J.
ROBELININRA Laboratoire Croissance et Métabolisme des Herbivores
Theix,
63122Saint-Genès-Champanelle
Différenciation,
croissance et
développement
cellulaire du tissu musculaire
Le tissu musculaire représente quantitativement 40 à 50 % du poids vif des
animaux domestiques. A
cetitre, c’est
unacteur essentiel du métabolisme
protéique et énergétique. C’est aussi,
avecle squelette
surlequel il s’attache, le tissu à l’origine du mouvement, capable de transformer
’
l’énergie des nutriments
enforce motrice. Enfin, c’est le tissu
«noble » des animaux domestiques élevés pour la production de viande. Cet article
apour but de présenter l’ensemble des processus qui accompagnent le
développement musculaire depuis la vie foetale jusqu’au stade adulte.
Le muscle est constitué de fibres musculaires entourées d’une mince
gaine
de tissuconjonc-
tif riche en
collagène, l’endomysium.
Les fibres sont
regroupées
en faisceauxpri-
maires
enveloppés
par unegaine conjonctive (perimysium)
renfermant desfibroblastes,
desadipocytes (gras intramusculaire),
des vais-seaux
sanguins irriguant
le tissu, et des nerfsmoteurs. Ces faisceaux
primaires
sont regrou-pés
en faisceaux secondairesenveloppés
dansune
gaine
deperimysium
un peuplus épaisse.
Dumont
(1986)
décrit une hiérarchie des fais-ceaux d’ordre
quatre,
dont le niveau leplus
élevé de
gaine conjonctive correspond
à latrame
principale
depérimysium,
visible à l’oeilnu sur une coupe transversale de
muscle,
et définissant legrain
de la viande.Enfin,
ces gros faisceaux sontregroupés
dansune trame
conjonctive plus épaisse, l’épimy-
sium, pour former le muscle lui-même. Cetteenveloppe conjonctive s’épaissit
aux extrémitésdu muscle pour former les tendons et les apo- névroses
qui
assurent la liaison avec le sque-lette,
et constituent le relais de la force motricedéveloppée
par le muscle.Ces différents niveaux de tissu
conjonctif,
constitué de fibres de
collagène
forment unetrame dont
l’organisation
est en relation étroiteavec la tendreté de la viande
(figure 1).
Résumé
_________________________Le tissu musculaire est constitué de fibres
allongées, cylindriques, plurinucléées
et
organisées
en faisceaux entourés par unegaine
de tissuconjonctif.
On distin-gue différents
types
de fibresmusculaires,
selonqu’elles
sont alimentées en éner-gie
par laglycolyse
en milieuanaérobie,
ou par lecycle
de Krebs et la chaîne res-piratoire
en milieu aérobie. Ondistingue
aussi les fibres à contraction lente de celles à contractionrapide.
Les cellules musculaires se
développent
chezl’embryon
àpartir
de larégion somitique.
Les cellulesmyogéniques,
non encore différenciées semultiplient
aucours du
cycle
deprolifération.
Les cellulesqui quittent
cecycle
entrent ensuitedans
laphase
de différenciation pour se transformer enmyoblastes.
Ces derniersfusionnent
pour donner desmyotubes qui
évoluent enfin en fibres musculaires.La différenciation
métabolique
et fonctionnelle est sous le contrôle de l’innerva- tion et des hormones.La différenciation musculaire chez les bovins se
produit
en totalité durant la vie foetale. Lepremier
tiers de la vie foetale est caractérisé par laprésence
de myo-tubes,
par unemultiplication
trèsrapide
des noyaux et uneaugmentation
du nombre desmyotubes.
Au cours du deuxième tiers de la viefoetale,
lesmyotubes
évoluent en fibres musculaires. La
multiplication
des noyaux est encore trèsintense,
maisl’augmentation
du nombre de fibres se ralentit. C’est à ce stadequ’apparaissent
les différentstypes
contractiles de fibres. Apartir
du troisièmetiers de la vie
foetale,
le nombre de fibres restestable,
alors que le nombre de noyaux continue des’accroître,
et cela presquejusqu’au
stadeadulte, grâce
à l’in-corporation
de nouveaux noyaux issus des cellules satellites. Lasynthèse protéi-
que est très intense chez le
foetus,
et reste à un niveau élevéaprès
la naissance.La croissance foetale
représente
unephase primordiale
de la croissance muscu-laire,
avec un accroissementimportant
du nombre de fibres et surtout du nombre de noyaux, et aussi unesynthèse protéique
trèsrapide.
