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JACQUESMORLAINE EIFFEL. PIERRE BELFOND 3 bis, passage de la Petite-Boucherie Paris 6e

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TOUR

LA

EIFFEL

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JACQUES MORLAINE

L A

T O U R E I F F E L

P I E R R E B E L F O N D 3 bis, passage de la Petite-Boucherie

Paris 6e

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Iconographie

Tous les documents proviennent d'une collection particulière à l'exception de ceux des pages suivantes :

A. Hallery : 8, 128, 151.

S. Lido : 10, 165, 169, 174, 175, 178, 183.

Roger-Viollet : 83, 86, 91, 110, 138.

Servain : 160.

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Editions Pierre Belfond

3 bis, passage de la Petite-Boucherie 75006 Paris

ISBN 2.7144.1151.7

© Belfond 1978

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NON, LA TOUR EIFFEL N'EST PAS UN CHÂTEAU BRANLANT

La Presse, ces derniers temps, a manifesté bruyam- ment son inquiétude quant à la solidité de la Tour de M. Eiffel. On a même posé la question : « Va-t- elle mourir ? »

Non, elle va avoir bientôt quatre-vingt-dix ans, mais cette vieille dame se porte comme un charme. Gustave Eiffel a même écrit dans son livre édité en 1900 que, bien entretenue, elle serait immortelle.

A ce sujet, un hebdomadaire a cité une note administra- tive du 13 février 1970, paraît-il, note dont on ne retrouve la trace ni à la tour Eiffel ni à l'Hôtel de Ville. D'où vient donc cette note mystérieuse ?

On a écrit qu'il fallait renforcer l'ossature.

De quoi s'agit-il ? Des grandes poutres (arbalétriers), 4 par pilier, donc 16 jusqu'au 2 étage et 12 après.

Elles sont impeccables, entretenues intérieurement et extérieurement. C'est surtout l'intérieur qui risque de se corroder par suite de trous d'homme par lesquels l'eau peut entrer.

Mais elles sont faites de telle sorte qu'un homme peut

entrer et se mouvoir à l'intérieur pour en assurer l'entre-

tien.

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Trou d'homme aménagé dans l'arbalétrier pour permettre l'entretien.

On s'inquiète de l'escalier de secours qui relie le 2e au 3 étage.

Il est en mauvais état, c'est vrai, mais sa reconstruc- tion a déjà commencé et il faut plusieurs hivers encore pour terminer ce travail. En effet, à cause des visiteurs de l'été, les gros travaux et la peinture générale ne peuvent être exécutés que pendant la mauvaise saison (cinq mois par an).

Reconstruire certaines plates-formes?

Pour quoi faire ? Elles ont été refaites complètement durant la dernière décennie. Elles sont entièrement métalliques et en excellent état. En vingt-cinq ans, la Société de la tour Eiffel a fait progressivement 115 mil- lions de francs lourds de gros travaux, non compris la peinture.

Le point le plus important : remplacer l'ascenseur hydrau- lique qui relie le 2 au 3 étage. Est-il à remplacer?

Il date de 1889, c'est-à-dire de l'origine du monument.

Il ne présente aucun danger. Ses cabines sont modernes et nouvellement installées durant l'hiver 1976-1977 (coût : 3,5 millions de francs lourds).

L'établissement d'un frein de sécurité en 1973, en cas de rupture de câble, assure une sécurité absolue. Ceci a repré- senté une dépense de 3 millions de francs lourds en 1973.

Un journaliste a prétendu que cet ascenseur a été arrêté il y a six ans ! ce qui est faux. Il est arrêté chaque année pen- dant cinq mois à cause de son mécanisme hydraulique situé en plein air, donc exposé aux intempéries et par conséquent au gel.

La Société de la tour Eiffel a consulté plusieurs entre- prises pour la reconstruction de cet ascenseur. Une seule a accepté d'envisager de faire ce travail et a fourni un devis de l'ordre de 35 à 40 millions de francs lourds.

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Graissage des ascenseurs.

Le financement.

