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AVIS

Haut Conseil de la santé publique

1/68

Cet avis doit être diffusé dans sa totalité, sans ajout ni modification

relatif à la prévention de la transmission à l’Homme des virus influenza porcins et aviaires

10 décembre 2021

Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a été saisi par la Direction générale de la santé (DGS) et la Direction générale de l’alimentation (DGAL) par courriel en date du 3 novembre 2021 (annexe 1) en vue d’établir des recommandations de protection individuelle des intervenants dans les lieux de détention de porcins et de conduite à tenir en cas de suspicion de cas de grippe zoonotique.

Les commanditaires souhaitent obtenir des précisions relatives aux circonstances favorisant ces transmissions et aux secteurs d’activité concernés ainsi que des recommandations visant à réduire les risques de transmission à l’Homme ou atténuer leurs impacts (notamment le port d’équipements de protection individuelle adaptés).

Afin de répondre à cette saisine, un groupe de travail (GT) composé ou non d’experts du HCSP a été constitué. Compte tenu de la thématique, des représentants du centre national de référence (CNR) des virus respiratoires (dont la grippe), de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), du laboratoire national de référence (LNR) Influenza porcin et du LNR Influenza aviaire ont intégré ce groupe de travail (annexe 2).

Sur le plan méthodologique, cinq réunions d’experts ont été programmées et une recherche bibliographique a été effectuée.

Du fait des similitudes qui caractérisent l’exposition des personnels en charge des animaux domestiques susceptibles d’être infectés par des virus influenza, le GT a pris la décision d’élargir son avis aux virus aviaires.

A noter que dans le chapitre « conduite à tenir », de nouvelles définitions de cas sont proposées.

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Table des matières

1. Les éléments virologiques relatifs aux virus influenza zoonotiques ... 4

1.1 Origine et caractéristiques des virus ... 4

1.1.1 Virus influenza porcins ... 4

1.1.2 Virus influenza aviaires ... 6

1.2 Transmission à l’Homme, source d’infection et facteurs virologiques favorisants ... 8

1.2.1 Virus influenza porcins ... 8

1.2.2 Virus influenza aviaires (voir avis du HCSP [41]) ... 10

2. La sensibilité des virus zoonotiques aux antiviraux ... 14

2.1 Données des études sur l’efficacité des antiviraux ... 14

2.1.1 Virus influenza porcins ... 14

2.1.2 Virus influenza aviaires ... 14

2.2 Recommandations internationales pour l’utilisation des antiviraux en cas d’émergence de virus influenza zoonotique (porcin ou aviaire) chez l’homme ... 14

3. Le diagnostic virologique des infections zoonotiques chez l’Homme ... 17

3.1 La technique de RT-PCR ... 17

3.2 En complément de la détection par RT-PCR, ... 17

3.3 Les tests rapides d’orientation diagnostique grippe ... 17

4. Les données épidémiologiques relatives aux virus influenza porcins et aviaires ... 18

4.1 Chez l’animal ... 18

4.1.1 Virus influenza porcins ... 18

4.1.2 Virus influenza aviaires ... 20

4.2 Chez l’Homme ... 21

4.2.1 Épidémiologie des cas humains d’infection par un virus influenza porcin (grippe porcine) 21 4.2.2 Épidémiologie des cas humains d’infection par un virus influenza aviaire (grippe aviaire) 23 5. Synthèse sur les cas humains (aspects cliniques et diagnostiques, évolution, traitements) . 26 5.1 Cas de grippe porcine ... 26

5.2 Cas de grippe aviaire ... 26

6. Efficacité des mesures barrières en prévention de la transmission à l’Homme des virus influenza porcins et aviaires : ... 27

7. L’avis du HCSP des 21 décembre 2017 et 22 juin 2018 relatif à l’actualisation de la conduite à tenir lors d'une exposition à des volailles ou d'autres oiseaux atteints d'influenza aviaire à virus hautement pathogène et à risque établi de transmission humaine sur le territoire national . ... 28

8. Conduite à tenir ... 29

8.1 Préambule : ... 29

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8.2 Le HCSP propose les définitions suivantes ... 30

8.2.1 Grippe porcine (infection humaine par un virus influenza d’origine porcine) ... 30

a) Cas suspect de grippe porcine ... 30

b) Cas possible de grippe porcine ... 30

c) Cas confirmé de grippe porcine ... 31

8.2.2 Grippe aviaire (infection humaine par un virus influenza d’origine aviaire) ... 31

a) Cas suspect de grippe aviaire ... 31

b) Cas possible de grippe aviaire ... 31

c) Cas confirmé de grippe aviaire ... 33

8.2.3 Définition d’une personne contact ... 33

8.2.4 Définition d’une exposition à risque ... 33

Le HCSP recommande : ... 35

Annexes ... 51

Annexe 1 : saisine de la DGS et de la DGAL ... 52

Annexe 2 : composition du groupe de travail ... 54

Annexe 3 : Mesures d’éducation, de protection et d'hygiène pour les personnes exposées à des oiseaux ou porc suspects ou confirmés infectés ainsi qu’à leurs produits (plumes, déjections…) ... 55

Annexe 4 : coordonnées du Centre National de Référence (CNR) des Virus des infections respiratoires (dont la grippe) ... 57

Annexe 5 : fiche à adresser avec le prélèvement au CNR (incluant les virus influenza zoonotiques) ... 58

Annexe 6 : liste et coordonnées des points focaux régionaux ... 59

Annexe 7 : précautions d’hygiène en milieu de soins ... 61

Annexe 8 : suspicion de grippe porcine ou aviaire : conditions de prélèvement ... 64

Annexe 9 : document pour information des personnes contacts et/ou co-exposées d’un cas confirmé d’infection par un virus influenza porcin ou aviaire ... 66

Annexe 10 : antiviraux inhibiteurs de la neuraminidase (INA) : mode d’administration et posologies usuelles ... 67

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Cet avis doit être diffusé dans sa totalité, sans ajout ni modification 4/68 Le HCSP a pris en compte :

1. Les éléments virologiques relatifs aux virus influenza zoonotiques

L’Homme peut être infecté par des virus influenza porcins et /ou aviaires. Il s’agit de virus influenza de type A animaux d’importance majeure en santé publique car susceptibles d’être responsables de pandémie. Ils nécessitent une vigilance particulière suivant la sévérité de l’infection chez l’Homme et leur capacité à s’adapter durablement à l’Homme.

1.1 Origine et caractéristiques des virus

1.1.1 Virus influenza porcins

On entend par virus influenza porcin, ou swIAV pour swine (sw) influenza A virus (IAV), un IAV isolé à partir d’un prélèvement biologique de porc.

Chez le porc, l’émergence d’un nouveau swIAV, différent de ceux connus pour circuler dans l’espèce et/ou de ceux déjà identifiés ponctuellement, peut résulter de divers mécanismes :

• le transfert in toto1 d’un IAV d’une autre espèce animale, en l’occurrence aviaire ou humaine ;

• des modifications génétiques (mutation, délétion, insertion) introduites pendant la réplication du génome viral, en raison d’erreurs de l’ARN polymérase ARN-dépendante du virus, dépourvue de mécanisme de relecture et d’activité de correction. Lorsque les modifications concernent les gènes codant l’hémagglutinine (HA) ou la neuraminidase (NA), elles peuvent conduire à un « glissement antigénique » (drift) et à l’émergence d’un nouveau « variant » antigénique ;

• le réassortiment génétique, en raison de la segmentation du génome viral ; lorsqu’une cellule est co-infectée par deux virus différents, il peut se former, lors de l’assemblage et du bourgeonnement, un « virus réassortant » ayant emprunté des segments génomiques à l’un et l’autre des virus parentaux ; quand le réassortiment concerne le gène HA ou NA, il entraîne une « cassure antigénique » (shift) c’est-à-dire le remplacement d’un antigène majeur.

L’apparition d’un nouveau swIAV variant ou réassortant dans une population de porcs n’entraîne pas toujours la disparition du ou des virus précédemment en circulation. Ainsi, on distingue des swIAVs « enzootiques », c’est-à-dire des virus qui se sont adaptés à l’espèce et qui ont largement diffusé dans la population porcine, et des swIAVs

« sporadiques », qui sont détectés ponctuellement mais sans diffusion apparente à l’échelle d’une population. Un virus d’abord qualifié de sporadique peut devenir enzootique. Tous les virus influenza porcins, qu’ils soient qualifiés d’enzootiques ou de sporadiques, sont à potentiel zoonotique.

