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Remarques incertaines sur l'axiomatisation en géographie humaine

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Remarques incertaines sur l'axiomatisation en géographie humaine

RAFFESTIN, Claude

RAFFESTIN, Claude. Remarques incertaines sur l'axiomatisation en géographie humaine. In:

Géopoint 80 : Axiomes et principes en géographie . 1980. p. 136-145

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:4520

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A T E L I E R AXIOMES OU P R I N C I P E S DE L'ANALYSE SPATIALE

REMARQUES INCERTAINES SUR L'AXIOMATISATION EN GEOGRAPHIE HUMAINE

Claude RAFFESTIN

Ce ti tre, inquiet, n ' a pas d'autre objectif que d'exprimer mon état d'incertitude ; non par rapport au thème que je trouve stimulant mais par rapport à ma capacité de l'aborder avec une pénétration suffisante.

D ' o ù v a is -j e pa r ti r ? Ai nsi se fo r mu l e l a qu es ti on p réj u dici ell e.

Ma réponse sera historique ( c ' e s t assez dire que je débute mal) et par conséquent peu originale. Les notions d'axiomatique et d'axiomatisation sont apparues d'abord en géométrie et ensuite en mathématique, mais beau- coup plus tard. Si la géométrie est l ' u n e des plus anciennes disciplines c ' est aus si l ' un e d e ce lle s qu i a c o nn u t rè s t ôt le plu s d ' a p plic ati o ns pratiques : sans la maîtrise de la géométrie il aurait été impossible, par exemple, de mesurer les terres après les inondations périodiques du Nil.

Autrement dit les axiomes d'Euclide étaient très enracinés dans l ' e x - périence de l'espace conduisant à des évidences concrètes. La racine du mot axiome signifie d ' a i l l e u r s "pousser devant s o i " ; c'est ce qu'on met en évidence. Evidence tirée de l'expérience, extraite de la pratique des choses. Finalement, les axiomes de la géométrie euclidienne sont tirés d'une pratique et élevés au rang de connaissances évidentes mais non démon- trées. Ce qui signifie que si les conditions étaient changées, l'évidence ne serait plus telle. La géométrie euclidienne n'est donc pas détachée de l'expérienc e et de la pratique des choses. Elle es t une tentative, réussie, de description du monde réel qui nous entoure. Les théories mathématiques modernes rejettent cette idée puisqu'elles cherchent à construire sur un terrain neuf, sur une tabula rasa sur laquelle on va disposer des axiomes arbitraires mais cohérents : "Ces axiomes, posés a priori, régissent l ' e - xistence d'êtres qu'il ne faut en aucune façon placer dans un cadre réel, et dont le nom, toujours précisé, n ' a aucune importance cependant" (1).

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Que ce soit dans la perspective ancienne ou dans la perspective moderne, on a néanmoins affaire à des axiomes : les uns fortement liés au monde réel, les autres apparemment non. Dans le cas d'Euclide, la média- tion est assurée par la pratique et l'expérience que l ' o n a des choses ; dans le cas des mathématiciens modernes, la médiation est assurée par un métalangage produit par eux-mêmes. La "pureté" réside dans le fait, pour les mathématiciens modernes, que les axiomes posés sont "construits" et non tirés d ' u n e expérience. Mais dans tous les cas, et en cela je suis d'accord avec Nicolas-Obadia, l'axiome est idéologique dans la mesure où il résulte d ' u n e "production".

Ceci dit, mon état d'incertitude est toujours aussi grand car je me demande si dans le cas de la géographie il faut poser des axiomes au sens de la géométrie euclidienne ou au sens de la mathématique actuelle. Si l ' o n répond au sens de la mathématique moderne on risque de s'enfermer dans un formalisme excessif. En fait, il n ' e s t pas possible de répondre sans savoir quel est l ' o b j e t de la géographie humaine. Si l'objet de la géométrie est

" l ' e s p a c e " il n ' e s t pas certain que l ' o n puisse déterminer d ' u n e manière univoque l ' o b j e t de la géographie humaine.

