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Collectif, Les dispositifs publics en action. Vers une sécurisation des parcours professionnels et personnels ?
Aurélie Gonnet
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Aurélie Gonnet. Collectif, Les dispositifs publics en action. Vers une sécurisation des parcours profes-
sionnels et personnels ?. 2014, �10.4000/temporalites.2952�. �hal-03047024�
20 | 2014
Varia
Collectif, Les dispositifs publics en action. Vers une sécurisation des parcours professionnels et personnels ?
CEE/Éditions Liaisons, 2014.
Aurélie Gonnet
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/temporalites/2952 DOI : 10.4000/temporalites.2952
ISSN : 2102-5878 Éditeur
ADR Temporalités
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Référence électronique
Aurélie Gonnet, « Collectif, Les dispositifs publics en action. Vers une sécurisation des parcours professionnels et personnels ? », Temporalités [En ligne], 20 | 2014, mis en ligne le 02 mars 2015, consulté le 05 janvier 2021. URL : http://journals.openedition.org/temporalites/2952 ; DOI : https://
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Collectif, Les dispositifs publics en action. Vers une sécurisation des
parcours professionnels et personnels ?
CEE/Éditions Liaisons, 2014.
Aurélie Gonnet
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Issu de la rencontre de questionnements sur la mise en œuvre concrète et les effets des dispositifs publics d’emploi, cet ouvrage est le fruit d’un travail collectif de chercheurs de quelque sept laboratoires, dont la restitution des réflexions a également fait l’objet d’un colloque en juin 2014. La cohérence de l’ouvrage et la solidité des analyses proposées sont ainsi nourries des échanges qui, depuis trois ans, se rejoignent sur les enjeux de l’inflexion que connaît l’action publique en faveur du nouveau leitmotiv des politiques d’emploi : la sécurisation des parcours professionnels. Celle-ci est abordée sous un angle bien spécifique, celui des dispositifs appréhendés tout à la fois comme traduction réglementaire et matérielle de politiques publiques et comme configuration locale mettant en scène des intermédiaires et des bénéficiaires. Entre opérations techniques, perceptions morales, ressources individuelles et contexte d’action, c’est la question de la capacité d’agir des professionnels comme des bénéficiaires qui est au cœur de l’ouvrage et des trois questions qui en forment la structure : (dé)stabilisation des professionnels ? (Ré)appropriation des dispositifs ? (In)sécurisation des trajectoires ?
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La première partie réunit trois contributions traitant des effets de transformations législatives et organisationnelles sur des groupes professionnels proches du modèle fonctionnaliste de la profession : formation longue, utilité sociale reconnue, capacités d’autorégulation des pratiques et des carrières, via notamment des organisations professionnelles, et enfin autonomie et monopole d’exercice garantis par l’État.
Désormais soumis à des exigences de performance et de rationalisation budgétaire, l’autonomie et les capacités de régulation de ces groupes professionnels sont remises en cause, qu’il s’agisse de la création de services de santé au travail enjoignant aux médecins la pluridisciplinarité, de la demande pressante faites aux enseignants du
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supérieur à investir des dispositifs de professionnalisation de leurs étudiants, ou du développement d’indicateurs de contrôle des pratiques et des carrières chez les magistrats, les diplomates et les ambassadeurs. Si pour certains de ces professionnels, dont le parcours les inscrivait déjà dans le sens de ces réformes, ceci permet un enrichissement du travail, ils demeurent « margin[aux] et marginalisé[s] » (p. 54) et leur engagement largement dépendant du contexte local plus ou moins favorable. C’est en effet plutôt un sentiment d’éloignement de son cœur de métier et de remise en cause de son expertise – ainsi que de la définition du « bon professionnel » du fait d’une autonomie réduite – qui est évoquée par ces professionnels.
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Malgré ces points communs, la comparaison de ces groupes professionnels témoigne de capacités de résistance variables : l’introduction d’une culture du résultat chez les magistrats, les ambassadeurs et les diplomates ne s’est pas traduite, pour l’heure, par une remise en cause réelle du fonctionnement de leurs activités et du déroulement des carrières. Elle a surtout conduit au développement d’une rhétorique de défense et de valorisation du métier. Cette rhétorique existe également chez les médecins du travail mais son efficacité est plus limitée, du fait notamment qu’il s’agit là d’un segment peu valorisé de la médecine et que les changements organisationnels induits par la réforme sont bien plus prégnants sur leur activité. En modifiant les compétences attendues de ces professionnels et donc le sens de leurs trajectoires, ces dispositifs soulèvent ainsi la question de la cohérence entre logique professionnelle et organisationnelle.
