LES PRÉFÉRENCES ALIMENTAIRES DU PORCELET
VI. -
APPÉTIBII,IT!
DES FARINES ANIMALESE. SALMON-LEGAGNEUR A. AUMAITRE
J. RETTAGLIATI
A. KMOISANT.Station de Recherches sur
l’Elevage,
Centre national de Recherches
zootechniques, Jotiy-en-Josas (Seine-et-Oise).
SOMMAIRE
L’étude de
l’appétibilité
conférée aux aliments pourporcelets
parl’incorporation
de farines depoisson
ou de viande a étéentreprise.
Deux sériesd’expériences
portant sur un total de 910porcelets
ont
permis
depréciser :
1
° que, à
quelques exceptions près,
leporcelet apprécie
engénéral
les farinesanimales ;
2
" que, notamment
pour les
farines depoisson,
on peut déceler des différencesd’appétibilité
entre des farines de provenances
différentes ; 3
°
que le tauxauquel la
farine depoisson
estincorporée
peut avoir une certaine incidence surl’appétibilité
dumélange,
maisqu’il
ne semble pas en être de même pour la farine de viande.INTRODUCTION
Les farines animales (de poisson
ou deviande) constituent l’une des
sourcesde
protéines
lesplus
courammentutilisées dans l’alimentation du
porc.leur
hautevaleur biologique
lesdésigne
enparticulier
àl’usage des jeunes animaux
encroissance (HANSON, ig53-54
-LASS I TE R
etal., 1955
- BRAUDE etal., ig6o).
Dans certainsrégimes synthétiques
de sevrageprécoce elles
ont pu êtresubstituées
avecsuccès
aux
protéines de lait (L UCAS
etal., ig5 g ).
Mais
avantde généraliser l’emploi de
cesaliments
pour leporcelet
nonsevré, il importait de vérifier
quecelui-ci acceptait d’en
consommervolontiers des quantités
suffisantes.
Nous avonsinsisté
àplusieurs reprises
surl’importance de l’appétibilité
pour les aliments des
porcelets (SALMON-I,!GAOrr!ux
etFÉVRIER, 1955 , 195 6, 1959 ).
Or, l’appétibilité des farines animales
est mal connue etparfois discutée (CARRO!"
1942
) ;
chez le veauégalement, M A T HI E U
etW!GAT-I,iTR! (ig5o)
ont montré que5
p. 100de farine de poisson diminuaient
notablement laconsommation alimentaire.
Le but de
notreétude
adonc été de préciser
chez leporcelet
avant sevrage :W
quel était
en moyennele niveau d’appétibilité des farines de poisson
etde viande ;
2
° si cette
appétibilité
semanifestait davantage
àcertains
tauxd’utilisation qu’à
d’autres
etquels étaient les
taux que l’onpouvait
considérer commeoptimum.
MATÉRIEL
ETMÉTHODES
Deux séries
d’expériences
portant sur un total de 9roporcelets ( I r 7 purtées)
furententreprises.
Dans la
première série,
on a surtout cherché à se rendre compte, en faisantappel
à des farines aussi diverses quepossible,
si les farines animalespouvaient
êtreconsidérées,
engénéral,
commeappétibles.
Nous voulions aussi voir si cetteappétibilité
étaitsusceptible
de varier. A ceteffet,
7échantillons de farine de
poisson
et 2de farine de viande furent utilisés etcomparés
successivement à un échantillon de blé pur dontl’appétibilité
avait été testée au coursd’expériences
antérieures(S ALMON -L EGA
GNEUR
etFÉVRIER, Ic!j9)·
Les farines de
poisson (A, B, C, D, E, F, G)
étaient choisies en raison de leurs provenances diverses(France, Norvège, Pérou) ’ et
des variétés depoissons qu’elles comportaient (hareng, requin, anchois, truite...). Les
farines de viande(I, II) provenaient
de deux usinestraitant,
l’une des viandesfraîches,
l’autre des viandesd’équarrissage.
On trouvera au tableau i lesprincipales caractéristiques
de cesdifférentes farines et des
mélanges auxquels
elles ont donné lieu.Les taux
d’incorporation
des farines dans l’aliment étaient de 8 p. 100pour les farines depoisson
et de 10p. 100pour les farines de viande. Ces taux sont souvent utilisés dans la
pratique
et ils per- mettentl’apport
deprotéine
leplus généralement
recommandé. L’alimentcomprenait
en outre dublé et 2p. 100d’un
mélange
minéralapproprié ;
il était distribué engranulés de
5 mm de diamètre.Les consommations étaient
comparées
à celle du même blé distribué simultanément comme témoin.Chaque comparaison
se faisait isolément et les farines animales étaient ainsi étudiées les unesaprès
les autres.