Cette incertitude m'amène à formuler une seconde question préju- dicielle. Quel est l ' o b j e t de là géographie humaine ? Question banale, irritante parce que toujours posée et reposée mais pourtant essentielle si l ' o n veut envisager une axiomatique. Comment axiomatiser une d i s c i - pli ne non identifiée ? Deux conc eptions s'affrontent ac tuellement relati -vement à l ' o b j e t de la géographie.

La première est c e l l e de la géographie classique : la géographie est la science de l ' e s p a c e ou selon le mot de Vidal de la Blache "la science des lieux". Etant entendu que cette conception peut être mobilisée par diverses problématiques (morpho-fonctionnelle, quantitative, "huma-ni ste", etc.). Par exemple, pour H. Beguin et J. Thisse c ' e s t très expli- citement à cette conception q u ' i l s se réfèrent l o r s q u ' i l s proposent une axiomatique de la géographie. Ils définissent l'espace géographique par des mesures définies sur un espace métrique ( 2 ) . Pour Nicolas-Obadia, sur la base de son axiome chorologique "est géographique tout objet au sens statisti que du terme qui di fférencie l'es pace terrestre", il es t moins a i s é d ' i n d i q u e r quel est l ' o b j e t de la géographie auquel il se réfère.

La seconde conception est c e l l e qui s'enracine dans les sciences

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de l'homme : l'objet de la géographie est la pratique et la connaissance que les hommes ont de l'espace. Il est évident que cette conception peut également être mobilisée par différentes problématiques. Dans ce cas, l ' o b j e t de la géographie n ' e s t pas l'espace mais une relation avec l ' e s - pace à travers une pratique et une connaissance. Cette relation n ' e s t évi- demment pas absente de la géographie classique mais alors pourquoi con- t r a c t e r , d a n s l ' e s p a c e s e u l , c e t t e r e l a t i o n . P a r d é f i n i t i o n s ' i l y a r e l a - tion il y a au moins deux termes. Il y a bien chez Nicolas-Obadia une relation puisque dans son axiome il prend en compte tous les objets qui d i f f é r e n c i e n t l ' e s p a c e . S i l a r e l a t i o n e n t r e l ' o b j e t e t l ' e s p a c e e n t r a î n e la différenciation de l'espace, l'objet est géographique. Dans ces condi- tions, on pourrait reformul er son axiome et dire : est géographique toute relation qui différencie l'espace terrestre. Il ne serait certainement pas d'accord et loin de moi l'idée de lui proposer cette formulation. Ceci dit, son axiome est ambigu, ce qui est grave pour un axiome, car il ne permet pas de comprendre la conception qui est ici en cause. Mais là n'est pas le problème et il s ' a g i s s a i t seulement d'une parenthèse que je m'empresse de refermer.

Ce qui m'importe, pour l ' i n s t a n t , c ' e s t de savoir que la géographie ou plutôt les géographes "fonctionnent" en se référant implicitement ou explicitement à deux objets : science de l'espace ou des lieux (objet A ) , pratique et connaissance que les hommes ont de l'espace ou des lieux (objet B). Dorénavant, par commodité, je parlerai de la conception A et/ou de la conception B.

En matière de géographie humaine, le "dépliage" de A et de B est identique mais la manière de l'observer ne l ' e s t pas. Essayons de le mon- trer en recourant à une formulation simple. Posons l'ensemble ( G ) c'est-à- dire les acteurs, les groupes, l'ensemble (M) ou le médiateur instrumen-tal et l'ensemble ( E ) soit l'espace donné. On se trouve en présence d'une r e l a t i o n t r i a n g u l a i r e d u t y p e G M E = 0 . L e r é s u l t a t d e l ' i n t e r s e c t i o n est un sous-ensemble E' q u ' o n peut qualifier d'espace produit ou d'espace géographique.

D a n s l a c o n c e p t i o n A , o n a c t u a l i s e l e r é s u l t a t d e l ' i n t e r s e c t i o n soit E' mais on potentialise G M E ; dans la conception B on tend à actualiser G M E et à potentialiser E ' . Ce qui signifie que dans le cas "A"

on pratique une méthode régressive pour remonter de E' aux ensembles en intersection tandis que dans le cas de "B" on pratique une méthode

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progressive pour descendre de G M E à E ' .