Chez le porc, les acides sialiques (AS) qui sont présents à la surface des cellules épithéliales de l’arbre respiratoire, et qui servent de récepteurs aux swIAVs, sont globalement distribués de la même manière que chez l’Homme. On retrouve tout le long de l’épithélium de l’arbre respiratoire des récepteurs de type AS-α2,6-Gal, mais des récepteurs de type AS-α2,3-Gal sont également présents dans l’arbre respiratoire inférieur [1]. Ainsi, le porc peut être

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infecté par les swIAVs, lesquels ont généralement une plus grande affinité pour les récepteurs de type AS-α2,6-Gal que pour ceux de type AS-α2,3-Gal, mais également par des IAVs humains qui se lient eux aussi aux récepteurs de type AS-α2,6-Gal, voire par des IAVs aviaires qui eux se lient aux récepteurs de type AS-α2,3-Gal [2].

D’autres déterminants peuvent affecter la transmission inter-espèce : des facteurs viraux tels que la stabilité de la HA, l’efficacité de transcription et de réplication, la balance HA/NA ; ou des facteurs d’hôte, comme la température corporelle, l’immunité adaptative pré-existante ou les facteurs de restriction impliqués dans l’immunité innée anti-virale [3–

5].

Au vu de l’historique des swIAVs qui circulent de manière enzootique chez le porc dans le monde, i.e., des virus de sous-types H1N1, H1N2 et H3N2, on observe qu’ils ont tous émergé à la faveur d’une transmission inter-espèce, suivie la plupart du temps de phénomènes de réassortiments ayant permis de fixer des gènes de virus d’origine humaine ou aviaire dans des virus préalablement adaptés à l’espèce porcine [6–8]. L’incorporation de gènes de virus humains est plus fréquente que celle de gènes de virus aviaires [9,10].

Les reconstructions phylogénétiques ont permis de classer les séquences des gènes H1 et H3 des swIAVs en clades et sous-clades, définis non seulement en fonction de l’origine du gène, mais également en fonction de la date de son introduction [11,12].L’adaptation et la diffusion chez le porc de virus aviaires in toto sont rares, n’ayant été rapportées qu’à deux reprises, en Europe (virus H1N1) et en Asie (virus H3N2). Des virus aviaires dits faiblement pathogènes de sous-types H3N3, H4N1, H4N6, H4N8H5N1, H5N2, H5N6, H6N6, H7N2, H7N9, H9N2, ou encore H10N5 et H10N8, ainsi qu’un virus H3N8 équin, ont également été détectés chez des porcins de manière sporadique, mais ces virus ne se sont pas adaptés à l’espèce porcine [13–17]. Des analyses sérologiques ont suggéré des passages aux porcs de virus aviaires hautement pathogènes de sous-types H7N7 et H5N8 [18,19]. D’autres virus réassortants de sous-types H3N1, H2N3 ou H1N7, ayant incorporé des gènes de virus aviaire ou équin, ont aussi été identifiés mais ne se sont pas maintenus [13]. Cependant, des gènes de virus aviaires ont été incorporés dans des virus porcins triple-réassortants (combinant des gènes de virus porcins, humains et aviaires) de sous- types H3N2, H1N2 et H1N1 qui ont émergé en Amérique du Nord à partir de la fin des années 90 et qui se sont depuis largement répandu sur ce continent, ainsi qu’en Asie [8].

Ces virus dits « à cassette TRIG » (triple reassortant internal genes) ont eux-mêmes opéré des réassortiments successifs, via notamment l’acquisition de nouveaux gènes HA et/ou NA d’origines humaines [7,12,20].

Ainsi, des swIAVs de sous-types H1N1, H1N2 et H3N2 sont enzootiques dans toutes les populations porcines du monde, mais de nombreux lignages existent au sein de ces sous- types et se distinguent en fonction des continents (Amérique versus Asie versus Australie versus Europe).

A l’échelle européenne, on distingue quatre lignages principaux de swIAVs enzootiques [21–24]. Le lignage « Eurasian avian-like (EA) swine H1N1 » (H1avN1 ; H1 de clade 1C.2), entièrement d'origine aviaire, est apparu en 1979. Le lignage « human-like réassortant swine H3N2 » (H3N2) a émergé en 1984 suite à un réassortiment entre le virus H1avN1 et un virus H3N2 d’origine humaine issu de la pandémie de 1968, lequel a fourni ses gènes H3 et N2. Le lignage « human-like reassortant swine H1N2 » (H1huN2 ; H1 de clade 1B.1.2) est apparu à la suite d’un réassortiment entre le swIAV H3N2 et un virus H1N1 humain saisonnier, virus qui a fourni son gène H1. Enfin, le lignage « pandemic-like swine H1N1 » (H1N1pdm ; H1 de clade 1A.3.3.2) fait suite à l'introduction, en 2009, du virus humain A/H1N1pdm09 responsable de la première pandémie grippale du XXIe siècle [25,26]. Ce virus humain est lui-même d’origine porcine, car constitué de gènes issus du

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H1avN1 européen et d’un swIAV triple réassortant américain, mais il n’avait jamais été détecté chez le porc avant d’émerger chez l’Homme [27]. Le virus A/H1N1pdm09 est devenu saisonnier chez l’Homme et des transmissions de l’Homme vers le porc au moment des épidémies hivernales, en sus de sa circulation toute l’année dans la population porcine, ont également été documentées [28–31].

Des swIAVs de ces quatre lignages enzootiques co-circulent donc en Europe (dont la France) chez le porc depuis 2009 et de nombreux virus issus de réassortiments génétiques entre ces virus enzootiques ont été détectés au cours des dix dernières années dans de nombreux pays européens. Des virus réassortants étaient déjà détectés avant 2009, mais les combinaisons de gènes se sont diversifiées depuis l’introduction du virus H1N1pdm09.

De nouveaux génotypes viraux sont devenus enzootiques à l’échelle de certains pays, allant parfois jusqu’à supplanter localement les virus parentaux. On pourra citer, par exemple, un virus H1avN2 au Danemark, des virus H1pdmN2 au Royaume-Uni et en Allemagne, etc [24,32–35]. On identifie également, régulièrement, des virus réassortants comportant un gène HA ou un gène NA issus de virus humains saisonniers de sous-type A/H3N2, confirmant que les animaux peuvent être infectés par d’autres virus humains que le virus A/H1N1pdm09 lors des épidémies hivernales [29,36,37]. Ainsi, les génotypes viraux détectés et leurs fréquences relatives varient aujourd’hui largement d’un pays à l’autre, rendant difficile la réalisation de bilans des swIAVs en circulation à l’échelle européenne.

Certains des virus porcins issus des lignages H1avN1, H1huN2 ou H3N2 européens s’éloignent de plus en plus, sur le plan antigénique, des antigènes contenus dans le seul vaccin vétérinaire disponible visant ces lignages, vaccin qui contient des souches inactivées isolées au début des années 2000. Même s’il est connu que la vaccination des truies et le transfert d’immunité passive aux porcelets n’empêchent pas l’infection et ne réduit que partiellement l’excrétion virale en cas d’infection, la diminution de l’efficacité vaccinale vis-à-vis de certains variants pourrait faciliter, voire accentuer leur diffusion [38].

Indépendamment de la vaccination, la distance antigénique entre un virus émergent et les souches préalablement en circulation sur un territoire peut aussi être un élément facilitant sa diffusion, du fait de l’absence d’immunité de population pré-existante. Ces phénomènes ont sans doute contribué à la propagation dans plusieurs autres pays européens, comme l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et la France, du virus H1avN2 qui était préalablement devenu enzootique au Danemark. Deux nouveaux sous-clades, 1C.2.4 et 1C.2.5, ont ainsi été définis début 2021 au sein du clade 1C.2 formé par les gène H1av, en sus des clades 1C.2.1-3 précédemment distingués [39]. Les gènes HA du clade 1C.2.4 présentent des spécificités régionales bien marquées, avec la fixation de certaines délétions/mutations près du site de fixation au récepteur ou dans certains sites antigéniques. Un virus H1avN2 portant une HA de clade 1C.2.4 présentant des caractères propres (génotype dit #E) a émergé en Bretagne en février 2020, sans doute à la faveur d’importations d’animaux vivants excréteurs. Ce virus H1avN2 #E s’est très rapidement propagé dans tout le grand Ouest de la France, provoquant une épizootie marquée, sans précédent depuis l’introduction du virus H1huN2 dans les années 90 [40]. Ce génotype a été le virus le plus fréquemment détecté en France en 2020-2021, bouleversant les proportions des autres lignages précédemment en circulation (voir 2.1).