Dans la deuxième
série,
nous avons vouluvoir,
à l’aide d’une farine depoisson (G)
et d’unefarine de
viande(I)
de types courants, sil’appétibilité
d’une farine animalepouvait
varier en fonctiondu taux
d’incorporation
dans l’aliment(dans
les limites habituelles d’utilisationpratique).
A ceteffet,
3 taux étaientcomparés : respectivement
3-5 et 8 p. 100pour la farine depoisson
et 3-5 et10p. Ioo pour la farine de viande. A ces
aliments,
offerts simultanément en libre choix auxporcelets,
on
adjoignait également
du blé seul comme élément decomparaison.
Ledispositif expérimental
étaitici un peu différent du
précédent :
pouralléger l’expérience,
les troismélanges
étudiés et le témoinétaient offerts ensemble aux mêmes animaux.
Dans les deux
expériences,
les différents aliments étaientdistribués,
àpartir
de 10jours après
la naissance et
jusqu’à l’âge
de 8semaines,
dans depetits
nourrisseursautomatiques.
Les nourrisseursautomatiques (à
raison de deux parportée)
étaient intervertischaque jour
à l’intérieur desloges
pour éviter les
phénomènes
d’accoutumance. Lesquantités
d’aliment consommées étaient déter-minées,
comme dans nosexpériences précédentes,
parpesée
desquantités
restantes.Les consommations étaient
exprimées
en g d’alinrent parporcelet
et les rapportsd’appétibilité,
aliment
expérimental consommé,
! , . , h f .
aliment témoin
aliment témoin consommeconsommé
étaient déterminéschaque
fois.L’examen des résultats a été
effectué,
pour lesappétibilités
des farines à taux constant, par la méthode descouples,
et pour celles à tauxvariables,
parl’analyse
de variance. Danschaque
cas,seuls ont été
exprimés
les seuils designification
des différences observées.RESULTATS
1
. -
Appétibilité des farines de poisson et de viande
aux taacx
uniformes
de 8 et 10fi.
100 :Les consommations
moyennes parporcelet,
lesrapports d’appétibilité
et lesseuils de signification du
caractèred’appétibilité
sontrapportés
pourchaque farine
étudiée, dans
letableau
2.Le seuil de signification attaché
àchaque appétibilité indique dans quelle
mesurela farine animale
aété réellement préférée
autémoin ; il reflète l’uniformité
ducomportement des porcelets.
On constate
immédiatement
la trèsgrande variabilité
desrésultats,
notam-ment en ce
qui
concernel’appétibilité des différentes farines de poisson étudiées.
Certaines farines de poisson (D, C, A)
se sont montrées trèsappétibles
etd’autres (comme la farine E) inappétibles. Il
en ressort uneimpression
moyenned’appétibilité
des farines de poisson
pourle porcelet (6
farines sur7
sontappétibles), mais qu’il
nous
est, bien entendu, difficile d’étendre
etdont
il nous estimpossible
de connaîtrela raison.
En
cequi
concerne lesfarines de viande, la
similitude des résultatsobtenus dans
nosdeux essais est,
parcontre,
assezfrappante. Elle témoigne, dans
les deuxcas,
d’une appétibilité
faiblemais
nonnégligeable
des farinesétudiées.
2
. -
!4!)!’Mt!
desfarines animales
à
différents
tauxd’incorporation :
En
cequi
concernela farine de poisson, l’étude
aété faite
avecla farine (G)
qui s’était
montréemédiocrement appétible
au cours de l’essaiprécédent. La
farinede viande était
cellefabriquée
àpartir de produits frais. Les résultats de
cesdeux
expériences
sontprésentés
autableau
3 ;les quantités consommées
sontexprimées
en grammes par
porcelet pendant
lapériode d’allaitement.
L’examen des différences de consommation rencontrées
montre que lesaliments
contenant 3 et5
p. 100de farine de poisson
ont étépréférés
àcelui qui
encontenait
8
p. 100(signification
P <0 , 05 ).
Parcontre, les faibles différences de consommation,
et
donc d’appétibilité,
quel’on observe
pour lafarine
deviande
entreles
aliments à3
-5
ou 10 p. 100 ne sontnullement significatives.
Onpeut
penser que lesporcelets
ont
fait
peude différence
entre cesdiverses présentations.
DISCUSSION
L’ensemble des résultats acquis dans les deux séries d’expériences semble
montrerque les
farines animales étudiées présentaient
engénéral
unecertaine appétibilité
propre à en faciliter
l’ingestion
par leporcelet. Cette appétibilité
contraste avec lefait
quecertains animaux,
commele
veau parexemple, apprécient
peu cesfarines,
notamment
les farines de poisson (M A T H IE U
et!V!GAn-I,iTx!, ig6o).