Si l e s choses obéissaient à cette formulation mathématique sim- p l i s te , j e l 'a c c o r d e, c ' es t - à -d i re s i l es e ns em bl es G, M e t E é t ai e n t parfaitement identifiés, il n ' y aurait aucun problème à passer à E' mais tel n ' e s t pas le cas. En effet, G, M et E sont imparfaitement connus. S ' i l s étaient, sinon parfaitement connus, du moins connus avec une préci-sion suffisante, on disposerait d'une géographie déductive dont l e s linéa-ments existent sous la forme de plusieurs modèles. Cette méconnaissance des ensembles précités conduit à faire prévaloir encore une démarche in-d u c t i v e f o n d é e s u r l ' o b s e r v a t i o n ( d i r e c t e o u i n d i r e c t e ) e t l a d e s c r i p t i o n

( q u a l i t a t i v e o u q u a n t i t a t i v e ) .

La conception A se réfère à un produit complexe dans lequel les proces sus et les relati ons sont cristallisés al ors que la conc eption B se réfère à un ensemble de relations dont dérive un résultat. Il est évident que dans ces conditions l'axiomatisation de A ne peut pas être envisagée comme l'axiomatisation de B. Dans le cas de A on axiomatise E ' , dans le cas de B on doit axiomatiser G, M et E. Sans doute est-il plus économique d'axiomatiser A mais alors il faut s'attendre à rencontrer passablement de contradictions dans la mesure où E' n ' a rien d'homogène ni non plus rien d'univoque puisque c ' e s t le résultat d'un processus. En revanche, axiomatiser B est peu économique mais sans doute théoriquement plus sûr sinon plus facile. La première conclusion, toute provisoire, à l a q u e l l e je parviens est que l ' o n ne peut parler d'axiomatique qu'après avoir par- faitement défini la conception à laquelle on se réfère. Il n ' y a là rien de surprenant et il en va de même en géométrie : les axiomes de la géomé-tri e projec tive qui n'emploie pas le conc ept de grandeur ne sont pas les mêmes que ceux de la géométrie métrique qui y recourt.

Ainsi la volonté d'axiomatiser la géographie pourrait avoir un sous- p r o du i t i n t é res s a nt à s av oi r c el ui d e p ré c i s e r l e o u l es o bj e ts d e l a gé o - graphie. L'axiomatisation de la géographie q u ' e l l e réussisse ou q u ' e l l e échoue débloquera en tout cas ce vieux problème de l ' o b j e t .

Ceci étant dit, on peut, on doit même, se demander pourquoi on veut axiomatiser la géographie ? La réponse ne peut être ni simple ni univoque et mon état d'incertitude demeure entier. La conc lusion provisoi re à la- q u e l l e je s u i s parvenu n ' a pu l'entamer car il me reste suffisamment de lucidité pour ne pas l ' e s t i m e r autrement que banale. Alors ?

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Alors, il faut reprendre la question d'une autre manière et sous un angle différent. La démarche qui a prévalu dans les sciences de l'homme auxquelles appartient la géographie humaine a été c e l l e , je l ' a i rappelé p l u s ha u t, d e l ' o bs e rv ati o n, d e l a de s c ri p ti o n e t d e l ' i n d uc ti o n . L a g é o- graphie a procédé par accumulation d'observations, par comparaison, par analogie et par généralisation : méthode qui fonde notre vieille distinc- tion géographie régionale versus géographie générale. Procédure qui appa- rente le géographe à Sysiphe. Mais dès le XIXe sont apparus des hommes, tel Von Thünen, qui ont cherché à libérer Sysiphe encore que celui-ci con- centré dans son effort ne les ait pas entendus. D'autres âmes compatis- santes se sont penchées sur son sort au XXe. Ainsi les Weber, les C h ri st all e r, l es L o esc h, l es Z i p f, etc ., on t p r op os é d es m o d èles et d es théories qui finalement ont retenu l'attention.