1.1.2 Virus influenza aviaires

Les virus influenza aviaires ont comme immense réservoir, les oiseaux aquatiques et de ce fait ne peuvent être éradiqués. Les caractéristiques des virus aviaires responsables d’infections humaines jusqu’en 2017 avaient été définis dans les avis des 21/12/2017 et 22/06/18 du HCSP [41] relatifs à l’actualisation de la conduite à tenir lors d’une exposition à des volailles et autres oiseaux atteints d’influenza aviaire hautement pathogène (HP) et

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à risque de transmission humaine. Pour rappel, la dénomination de virus influenza aviaire hautement pathogène et faiblement pathogène (FP) définit le caractère de pathogénicité chez les oiseaux sans préjuger de la sévérité de la pathologie chez l’homme.

Alors que de nombreux sous-types d’hémagglutinine (H1 à H16) existent pour les virus influenza aviaires faiblement pathogènes, seuls deux sous-types, H5 et H7, peuvent présenter des mutations spontanées au niveau du site de clivage de l’hémagglutinine, aboutissant à des virus hautement pathogènes pour les oiseaux, avec une capacité de diffusion systémique chez les volailles et chez les oiseaux sauvages. Certains de ces virus, indépendamment de leur pathogénicité chez les volailles, peuvent être responsables d’infections sévères chez l’Homme avec une létalité élevée malgré leur faible adaptabilité.

Plusieurs sous-types de virus influenza aviaire ont provoqué des infections chez l’Homme mais les virus qui sont étroitement surveillés pour leur potentiel zoonotique sont les virus H5N1, H5N6 et H5N8 de la lignée A/goose/Guandong/1/1996 H5N1 (tous hautement pathogènes pour les oiseaux), ainsi que les virus H7N9 (faiblement et hautement pathogènes pour les oiseaux).

La lignée de virus influenza aviaire hautement pathogène dénommée A/goose/Guandong/1/1996 H5N1 initialement apparue en 1996 en Chine s’est propagée mondialement et les virus issus de cette souche se sont diversifiés en de multiples sous- types, les différentes lignées génétiques du gène HA H5 HP apparentées à ce virus ayant été classées en clades (0-9) et sous-clades phylogénétiquement distincts par dérive et glissement génétiques. Depuis 2008, de nouveaux virus dérivés de virus H5N1 sont apparus par réassortiments avec des virus aviaires faiblement pathogènes aboutissant à des virus hautement pathogènes pour les oiseaux H5Nx (N2,N3,N5,N6,N8) [42]. En particulier, à partir de 2014, les virus influenza aviaire hautement pathogènes H5 de clade 2.3.4.4 (de sous-clade 2.3.4.4a puis de sous-clade 2.3.4.4b à partir de 2016) se sont répandus mondialement et ont provoqué plusieurs vagues épizootiques en Europe dont la dernière, une des plus importantes que l’Europe ait connue, date de l’hiver 2020-2021. Au cours de celle-ci plusieurs sous-types H5N8, N5, N4, N3 et N1, ont été détectés, attestant des nombreux réassortiments des virus de ce clade. Actuellement, une nouvelle vague épizootique d’influenza aviaire HP affecte l’Europe avec plus de 27 pays concernés ainsi que l’Asie et l’Afrique. L’avifaune migratrice est particulièrement touchée et plus de 500 notifications en Europe de virus d’influenza aviaire en avifaune sauvage rapportées depuis le 01/08/2021. Les élevages de volailles sont également concernés dans plusieurs pays avec plus de 190 élevages (principalement des élevages de dinde de chair, de poulets de chair et de poules pondeuses) atteints depuis le 01/08/2021. Le sous-type majoritaire détecté est un virus de sous-type H5N1 du clade 2.3.4.4b de la lignée A/goose/Guandong/1/1996. La France est également concernée avec deux élevages atteints dans le département du Nord depuis le 27/11/2021 et de nombreux cas en avifaune (plus de 300 oiseaux sauvages morts dans le département de la Meuse).

Plusieurs cas de transmission de ces virus H5Nx à l’Homme ont été identifiés depuis 2017 (voir chapitre 4.2.2.)

Les virus aviaires hautement pathogènes de sous-type H7 (H7N7, H7N9) sont des dérivés de virus aviaires faiblement pathogènes mais ils ont acquis des facteurs de haute pathogénicité pour les oiseaux par insertion d’acides aminés au niveau du site de clivage de l’hémagglutinine et des caractéristiques génétiques contribuant à permettre infecter l’Homme [43].

D’autres virus aviaires faiblement pathogènes (H6N1, H7N2, H7N3, H7N4, H7N7, H7N9, H9N2, H10N3, H10N7, H10N8) sont responsables d’infections chez l’homme [44].

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De manière concomitante à l’épizootie survenue en élevages porcins avec le virus H1avN2 portant une HA de clade 1C.2.4 (voir 1.1 a et 2.1), plusieurs élevages de dindes reproductrices présentant des symptômes de chute de ponte ont été signalés d’avril 2020 à novembre 2021, les virus influenza caractérisés à l’occasion de ces cas en élevages de dindes reproductrices étaient directement apparentés phylogénétiquement pour les 8 segments viraux avec les virus porcins H1avN2. L’analyse phylogénétique conduite sur les génomes de virus porcins et aviaires suggère au moins trois passages inter-espèces du porc vers la dinde [45]. Il est à noter que la dinde est une espèce aviaire bien connue pour sa sensibilité aux virus influenza, y compris d’origine porcine [46,47].

1.2 Transmission à l’Homme, source d’infection et facteurs virologiques favorisants

La transmission des virus influenza porcins et aviaires à l’homme est multifactorielle. Elle dépend de facteurs intrinsèques au virus, de facteurs liés à l’hôte ainsi que de facteurs extrinsèques démographiques et sociologiques.

1.2.1 Virus influenza porcins

Les swIAVs sont excrétés dans les sécrétions oro-nasales du porc. La transmission d’un animal à l’autre peut se faire par contact direct ou indirect, mais la transmission au sein d’un lot/groupe, voire d’un élevage, se fait essentiellement par le biais des aérosols formés lors de la toux et des éternuements [48]. La transmission à l’Homme peut elle aussi se faire par contact, impliquant le transfert du virus aux muqueuses faciales telles que les yeux, les narines et la bouche, directement via des gouttelettes (particules de plus de 10 µm de diamètre) ou indirectement par l'intermédiaire d’objets contaminés par des virus ou fomites. En outre, la transmission du porc à l’Homme par voie aérienne implique l'inhalation de particules de moins de 100 μm de diamètre (fraction inhalable), dont le dépôt dans l’arbre trachéo-bronchique va dépendre du diamètre aérodynamique moyen (fraction alvéolaire : particules de moins de 4 μm). La transmission de virus porcins à l’Homme par la voie aérienne est suspectée dans de nombreux cas d’infections zoonotiques [49,50].

La transmission de virus d’origine humaine vers le porc (voir 1.1 a) relève des mêmes mécanismes que celle du porc vers l’Homme [51].

Les virus influenza porcins se multiplient principalement dans les cellules de l’arbre respiratoire du porc. Il n’y a pas de virémie, pas de multiplication dans les muscles et donc pas de transmission via les produits carnés qui entrent dans l’alimentation humaine. Les virus influenza porcins ne se multiplient pas, ou de manière limitée pour quelques souches (notamment d’origine humaine), dans la sphère digestive du porc [52,53]. L’excrétion virale via les fèces reste a priori très anecdotique même si des ARN génomiques et des particules infectieuses ont pu être détectées dans cette matrice [54,55], possiblement à la faveur de l’ingestion par l’animal de sécrétions oro-nasales contaminées [56].