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La seconde partie, composée de cinq contributions, explore la réception de dispositifs
publics non plus par ceux chargés de les appliquer mais par ceux qu’ils visent : les
bénéficiaires. Premier résultat : aussi structuré et cadré qu’il soit, chaque dispositif se
traduit systématiquement par une variété d’usages plus ou moins prévisibles et
spontanés. La comparaison France/Argentine de l’effet de dispositifs d’insertion
professionnelle des jeunes met ainsi au jour un usage différencié de ces prestations qui
tiennent tant aux trajectoires de chacun qu’au contexte national qui s’offre à la fois
comme ressource, surtout pour la France où l’État mène une politique d’emploi active,
et comme contrainte, limitant régulièrement les enjeux d’insertion à une vision
utilitaire de l’emploi, sans considération pour la satisfaction au travail. Si ces dispositifs
sont les mêmes pour tous ceux qui en bénéficient, leur réappropriation varie
considérablement selon les ressources de chacun : leur poids est renforcé par
l’individualisation et la responsabilisation dont ces politiques sont porteuses menant à
une dualisation croissante du public cible. C’est le cas des étudiants en alternance dans
des master 2 en gestion de patrimoine et en gestion de portefeuille dont l’orientation
dépend fortement de leur origine sociale. Le diplôme continue ainsi d’être un marqueur
social crucial dans la trajectoire professionnelle des individus, comme en témoigne le
cas de la VAE militante qui loin de remettre en cause la « société des diplômes » y
souscrit dans une logique utilitaire et managériale. En effet, travaillant à se saisir du
dispositif pour en bénéficier, les syndicalistes et élus locaux révisent leur engagement
pour tenter de le valoriser scolairement, socialement et économiquement tout en
l’amputant de sa part la plus militante et politique. En promouvant une logique de
parcours, ces dispositifs invitent les individus à relire le chemin fait sous l’angle des
compétences acquises, des ressources mobilisables, de la pertinence de leurs choix et de
la cohérence de leur trajectoire. Cette relecture peut conduire d’un côté à une
composition lissée de sa trajectoire en vue de sa valorisation professionnelle et sociale,
ou de l’autre à une réorientation subie du fait des dissonances identitaires qu’elle met
au jour. Le congé parental, ainsi, a été pensé comme un moyen d’assurer la continuité
d’une carrière professionnelle sans sacrifier sa vie familiale. Il suscite régulièrement pourtant, au contraire, une baisse des ambitions professionnelles du fait de la scission statutaire, identitaire et matérielle entre la vie professionnelle et la vie familiale qu’il induit et dont il complique alors la conciliation.
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Plus que la diversité des usages, c’est l’inégale capacité d’action des bénéficiaires qui est mise en exergue par l’examen minutieux de ces dispositifs, fondés sur une activation des individus incités à prendre en main leur parcours et donc à s’approprier ces dispositifs. Ceci se lit tout particulièrement dans le cas des salariés de groupements d’employeurs travaillant en temps partagé. Si, globalement, ce mode de travail et la culture de l’arrangement qu’il suscite sont favorables à une stabilité de l’emploi, ce que reconnaissent les salariés, cela reste un mode de gestion local tributaire de la politique menée par le groupement et renvoyant chaque salarié à sa capacité de négociation et de gestion de son parcours. En consacrant l’individualisation des parcours professionnels, ces dispositifs révèlent les ambiguïtés et les difficultés de l’injonction au pouvoir d’agir d’individus inégalement dotés en ressources.