Mais ces modèles et ces théories n'ont pas émergé sans recours à l'observation et à la description : ils proc èdent de l'inducti on, de l ' i n - f ë r en c e e t d e l ' an al og i e . P ou r t an t o n a t en t é d e l e u r fai r e j o ue r u n r ôl e déductif. A cela, il n ' y a rien à redire, à cela près tout de même que la relation triangulaire, indiquée précédemment, G M E n'était pas stable.

Ces modèles et ces théories ont nécessairement été construits sur des ensembles G, M et E observés à un moment ( t ) . Leur application à un moment (t + n) aurait dû contraindre à une redéfinition des ensembles de l ' i n t e r - section, en tout cas pour G et M. Cela suffit à expliquer les discordances e n t re c e q ui ét ai t a tt en d u et ce qui ét ait ob se r v é . Ma is c es " éc a rts "

quelque grands q u ' i l s aient pu être n'avaient pas d'importance relative- ment à l'économie réalisée : économie de temps et d'énergie d'observation.

Les modèles et les théories permettent de n'être plus submergés par les observations ; ils permettent d'organiser celles-ci. Organisation qui pro- cède du rôle déductif q u ' o n a fait jouer à ces modèles et à ces théories.

I l y a un e l i a i s o n e n t re p o uv o i r d éd uc ti f e t p ri nc i pe d 'éc o n o mi e .

Une axiomatique géographique aurait pour conséquences immédiates l' i n t ro d uc t i o n d u p r i nc i p e d e d éd uc ti on d ' un e p a r t et l 'i ntr o d uc ti o n d u principe d'économie d'autre part. En fait, tous les axiomes sont des principes de déduction ( 3 ) comme on peut le constater, par exemple, dans l'axiomatique de Peano qui comporte trois termes et cinq propositions. Les trois termes sont zéro, le nombre et le successeur de ; les cinq proposi- tions sont : 1. zéro est un nombre ; 2. le successeur d ' u n nombre est un nombre ; 3. plusieurs nombres quelconques ne peuvent avoir le même succes- seur ; 4. zéro n ' e s t le successeur d'aucun nombre ; 5. si une propriété

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appartient à zéro et si, l o r s q u ' e l l e appartient à un nombre quelconque, e l l e ap p a rti e nt au s s i à s o n s uc c es s eu r , al o rs el l e a pp ar t i e nt à to us l e s nombres. Pourtant Russell a montré dans Introduction to Mathematical Philosophy que les trois termes premiers se prêtent à des interprétations multiples de sorte qu'il n ' y a pas univocité mais équivocité.

Pour être vraiment rigoureux il faut que soient réalisées certaines conditions fondamentales :

- 1. Que soient énoncés explicitement les termes premiers à l ' a i d e desquels on se propose de définir tous l e s autres.

- 2. Que soient énoncées explicitement les propositions premières à l ' a i d e desquelles on se propose de démontrer toutes les autres.

- 3. Que les relations énoncées entre les termes premiers soient de pures relations logiques, et demeurent indépendantes du sens concret qu'on peut donner aux termes.

- 4. Que seules ces relations interviennent dans les démonstrations, indépendamment du sens des termes (ce qui interdit, en parti- culier, de rien emprunter à la considération des figures) ( 4 ) .

Ces principes étant posés, il convient de se demander quels sont les avantages de la méthode axiomatique. Sans aucun doute, "elle est d'abord un précieux instrument d'abstraction et d'analyse. Le passage d'une théorie concrète à la même théorie axiomatisée, puis formalisée, renouvelle en le prol ongeant le trav ail d'abstraction qui conduit, par exemple, du nombre concret au nombre abstrait". "D'autre part, avant le traitement axiomatique, les notions fondamentales d ' u n e théorie demeurent souvent encore confuses, e l l e s ont des compréhensions à la fois trop ri- ches et insuffisamment explicitées : rien ne nous garantit alors que ces divers éléments resteront toujours compatibles, rien ne nous prémunit con- tre le danger de glisser inconsciemment, dans nos raisonnements, de l ' u n à l'autre" ( 5 ) . Au fond, pour employer un langage immédiat et non technique, l'axiomatisation apparaît comme un processus de "purification" des notions utilisées. N'est-ce pas ce dont la géographie a besoin d ' u n e manière urgente ? Encore une fois, je pense que même si nous ne parvenions pas à dégager une axiomatique de la géographie l'effort ne sera pas vain car il nous aura obligés à faire un gain de cohérence au niveau des notions et des concepts que nous manipulons.