L’augmentation de la diversité génétique à la suite de l’introduction dans les swIAVs de gènes issus de virus humains ou aviaires, ainsi que la persistance des swIAVs dans les élevages (voir 2.1 a), ne font qu’accroître les risques de co-circulations virales, donc de co- infections et d’émergence de nouveaux virus réassortants [37]. L’émergence de nouveaux génotypes viraux peut avoir des conséquences importantes du point de vue de la santé animale, en termes de diagnostic moléculaire ou sérologique des infections grippales chez le porc, mais aussi de virulence des souches, de capacité de transmission ou de diffusion dans la population porcine, d’échappement à l’immunité spécifique de l’hôte ou à la protection vaccinale. En outre, les épizooties marquées dues à des nouveaux swIAVs émergents peuvent constituer un risque au regard de leur transmission vers l’Homme, voire d’autres espèces animales, puisque les risques d’exposition dans les élevages et dans

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l’environnement augmentent quand la pression d’infection en élevage est forte. De plus, les virus émergents peuvent avoir acquis de nouvelles propriétés augmentant leur capacité de franchissement de la barrière d’espèces, et donc présenter un potentiel zoonotique accru [12,57]. Les personnes qui présentent des facteurs de risque vis-à-vis des infections grippales sont particulièrement concernées par le risque de développer une forme grave en cas d’infection par un swIAV.

Dans la plupart des cas, les swIAVs détectés chez l’Homme, alors appelé A(H1N1)v, A(H1N2)v ou A(H3N2)v (v pour variant) d’origine porcine, n’acquièrent pas la capacité de se transmettre d’homme à homme. Cependant, des cas groupés liés à une transmission inter-humaine ont pu être documentés [49] (voir 4.2). Surtout, on retiendra que le virus porcin H1N1 multi-réassortant qui a émergé chez l’Homme au Mexique en 2009 (H1N1pdm09) a pu acquérir un potentiel de transmission inter-humaine très efficace puisqu’il a été responsable d’une pandémie [58].

Depuis la pandémie de 2009, il est régulièrement rapporté des cas d’infections zoonotiques par des swIAVs réassortants comportant un ou plusieurs gènes du virus A(H1N1)pdm09, lesquels ont émergé à la suite de l’introduction de ce virus dans l’espèce porcine (voir 1.1 a). Des études expérimentales, dont certaines menées chez le furet, rapportent que certains de ces virus réassortants pourraient effectivement avoir un potentiel zoonotique accru [12,57,59].

Un des risques liés aux infections humaines par le virus A(H1N1)pdm09 en provenance du porc relève du fait qu’il évolue différemment dans les deux espèces. Plus de 10 ans après son émergence, les reconstructions phylogénétiques montrent que certaines des souches isolées chez le porc se classent dans des génogroupes spécifiques de l’espèce [24,30,36,60]. Les mutations accumulées concernent tous les gènes et on ne distingue pas clairement, pour le moment, de déterminants bien particuliers de la spécificité d’hôte, d’autant que ceux-ci pourraient varier en fonction des régions géographiques [36].

Cependant, la distinction de signatures génétiques uniques des souches H1N1pdm09 circulant chez le porc permettrait d’améliorer le diagnostic des infections d’origine zoonotique chez l’Homme [60], d’autant que la fixation de mutations particulières dans l’espèce porcine pourrait modifier certaines propriétés virales dont l’impact chez l’Homme ne peut être prédit.

Pour le moment, et en dépit de la dérive antigénique observée pour certains clusters géographiques [24,61], les souches H1N1pdm09 isolées chez le porc restent pour la plupart encore liées aux souches saisonnières sur le plan antigénique [30,60]. Le vaccin contre la grippe saisonnière humaine permet vraisemblablement, de conférer un certain niveau de protection vis-à-vis du virus H1N1pdm09 excrété par les porcs.

La problématique liée au fait que les virus influenza évoluent différemment dans les deux espèces (porcine et humaine) est déjà bien connue pour les virus H3N2 [12,62]. La dérive des swIAVs par glissement antigénique s’opère généralement plus lentement chez le porc que chez l’Homme. Ainsi, même si le gène HA des virus H3N2 porcins est d’origine humaine, les réactions croisées sont faibles entre les virus H3N2 porcins qui dérivent des lignages les plus anciens, comme le swIAV H3N2 européen, et l’antigène H3N2 qui est inclus dans la composition du vaccin annuel contre la grippe saisonnière humaine. Celui-ci ne sera donc pas, a priori, efficace vis-à-vis de la plupart des virus H3N2 porcins. Il ne confère pas non plus de protection vis-à-vis des swIAVs H1huN2, ceux-ci étant issus d’un ancien virus H1N1 humain qui n’est plus inclus dans le vaccin contre la grippe saisonnière, ni contre les swIAVs à H1av d’origine aviaire.

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Des infections préalables par des virus humains saisonniers pourraient toutefois conférer une protection croisée partielle vis-à-vis de virus porcins, en lien avec la réponse mémoire à médiation cellulaire [63], voire du fait de réactions antigéniques croisées impliquant des anticorps anti-HA [64,65]. Cependant, le niveau de protection conférée n’est pas objectivé et pourrait être âge-dépendant. Ainsi, les sujets jeunes n’ayant pas été exposés aux anciennes souches humaines préalablement transmises aux porcins seraient plus à risque d’être infectés par des swIAVs ayant incorporé des gènes de ces anciennes souches humaines, voire de développer des formes graves comme cela fut observé lors de la pandémie de 2009 due au virus A(H1N)pdm09 multi-réassortant d’origine porcine [66].

1.2.2 Virus influenza aviaires (voir avis du HCSP [41])

La capacité d’un virus influenza aviaire à infecter l’Homme dépend en premier lieu de sa capacité à interagir avec les multiples facteurs de l’hôte nécessaires à sa multiplication.

Les principaux mécanismes figurent ci-dessous :

• L’interaction de l’HA des virus aviaires avec les acides sialiques récepteurs pour l’attachement du virus à la cellule hôte est dépendante de l’affinité préférentielle de type AS-α2,3-Gal. Or chez l’Homme, les cellules épithéliales porteuses des récepteurs AS-α2,3-Gal sont présentes au niveau de l’épithélium du tractus respiratoire inférieur (bronchioles et alvéoles pulmonaires) ainsi qu’au niveau de la conjonctive alors que celles porteuses de récepteurs AS-α2,6-Gal sont présentes tout au long de l’épithélium de l’arbre respiratoire notamment supérieur, et en très grand nombre

• Les processus de transcription et de réplication du génome viral se déroulent au sein des ribonucléoprotéines (RNP) composées de chacun des segments d’ANR viral, de la nucléoprotéine (NP) et du complexe polymérase formé des protéines PB1, PB2 et PA.

Outre les protéines du complexe polymérase, ces processus requièrent des interactions avec différents facteurs cellulaires. Ainsi l’efficacité de la réplication virale dépend de nombreux déterminants viraux et cellulaires. Un déterminant majeur de la spécificité d’hôte correspond notamment au résidu 627 de la protéine PB2, généralement un glutamate (E) pour les virus aviaires et une lysine (K) pour les virus humains. La seule mutation PB2 E627K détermine la capacité de multiplication des virus aviaires en cellules de mammifères, à 33°C, ainsi que dans le tractus respiratoire supérieur chez la souris ou le furet. D’autres déterminants qui contribuent à l’efficacité de multiplication des virus aviaires chez l’hôte mammifère ont été identifiés au niveau des protéines PB1 et PA.

• L’échappement du virus à la réponse antivirale de l’hôte, notamment la réponse interféron, est essentielle pour une multiplication virale efficace. Les protéines virales NS1 et PB1-F2 sont les principales protéines antagonistes de la réponse antivirale de l’hôte pour lesquelles des déterminants de virulence chez l’hôte mammifère ont été identifiés.

La capacité de multiplication efficace chez l’hôte mammifère ou chez l’Homme ne signifie pas pour autant une capacité de transmission efficace par gouttelettes respiratoires d’un individu à un autre. Des expériences réalisées avec les virus H5N1 chez le furet, modèle animal de choix pour l’infection chez l’Homme lors de transmission interhumaine, ont montré que la capacité de transmission par gouttelettes respiratoires est observée en présence simultanée de mutations qui confèrent la spécificité de fixation de l’HA au récepteur humain SA2,6 avec une bonne affinité, une plus grande stabilité de l’HA et un pH de fusion diminué ainsi qu’une capacité de réplication en cellules de mammifères augmentée. Cette dernière propriété est conférée par la

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mutation E627K dans PB2 ou équivalent. Toutefois, d’autres mutations pourraient être requises pour conférer au virus un potentiel de transmission par voie respiratoire chez l’Homme.