La Société de la tour Eiffel finance 6 millions nouveaux de gros travaux chaque année mais elle ne peut pas assu- rer le financement total de cet ascenseur en une seule fois. Elle pourrait le faire au moyen d'un emprunt. Mais compte tenu que sa concession actuelle de la Ville de Paris se termine dans deux ans ( 1 janvier 1980), elle n'a pas actuellement contacté de prêteurs.

Par contre, elle a demandé en 1975 à la Ville de Paris le renouvellement anticipé de la concession afin de lui per- mettre de trouver des prêteurs. Elle souhaiterait de la Ville de Paris une concession de vingt à vingt-cinq ans, afin de pouvoir amortir aisément un emprunt de quinze ans par exemple.

Rectification de chiffre.

En 1976, la Société de la tour Eiffel a donné à la Ville de Paris, près de 6 millions en numéraire sur les recettes.

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Elle a dépensé plus de 6 millions en gros travaux, ce qui fait 12 millions. La même année, l'État a prélevé 3 mil- lions et demi d'impôts, soit 15 millions et demi et non 27 millions comme il a été écrit dans L'Express.

Le gaz.

C'est à la demande du Gaz de France que le gaz a été installé du temps de la concession André Pignarre dans les restaurants de la tour Eiffel afin de faire un exemple.

Ces installations sont vérifiées régulièrement par le Gaz de France. Elles ne présentent aucun risque d'autant plus que tout est en plein air.

La tour Eiffel est-elle une affaire?

Elle le fut la première année. Ce pourrait être encore une bonne affaire si l'État et la Ville de Paris ne prenaient pas plus de la moitié des recettes. Les actionnaires qui n'ont pas touché de dividendes en 1974 et 1975 ont reçu cette année 7,50 F par action !

Voici quelques précisions répondant aux attaques récentes de certains journaux. Mais la tour Eiffel n'a- t-elle pas toujours été attaquée injustement ? Même avant d'être terminée. En 1887, déjà, une pétition, signée par les plus grands noms de l'époque, avait tenté de compromettre sa construction. Voici ce document :

« Nous venons, écrivains, peintres, sculpteurs, archi- tectes, amateurs passionnés de la beauté jusqu'ici intacte de Paris, protester de toutes nos forces, de toute notre indi- gnation, au nom du goût français méconnu, au nom de l'art et de l'histoire française menacés, contre l'érection, en plein cœur de notre capitale, de l'inutile et monstrueuse tour Eiffel que la malignité publique, souvent empreinte de bon sens et d'esprit de justice, a déjà baptisée du nom de tour de Babel.

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« Sans tomber dans l'exaltation du chauvinisme, nous avons le droit de proclamer bien haut que Paris est la ville sans rivale dans le monde. Au-dessus de ses rues, de ses boulevards élargis, le long de ses quais admirables, au milieu de ses magnifiques promenades surgissent les plus nobles monuments que le genre humain ait enfantés.

« L'âme de la France, créatrice de chefs-d'œuvre, res- plendit parmi cette floraison auguste de pierres. L'Italie, l'Allemagne, les Flandres, si fières, à juste titre, de leurs héritages artistiques, ne possèdent rien qui soit comparable au nôtre et, de tous les coins de l'univers, Paris s'attire la curiosité et l'admiration.

« Allons-nous donc laisser profaner tout cela?

« La Ville de Paris va-t-elle donc s'associer plus long- temps aux baroques, aux mercantiles imaginations d'un constructeur de machines pour s'enlaidir irréparablement et se déshonorer?

« Car la tour Eiffel, dont la commerciale Amérique ne voudrait pas, c'est, n'en doutez pas, le déshonneur de Paris ! Chacun le sait, chacun le dit, chacun s'en afflige pro- fondément, et nous ne sommes qu'un faible écho de l'opi- nion universelle et légitimement alarmée.