La croissancepostnatale
est surtout caractérisée par la maturation des fibres
juste après
la naissance, et par l’accroissement de leur diamètrejusqu’au
stade adulte.1 / Structure et caractéristiques biologiques des fibres
musculaires
La fibre musculaire est une cellule
plurinu-
cléée
allongée
dont la section a une formepoly- gonale.
Salongueur peut
atteindreplusieurs centimètres,
et son diamètre moyen une cen- taine de microns chez l’adulte. Les noyaux sont localisés à lapériphérie
de lafibre,
tandis que le centre estoccupé
par lesystème
contractile(figure 2).
La membraneplasmique
a une struc-ture
particulière,
et comporte notamment unezone de
jonetion
entre le nerf moteur et la fibremusculaire
appelée plaque
motrice. Cettejonc-
tion neuro-musculaire
joue
un rôle trèsimpor-
tant dans la différenciation.
Les
invaginations
de la membraneplasmique
et un réseau dense de reticulum
endoplasmi-
que assurent la transmission de l’influx ner- veux
jusqu’au système
contractile. Enfin cer-taines fibres musculaires sont très riches en mitochondries
qui
assurentl’approvisionne-
ment en
énergie
nécessaire à leur contraction.Les cellules sont caractérisées par un appa- reil contractile constitué de
myofibrilles qui
occupent lamajeure partie
du volume cellu- laire. Cesmyofibrilles
sont des éléments allon-gés qui
s’étendent sur toute lalongueur
de lacellule et
qui
sont constitués de faisceaux demyofilaments protéiques.
Desmyofilaments épais (myosine)
et fins(actine-G, tropomyosine
et
troponine) s’interpénètrent
dans le sens lon-gitudinal
et donnent aux coupeslongitudinales
un
aspect
striécaractéristique
des musclessquelettiques (figure 3).
La bande 1 de couleurclaire,
ne comporte que des filaments fins. La bande Aplus foncée,
est formée parl’interpé-
nétration des deux types de filaments.
La contraction musculaire
correspond
à unraccourcissement de la bande 1 dû à un
glisse-
ment des filaments fins d’actine entre les fila- ments
épais
demyosine.
Ce mécanisme met enjeu
la formation d’uncomplexe d’acto-myosine, l’énergie
nécessaire étantproduite
parhydro- lyse
d’ATP en ADP au niveau de lamyosine.
Onverra
plus
loin que cette activité ATPase est un critère de classification des fibres musculaires.On trouvera
plus
de détails sur cesaspects
de la structure et du fonctionnement du muscle dansl’ouvrage
de Berkaloff et al(1977).
1.
1
/ Caractéristiques fonctionnelles et métaboliques des fibres
A l’intérieur d’un muscle
donné,
les fibres diffèrent par leurscaractéristiques morphologi-
ques,
biochimiques
etphysiologiques (Bacou
etVigneron 1988).
En dehors des différences depigmentation (muscles plus
ou moinsrouges) remarquées depuis
trèslongtemps,
on constatesurtout des différences dans la vitesse de contraction des fibres ainsi que dans leur méta- bolisme
énergétique.
Caractéristiques
fonctionnelles des fibres.L’activité contractile des fibres est
plus
oumoins
rapide,
selon la nature de lamyosine, principale protéine
constitutive desmyofi- brilles,
etqui
comporte différentes isoformes.Sans entrer dans les détails
(cf
revue de Bacouet
Vigneron 1988),
la vitesse de contractionqui
est due à la nature de la
myosine
est étroite-ment corrélée à l’activité
ATPasique.
C’est lamesure de cette activité
qui
a été laplus
utiliséejusqu’à présent
pour déterminer lestypes
de fibres.Caractéristiques métaboliques
des fibres. Les fibres musculairespeuvent puiser
leurénergie
dans le stock deglycogène musculaire,
maisaussi au niveau du
glucose
et des acides gras circulants. L’utilisation de ces nutriments éner-gétiques peut
emprunter deux voies métaboli- ques,glycolytique
ouoxydative.
En milieuanaérobie,
laglycolyse
ou laglycogénolyse
pro- duisent dulactate,
avec uneproduction
d’éner-gie
assez réduite(3
ATP par mole deglucose).
Ce processus très
rapide permet
de faire face àune demande
brusque
enénergie,
mais ne per- met pas de satisfaire une demande delongue
durée. En
effet,
l’accumulation de lactate acidi- fie le muscle et tend à freiner laglycolyse.