La recherche des mutations associées à la capacité de multiplication chez l’hôte mammifère et la transmission par gouttelettes respiratoires permet ainsi d’évaluer le risque zoonotique des virus aviaires circulants.

Pour les virus H5N1, les différentes mutations d’adaptation à l’hôte mammifère ont été détectées dans la nature parmi les virus aviaires. De plus, certaines mutations telles que les mutations de spécificité pour le récepteur SA2,6 ou la mutation PB2 E627K émergent rapidement lors de la multiplication chez l’Homme et sont plus fréquemment retrouvées pour les virus H5N1 isolés de cas humains. Il est également à noter que les virus H5N1 de clade 2.2.1 qui circulent en Egypte possèdent naturellement la mutation PB2 E627K. Des preuves de la transmission du poulet au furet pour des virus H5N1 de clade 1 ont pu être mises en évidence mais pas pour des virus de clade 2.3.2.1c. La transmission aérienne chez le furet de virus d’influenza aviaire H5N1 dépend de chaque souche et doit donc être investiguée pour chacune [67].

Pour les virus H5Nx, le potentiel zoonotique varie selon les sous-types.

Pour les virus H5N6 isolés d’oiseaux comme de cas humains, des mutations au niveau du site de fixation au récepteur de l’HA ainsi que la perte d’un site de glycosylation en position 158 de l’HA leur confèrent une capacité de fixation aux récepteurs aviaires SA2,3 comme humains SA2,6 avec une affinité comparable ainsi qu’une capacité de fixation à l’épithélium de la trachée et des alvéoles pulmonaires humains in vitro. Les mutations du complexe polymérase d’adaptation à l’hôte mammifère ne sont pas présentes chez les virus issus de volailles mais la mutation PB2 E627K est retrouvée chez les virus isolés de cas humains. Les virus H5N6 aviaires ont une pathogénicité modérée pour la souris. Chez le furet, la pathogénicité est modérée ou plus sévère pour les virus H5N6 qui présentent une délétion dans la tige de la neuraminidase, mais toujours inférieure à la pathogénicité observée pour les virus H5N1. De plus, les virus H5N6 sont transmissibles chez le furet par contact mais pas par aérosol. De façon comparable, les virus H5N2 de la même lignée sont également transmissibles par contact entre furets mais pas par aérosol.

Pour les virus H5N8, des cas humains de grippe aviaire par des souches hautement pathogènes de ce virus ont été observés en décembre 2020 [68]. Même s’il a été montré que ces virus ne sont pas transmissibles chez le furet ni par contact ni par aérosol, des infections chez de nombreuses espèces de mammifères par ces mêmes virus dans plusieurs pays européens lors de l’épizootie d’influenza aviaire hautement pathogène de l’hiver 2020-2021 (renard roux, phoques gris et phoques communs au Royaume-Uni en décembre 2020, de phoques gris en Suède en mars 2021 et de phoques communs en Allemagne en aout 2021 [69] indiquent que ces virus peuvent se transmettre aux mammifères et que ces virus évoluent. Des sérologies positives ont également été rapportées chez le porc en France lors de l’épizootie de 2016-2017 [19]

Il a en effet été observé que la protéine HA de virus H5N8 présentait plusieurs substitutions à surveiller, notamment la mutation T160A qui augmente la capacité de liaison aux récepteurs SA2,6 [70].

Pour les virus H7N9 FP isolés de cas humains mais également des virus de l’environnement, il a été observé i) des mutations dans l’HA qui confèrent une spécificité de fixation aux récepteurs SA2,6, ii) des mutations de spécificité d’hôte et d’efficacité de réplication accrue au niveau des protéines du complexe polymérase (mutation PB2

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E627K ou équivalent), et iii) des mutations dans NS1 ou PB1-F2 associées à une virulence accrue chez l’hôte mammifère ou à l’échappement aux réponses de l’hôte. De plus, des expériences de transmissibilité par contact et gouttelettes respiratoires chez le furet ont montré que les virus H7N9 de la deuxième vague ont acquis ce potentiel qui est encore accru pour les virus de la troisième vague [71]. Cette évolution s’accompagne également d’une baisse du pH de fusion pour les virus de la troisième vague. La pathogénicité des virus H7N9 FP pour le furet reste modérée en dépit de l’évolution virale. Pour les virus H7N9 HP les plus récents, qui ont acquis le caractère HP pour les volailles, il a été montré que les virus isolés de cas humains possèdent une spécificité pour les récepteurs majoritairement de type AS2,3 ou mixte AS2,3/SA2,6 [43]. Ils possèdent la mutation PB2 E627K éventuellement associée à une mutation PB2 K526R qui accroit l’efficacité de réplication chez l’hôte mammifère. Comme les virus H7N9 FP récents, les virus H7N9 HP sont efficacement transmis par gouttelettes respiratoires chez le furet. De surcroit, l’infection par les virus H7N9 HP s’est avérée plus sévère que pour les virus H7N9 FP et même létale chez le furet et la souris alors que la pathogénicité est modérée chez le singe. Chez le furet, la diffusion du virus au cerveau a également été observée comme pour les virus H7N9 FP [72].

Conclusion

Le porc peut être infecté par des virus influenza porcins, humains ou aviaires. Il peut devenir un hôte intermédiaire pour l’adaptation de virus influenza aviaires à l’hôte mammifère, mais surtout il sert de creuset pour la génération de nouveaux virus réassortants comportant des gènes de diverses origines (principalement porcine et humaine) et constitue un réservoir pour d’anciennes souches humaines puisque les virus influenza évoluent différemment dans les deux espèces. Les virus influenza qui émergent et circulent chez le porc sont tous à potentiel zoonotique. L’étude approfondie des virus influenza porcins détectés dans les élevages de porcs ces dernières années, révèle une diversité virale sans cesse croissante, y compris en France, notamment suite à l’introduction du virus humain responsable de la pandémie de 2009, virus qui était lui- même d’origine porcine.

Parmi les principaux virus influenza porcins et aviaires pour lesquels des cas d’infection chez l’Homme ont été détectés, une bonne corrélation est dans l’ensemble observée entre la transmission par gouttelettes respiratoires chez le furet et la présence des mutations caractéristiques des virus humains en termes de spécificité de fixation au récepteur, stabilité et pH de fusion de l’HA, et fonctions de la polymérase virale. Une liste des mutations à considérer pour l’évaluation du risque zoonotique posé par les virus influenza aviaires de sous-type H5N1 est donnée sur le site des CDC américains [73].

Le risque pandémique associé aux virus influenza porcins ou aux virus influenza aviaires à potentiel zoonotique dépend non seulement des facteurs viraux intrinsèques mais également de facteurs liés à l’hôte. Ainsi, des facteurs génétiques peuvent avoir un impact sur la réponse innée et la réponse antivirale de l’hôte qui constituent les premières lignes de défense vis-à-vis de l’infection et contribuent à en limiter la sévérité, ou encore sur la réponse immunitaire essentielle pour le contrôle de l’infection. Par ailleurs, la préexistence éventuelle d’une immunité croisée vis-à-vis d’un autre virus influenza est à prendre en compte dans l’évaluation de la capacité d’infection et de diffusion dans la population. En outre, la densité des populations animales et humaines ainsi que la fréquence et les contacts prolongés avec des animaux fortement excréteurs de virus influenza facilitent chez l’Homme l’accès de ces virus à l’arbre respiratoire (supérieur et profond). Ce sont des facteurs extrinsèques déterminants pour la survenue

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d’infections zoonotiques et l’initiation d’une transmission interhumaine soutenue. Ces facteurs extrinsèques dépendent largement des activités humaines (pratiques d’élevage, de commercialisation, etc.).

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2. La sensibilité des virus zoonotiques aux antiviraux 2.1 Données des études sur l’efficacité des antiviraux

2.1.1 Virus influenza porcins

Comme la plupart des virus influenza de type A, les virus influenza porcins sont globalement résistants aux inhibiteurs de la protéine M2. Lors de la pandémie A/H1N1 pdm09, la mutation S31N (remplacement de la sérine par asparagine) dans la protéine M2 était présente dans la plupart des isolats testés [74]. Par ailleurs, une double mutation V27A (remplacement de la valine par alanine) et S31N a été observée avec une fréquence accrue ces dernières années dans les virus influenza porcins [75].