« Enfin, lorsque les étrangers viendront visiter notre Exposition, ils s'écrieront étonnés : Quoi ! C'est cette hor- reur que les Français ont trouvée pour nous donner une idée de leur goût si vanté? Ils auraient raison de se moquer de nous, parce que le Paris des gothiques sublimes, le Paris de Jean Goujon, de Germain Pilon, de Puget, de Rude, de Barye, etc., sera devenu le Paris de M. Eiffel.

« Il suffit d'ailleurs, pour se rendre compte de ce que

nous avançons, de se figurer une tour vertigineusement

ridicule, dominant Paris, ainsi qu'une noire et gigantesque

cheminée d'usine, écrasant de sa masse barbare : Notre-

Dame, la Sainte-Chapelle, la tour Saint-Jacques, le Louvre,

le dôme des Invalides, l'Arc de triomphe, tous nos monu-

ments humiliés, toutes nos architectures rapetissées, qui

disparaîtront dans ce rêve stupéfiant. Et, pendant, vingt

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ans, nous verrons s'allonger sur la ville entière, frémis- sante encore du génie de tant de siècles, comme une tache d'encre, l'ombre odieuse de l'odieuse colonne de tôle bou- lonnée.

« C'est à vous qui aimez tant Paris, qui l'avez tant embelli, qui l'avez tant de fois protégé contre les dévasta- tions administratives et le vandalisme des entreprises industrielles, qu'appartient l'honneur de le défendre une fois de plus.

« Nous nous remettons à vous du soin de plaider la cause de Paris, sachant que vous y dépenserez toute l'énergie, toute l'éloquence que doit inspirer à un artiste tel que vous l'amour de ce qui est beau, de ce qui est grand, de ce qui est juste... Et si notre cri d'alarme n'est pas entendu, si nos raisons ne sont pas écoutées, si Paris s'obstine dans l'idée de déshonorer Paris, nous aurons du moins, vous et nous, fait entendre une protestation qui honore. »

Cette lettre, adressée en février 1887 à M. Alphand, directeur général des Travaux de l'Exposition de 1889, était signée de Charles Gounod, Charles Garnier, Victo- rien Sardou, Eugène Guillaume, Alexandre Dumas, Fran- çois Coppée, Leconte de Lisle, Daumais, Sully Prud- homme, Delaunay, Vaudremer, G.-J. Thomas, Guy de Maupassant, etc.

M. Alphand transmit cette lettre à M. le ministre du Commerce, Edouard Lockroy, qui lui envoya en retour une autre lettre, dont voici la conclusion :

« Ce que je vous prie de faire, c'est de recevoir la protes- tation et de la garder. Elle devra figurer dans les vitrines de l'Exposition. Une si belle et si noble prose, signée de noms connus dans le monde entier, ne pourra manquer d'attirer la foule et, peut-être, de l'étonner. »

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Plan en élévation de la Tour par Gustave Eiffel.

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LE CLOU DE L'EXPOSITION DE 1889

L'histoire de la tour Eiffel est étroitement liée à celle de l'Exposition de 1889, exposition qui fut décidée, semble-t-il, pour des raisons de pure politique intérieure, et en vue même de résonances éventuelles sur le plan international.

C'est à Jules Ferry que revient la gloire de cette initia- tive qui devait avoir une répercussion mondiale. L'idée qu'il avait lancée à ce sujet, en 1878, fut adoptée le 8 no- vembre 1884, après six ans de réflexion, et c'est donc grâce à lui que fut signé, après accord du président de la République, Jules Grévy, le décret de Maurice Rouvier, ministre du Commerce, ordonnant l'ouverture d'une Exposition universelle du 5 mai au 31 octobre 1889.

Jules Ferry avait longtemps hésité pour cette Exposi- tion et il avait surtout longuement mûri l'idée de partici- pations étrangères. En effet, les puissances susceptibles - d'être représentées à Paris étaient presque toutes des monarchies, alors que la France était républicaine. Or, le thème de cette Exposition était précisément de commé- morer grandiosement le centenaire de la Révolution fran- çaise.

Mais comment faire une Exposition universelle sans participations étrangères ? Cela semblait impossible.