Enmilieu
aérobie,
ladégradation
duglucose,
desacides gras et de certains acides aminés,
peut
allerjusqu’au
stadeCO,
etH,O,
par la voie ducycle
de Krebs et de la chaînerespiratoire.
Ceprocessus
produit
unegrande quantité
d’éner-gie (38
ATP par mole deglucose),
mais sedéroule
plus
lentement que laglycolyse.
Les fibres musculaires
peuvent
être classéesen trois
catégories
selon leurtype
de métabo-lisme, oxydatif, glycolytique
ou encoreoxydo- glycolytique.
Les fibresoxydatives
sontplus
riches en
mitochondries,
tandis que les fibresglycolytiques
ont un stock deglycogène plus important.
1.
2
/ Classification des fibres musculaires
L’association de ces deux critères de classifi- cation, activités contractile et
métabolique,
conduit à
distinguer
troisprincipaux
types de fibres :- des fibres lentes à métabolisme
oxydatif
- des fibres
rapides
à métabolismeoxydatif
etglycolytique
- des fibres
rapides
à métabolismeglycolytique
Les différentes
terminologies
ainsi que lesprincipales caractéristiques
de ces fibres sontrappelées
dans le tableau 1.2 / Ontogenèse et développement
des fibres musculaires
Les travaux concernant
l’origine,
lamultipli-
cation et la différenciation des fibres muscu-
laires ont surtout été effectués sur les rongeurs
et
les
oiseaux. Nous nousappuierons
sur cestravaux pour décrire les aspects
généraux
de lamise en
place
et dudéveloppement
du tissumusculaire. Ensuite, nous ferons le
point
desconnaissances
plus
restreintes concernant les mammifèresdomestiques
et notamment les bovins.L’origine embryonnaire
des cellules muscu-laires est localisée au niveau du
mésoderme,
etplus
exactement des somites(Kieny
et al1988).
La carte
présomptive
des différents territoiresembryonnaires
est mieux connue chez lesamphibiens
et les oiseaux que chez les mammi- fères. Lafigure
4représente
cette carte chezl’embryon
d’oiseau au stadegastrula (33
heuresd’incubation).
La mise enplace
d’un tissu meten
jeu
deux processus successifsdistincts,
lamultiplication
cellulaire(hyperplasie), puis
ladifférenciation de ces
cellules, qui
met fin à leurpouvoir
de division. Nousprésentons
cesdeux aspects
séparément
pour la clarté de l’ex-posé, cependant
il existe au même instant descellules en cours de
prolifération
et des cellulesen cours de différenciation.
2.
1 / Multiplication des cellules
musculaires
Les cellules de la
lignée myogénique
encore indifférenciées sontappelées pré-myoblastes.
Elles se
multiplient
activement au cours ducycle
deprolifération
cellulaire. Cettemultipli-
cation cellulaire est surtout active durant les
premiers
stades dedéveloppement, cependant
elle se
prolonge
dans le cas du muscle bien au- delà des stadesembryonnaires,
au niveau descellules
satellites,
presquejusqu’au
stadeadulte.
a /
Cycle
deprolifération
cellulaireCe
cycle comporte
quatrephases principales
et une
phase
externe(Allen
et al 1979,figure 5) : - phase
S :synthèse
du DNA(durée
environ4
heures)
-
phase G z : phase post-synthèse
depréparation
de la mitose
(durée
2,5heures)
-
phase
M : mitose(durée
45minutes).
A l’issuede cette
phase,
on obtient deux cellules fillesau stade
G,.
-
phase G, : phase
d’arrêt avant laphase
de syn-thèse. Sa durée est variable de 3 à 12 heures.
En dehors de ce
cycle
existeégalement
unecinquième phase G o , qui correspond
à un étatquiescent
danslequel
les cellulespeuvent
res-ter
pendant
trèslongtemps.
Ces cellules peu- vent être recrutées chez l’adulte lors de larégé-
nération tissulaire
après
une blessure.Le
cycle
cellulaireS-G,-M-G,
conduit à unaccroissement du nombre de cellules
(hyper- plasie).
Ces cellules ne sont pasdifférenciées,
c’est à dire
qu’elles n’expriment
pas les caracté-ristiques
desmyoblastes,
mais elles fontdéjà partie
de lalignée myogénique,
car elles ne pourront se différencierqu’en myoblastes ;
onles nomme
parfois
desmyoblastes présomptifs.