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Ceci conduit alors à interroger les effets concrets de ces dispositifs sur les trajectoires, c’est l’objet des cinq contributions qui forment la troisième et dernière partie. Est-ce que l’objectif de sécurisation des parcours professionnels est atteint ? Rien n’est moins sûr. Si les contributions précédentes mettaient en évidence une réappropriation différenciée des dispositifs, du fait d’une inégale répartition des ressources et des capacités d’action autorisées, c’est une autre forme de dualisation des politiques publiques qui apparaît ici. Répondre au problème du chômage par la sécurisation des parcours professionnels et la création de dispositifs c’est alors nécessairement identifier des publics cibles et donc catégoriser les individus selon s’ils ont droit et accès à ces dispositifs ou non. C’est le cas des immigrés dont la trajectoire professionnelle est intimement liée aux politiques migratoires et sociales. Le parcours professionnel des étrangers dépend alors considérablement du cadre institutionnel et de l’environnement local, notamment associatif, jouant sur « les capacités à se saisir du droit et [...] à le contourner » (p. 175) dans un contexte où l’orientation professionnelle, la projection dans l’emploi et dans la vie plus généralement, dépendent largement du statut juridique. Cette question de l’accès aux droits est fondamentale et influe sur les parcours professionnels, ce que montre également le cas de la rupture conventionnelle qui, si elle permet une indemnisation du chômage, n’autorise pas l’accès à un suivi par Pôle Emploi ou à un contrat de sécurisation professionnelle. Le faible taux de retour à l’emploi suite à une rupture conventionnelle ainsi que son caractère majoritairement subi contredisent l’objectif affiché de promotion et de sécurisation de la mobilité professionnelle, à l’instar des prestations d’aide à la mobilité du 1 % logement qui se révèlent, elles aussi, davantage favorables aux entreprises qu’aux salariés, quand bien même ils en semblent globalement satisfaits. Quand le premier dispositif s’avère être avant tout un facilitateur de rupture de contrat de travail, éludant toute interrogation sur les conditions de travail souvent dégradées, le second conduit à l’externalisation des contraintes liées à la mobilité géographiques des salariés, évacuant les problèmes d’ordre personnel et mettant à distance le salarié et la gestion d’une mobilité pourtant si marquante dans un parcours, professionnellement et personnellement.
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C’est donc la question des effets indésirés, si ce n’est clairement nocifs, de ces dispositifs sur les parcours professionnels des bénéficiaires comme de ceux qui en sont exclus qui se pose, à l’instar des emplois aidés non-marchands qui s’avèrent nuire à la
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stabilité de l’emploi des jeunes y ayant recours. Ceci invite à considérer le fait que par- delà l’objectif de sécurisation des parcours, ce sont en fait des politiques de flexibilisation d’un marché du travail jugé trop rigide qui sont menées, la mobilité des travailleurs étant alors présentée comme la seule, si n’est la meilleure solution pour y faire face. Le cas des pigistes est représentatif de ce phénomène puisque les politiques sectorielles actuellement favorables à la presse écrite se sont traduites par une hybridation de la relation d’emploi des journalistes, autorisant ces derniers à cumuler salaire et droits d’auteurs ce qui conduit à diluer la relation salariale en un cumul de statuts et d’employeurs. La baisse de l’emploi salarié qui s’est ensuivi a alors favorisé une dégradation des conditions de travail, une baisse tendancielle des revenus et un accroissement de l’incertitude clairement néfastes à toute sécurisation des parcours, les carrières de pigistes ne dépassant que rarement les dix années. Dans cette situation, comme dans les précédentes, l’absence de collectif renforcée par la logique individualiste que promeuvent ces dispositifs s’avère être un élément décisif pour des individus faisant face seuls à des politiques qui les dépassent tout en les enjoignant à s’y montrer acteurs.
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Au final, la démultiplication des dispositifs publics conduit à interroger le mode
d’action politique choisi : le désencastrement de la sphère économique semble acté par
des politiques non plus tournées vers la régulation du marché du travail mais vers une
action sur ceux dont on pense pouvoir modifier le comportement : les individus. Or
qu’il s’agisse de cadre institutionnel ou de configurations organisationnelles, les
parcours individuels, comme les capacités d’action et de réappropriation, demeurent
régis par des phénomènes largement extérieurs aux individus, inégalement dotés en
ressources par ailleurs. La comparaison de ces divers dispositifs invite ainsi à observer
un renforcement de l’individuel, de l’arrangement et du local ce qui tend à troubler les
parcours et les constructions identitaires. Outre la multiplication des dispositifs étudiés
autorisant la montée en généralité de l’analyse, l’argumentation se voit renforcée par la
diversité des méthodes d’enquête employées. Si la part du lion revient aux méthodes
qualitatives, les plus à même de saisir les usages et les effets de ces dispositifs, l’ouvrage
donne à voir toute leur variété : observation, entretiens, biographies, monographies,
enquêtes longitudinales. Trois des treize contributions usent de données quantitatives
et deux se livrent à des comparaisons internationales ce qui permet de compléter et de
mettre en perspectives les résultats ici présentés. L’on pourra cependant regretter
l’absence de paragraphes intermédiaires et conclusifs qui armeraient davantage la
démonstration en mettant en évidence les résultats de ces comparaisons. Enfin, si les
stratégies de résistance et de contournement des acteurs ne sont pas accentuées ici,
elles doivent faire l’objet d’un ouvrage à venir complétant cette riche dynamique de
réflexions sur les dispositifs publics en action.
AUTEUR
AURÉLIE GONNET
Laboratoire Lise – CNAM, UMR3320 aureliegonnet@gmail.com
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