Son successeur, M. Brisson, ne s'intéressa guère à l'Exposition et ce n'est qu'avec l'accession à la prési- dence du Conseil de M. de Freycinet que l'on reparla sérieusement du projet.

Charles de Saulces de Freycinet, ingénieur, prit tout de

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suite à cœur de faire de ce projet une grande chose, une grande Exposition, la plus belle de tous les temps.

« Il faut trouver une idée, disait-il, quelque chose de sensationnel, d'attractif, de " jamais vu ", une grande idée », et il chargea Édouard Lockroy, ministre du Com- merce et de l'Industrie, de tirer des dossiers administra- tifs tous les projets en attente, toutes les idées qui dor- maient dans les tiroirs, même les plus farfelues, les plus extraordinaires, les plus extravagantes. Mais ces dossiers ne révélèrent rien d'extraordinaire, ni même de sérieux, et Lockroy fit convoquer M. Bourdais, architecte du Tro- cadéro, très en vogue à l'époque.

Bourdais présenta un projet de tour de pierre sur l'es- planade des Invalides qu'Édouard Lockroy confia à son collaborateur Pierre Vévard, le chargeant de l'étudier avec une commission de hautes personnalités scien- tifiques, qu'il lui demanda de nommer.

La réponse de Vévard ne se fit pas attendre, précise et négative... pour deux raisons : poids considérable de l'édifice, dangereuse résistance à la force du vent.

M. de Freycinet, président du Conseil, était un ami per- sonnel de l'architecte Bourdais, mais son ministre Loc- kroy était contre la « tour du Soleil ».

Quant à M. Poubelle, préfet de la Seine et inventeur des boîtes à ordures ménagères, il refusait de se pronon- cer.

Très maladroitement, Bourdais fit une conférence de presse, espérant quelques articles élogieux à son égard, afin de forcer la main au ministre Lockroy. Il décrivit en détail aux journalistes la tour qu'il allait être incessam- ment chargé de construire. « Mes plans sont chez le ministre, ainsi que mes calculs. Avec mon ami Sédillot, nous allons bientôt attaquer la tour du Soleil. »

Effectivement, on ne parla que de cela dans la presse.

Mais, dans le même temps, les lecteurs de L'In-

transigeant purent lire un article, signé A. de R., qui ame-

nait une note dissonante. Il y était question d'un projet

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tenu secret, dont l'auteur ne saurait être que Gustave Eif- fel, ingénieur déjà célèbre depuis la construction du via- duc de Garabit, et à l'origine de bien d'autres fabuleuses réalisations architecturales métalliques. Il s'agissait d'une tour en fer, haute de 300 m.

A. de R. était un journaliste très connu : Antoine de Restac, ami personnel de Gustave Eiffel et qui avait défrayé la chronique quand il avait eu des mots avec M. de Maupassant.

Cet article tomba comme une véritable bombe !... Mais enchanta le ministre Lockroy, qui se sentit ainsi soulagé : désormais, il n'y avait plus un seul projet à accepter ou à refuser, mais deux.

M. Lockroy bondit chez le président de la République, une coupure de presse en main. « Ouvrons donc un con- cours », lui proposa-t-il. Ce qui fut fait.

Dans son atelier de Levallois-Perret, Gustave Eiffel tra- vaillait, entouré de ses adjoints : Nouguier, Koechlin et Sauvestre, à son projet d'une tour métallique de 300 m de hauteur.

Lors d'une conférence, Eiffel avait récemment déclaré : « J'ai eu dans ma carrière industrielle l'occa- sion de faire, avec mes collaborateurs, de nombreuses études sur les pieds métalliques. Notamment en 1869, avec M. Nordling, ingénieur de la Compagnie d'Orléans.

« J'ai construit, sous les ordres de cet éminent ingé- nieur, deux des grands viaducs de la ligne de Commentry à Gannat, ceux de la Sioule et de Neuvial.

