définir les critères permettant d’identifier les situations dans lesquelles un débiteur a vu son risque de crédit augmenter significativement entre la date d’octroi et la date d’établissement des comptes au format IFRS. En effet, ces situations doivent entraîner le transfert des expositions concernées vers le Stage 2. Ce passage du Stage 1 au Stage 2 aura pour conséquence une modification du mode de détermination de la dépréciation à comptabiliser générant une augmentation de cette dernière. De la même manière, l’identification des défauts doit conduire à un transfert en Stage 3 et à la comptabilisation d’une dépréciation pour pertes avérées (comme à l’heure actuelle). Dans tous les cas, les correctes classifications dans les différents niveaux supposent un dispositif de mesure des risques rigoureux.

Le calcul des pertes attendues (Stages 1 et 2) ou avérées (Stage 3) suppose le respect de conditions minimales. Pour chaque classe de risque des différentes catégories homogènes de contrepartie, il faut idéalement estimer (i) la probabilité de défaut en calculant le rapport entre le nombre observé de défaut par le nombre de débiteurs observé au début de la période et (ii) la perte en cas de défaut sur la base des flux de recouvrement observés sur des défauts passés.

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8 Pour le Stage 1 de la norme IFRS 9, le calcul de la probabilité de défaut se fait sur un horizon d’un an. En revanche, pour les encours ayant connu une dégradation significative du risque (stage 2), il faut, au contraire, déterminer des pertes attendues à maturité ce qui n’est pas forcement aisé et peut se heurter à un manque de disponibilité des données notamment pour les années les plus récentes. Le calcul des taux de défaut se fait systématiquement à partir du nombre des débiteurs (et non des encours).

La détermination de la perte en cas de défaut se heurte fréquemment à des difficultés pour disposer des données relatives au recouvrement et, partant de là, aux pertes constatées.

Des coefficients forfaitaires (par exemple, ceux proposent dans la méthode de Bâle II/III) peuvent être utilisés, par exemple, au motif de la disproportion des coûts associés à la détermination du paramètre mais il importe de s’assurer de leur caractère conservateur.

Les résultats des modèles de pertes attendues doivent être périodiquement testés pour s'assurer de leur pertinence de la méthodologie mise en œuvre et du caractère raisonnable des estimations réalisées, de la robustesse du moteur de calcul et de la méthodologie. La fonction de gestion des risques doit s’assurer que la méthodologie employée assure une correcte discrimination et l’absence de phénomène de concentration des contreparties dans certaines classes de risque.

Concernant la correcte discrimination, il faut s’assurer que les notations les plus favorables sont sur la base des observations réalisées, effectivement associées à des taux de défaut plus faibles. Dans le cas contraire, cela signifie que le système de mesure des risques ne parvient pas à correctement discriminer les contreparties par niveau de risque.

Les concentrations excessives correspondent à un phénomène d’agglutination des observations sur certaines classes de risques. Ceci doit conduire l’établissement à rechercher si les contreparties ne doivent pas etre ventilées en une ou plusieurs classes de risque supplémentaires.

Le degré de sophistication des techniques utilisées doit être proportionnelle à la nature, la taille, la complexité et la matérialité des expositions de crédit des banques. À défaut de données suffisantes disponibles ou si ces données ne peuvent être collectées qu’à des coût jugés excessifs, la norme permet l’utilisation de méthodes moins élaborées mais nécessitant tout de même d’estimer des pertes attendues à un an et à maturité. Ainsi, par exemple, des matrices de transition (de Stage 1 à défaut ou de Stage 2 à défaut) peuvent être utilisées en complément des taux de provisionnement appliqués aux encours douteux existants (ex. : le provisionnement d’un actif classé en Stage 1 pourrait être égal au taux de passage en défaut à un an multiplié par le taux de provisionnement des encours en défaut). Toutefois, les établissements devront pouvoir démontrer la prise en compte d’une approche prospective (forward looking) en s’appuyant par exemple sur des scénarios.