Par a i l l e u r s , l'axiomatique, selon Russell , contraint à généraliser ce qui s i g n i f i e "transformer une constante en une variable : " A i n s i , quand on éc arte l e s significations intuitives , toujours s péci al es, on ne s e rend

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pas seulement capable de penser d ' u n e manière plus dépouillée la théorie initiale, on forge du même coup un instrument intellec tuel pl urival ent, utilisable pour toutes les théories isomorphes à la première" ( 6 ) .

C ' e s t alors qu'on retrouve le principe d'économie que j ' a i évoqué plus haut : "on rassemble plusieurs théories en une seule, on pense le multiple dans l ' u n " ( 7 ) . Par l'axiomatique, on s'approche un peu p l u s de ce "graal" à la recherche duquel sont les géographes : l'invariant.

Pourquoi ? Parce que "l'axiomatique, en décelant les analogies for- melles, révèle des correspondances insoupçonnées entre divers domaines d'une même science, et même des parentés entre des sciences qui semblaient étrangères" (8).

Les disciplines semblent obéir à un processus qui relie diverses étapes : observation, description, induction, déduction et axiomatique. Or une axiomatique se construit sur une théorie déductive laquelle n ' a de valeur que si elle organise un vaste ensemble de lois acquises inductive- ment à la suite d ' u n e longue exploration des phénomènes. Dès lors la ques- tion fondamentale est de savoir si la géographie est parvenue à un degré suffisant de maturité pour qu'une ou plusieurs axiomatiques soient possi- bles. Apparemment, la réponse est positive. En tout cas pour la conception A qui est en mesure de poser une série de principes du type : homogénéité de l'espace, isotropie, distance métrique. C ' e s t tout ce qui a trait à l'espace-lieu de la science régionale. A-t-on affaire à une axiomati que ou à une pré-axiomatique ? Je vais emprunter un exemple à Lajugie, Delfant et Lacour et le discuter ( 9 ) .

Pour ces auteurs, l'espace est défini comme l'ensemble A des lieux "a" contenus dans un plan.

Par ailleurs "on peut concevoir une l i s t e de facteurs que l ' o n peut trouver en chaque lieu ; celui-ci n ' e s t plus seulement un point cartographique mais un point d'activités" (10). Poursuivons le raisonnement des auteurs p r é c i t é s : " L ' a c t i v i t é z e s t , p a r e x e m p l e , e n a , . , s o i t a l o r s l e s c a r a c - tères Cl, C2, Cm susceptibles d'être trouvés en tout point an n . On a alors l'ensemble économique F

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Soit maintenant une activitéU1, qui cherche à se localiser dans l'espace A du point de vue géographique et dans l'espace F du point de vue économique.

Admettons que par observation courante (devenant ainsi un axiome faible) l ' a c t i v i t é U1 demande au moins les valeurs minimales C-, ou p l u s les valeurs maximales C+ des caractéristiques spatiales nécessaires à son implantation soit ainsi :

La localisation L de U1 résulte de l'inters ec ti on des ensembles F et Ru,, soit -Lu1 = Ru1 F.

Si l ' o n recherche l e s termes premiers de cette préaxiomatique on va évidemment retomber sur ceux que nous avons mis en évidence soit G les acteurs, soit M les instruments, soit E l'espace. Cependant ils ne sont pas chez Lajugie, Delfand et Lacour explicités de cette manière. Tout proces sus de localisation es t bien sous sa forme la plus général e, et aussi, la plus banale es t bien une intersec ti on entre

G M E = L

Seulement les termes premiers u t i l i s é s dans le processus de déduction sont ambigus puisque G et M n'apparaissent pas en tant que termes dis-ti nc ts mais sont contractés . En effet, G et M sont restitués sous la forme de Ru.. C'est-à-dire que l'acteur et son médiateur instrumental ne font qu'un soit l'ensemble Ru,. Ce qui est vrai d ' u n e manière synchroni-que puisque, par rapport à un objectif donné, l'acteur ne cherche pas à se localiser en utilisant simultanément deux ensembles instrumentaux dif-férents et éventuellement contradictoi res. Mais par ailleurs, on se rend compte que l ' o n ne tient aucun compte de l ' é c h e l l e qui caractérise l ' a c - teur. Echelle qui peut influer sur le choix du système instrumental M.