« Les piles de ces viaducs, dont la partie métallique atteint une hauteur de 51 m au-dessus des soubassements de maçonnerie, sont constituées par des colonnes en fonte, réunies par des entretoises de fer. Je me suis, depuis, attaché à ce genre de construction, mais en rem- plaçant la fonte par le fer, afin d'en augmenter la soli- dité. »

Un jour que Gustave Eiffel travaillait, Antoine de Res- tac arriva en trombe et, bousculant même une employée,

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entra sans frapper. Il semblait encore plus surexcité que d'habitude et s'écria : « Gustave, je sors de chez Lockroy, il veut te voir, il t'attend. » Il expliqua alors à Eiffel que le ministre avait trouvé le moyen de se débarrasser de Bourdais et de sa tour du Soleil et qu'ils avaient rendez- vous, le soir même, au domicile du ministre, rue Vieille- du-Temple.

Antoine de Restac avait préparé Eiffel à l'idée d'un concours. « C'est une idée démocratique », lui avait-il dit.

Eiffel n'était pas enchanté. Il n'avait, de sa vie, jamais participé à un concours... Mais la tour de 300 m, il fallait la faire... L'enjeu était de taille !

Lockroy était grand, maigre, avec des cheveux blancs et d'énormes moustaches aux longues pointes effilées, l'air moqueur, très nerveux et fumant sans cesse des

« demi-londrès ». Il était le gendre de Victor Hugo et devint, plus tard, le beau-père de Léon Daudet qui écrivit de lui : « Un homme léger, séduisant et habile, bien qu'assez ignorant », ce qui était vrai.

Ayant été retenu au ministère par l'affaire du canal de Panama, qui menaçait de mal tourner (Ferdinand de Les- seps commençait à manquer d'argent et sollicitait l'auto- risation de lancer un emprunt), le ministre arriva en retard au rendez-vous et s'entretint d'abord avec Eiffel du projet qu'il venait de débattre. Celui-ci lui donna d'ail- leurs son point de vue technique sur le canal. Puis, d'un seul coup, la conversation quitta Panama pour la Tour.

« De Restac vous a mis au courant de mes intentions ? J'ai décidé d'ouvrir un concours..., entama Lockroy.

— Monsieur le ministre, je serais fier d'être du nombre des concurrents », répondit simplement Eiffel.

Lockroy et de Restac poussèrent un soupir. Eiffel, qui avait jusqu'alors toujours refusé de participer à un con- cours, venait d'accepter.

Le 1 mai 1886, Édouard Lockroy arrêtait définitive- ment le programme du concours.

«... les concurrents devront étudier la possibilité d'éle-

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ver une tour de fer à base carrée de 125 m de côté à la base et de 300 m de hauteur.

«... Ils feront figurer cette tour sur le plan du Champ- de-Mars et, s'ils le jugent convenable, ils pourront pré- senter un autre plan sur ladite tour... »

En mai 1886, Eiffel est convoqué au ministère par Loc- kroy pour assister à une réunion de la commission pour l'Exposition. En arrivant, il est surpris de voir les plans qu'il avait envoyés, étalés sur la grande table ovale entourée de personnalités importantes : Alphand, direc- teur des travaux de la Ville de Paris, Berger, ancien com- missaire des Expositions internationales, Brune, profes- seur à l'École des beaux-arts, Collignon, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, Condamin, professeur à l'École centrale, l'amiral Mouchez, directeur de l'Observatoire de Paris, et quelques autres.

La plupart félicitèrent Eiffel, d'autres — amis de Bour- dais — demeurèrent sur la réserve. Ils avaient encore l'es- poir que l'on renonce au projet d'Eiffel, au profit de la tour du Soleil.

Eiffel prit la parole :

« Messieurs, comme vous avez pu le constater sur les plans que vous avez examinés, j'envisage une tour métal- lique, de forme pyramidale quadrangulaire, à trois

Première plate-forme_Echelle 0002 p.m.

Fig.1. Elévation

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Vue en plan du premier étage.