Le risque de modèle doit faire l’objet d’une évaluation par chaque établissement pour tenir compte de son contexte et de son environnement. Cette évaluation qui doit etre partagée avec l’ensemble des parties prenantes doit conduire à fixer des marges à titre de conservation pour prendre en compte les incertitudes associées aux estimations effectuées.

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9 VI - La mesure interne des risques de crédit doit être encadrée par une gouvernance

appropriée

La gouvernance du système de mesure interne du risque de crédit doit faire l’objet d’un dispositif structuré et formalisé. Le rôle de la fonction de gestion des risques doit être essentiel notamment concernant les règles de validation des différents travaux relatifs à la mise en place et au fonctionnement des mesures du risque de crédit. En outre, l’implication des organes exécutifs et délibérant doit être prévue et effective ainsi que celle des fonctions d’audit interne et externe. Il est également important que les banques rendent obligatoire l’usage de la mesure interne du risque de crédit par les services de la banque et favorise l’insertion opérationnelle (use test) dans les activités de la banque.

La norme IFRS 9 repose sur la disponibilité de données nombreuses relatives au risque de crédit. Dans ce contexte, le superviseur doit exiger des banques qu'elles s’assurent de manière permanente de la qualité et de l’intégrité de toutes les données qui sont nécessaires à la détermination des pertes attendues. Pour cela, les banques doivent développer et mettre en œuvre des standards et des politiques adaptées pour garantir l’exhaustivité visant à assurer la qualité des données, notamment pour celles qui alimentent les modèles de calcul de pertes attendues. Les établissements de crédit doivent donc développer des standards de qualité et des politiques concernant les données utilisées pour le calcul des pertes attendues. Ces données doivent etre collectée sur une base continue et leur complétude doit être vérifiée pour alimenter les modèles de calcul.

Les procédures d’archivage des données doivent permettre de retracer toutes les évolutions intervenues concernant le système de mesure interne du risque de crédit. La gestion des données est un élément clé pour permettre un fonctionnement efficace et performant du système de mesure interne du risque de crédit. Dans ce domaine, il n’importe pas seulement que les informations nécessaires à la détermination des paramètres existent mais qu’elles soient aisément récupérables et rendues disponibles pour les besoins des calculs des pertes attendues.

Les coûts de la maintenance et d’évolution du système de mesure interne du risque de crédit ne doivent être négligés. Le système de mesure interne du risque de crédit une fois installé doit être alimenté par de nouvelles données et sa performance doit être régulièrement testée dans le cadre des exercices de back testing. Dans ces conditions, les banques doivent disposer des moyens adéquats pour assurer le fonctionnement et l’évolution du système de mesure interne du risque de crédit ainsi que le rafraîchissement régulier des données.

VII - Les défis pour le superviseur

De manière générale, le superviseur n’est pas destiné à être en charge de la validation des modèles de détermination des pertes attendues. Par contre, il doit évaluer la robustesse de la méthodologie et l’indépendance de l’exercice de validation ; il doit aussi tester le dispositif de gestion des risques de l’établissement et sa conformité par rapport aux standards règlementaires.

Il incombe au superviseur d’exiger des établissements la mise en place de dispositifs assurant la qualité des estimations de pertes attendues. Pour se faire, le superviseur peut fixer un certain nombre d’exigences minimales à respecter pour s’assurer d’un niveau minimum de standardisation et de pertinence des estimations produites. Les exigences minimales doivent couvrir

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10 de nombreux aspects quantitatifs et qualitatifs (documentation, méthodologie, gouvernance, intégrité et qualité des données, hypothèses, données utilisées et produites, conception et contrôles du modèle, back testing visant à s’assurer de la qualité et de la stabilité du modèle). Concernant en particulier la gouvernance, il importe de définir la fréquence et le processus de validation du modèle de risque ainsi que les responsabilités des acteurs.

