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Terres d’estuaires

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Normandie, Picardie :

Terres

d’estuaires

n°2 Septembre 2012

otes & Mer

L

es estuaires, organismes fluviaux pénétrant la mer, se caractérisent également par leur forte productivité étroi- tement associée à la présence de particules fines issues du bassin versant et piégées par le jeu des marées. Riches en matière organique, elles se déplacent, déposent, érodent au gré de la marée et du débit du fleuve, créant et alimen-

tant vasières et zones humides, ce qui explique l’impor- tance des estuaires parmi les écosystèmes mondiaux.

Normands et picards ont la chance de bénéficier de la présence de nombreux estuaires (Somme, Orne…), ap-

pelés aussi baie (des Veys…), ou havre (Regnéville…).

Les services rendus à l’homme et à la nature sont mul- tiples : terre d’accueil pour les oiseaux, épuration du fleuve, pêche (ponte, nourriceries), aquaculture…,

mais également lien entre l’intérieur des terres et la mer, zone d’implantation industriello-portuaire... Eco-

nomie et nature s’y opposent parfois fortement. En ef- fet, les populations côtières tentent d’en tirer un maxi- mum de bénéfices, domestiquant et contraignant un

système par nature évolutif. Poldérisation, barrages, digues, creusement de chenaux, disparition de sur-

faces estuariennes ont grevé fortement leur capacité biologique. A ce titre, la Seine a payé un lourd tribu.

Aujourd’hui l’ensemble des acteurs a compris que ces systèmes méritent d’être protégés, et surtout gérés d’une façon globale et intégrée. Heureuse-

ment des outils nombreux et efficaces se mettent

en place. Axel Romana,

Président du Conseil scientifique de l’estuaire de la Seine

> Dynamique

Des zones d’interfaces

p. 2

> Témoignages

Des suivis pour mieux comprendre

p. 4

La lettre du R éseau d’Obs ervation du Litt oral Normand et Pic ard

> Fonctionnalités

Des milieux riches et attractifs

p. 3

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Dynamique du milieu

> Entre la Baie du Mont-Saint-Michel et l’estuaire de l’Authie, pas moins d’une quinzaine d’estuaires aux dimensions, morphologies et fonctionnements sédimentaires variés est dénombrée. Loin d’être des espaces figés, ces milieux sont en constante évolution.

Dynamique des sédiments et évolution morphologique

Une caractéristique commune : les fortes marées Les estuaires sont des zones de mélange eau douce/eau salée soumises à l’influence des fleuves ou rivières, de la marée et des houles. En Manche, les marées sont importantes avec des marnages atteignant 13 m, 8,5 m et 10,5 m respectivement en Baie du Mont-Saint-Michel, dans les estuaires de la Seine (apport fluvial le plus important en Manche) et de la Somme. Ce régime induit de larges surfaces estuariennes découvrantes, de forts courants responsables d’une importante mobilité sédimentaire et, sur certains estuaires, un phénomène de mascaret.

Une influence variable des houles

Les différentes façades sont diversement exposées aux houles, essentiellement de provenance Ouest, d’origine atlantique (Ouest Cotentin) ou levées par les vents locaux.

Les embouchures des estuaires sont en forme d’entonnoir lorsqu’elles sont principalement construites par les marées (ex : estuaire de Seine, Baie des Veys) ou barrées par des flèches littorales lorsqu’elles sont dominées par les houles et la dérive littorale résultante (ex : havres du Cotentin, estuaires du Calvados, estuaire de Somme). Les flèches littorales actuelles, mises en place en fin de transgression holocène, sont sableuses pour la plupart ou constituées de galets le

long du littoral du Pays de Caux et en estuaire de Somme.

Des milieux qui se ferment

Les estuaires de la Manche sont en cours de colmatage. La remontée du niveau marin, amorcée il y a plus de 10 000 ans,  a permis l’accumulation de stocks sableux transportés progressivement dans les estuaires par les forts courants de marée et de houle. Les apports continentaux actuels, faibles et limités essentiellement à des particules fines, contribuent à la présence de bouchons vaseux et de vasières intertidales, biologiquement riches. Les aménagements humains réalisés depuis 200 ans ont conduit à accélérer le phénomène de colmatage, à limiter la mobilité des chenaux et à fermer totalement certains systèmes estuariens.