étages. Le premier sera de 57,63 m. Dans les espaces compris entre les montants, j'installerai quatre restau- rants. Il y aura, d'autre part, une galerie courante exté- rieure portée par des consoles qui fera le tour du premier étage, sur une superficie de 4 200 m Au milieu... le vide.

Il faut que la construction soit légère, pour que les vents puissent passer à travers. Le deuxième étage comportera une galerie extérieure établie sur le même principe qu'au premier mais avec ici un plancher central d'une surface de 1 650 m Le troisième étage (350 m sera complète- ment couvert avec un chemin de ronde. Les visiteurs pourront, à l'abri du vent, dans une sorte de phare vitré, admirer Paris et les environs.

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Au sommet, j'envisage une terrasse, avec un apparte- ment de plusieurs pièces, dont j'aimerais conserver le libre emploi. Au-dessus encore, des poutrelles en croix supporteront les poulies de l'ascenseur vertical, qui reliera le deuxième au troisième étage. Les ascenseurs reliant le sol au premier et au deuxième étage seront encastrés dans les piliers. Ils seront hydrauliques. »

Ces plans préparés pour participer au concours furent réalisés exactement, sans y apporter aucune modifica- tion. Ce sont ceux de l'actuelle tour Eiffel.

Dans le silence qui suivit, Lockroy demanda à Eiffel :

« Et combien cela va-t-il coûter ?

— 6 500 000 F. L'édifice pèsera 7 000 t, sans les ascen- seurs et installations secondaires.

— Et le poids des visiteurs ?

— La surface maximale des plates-formes pouvant être occupées par les visiteurs est de 5 208 m A raison de deux personnes par m à 70 kg de moyenne par personne, cela représente 10 416 personnes, soit un poids total de 729 t, ce qui est très raisonnable. »

Eiffel avait donné ces explications avec calme, très décontracté, montrant sa bonne humeur bourguignonne et impressionnant l'auditoire par sa facilité d'élocution, sa clarté, la netteté de ses idées.

Après plusieurs semaines, la conclusion de la commis- sion fit connaître que, parmi les sept cents projets présen- tés au concours sur la proposition de M. Alphand, direc- teur des travaux de la Ville de Paris, et à l'unanimité des membres de la commission, on avait retenu la tour de M. Eiffel qui, disait le rapporteur, doit être « un chef- d'œuvre de l'industrie métallique ».

Sadi Carnot, devenu président de la République, s'inté- ressa immédiatement à l'Exposition de 1889. Dans l'un de ses premiers discours, il avait déclaré : « Il est néces- saire, il est capital que l'Exposition soit non pas une simple réussite, mais un triomphe. »

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Plus de deux millions et demi de visiteurs par an font l'ascension de la tour Eiffel, mais cela ne veut pas dire qu'ils la connaissent.

Et pourtant, son histoire vaut d'être contée...

Sait-on que Gustave Eiffel sortit de l'Ecole centrale avec le diplôme d'ingénieur chimiste et faillit entrer dans une fabrique de moutarde à Dijon ; que la date officielle de naissance de la tour Eiffel est le dimanche 31 mars 1889; qu'elle compte 12 000 pièces métalliques et 2 500 000 rivets; que seulement 60 ouvriers y ont travaillé pendant les 780 jours de sa construc- tion proprement dite; qu'on l'aurait peut-être démolie en 1909 si le général Ferrié n'avait pas démontré l'utilisation possible de cette antenne de 300 m pour la T.S.F. naissante (et c'est effectivement depuis la tour Eiffel que furent diffusés la première émission de variétés et le premier journal parlé à la radio) ; qu'on ne recense que 2 rescapés parmi les 370 personnes qui se sont jetées de la Tour pour se suicider; qu'à la fin de sa vie, Gustave Eiffel disait : « Je devrais être jaloux de la Tour, elle est beaucoup plus célèbre que moi ! »

Ce sont des centaines d'autres détails curieux ou insolites, et bien d'autres anecdotes savoureuses ou dramatiques que nous révèle Jacques Morlaine — l'homme pour qui la tour Eiffel n'a plus de secrets puisqu'il est son attaché de presse !

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