Le superviseur doit développer ses capacités techniques pour mettre en œuvre des contrôles sur des modèles utilisés pour déterminer les pertes attendues des établissements de crédit. Afin d’être en mesure d’évaluer les travaux réalisés par les établissements assujettis, le superviseur doit constituer et enrichir son capital technique afin de vérifier les travaux réalisés et fournir, si possible, des conseils techniques en matière de surveillance pour garantir leur mise en œuvre efficace. Comme point de départ, le superviseur doit recenser la liste des modèles de pertes attendues utilisés par les établissements de crédit afin d’assurer la formation future de ses superviseurs, en particulier, dans le cadre des missions de contrôle sur place,

Les partenariats avec la profession de l'audit externe paraissent nécessaires pour s’assurer la mise en œuvre efficace d'IFRS 9 par les établissements assujettis. L'audit externe doit garantir que les entités réglementées produisent des estimations de pertes attendues guidées par la neutralité et la pertinence. Il importe toutefois que les superviseurs et l’audit externe restent dans leurs champs de responsabilité respectifs. Le superviseur doit également examiner les résultats des auditeurs externes dans le cadre de son évaluation des risques propres à chaque établissement.

Le superviseur doit adapter et revoir son système de supervision par les risques afin d’évaluer le dispositif de calcul des pertes attendues des établissements de crédit concernés. A minima, le processus de supervision doit viser à évaluer dans un contexte règlementaire dans lequel les pertes attendues sont applicables la pertinence des politiques de gestion du risque de crédit des établissements de crédit. Il s’agit, en premier lieu, de valider la conformité des établissements avec les règles de classification et de transfert entre les différentes catégories. Le superviseur doit également évaluer les hypothèses des méthodologies de calcul utilisées, identifier et vérifier les données entrant dans la méthodologie de calcul, vérifier et analyser les résultats du modèle, évaluer la pertinence et l’indépendance du processus de validation interne et estimer l’appropriation du dispositif de gestion des risques ainsi que son interaction avec l’appétit pour le risque et le processus d’adéquation des fonds propres de l’établissement. Les conclusions de ces évaluations doivent permettre de guider les décisions de supervision notamment en ce qui concerne les contrôles sur place à effectuer. La première application du modèle de pertes attendues doit normalement faire l’objet d’un contrôle sur place par le superviseur.

La coopération avec les autorités de contrôle étrangères dont les groupes ont des filiales dans l’UMOA doit également être encouragée. Les phénomènes d’interdépendance et les potentiels effets de contagion entre les entités d’un même groupe nécessitent de disposer d’une vision élargie des entités consolidées. Cette vision plus large est généralement obtenue grâce aux collèges de supervision ou à la relation Home-host entre les superviseurs. De façon générale, il est essentiel qu’au regard de l’importance des groupes dans l’UMOA, existe une collaboration continue sur les questions de supervision comme le niveau des pertes attendues.

La mise à jour des textes prudentiels relatifs à la gestion des risques publiés en d’août 2018 doit être effectuée pour intégrer les dispositions relatives aux pertes attendues. Les

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11 dispositions applicables doivent permettre notamment de couvrir les modalités d’évaluation et de validation du risque de crédit, les mécanismes de contrôle interne à mettre en place et les règles de gouvernance à appliquer afin de garantir l’adéquation du dispositif de pertes attendues, l'adoption et la documentation de méthodologies, l’efficacité du processus de notation du risque de crédit, les définitions du défaut et des indicateurs de dégradation significative, le choix et le test des indicateurs prospectifs, les décotes à appliquer aux valeurs des sûretés, etc.

Les impacts macro-prudentiels doivent également faire l’objet d’une analyse attentive.

L’augmentation des provisions pour pertes attendues peut avoir des effets sur les modèles d’activité des banques et inciter à se positionner sur des activités dont les actifs présentent de faibles risques de crédit. Dans ce contexte, une aversion aux expositions présentant des risques élevés comme le financement des entreprises en phase de démarrage est susceptible de survenir. Pour minimiser de possibles effets inattendus sur le financement de l’économie, le recours à des outils macro- prudentiels pourrait être étudiés comme, par exemple, minimiser la concentration sur des actifs à faible risque.

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