Sophie Le Bot et Robert Lafite, Laboratoire M2C Université de Rouen

Dépoldériser pour préserver nos côtes Depuis plus de dix ans, le Conservatoire du

littoral s’interroge sur les effets du change- ment climatique sur les côtes. Certaines dé- fenses contre la mer pourraient être difficiles à maintenir en raison de leurs coûts, mais

c’est également une question de préserva- tion des milieux naturels. La conquête des

terres sur la mer a interrompu les conti- nuités écologiques à l’origine des fonc- tions importantes que jouent ces milieux d’interface en particulier les estuaires. Plu-

sieurs projets expérimentaux de dépoldé- risation sont actuellement à l’étude dans

l’estuaire de la Somme, les Bas-Champs de Cayeux ou sur des sites pilotes comme

la baie des Veys ou l’estuaire de l’Orne, afin de restaurer ces espaces côtiers et leurs fonctions ainsi que répondre aux nouvelles questions que ces processus

soulèvent.

Isabelle Rauss, Conservatoire du littoral

Des zones d’interfaces

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Cartographie diachronique de l’occupation du sol sur la réserve de l’estuaire de la

Seine entre 1973/1975 et 2008

Réalisation : Maison de l’estuaire, GF - 2010.

Sources : orthophotographie GPMH et IGN

Cordon de galets du Hourdel en 2006 (baie de Somme)

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> Forte productivité, zone d’alimentation, de reproduction ou encore de nourricerie pour de nombreuses espèces, les estuaires offrent des fonctionnalités favorisant la biodiversité. Ces lieux très attractifs sont également le siège d’usages parfois antagonistes...

Des zones d’interfaces

Des milieux riches et attractifs

Biodiversité et fonctionnalités

Pour aller plus loin....

Retrouvez plus d’infor- mation sur ces différents sujets sur le site internet www.rolnp.fr

Des usages diversifiés, une gestion complexe

La forte productivité des estuaires, leur position géostratégique (zone de passage entre mer et intérieur des terres), la beauté des paysages et la biodiversité qu’ils abritent font de ces espaces des territoires attractifs, convoités, porteurs d’enjeux (pression foncière, qualité des eaux, gestion des ressources naturelles), et de conflits d’usage (accès à la terre, exploitation des ressources naturelles, pollutions). La multiplicité des enjeux et des acteurs du territoire, élus, administrations, représentants socio-professionnels (pê- cheurs, agriculteurs, conchyliculteurs), usagers (touristes, chasseurs, pêcheurs à pied, cueilleurs), organismes de protection de l’environnement littoral... complexifient la gestion de ces espaces.

Pascal Hacquebart, Gemel Normandie

Une forte productivité primaire, source d’alimentation pour de nombreuses espèces

Par nature, le littoral est une zone très productive. Mais lorsque l’eau douce, chargée de matière organique s’y mêle, la production végétale issue de la photosynthèse – premier maillon de la chaîne alimentaire – est décuplée.

Les estuaires sont ainsi de formidables sources d’alimentation pour de nombreuses espèces animales et constituent des zones de reproduction, des zones d’abris ou de repos et de nourricerie pour les juvéniles.

Le bar vit ainsi les première années de sa vie dans les estuaires profitant des ressources alimentaires abondantes et de la protection offerte par les eaux troubles face aux prédateurs.

Le cycle des marées rythme la vie des espèces

Le rythme des marées permet au phoque veau-marin - présent en baie de Somme, en baie des Veys et en baie du Mont Saint Michel - de se reposer sur des bancs de sable à marée basse et de s’alimenter dans la colonne d’eau à marée haute. Les oiseaux limicoles côtiers, eux, s’alimentent sur les vasières découvertes à marée basse et se reposent sur les bancs de sable à marée haute.

Des haltes migratoires d’importance internationale Les petits échassiers migrateurs passent l’hiver sur nos estuaires.