Les inhibiteurs de la neuraminidase (INA) (oseltamivir, peramivir, zanamivir) restent actifs vis-à-vis des virus porcins. Cependant des mutations ponctuelles ont été décrites telle que la mutation H275Y (remplacement de l’histidine par la tyrosine) dans la neuraminidase (NA) du virus H1N1pdm09, qui confère une résistance à l’oseltamivir alors que la souche reste sensible au zanamivir [76].

De même, les virus influenza porcins sont sensibles au favipiravir, inhibiteur de la polymérase ainsi qu’au baloxavir/marboxil, inhibiteur de l’activité endonucléase de la protéine PA [77].

2.1.2 Virus influenza aviaires

La sensibilité des virus influenza aviaires aux antiviraux a été présentée dans l’avis de 2017 à savoir que ces virus sont naturellement résistants à 45 % aux inhibiteurs de la protéine M2 (amantadine, rimantadine) et que la prévalence des virus résistants circulant chez les oiseaux varie avec le temps, les régions géographiques et les sous-types.

Concernant les INA (oseltamivir, zanamivir, peramivir), les virus influenza aviaires sont naturellement sensibles mais des mutations dans la NA se traduisent par une réduction de la sensibilité virale. L’émergence de la mutation R292K (remplacement de l’arginine par la lysine en position 292) pour des H7N9 de cas humains a en effet été observée, cette mutation confère un phénotype de multirésistance aux INA.

Ces virus sont sensibles au favipiravir, ainsi qu’au baloxavir marboxil.

2.2 Recommandations internationales pour l’utilisation des antiviraux en cas d’émergence de virus influenza zoonotique (porcin ou aviaire) chez l’homme

En 2009-2010, avec l’émergence du virus pandémique d’origine porcine A(H1N1)pdm09, l’Organisation mondiale de la santé avait émis des recommandations en termes de traitement et de chimioprophylaxie par l’utilisation d’antiviraux (oseltamivir, zanamivir) [78]

qui depuis ont été largement reprises dans les recommandations nationales. L’actualisation qui est réalisée concerne l’évolution épidémiologique des cas et l’évaluation du risque de transmission à l’homme [79].

Aux Etats-Unis, s’agissant des virus influenza de type A circulant chez les porcs et susceptibles de provoquer des infections humaines (H1N1v, H3N2v, H1N2v), les CDC ont émis des recommandations en 2017 qui restent d’actualité sur l’utilisation des antiviraux [80].

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Les recommandations américaines sont basées sur celles énoncées vis-à-vis de la grippe saisonnière humaine [81].

• Pour les patients hospitalisés présentant une forme compliquée ou avec des facteurs de risque de forme grave, le traitement à dose thérapeutique par oseltamivir oral est recommandé dès que possible (dans les 48 heures suivant le début des signes cliniques) sans attendre les résultats de dépistage de la grippe (cas confirmé, cas possible, cas suspect). Le zanamivir inhalé et le baloxavir oral ne sont pas recommandés dans le traitement des formes compliquées par manque de données chez les patients présentant des formes graves. Le peramivir intraveineux est non recommandé pour les patients hospitalisés pour la grippe. La prescription plus tardive du traitement antiviral (au-delà de 48 heures après le début des signes) peut rester efficace chez les patients présentant une forme modérée ou grave.

• Un traitement antiviral par oseltamivir oral, zanamivir inhalé, peramivir intraveineux ou baloxavir oral est recommandé en ambulatoire chez les patients (cas possible, cas suspect) s'ils présentent des facteurs de risque de forme grave. En l’absence de facteurs de risque, ce traitement peut être prescrit s’il est initié dans les 48 heures après le début des signes cliniques.

• Le traitement antiviral à dose prophylactique peut être proposé en post-exposition chez les personnes à haut risque de forme grave (personnes immunodéprimées, greffés de cellules souches hématopoïétiques dans les 6 à 12 mois post-greffe, les receveurs de transplantation pulmonaire), chez les contacts familiaux eux même à risque de forme graves.H1N1

L’ensemble de ces recommandations ne sont pas différentes de ce qui avait été présenté par les CDC pour le traitement ou la prévention des cas d’infections humaines par des virus influenza aviaires [82].

L’ECDC ne présente pas de recommandations spécifiques pour le traitement antiviral des cas humains de grippe dus à des virus porcins si ce n’est que la chimioprophylaxie antivirale pré ou post-exposition est à envisager en fonction de l’analyse de risque de formes graves [83].

Au Canada, s’agissant de l’utilisation des antiviraux, il n’est pas détaillé de recommandations spécifiques pour l’utilisation des antiviraux à visée thérapeutique ou prophylactique pour les cas humains dus aux virus influenza aviaires ou porcins [84].

L’agence de Santé publique anglaise (Public Health England) a présenté une actualisation en 2021, des recommandations de prise en charge des cas humains d’infection à virus influenza aviaire, en suivant celles pour la grippe humaine saisonnière (https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachme nt_data/file/968566/Avian_influenza_guidance_and_algorithms_for_managing_incidents_

in_birds.pdf ). S’agissant des cas humains à virus influenza porcin, les recommandations suivent également celles de la grippe humaine [85].

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Tableau 1. Recommandations relatives à la prescription d’antiviraux du CDC [82]

(https://www.cdc.gov/flu/swineflu/interim-guidance-variant-flu.htm )

Critères de la grippe Molécule(s) antivirale (s) Doses Formes compliquées

Patients hospitalisés

Patients avec des facteurs de risque de forme grave

Oseltamivir oral Dose thérapeutique

adulte : 75 mg x2/j pendant 5 joursa

Forme de grippe modérée ou

non compliquée Oseltamivir oral Zanamivir inhalé

Baloxavir oral

Dose thérapeutique

adulte : 75 mg x2/j pendant 5 jours adulte : 10 mg inhalé x2/j pendant 5 jours

Patients non hospitalisés, à

risque de forme grave Oseltamivir oral Zanamivir inhalé Baloxavir oral Peramivir IV

Dose thérapeutique

adulte : 600 mg IV/perfusion unique Patients non hospitalisés, sans

facteur de risque de forme grave Oseltamivir oral Zanamivir inhalé Baloxavir oral

Dose thérapeutique

Si traitement initié dans les 48 H après le début des signes cliniques

Personne Immunodéprimée contact de cas

Contacts familiaux à risque de

forme grave Oseltamivir oral

Zanamivir inhalé

Chimioprophylaxie post-exposition adulte : 75 mg x1 /j voire 75 mg x2/j pendant 7 jours

a : traitement pendant 10 jours chez les personnes immunodéprimées

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3. Le diagnostic virologique des infections zoonotiques chez l’Homme

Les techniques de RT-PCR en temps réel restent les techniques de choix pour la détection rapide et spécifique des virus zoonotiques porcins et aviaires chez l’Homme.

3.1 La technique de RT-PCR

Spécifique du gène M avec amorces et sondes actualisées aux IAVs en circulation depuis la pandémie de 2009 permet de détecter l’ensemble des virus influenza A d’origine zoonotique comme ceux de la grippe saisonnière avec une très bonne sensibilité.

La détermination du sous-type viral (HxNy) nécessite la mise en œuvre de tests de RT-PCR utilisant des amorces spécifiques du gène codant l’HA et de celui codant la NA adaptées à chacun des sous-types et/ou lignages viraux. Compte tenu de l’évolution génétique constante des virus, une actualisation régulière des amorces et sondes utilisées est nécessaire. Cela suppose un suivi de l’évolution des séquences des virus influenza dans les différentes espèces, lequel est réalisé par le centre national de référence (CNR) des virus des infections respiratoires (dont la grippe) pour les virus saisonniers et par les Laboratoires Nationaux de Référence (LNR) Influenza porcin et Influenza aviaire (Anses) pour les virus influenza porcins et aviaires, respectivement. De plus, afin de pallier ces évolutions, ces techniques spécifiques réservées aux laboratoires de référence seront amenées à être adaptées afin d’être en capacité de détecter des virus à potentiel zoonotique.

3.2 En complément de la détection par RT-PCR,

Les nouvelles méthodes de séquençage à haut débit (NGS) permettent la détermination de la séquence du génome complet des virus influenza A quel que soit leur sous-type ou lignage.