La détermination
précoce
de ces cellulesqui précède
etprépare
ladifférenciation,
est aucoeur des recherches actuelles sur la différen- ciation cellulaire. A titre
d’exemple,
on a isolérécemment une
lignée
cellulaireindifférenciée, qui peut
se différencier soit enmyoblastes,
soiten
adipocytes
soit enchondrocytes.
La différen-ciation en
myoblastes
peut être déclenchéegrâce
à un traitementchimique.
On a montréque ces cellules
possédaient
ungène (myo-D,) qui, lorsqu’il
est activéultérieurement,
entraî-nerait la différenciation en
myoblastes.
Cettedétermination
précoce
est antérieure à la diffé- renciationproprement
dite. Elle seproduit
surdes cellules
qui
sont encore dans lecycle
deprolifération.
Cetexemple
montre que l’onpeut imaginer
des moyens d’accroître le nombre de cellulesmusculaires,
même si lestechniques
pour y
parvenir
sont encore à l’étatexpérimental.
b /
Régulation
de lamultiplication
cellulaireCes
aspects
de lamultiplication
cellulairesont très
importants,
car c’est trèsprobable-
ment à ce niveau que se situe l’action des fac-
teurs de croissance. Les facteurs de croissance FGF et TGF
(Fibroblast growth
factor et Trans-forming growth factor)
sont des activateurs de laprolifération
cellulaire(Florini
etMagri
1989).
Ilsjoueraient
le rôle d’activateur pour desgènes spéciaux
dont le nomgénérique
est« switch
gènes
»,plus
connus sous le nomd’oncogènes,
etqui
initient le programme deréplication
du DNA. Ils sontresponsables
del’orientation des cellules vers la
phase G&dquo;
c’est- à-dire durebouclage
dans lecycle
deproliféra-
tion.
c / Sortie du
cycle
deprolifération
Plusieurs théories ont été
évoquées
pourexpliquer
le passage des cellules ducycle
demultiplication
vers la différenciation propre- ment dite. En tout cas, il se passe unphéno-
mène irréversible
qui
fait que l’une au moins des cellules filles issues d’une mitose ne conti-nue pas le
cycle
deprolifération.
Au cours des
cycles
normaux demultiplica-
tion, les cellules filles sont semblables à la cel- lule mère
quant
à leurcapacité
desynthétiser
un certain nombre de
protéines spécifiques.
Lors de ce dernier
cycle particulier,
une descellules filles est différente de la
cellule
mère.On
peut
penser que ce nouvel état estprovoqué
par l’inactivation des
switch-gènes
et par l’acti- vation degènes jusqu’alors inexprimés (tel
quemyo-D,), responsables
del’expression
descaractéristiques
de la fibre musculaire. Les IGF 1 et II(insuline
likegrowth factor) joueraient
un rôle dans cetteétape
initiale de la différencia- tion.2.
2 / Différenciation des fibres musculaires
Les cellules
myogéniques
issues ducycle
deprolifération
cellulairepeuvent quitter
cecycle
en
G&dquo;
et sediriger
vers lesétapes
de la différen- ciation, c’est-à-dire de laspécialisation.
Ces cel-lules
s’appellent
alors desmyoblastes.
Nousallons
distinguer
trois aspects de la différencia- tion : la mise enplace
des fibres musculaires àpartir
desmyoblastes (différenciation morpho- logique),
l’établissement descaractéristiques
fonctionnelles desfibres,
et enfin ledéveloppe-
ment de leurs
caractéristiques biochimiques.
Cette distinction est totalement
artificielle,
car les trois types de différenciation progressentplus
ou moins simultanément chez le foetus.Cette différenciation cellulaire est aussi accom-
pagnée
par la mise enplace
de la structure et del’organisation anatomique
du tissu muscu- laire tellequ’on
la connaît chez l’adulte. Nousévoquerons
cetaspect plus
en détail dans lechapitre
concernant ledéveloppement
du tissumusculaire des bovins.
a /
Différenciation morphologique
Le schéma de
principe
de la différenciation des fibres musculaires estreprésenté
sur lafigure
6. Lesmyoblastes,
cellules mononu-cléées,
fusionnent pour former desmyotubes,
cellules
allongées
de forme tubulaire etpluri-
nucléées. Les
myotubes
ont souvent un diamè-tre assez
grand
et leurs noyaux sont situés enposition centrale,
c’est-à-dire au milieu ducylindre.