En ce qui concerne l ' e s p a c e , l'ambiguïté n ' e s t pas moins grande.

L'espace est tout à la fois un système de coordonnées, l'ensemble A, et un système de caractères, l'ensemble F.

Si on reprend l'intersection générale G M E, on découvre que G M équivaut à Ru. et que E équivaut à A F. Si je mets en parallèle l e s deux formul ations , j'obtiens :

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Autrement dit les termes premiers ne sont pas univoques dans cette pré- axiomatique. Ru, est tout à la fois acteur et système instrumental con- fondus mais d'un autre côté E est dissocié en A et F.

Allons un peu plus loin. En tant qu'ensemble de lieux, l'ensemble A est bien un ensemble d'éléments premiers ; seule sa représentation dépend du sujet-observateur mais cette représentation est conventionnelle et à cet égard toutes les représentations sont équivalentes dès qu'elles per-mettent un repérage adéquat.

L'ensemble F pose plus de problèmes puisque les caractères Cl, C2, Cm qu'on peut trouver dans l'ensemble A n'ont de signification que par rapport à une activité z. Or cette activité a son origine dans G et M. Donc il faudrait poser G M = z. C'est-à-dire que z doit être généré à partir des éléments premiers eux-mêmes. Mais cette activité z peut se référer à E en tant que support c'est-à-dire aux éléments de l'ensemble A ou se référer à E en tant que contenu soit aux éléments de l'ensemble F. E n'est donc pas univoque puisqu'on introduit une dichotomie entre conte-nant ou support et contenu. Mais si G M E = 0 cela signifie que E est une ressource. Mais que E soit ressource en tant que contenant ou en tant que contenu n'a pas d'importance. L'ensemble E est un ensemble infini de lieux.

En tant que terme premier E n'est qu'un ensemble de lieux. Or si G M E = 0 cela implique que G M met en évidence une ou des ressources dans E. Qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit : E en tant qu'ensemble de lieux pré-existe mais E en tant qu'ensemble de ressources dépend de G M.

La relation G M "invente" les ressources. Finalement, il faut savoir si E est ensemble de lieux ou ensemble de ressources. En tant qu'ensemble de lieux E est premier, en tant que ressource il dérive de G M. En d'autres termes c'est G M qui actualise ou non E en tant qu'en-semble de ressources.

Dans les conditions actuelles, on se trouve en présence de deux iti-

néraires pour atteindre une axiomatique : l'itinéraire de la conception A et

celui de la conception B. Dans le premier cas on axiomatise le résultat de

l'intersection G M E = L soit une axiomatique mathématico-géométrique

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des lieux. Dans le second cas, G, M et E doivent être définis comme termes premiers et il faut poser une série de propositions qui énoncent des rela- tions entre ces termes premiers.

La démarche actuelle est en voie de réaliser l'axiomatisation de la conception A mais pas encore celle de la conception B qui pourrait être celle de la science régionale, dans une certaine mesure.

NOTES

(1) Emile SALLE, L'axiomatique et sa méthode, in Histoire des mathémati- ques, Larousse, Paris 1977, p. 60.

(2) H. BEGUIN et J. THISSE, An axiomatic approach to geographical space.

Geographical analysis, 1979, p. 325-341.

(3) Bertrand RUSSELL, The Principles of Mathematics.

(4) Robert BLANCHE, L'axiomatique, PUF, Paris, 1959, p. 23.

(5) Ibid., p. 68.

(6) Ibid., p. 69.

(7) Ibid., p. 69.

(8) Ibid., p. 69.

(9) LAJUGIE, DELFAND, LACOUR, Espace régional et aménagement du territoire, Dalloz.

(10) Ibid., p. 569.

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