Ces méthodes sont en particulier indiquées lorsque le sous-type d’un virus influenza infectant un patient n’a pas pu être précisé par les méthodes citées précédemment, notamment celles permettant d’identifier les gènes HA et/ou NA des virus humains saisonniers. Les méthodes sans a priori reposent sur la production d’amplicons au moyen d’amorces complémentaires des séquences conservées à l’extrémité de chacun des segments du génome des virus influenza A. La séquence consensus du génome complet peut ainsi être établie pour des virus isolés ou directement à partir de prélèvements biologiques à condition que la charge virale soit suffisante. L’analyse phylogénétique des séquences, au regard des séquences disponibles dans les bases de données (i.e. GISAID) permet ainsi de déterminer la filiation de chacun des segments génomiques (sous-type, lignage, etc.) et d’identifier le cas échéant la survenue d’évènements de réassortiment. Ainsi, le séquençage peut également permettre de discriminer une souche H1N1pdm saisonnière d’une souche H1N1pdm d’origine porcine chez les patients rapportant un historique d’exposition à des porcs, d’autant que les virus H1N1pdm qui circulent chez le porc peuvent être des virus réassortants contenant un ou des gènes internes issus d’autres lignages porcins [60]. Par ailleurs, l’analyse des séquences permet, selon les données de la littérature, de rechercher la présence de déterminants associés à la capacité de multiplication du virus chez l’hôte mammifère, à la transmission par gouttelettes respiratoires, ainsi qu’à la virulence ou la résistance aux antiviraux. De plus, l’analyse des séquences permet d’identifier la présence de variants minoritaires au sein de la population virale et la mise en évidence de populations virales mixtes au niveau de déterminants clés (par exemple un mélange de virus résistants et sensibles aux INA).

3.3 Les tests rapides d’orientation diagnostique grippe

Ils permettent au mieux de déterminer le type viral. Ils ne sont pas adaptés à la détection de virus à potentiel zoonotique dans la mesure où leur sensibilité et spécificité sont susceptibles d’être diminuées.

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4. Les données épidémiologiques relatives aux virus influenza porcins et aviaires 4.1 Chez l’animal

4.1.1 Virus influenza porcins

Les infections grippales sont très fréquentes en élevages de porcs, notamment dans les zones de forte densité porcine. Une enquête de séroprévalence menée en France avant l’introduction du virus A(H1N1)pdm09 indiquait que près de 50 % des élevages dont les porcs sont élevés en bâtiments étaient touchés, dans toutes les régions de l’hexagone étaient touchés, dans toutes les régions de l’hexagone [86].

L’analyse couplée des données épidémiologiques et virologiques accumulées via la surveillance évènementielle (réseau de surveillance Résavip, https://www.plateforme- esa.fr/page/thematique-virus-influenza-chez-le-porc) montre que les syndromes grippaux touchent tous les types d’élevages au sein desquels sont affectés tous les types d’animaux, de tous âges et de tous stades physiologiques [87]. Cependant, plus de la moitié des animaux trouvés infectés ont moins de 10 semaines d’âge. Le syndrome grippal est jugé d’intensité normale dans trois quarts des cas environ et d’intensité sévère dans 25 % des cas confirmés positifs. Il n’a pas été mis en évidence de relation statistique entre l’intensité des symptômes et l’âge des porcs infectés, ni entre l’intensité des symptômes et le virus impliqué.

Depuis le début des années 2000, jusqu’en 2019, les swIAVs européens du lignage « avian- like swine H1N1 » (H1avN1) étaient responsables des trois-quarts des cas de grippe chez le porc, circulant sur l’ensemble du territoire [21,87]. Les virus du lignage « human-like reassortant swine H1N2 » (H1huN2) comptaient pour environ 20 % des cas, affectant plutôt les élevages de l’Ouest et du Nord. Le virus « human-like swine H3N2 » (H3N2), était seulement identifié très sporadiquement dans le Nord. Un variant antigénique du virus H1huN2 avait émergé en 2012 et compté pour près de la moitié des souches H1huN2 pendant quelques années, mais ne s’est pas maintenu et n’a plus été détecté qu’une seule fois en 2019. Des virus H1avN2 et H1huN1 étaient ponctuellement détectés dans le Grand- Ouest, issus de réassortiments entre souches enzootiques. Le virus « pandemic-like swine H1N1 » (H1N1pdm09) a vu sa fréquence augmenter entre 2010 et 2019, jusqu’à représenter près de 8 % des souches identifiées en 2019. C’est le seul sous-type à avoir été davantage détecté en hiver, lorsqu’il était prévalent chez l’Homme au moment des épidémies saisonnières [30,87]. Des virus réassortants comportant un ou plusieurs gènes du virus H1N1pdm09 étaient également identifiés de temps en temps [88]. Enfin, des virus portant un gène N2 de virus H3N2 humain saisonnier ont aussi pu être caractérisés [37].

En 2020, les proportions des différents sous-types de swIAVs ont été largement modifiées suite à l’introduction, l’adaptation et la diffusion d’un virus H1avN2 d’un nouveau génotype (génotype #E d’origine danoise, voir 1.1.1) [40].

Ainsi, le génotype H1avN2 #E aura compté pour 65 % environ des virus identifiés en 2020- 2021. Inversement, les virus H1avN1 et H1huN2 n’ont plus représenté que 27 % et 3 % des souches, respectivement. La fréquence (3 %) du virus H1N1pdm a également diminué. Il n’a pas été détecté de souches H3N2, mais de nouveaux virus réassortants H1pdmN2 ont fait leur apparition dans le Nord du pays.

a) Voies de transmission chez le porc et sévérité du syndrome grippal

Le virus est excrété chez le porc en moyenne 6 jours pendant la phase aiguë de l’infection dans les sécrétions nasales d’animaux malades ou infectés de manière asymptomatique [48]. Les titres viraux peuvent être supérieurs à 107 particules infectieuses/mL dans les sécrétions nasales au pic d’excrétion. La transmission du

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virus entre porcs se fait principalement par contact direct avec des sécrétions infectieuses par voie naso-pharyngée ou par la dispersion des aérosols produits par les porcs excréteurs lors de toux ou d’éternuements. Les swIAVs se transmettent entre les élevages principalement par les mouvements d’animaux infectés vers un élevage sensible ; la transmission par voie aéroportée est cependant possible dans les zones à forte densité, jusqu’à 2 kms sous des vents dominants [89].

Le taux de reproduction de base (R0) a été estimé, expérimentalement, à près de 15 pour des porcelets dépourvus d’immunité passive et à plus de 5 pour des porcelets ayant encore des anticorps maternels [90]. Ceci indique que le virus peut se propager au sein des bandes de porcelets issus de truies infectées ou vaccinées. Le processus de dissémination est plus lent que celui observé chez les porcelets dépourvus d’immunité passive, ce qui conduit à la présence d'animaux excréteurs sur une plus longue période de temps à l'échelle de la population. Ce phénomène favorise la persistance du virus dans l’élevage, d’autant que la réponse immunitaire des animaux infectés en présence d’immunité pré-existante est largement perturbée [91].

Une grippe d’intensité normale se manifeste par des signes cliniques modérés, associant de l’hyperthermie, des signes respiratoires frustes ou modérés et éventuellement une apathie associée à de l’anorexie ne dépassant pas deux à trois jours. Les taux de mortalité sont généralement faibles. Même si la morbidité peut toucher 100 % des individus d’un lot, le rétablissement s’opère d’ordinaire en cinq à sept jours. Cependant, la sévérité de la maladie peut varier en fonction de la virulence de la souche impliquée, de l’âge des animaux, de leur statut immunitaire et des infections bactériennes ou virales concomitantes. La grippe d’intensité élevée est caractérisée par des manifestations cliniques marquées, associant de l’hyperthermie, des signes respiratoires sévères (toux, toux quinteuse, dyspnée) sur une large proportion d’animaux et persistant plusieurs jours, éventuellement accompagnées de mortalité. Inversement, certaines infections peuvent passer inaperçues, n’entraînant pas de syndrome grippal aisément identifiable au sein d’un troupeau, alors même que les animaux sont excréteurs.

b) L’apparition d’une nouvelle forme de grippe : la grippe dite récurrente à l’échelle du troupeau

Sous sa forme dite classique, la grippe chez le porc a souvent été décrite comme une affection épisodique, touchant rapidement un grand nombre d’animaux, une à deux fois par an, mais ayant peu de conséquences à long terme sur la santé du troupeau.