La différenciationmorphologique
setermine par la
synthèse
dusystème
contractile(les protéines myofibrillaires) qui
vient occuper le centre desfibres,
tandis que les noyaux sontrejetés
à lapériphérie ;
on a alors des fibres musculaires.Ces
étapes
de la différenciation se déroulent durant le début de la vie foetale.Cependant,
ilfaut
souligner,
que durant toute la suite dudéveloppement
du tissumusculaire,
c’est-à- dire presquejusqu’à l’âge adulte,
ilpersiste
unegénération
de cellulesmyogéniques
non diffé-renciées
(les
cellulessatellites) qui
viennent fusionner avec les fibres musculaires existantes etparticipent
ainsi à l’accroissement du nom-bre de noyaux
présents
dans les fibres.b / Différenciation fonctionnelle
La mise en
place
descaractéristiques
fonc- tionnelles des fibres musculaires a lieu durant la vieembryonnaire
etfoetale,
et seprolonge
durant le début de la vie
post-natale
chez lesespèces
à naissanceprécoce (oiseaux,
rongeurs,porcins). ).
La
chronologie
de la différenciation fonction- nelle est maintenant bien connue chez les ron-geurs et les oiseaux. Sans
négliger l’apport
despionniers
dans cedomaine,
les études récentes basées sur des méthodesimmuno-cytochimi-
ques ont
permis
d’arriver à un schéma cohérent(Rubinstein
etKelly
1981, Crow1987).
Selonces auteurs, on observe deux
générations
suc-cessives de
myotubes
dont le rôle et le devenir sont différents.Dans un stade
initial,
à 15jours
degestation
chez le rat, lesmyotubes
depremière généra-
tion
(myotubes primaires)
sont rassemblés par groupes de 2 à 6cellules ;
ilsréagissent
tousmodérément aux
anti-corps
contre lamyosine rapide,
et très peu auxanti-c:orps
contre la myo- sine lente(figure 7).
A 17-18
jours,
cesmyotubes
devenusplus
gros,sont maintenant entourés par une deuxième
génération
demyotubes plus petits (myotubes secondaires).
Les deuxgénérations réagissent
fortement auxanti-corps anti-rapides,
mais lamajorité (90 %)
desmyotubes primaires réagis-
sent en
plus
assez nettement contre les anti- lents.Au cours du
développement ultérieur,
le deve- nir des deuxgénérations
est alors très différent.Les grosses cellules
primaires réagissent
demoins en moins aux
anti-corps anti-rapides,
etde
plus
enplus
aux anti-lents. Elles sont desti- nées à devenir les fibres musculaires lentes chez l’adulte. Au contraire, lesplus petites
cel- lules de deuxièmegénération
restent franche-ment
anti-rapides jusqu’à l’âge
de 14jours après
la naissance. Ensuite leur destinéedépend
du type de muscle dont elles font par- tie. Dans les musclesrapides,
elles conserventce caractère
rapide jusqu’à l’âge
adulte. Dansles muscles
lents,
on observe une évolution du typerapide
vers letype
lent. Il semble doncqu’il
y ait uneadaptation post-natale
à la fonc-tion musculaire.
En résumé, la
génération
de grosmyotubes primaires
est àl’origine
des futures fibres mus-culaires lentes. La seconde
génération
de myo- tubes depetite
taille formera lapopulation
desfibres
rapides
dans les muscles à caractèrerapide,
et évoluera enpartie
vers le caractère lent dans les muscles lents.c / Différenciation
métabolique
L’information sur la différenciation métaboli- que des fibres est
beaucoup
moins abondanteet moins claire. La différenciation
métabolique
semble
beaucoup plus
tardive que la mise enplace
destypes
contractiles. Les fibresprésen-
tent toutes les mêmes
caractéristiques
métabo-liques
durant la vieembryonnaire
et foetalechez le
lapin,
lepoulet
et leporcelet (Ashmore
et al 1973, Bacou et
Vigneron 1976).
Elles ontune activité
oxydative
modérée et une activitéglycolytique
très faible bien que des amas deglycogène
dans lapartie
centrale desmyotubes témoignent
d’une activitéglycogène synthétase
dans les stades très
précoces
dudéveloppe-
ment.
D’ailleurs,
le taux deglycogène
muscu-laire est
beaucoup plus
élevé durant la vie foe- talequ’ultérieurement.
Ce n’estqu’après
lanaissance
(chez
lesespèces
citéesplus haut) qu’apparaissent
des différences entre lesfibres,
en liaison avec le type de muscle
auquel
ellesappartiennent (figure 8).