Dans notre
étude, qui comportait
l’essai deg
farinesanimales dont 7 de poisson,
8 farines
ontprésenté
uneappétibilité supérieure
ouéquivalente
àcelle du
blé(ali-
ment
lui-même
trèsappétible)
et une seulement uneappétibilité inférieure.
Nous
ferons toutefois quelques réserves :
W
la
trèsgrande
variabilitéde l’appétibilité rencontrée dans les farines de
poisson
montre quecelle-ci
estdifficilement prévisible,
cequi peut parfaitement expliquer certains
casd’inappétence
caractériséerencontrés.
Parexemple, la farine
de poisson E
que lesporcelets
n’ont pasappréciée
estd’un type
très courant etparaissait présenter
toutes lesgaranties voulues de qualité.
Le fait
que certainesfarines
depoisson paraissent beaucoup plus appétibles
qued’autres
nepeut
être directement mis àprofit
car l’on ne sait àquoi l’attribuer ; s’agit-il de l’espèce de poisson,
duprocédé de fabrication, de la composition chimique
ou encore
du stockage ?
Riendans
notre travail nepermet
encore de lepréciser.
En dépit de
sonintérêt, l’étude de
cepoint
nousentraînerait malheureusement trop loin.
Mentionnons toutefois
que BARRICKetal. ( 1943 )
ontdéjà souligné
lapréférence
des
porcs àl’engrais
pourdes farines de certains poissons plutôt
qued’autres (sardine plutôt
quehareng)
avectoutefois
les mêmesdifficultés d’interprétation. Ce phéno-
mène a pu
jouer
dans nosessais,
notamment pourles
farinesA, C,
Dqui avaient
uneprovenance commune.
2
°
Comme le
montre notredeuxième expérience (différents taux),
certainesfarines animales peuvent
être peuappréciées
à un tauxd’utilisation donné
etmieux tolérées
à un autre.Cela
aété le
casde
lafarine de poisson G,
peuappétible
au tauxde 8
p. 100,mais consommée volontiers
aux tauxinférieurs ( 3
et5
p.ioo). On
endéduira qu’il peut exister dans les farines de poisson des substances qui les rendent
inappétibles
aux tauxélevés, mais dont
les effets restentmasqués
tant que le tauxd’incorporation
restesuffisamment bas. Ceci
montrel’intérêt qu’il
y a, enprésence
d’une farine de poisson dont les caractéristiques
ne sont pas connues, à resterdans les limites d’un
tauxrelativement faible, de
3 p. 100 parexemple.
En
cequi
concernela farine
deviande, il peut
en êtredifféremment,
comme lemontre notre
exemple, où le
tauxde
10 p. 100semble avoir
retenu lapréférence des
animaux. Toutefois, les écarts
entreles consommations des différents mélanges étant
très
faibles
et nonsignificatifs,
onpeut conclure
quela farine testée
nedevait
pasprésenter
uneappétibilité prononcée (ce qui
ressortd’ailleurs de l’expérience i)
etqu’elle
estainsi restée
à peuprès indifférente
à tousles
tauxétudiés.
CONCLUSION
L’emploi des farines animales (viande
etpoisson) dans l’alimentation du porcelet
semble pouvoir s’effectuer
sanscrainte
en cequi
concernel’influence
surl’appétibilité
des aliments.
Dansplusieurs
casmême, certaines farines
depoisson peuvent
per- mettred’améliorer
cetteappétibilité.
Toutefois,
ilparaît indiqué,
en cequi
concerneles farines de poisson, plus sujettes
à
des variations d’appétibilité
queles farines de viande, de s’en
tenirà des taux d’incor-
poration n’excédant
pas3
à5 p.
100,chaque fois
quele produit
serainsuffisamment
connu.
Reçu
en novembre 1961.SUMMARY
THE FEEDING PREFERENCES OF PIGLETS : VI - PALATIBILITY OF FISH AND MEAT MEALS.
The
palatibility
of differents kinds of fish and meat meals was studied inexperiments
with910
suckling pigs.
The
study
involved :n The
comparison
of the relativeconsumption
of seven mixtures of different fish meals and wheat and two mixtures of different meat meals and wheat offered at choice sideby
side with the cereal as a control(table i).
2
0 The
comparison
of theconsumption
of mixtures of differents levels( 0 - 5 -8
p.100 )
of agiven
kind of fish meal or of a
given
kind of meat meal( 0 - 5 - 10
p.100 ).
The results are shown in table 2 and 3. It appears that :
- fish and meat meals seem
generally palatable,
- differences of
palatibility exist, principally
between fish meals of different sources,-
piglets prefer
feedscontaining
3-5p. 100of fish meal to thosecontaining
o or 10p. 100butare less affected
by
the level of meat meal.RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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