Cependant, la surveillance évènementielle menée en France a montré que les swIAVs circulent toute l’année indiquant que la grippe du porc n’a pas de caractère saisonnier (indépendamment du sous-type viral incriminé) probablement en lien avec les caractéristiques des systèmes de production (renouvellement permanent de la population via la conduite en bande, confinement, élevage des animaux dans des compartiments successifs en fonction de leur âge avec de nombreux brassages …) [87]. Depuis quelques années, les bilans annuels du Résavip indiquent que plus de 40 % des cas relevés en élevage correspondent à de la grippe dite récurrente qui, contrairement à la forme épizootique, va perdurer dans l’élevage pendant plusieurs mois voire années. Il n’a pas été mis en évidence de relation statistique entre le type de grippe (classique ou récurrente) et l’intensité des symptômes, ni entre le type de grippe et le sous-type viral incriminé. Cette persistance de virus grippaux en élevage via plusieurs vagues d’infections consécutives et d’intensité variable a également été décrite dans d’autres pays (Pays-Bas, Espagne, Allemagne, Danemark…). Persistante à l’échelle de l’élevage, la grippe se répète ainsi sur chaque bande à âge fixe,

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principalement vers 7-8 semaines d’âge, le plus souvent dans des élevages où les reproducteurs sont vaccinés [87,92]. Cette circulation continue en post-sevrage (le plus souvent) entraine une déstabilisation permanente de l’élevage et pourrait donc servir de source permanente de dissémination du virus et contribuer à la co-circulation de différents sous-types pouvant former des réassortants.

c) Facteurs de risque de l’infection des élevages et de la persistance des virus influenza porcins

Les virus influenza porcins sont généralement introduits dans un élevage à la faveur de l’introduction d’animaux vivants contaminés et excréteurs. L’introduction de swIAVs via l’environnement est également suspectée dans les zones de forte densité (voir plus haut). Enfin, des virus influenza humains sont régulièrement introduits via les personnes travaillant au contact des porcs, lorsqu’elles sont elles-mêmes touchées par la grippe saisonnière (zoonose inverse, voir 1.1 1 et 1.2 1).

La structure des élevages actuels, avec un grand nombre de porcs élevés dans un même environnement, facilite la transmission entre les individus. En effet, plusieurs études ont identifié la densité d’élevages de porcs, la densité de porcs par salle, la taille du troupeau et le renouvellement important d’animaux en tant que facteurs de risque d’une infection par les virus influenza. D’autres facteurs telle que le type d’élevage (naisseur-engraisseur), les pratiques (adoptions, mélanges…), le logement et les circuits de ventilation, la structure et la taille des cases et le manque de biosécurité des élevages favorisent également l’introduction et la persistance des swIAVs. Dans la plupart des cas, le processus infectieux s’éteint dans les élevages d’engraissement exclusif après un processus épizootique classique, et ceci d’autant plus s’ils sont conduits en tout plein-tout vide (pratique d’élevage consistant à peupler et dépeupler tous les animaux d’un même élevage simultanément, ce qui favorise la rupture des cycles de contamination). Dans les élevages de type naisseur-engraisseur, où des animaux plus ou moins sensibles selon leur immunité sont toujours présents et où des cochettes de renouvellement potentiellement sensibles sont introduites à intervalle régulier, le virus semble pouvoir persister au sein de la population, même lorsque les salles sont conduites en tout plein tout vide, soulignant l’importance de la conduite et des conditions d’élevage (intervalle entre deux bandes successives, mouvements d’animaux, flux d’air entre les salles) dans la gestion des virus influenza porcins [93].

4.1.2 Virus influenza aviaires

a) Voies de transmission chez les oiseaux

Chez les oiseaux, les virus influenza aviaires sont excrétés dans les fèces et les sécrétions respiratoires. La transmission peut être directe par des contacts rapprochés entre individus via les sécrétions d’oiseaux infectés, en particulier par les matières fécales. Elle peut aussi être indirecte par aérosol (sécrétions respiratoires), et par tout vecteur passif contaminé (aliments et eau contaminés mais aussi matériels, personnels, véhicules, etc). Le virus pénètre dans l’organisme des volailles le plus souvent par la voie respiratoire mais également par la voie digestive.

En raison de la nature résistante des virus influenza aviaires, y compris de leur capacité à survivre pendant de longues périodes lorsque les températures sont basses, ils peuvent également survivre plusieurs semaines dans l’environnement.

Dans les fientes, le virus est capable de résister jusqu’à 7 jours à 20°C, 35 jours à 4°C. Ainsi, une combinaison de facteurs tels qu’une température basse, un pH neutre, une faible salinité, une non exposition aux UV ou encore une protection par un milieu

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riche en matières organiques favorise de manière importante la persistance de ces particules virales et le maintien de leur infectiosité. La transmission à l’Homme est similaire aux virus influenza porcins, et se fait par inhalation de particules aériennes respirables et non-respirables contaminées ou par contact avec les oiseaux infectés dans les élevages, marché de volailles vivantes ou abattoirs.

b) Facteurs de risque de l’infection des élevages aviaires

Les oiseaux sauvages (oiseaux aquatiques essentiellement) sont des hôtes naturels et des réservoirs pour tous les types de virus influenza aviaire, ils jouent donc un rôle majeur dans l’évolution, le maintien mais aussi la propagation de ces virus. L’avifaune sauvage infectée représente la principale voie d’introduction de virus influenza aviaire hautement pathogène (VIAHP) pour les volailles domestiques notamment en Europe et en France, lors de son passage ou séjour sur le territoire. Il résulte de cette introduction, selon le nombre d’oiseaux sauvages infectés et la fréquentation des lieux par ces oiseaux migrateurs, un environnement infecté avec une pression virale plus ou moins forte, associée à une virulence dépendante du virus concerné. De ce fait, l’incidence de l’infection est saisonnière et particulièrement marquée à l’automne au moment de la migration descendante. La contamination via la faune sauvage peut être directe, mais la voie majeure d’introduction est indirecte, via un environnement contaminé. Des activités humaines, de l’eau, des aliments ou du matériel contaminé par des oiseaux sauvages infectés représentent autant de vecteurs passifs susceptibles de contaminer les élevages. La présence d’oiseaux en plein air ou insuffisamment protégés de l’avifaune sauvage (basse-cours, élevages familiaux, oiseaux d’ornement ou élevages plein air) représente donc un facteur de risque majeur d’introduction de la maladie dans le compartiment domestique à cette période, de même qu’un respect insuffisant des mesures de biosécurité externe.

Lors d’épizootie en élevage, ce sont essentiellement les élevages avicoles infectés qui représentent la source majeure de diffusion des virus. Les liens épidémiologiques entre élevages et notamment les mouvements d’animaux représentent un risque important de diffusion. La proximité entre élevages et la densité d’animaux sont aussi des facteurs favorables à une diffusion de proche en proche. La transmission peut aussi se faire depuis l’environnement infecté, du fait du respect insuffisant des mesures de biosécurité externe.

4.2 Chez l’Homme

4.2.1 Épidémiologie des cas humains d’infection par un virus influenza porcin (grippe porcine) Des cas de transmission à l’Homme de virus influenza d’origine porcine sont détectés dans le monde depuis les années 1950. Les cas décrits sont essentiellement dus à trois sous- types : H1N1v, H1N2v et H3N2v, ces derniers concernant dans la très grande majorité des cas survenus aux États-Unis [94]. Du fait de leur caractère généralement bénin, il est très probable qu’ils ne soient pas systématiquement détectés et donc que leur nombre (plus de cinq cents cas confirmés par diagnostic moléculaire ou virologique, cf. tableau 2) soit très sous-estimé.

Les expositions à risque rapportées pour les cas de grippe humaine d’origine porcine sont principalement liées à une exposition directe à des porcs ou à un environnement contaminé par des porcs, que ce soit en élevage, dans des foires ou des salons d’exposition [95–99].

Des modélisations soutiennent l’hypothèse que les travailleurs du secteur porcin sont exposés à un risque d'infection par la grippe zoonotique [100]. Quelques enquêtes sérologiques ont d’ailleurs montré une plus forte prévalence d’anticorps anti-swIAV chez les personnes fréquentant régulièrement les élevages de porc par rapport à une population

Références

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