Dans les muscles rouges
(oxydatifs
chezl’adulte),
l’activité
oxydative
continue de s’accroîtrejus- qu’à
une valeur maximale versl’âge
de 30jours
chez lelapin,
et 5jours
chez lepoulet (Bacou
etVigneron 1976).
Elle décroît ensuiteplus
oumoins
rapidement
selonl’espèce.
L’activitégly- colytique
demeure à un niveau très faible dansces muscles
jusqu’à
l’état adulte.Dans les muscles blancs
(glycolytiques
chezl’adulte),
l’activitéglycolytique
devient deplus
en
plus prononcée
au cours de la viefoetale,
etsurtout au début de la vie
postnatale (Bacou
etVigneron
1976, Lefaucheur etVigneron 1986).
Au contraire, l’activité
oxydative
reste relative-ment faible et décroît
après
la naissance.2.a / Régulation de la différenciation des fibres musculaires
La différenciation des fibres musculaires est
sous le contrôle de deux
principaux facteurs,
l’innervation motrice et les hormones. Des syn- thèsesspécifiques
sur ces deux aspects ont étépubliées (Swatland
et Cassens 1974, Bacou etVigneron
1988,Vigneron
et al1989).
Nous n’enrappellerons
ici que lespoints
lesplus impor-
tants.
a / Rôle de
l’innervation
motriceL’innervation motrice semble
jouer
un rôle crucial dans l’évolution descaractéristiques
desfibres au cours de l’établissement de leur
type
contractilerapide
ou lent.Cependant
deuxécoles de
pensée
existent encore affirmant res-pectivement
lasuprématie
du contrôle « neuro-gène » (provenant
desnerfs moteurs)
ou ducontrôle «
myogène » (provenant
du musclelui-même)
sur la différenciation. Avant de résu-mer les effets de l’innervation motrice sur la
différenciation,
nous allons tout d’abord décrireplus précisément l’organisation
anato-mique
entre le muscle et lesystème
nerveux moteur, à savoir l’unité motrice et lajonction
neuro-musculaire ouplaque
motrice.L’unité motrice constitue le module de base du fonctionnement des muscles. L’unité motrice
comprend
troisparties,
un motoneurone situé dans la corne ventrale de la moelleépinière,
son axone moteur et enfin l’ensemble des fibres musculaires
qu’il innerve,
de l’ordre d’une dizaine dans les musclesrapides
àplus
d’unmillier pour les muscles lents actionnant des
masses
corporelles importantes.
L’excitation du motoneurone provoque la contraction de toutes les fibres innervées par celui-ci.La
jonction
neuro-musculaire : La liaisonsynaptique
entre les extrémités du neuronemoteur et la membrane de la fibre musculaire est
appelée plaque
motrice. Cette zone estcaractérisée par une forte densité de
récepteurs
à
l’acétyl-choline
et par une forte concentrationen
acétyl-choline
estérase.Mise en
place
de lajonction
neuro-musculaire chezl’embryon :
Lasynaptogenèse (différencia-
tion de la
plaque motrice)
est trèsprécoce ;
lespremières plaques
motricesapparaissent
sur lesmyotubes primaires.
Rubinstein etKelly (1981) indiquent
quechaque myotube primaire
estinnervé par un moto-neurone «
pionnier » qui
est
responsable
de l’évolution de ces cellulesvers le
type
lent. D’autres motoneurones enva-hissent ensuite la
population
demyotubes
dedeuxième
génération,
mais lajonction
neuro- musculaire ne peut pas être établie tant que ces cellules sont en contact avec lesmyotubes pri-
maires.
Cependant
d’autres auteurs montrent que l’innervation a surtout un rôle sur la diffé- renciation des cellules issues de lagénération
secondaire en fibres detype rapide (type II).
Entout cas, le rôle de l’innervation sur la différen- ciation des fibres n’est pas discutable. Les
expériences
d’innervation croisée le démon- trentparfaitement.
b /
Régulation
hormonaleLes cellules indifférenciées
quittent
lecycle
de
prolifération
pour entrer dans unephase
dedifférenciation des
myoblastes.
Cettephase qui
a été abordée
précédemment
est sous l’in-fluence de
gènes spécifiques qui pourraient
être activés par les IGF Au cours de cette
phase,
ces cellulesmyogéniques acquièrent
lespotentialités
propres auxmyoblastes (synthèse
de
protéines
contractilesspécifiques,
par exem-ple)
et fusionnent pour former desmyotubes puis
des fibres musculaires.Le
catalogue
des effets des différentes caté-gories
d’hormones sur cettephase
dudévelop- pement
musculaire seraitlong
et fastidieux.Afin de
simplifier
laprésentation
de cet aspect,nous avons
distingué
trois groupes d’hor-mones, selon que leur effet le mieux connu
actuellement se situe au niveau de la
proliféra-
tion
cellulaire,
de la fusion desmyoblastes
ouencore de la
synthèse protéique
dans les myo- blastes.Hormones stimulant la
prolifération
cellu-laire : elles ont
généralement
un effet inhibi- teur sur la fusion desmyoblastes.
C’est le casdes facteurs de croissance tels que le FGF et le TGF
(Fibroblast growth
factor etTransforming growth
factorbeta).
Hormones stimulant la fusion des
myoblastes :
les
prostaglandines PGE1,
les IGF et l’insuline stimulent la fusion desmyoblastes
en culture(Ewton
et Florini1981).
En cequi
concernel’insuline,
cet effet sur la différenciation pour- rait se situer au niveau de lasynthèse
de pro- téines membranaires nécessaires à la fusion desmyoblastes. Rappelons
que les IGF sont des fac- teurs de croissance secrétés par le foie et les autres tissusfoetaux,
notamment sous l’action de la GH ou de laprolactine placentaire.
Hormones stimulant la
synthèse protéique :
Denombreuses hormones interviennent au niveau de la
synthèse protéique
dans lemyoblaste.
LesIGF et l’insuline ont un effet sur le
transport
des acides aminés et leur utilisation au niveau traductionnel.L’ effet des IGF-1 est
plus important
que celui des IGF-11 bien que leur concentrationplasma- tique
soit assez réduite chez le foetus. Les hor-mones
thyroïdiennes
ont aussi un effet sur lasynthèse protéique,
mais au niveau de la trans-cription
de l’ADN en ARN dans le noyau(elles
ont des
récepteurs nucléaires).
L’effet leplus marqué
des hormonesthyroïdiennes
sur la dif-férenciation musculaire se situe au niveau de la transition des fibres de
type
foetal aux fibres detype
adulte que l’onappelle
aussi maturation des fibres. On peutimaginer qu’il s’agit
essen- tiellement d’un effet sur lasynthèse
demyosine
detype
adulte.La
différenciation musculation
est sousle contrôle
de
l’innervation etdes
hormones.
Chez les
bovins, prolifération,
différenciation
et maturationdes
fibresmusculaires
sedéroulent durant
la viefoetale.
Nous n’avons pas cité l’hormone de crois-
sance bien
qu’elle
provoqueexpérimentale-
ment une
hyperplasie (accroissement
du nom-bre de
noyaux)
dans les fibres musculaires chez lejeune
rat. Son effet n’estprobablement
pasdirect,
mais transmis par l’intermédiaire des IGF Enfait,
le rôle direct de cette hormone est assez réduit chez lefoetus,
chezlequel
elle estremplacée
par une hormone secrétée par lepla-
centa
(hormone placentaire lactogène,
ousomato-mammotropine). ).
En résumé, les
principales étapes
de la miseen
place
des cellules et du tissu musculaires sont laprolifération,
ladifférenciation,
la fusion desmyoblastes,
lasynthèse
dusystème
contractile et enfin son évolution au cours de la maturationmyofibrillaire.
Ces différentesétapes
se déroulent durant la vieembryonnaire
et
foetale,
voirejusqu’au
début de la vie post- natale dans lesespèces
à naissanceprécoce (rongeurs, lapins, porcins).
Laprésentation schématique
que nous venons d’en faire ne concerne pasd’espèce
enparticulier. Cepen- dant,
les travaux lesplus analytiques qui
ontpermis
depréciser
cetaspect
dudéveloppe-
ment musculaire ont
généralement
été réaliséssur des
espèces
de laboratoire et/ou depetite
taille(rats,
souris,lapins, poulets).
Cette
présentation préalable
nous permet maintenant d’aborder ledéveloppement
mus-culaire des bovins.
3 / Différenciation et croissance du tissu musculaire
chez les bovins
C eZ eS
0VlnS
_ -..!-.,-.a&dquo;_!!.’T.!_! ,Les connaissances sur la différenciation mus-
culaire sont
beaucoup
moins détaillées chez lesespèces domestiques
degrande
taille et notam-ment chez les bovins. Nous avons fait une syn- thèse des connaissances sur ce
sujet,
en incluant notamment les résultats nonpubliés
des travaux que nous
poursuivons depuis
troisans sur la différenciation des fibres musculaires chez le foetus bovin au Laboratoire de la Pro- duction de Viande à l’INRA de Theix. Cette
synthèse
ne concerne pas seulement le déve-loppement
foetal des fibresmusculaires,
maisaussi leur évolution ultérieure
qui
a faitl’objet
de travaux
plus
nombreux(Ashmore
etal 1972,
Cornforth et
al 1980,
Solomon et al1986).
Nous n’abordons pas ici la croissance
globale
du tissu musculaire des
bovins,
etplus spécia-
lement la croissance des différentesrégions musculaires,
renvoyant le lecteur à différentespublications (voir
notammentBerg
et Butter- field 1976, Robelin etGeay
1976, Robelin 1984, Robelin1986).
Nous
présenterons
successivement deux aspects dudéveloppement
des fibres muscu-laires,
tout d’abord lachronologie
de la diffé- renciation et de la mise enplace
des différents types de fibres durant la vie foetale et postna-tale, puis
les aspectsplus quantitatifs
relatifs àl’évolution du nombre de noyaux
(DNA
muscu-laire)
et du nombre et du diamètre des fibres.3.
1 / Différenciation et maturation des fibres musculaires des bovins
a /
Différenciation durant
la vie foetaleA la fin du
premier
tiers de la viefoetale,
lepoids
du foetus est encore très réduit(de
l’ordrede 100
g)
et, tandis que les muscles sont bien identifiablesmacroscopiquement,
leurorgani-
sation au niveau cellulaire n’est pas encore très avancée. En
particulier,
on nedistingue
pasencore très bien les faisceaux. Les cellules sont caractérisées en coupe transversale par une
taille assez
grande (diamètre
de 20microns)
etpar un espace clair au centre souvent
occupé
par un noyau : ce sont des
myotubes.
Elles nemanifestent pas d’activité
oxydative,
etréagis-
sent toutes comme des cellules de type
rapide (ATPase
stable en milieualcalin).
Au milieu de la vie
foetale,
alors que lepoids
du foetus atteint entre 2 et 3
kg,
laplupart
desmyotubes
se sont transformés en fibres muscu-laires caractérisées en coupe transversale par
une section
plus petite,
des noyauxdisposés
àla
périphérie
et neprésentant plus d’espace
clair au centre. Il reste
cependant
encore unepopulation
peu nombreuse demyotubes
desection
plus grande occupant
uneposition
cen- trale au milieu dechaque
faisceau de fibres.L’activité
oxydative
des fibres n’est pasplus
intense
qu’au
stadeprécédent.
Enrevanche,
lamesure de l’activité
ATPasique
révèledéjà
deuxtypes
de cellules. Lesmyotubes présentent
descaractéristiques
de typelent,
alors que lamajo-
rité des autres cellules
(fibres différenciées)
ontle caractère
rapide.
Cette évolutionrappelle
ladescription précédente
à propos desmyotubes primaires qui
s’orientent vers le caractèrelent,
alors que lesmyotubes
et les fibres secondaires manifestent un caractèrerapide.
Vers les deux tiers de la vie
foetale,
lepoids
dufoetus est alors voisin de 10
kg,
il ne resteplus
de
myotubes.
Les fibres deplus
enplus
serréesprennent
une formepolygonale.
Elles forment des faisceaux semblables à ceux que l’on observe chez l’adulte. Les deuxpopulations
defibres à caractère
rapide
et lent sedistinguent
de
plus
enplus
clairement.Enfin,
ondistingue
aussi deux
populations
de fibres selon l’activitéoxydative.
Ces deux modes de classificationqui
ne coïncident pas,
permettent
donc de mettreen évidence les trois types de fibres
évoqués précédemment.
Ces
étapes
recouvrent l’ensemble de la vie foetale chez lesespèces
à naissance tardivecomme les ovins et les bovins chez
lesquels
lepoids
du nouveau-né estsupérieur
à 4 % dupoids
adulte. Elles sepoursuivent
au-delà de la naissance chez les animauxplus légers
à la naissance, tels que leporcelet
ou lelapereau.
b / Maturation durant la vie
périnatale
et
post-natale
On observe encore une évolution
importante
des fibres musculaires au delà des deux tiers de la viefoetale,
notamment en relation avec ledéveloppement
de la fonction motrice des mus-cles