La baie du Mont Saint-Michel est ainsi un site d’importance internationale pour l’hivernage d’un grand nombre d’espèces telles que Bécasseau variable, Pluvier argenté, Barge rousse…

Les poissons estuariens sous surveillance Sous le pilotage de l’agence de l’eau Seine-Norman- die, le programme de surveillance établi au titre de la Directive cadre sur l’Eau (DCE) comprend la réali- sation de campagnes de chalutage dans plusieurs estuaires et fonds de baie estuariens normands.

Appliquant une méthodologie nationale, ces campagnes sont réalisées 2 fois/an pendant 3 années consécutives par cycle de suivi. L’état écologique des peuplements de pois- sons ainsi caractérisé montre des situations très contras- tées, de très bon à médiocre, entre les estuaires normands.

Franck Bruchon, Agence de l’Eau Seine Normandie

Des fonctionnalités au service d’espèces emblématiques

Les principaux estuaires normands et picards

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IBIS, un suivi qui fait des vagues !

L’érosion des berges des fleuves et des rivières est un phénomène qui préoccupe les gestionnaires et les riverains de ces hydrosystèmes.

Outre les facteurs naturels, l’acti- vité humaine et notamment les vagues générées par les bateaux provoquent une accélération du mécanisme d’érosion, rendu plus complexe dans des zones estua- riennes macrotidales. Tel est le cas en estuaire de Seine où les berges sont affectées par le passage de milliers de navires par an, dont 20  % ont de très gros gabarits. Le projet IBIS du programme Seine- Aval s’est focalisé depuis 2009, sur les relations entre les paramètres des navires, les caractéristiques du système estuarien et les trains d’onde de batillage générés par les navires. L’impact des vagues de batillage sur le transport sédimen- taire a été quantifié en zone inter- tidale par des mesures de terrain sur les sites ateliers couplées à une démarche expérimentale.

Julien Deloffre, Laboratoire M2C Université de Rouen

Mieux définir les en- jeux du littoral pour une conservation plus efficace !

L’Observatoire « Littoral, limicoles et macrofaune benthique » animé par Réserves Naturelles de France, en parte- nariat avec l’Agence des Aires Marines Proté- gées et l’Agence de l’Eau Seine Normandie, s’intéresse depuis 2000 à cet objectif ! Appli- qué dans un premier temps aux oiseaux limi- coles côtiers et aux communautés d’inverté- brés vivant dans la zone de balancement des marées, la démarche imaginée par les ges- tionnaires est simple  : constituer un outil de comparaison des données collectées pour une gestion conservatoire adaptative (plans de gestion, tableaux de bord...) et capable d’accompagner un littoral en constante évolution. L’action locale ainsi standardisée, devient alors nationale et stratégique pour accompagner l’Etat et les collectivités litto- rales dans la définition de leurs politiques environnementales.

Les liens avec le ROLNP sont alors tout trou- vés : préciser les enjeux du littoral normand et picard pour pas moins d’une quinzaine de localités déjà inscrite dans la démarche ; en comprendre ses fonctions écologiques au sein de contextes biogéographiques beau- coup plus vastes comme celui de la voie de migration Est-Atlantique empruntée par les limicoles… L’articulation entre les deux ou- tils s’annonce fructueuse !

Emmanuel Caillot, Réserve naturelle nationale du Domaine de Beauguillot

Directeur de la publication : Jean-Philippe Lacoste

Rédaction : Axel Romana, Sophie Le Bot & Robert Lafite, Isabelle Rauss, Pascal Hacquebart, Franck Bruchon, Emmanuel Caillot, Catherine Zambettakis, Julien Deloffre

Mise en page & impression : ROLNP & Dauphin Imprimé sur papier recyclé PEFC & encres végétales Crédits photographiques :

Page 1 : photos 1 & 2 : Havre de Régneville (50) ; photo 3 : Estuaire de l’Orne (14) ©Larrey&Roger Conservatoire du littoral / photo 4 : Opération de mesure individuelle des poissons échantillonnés

©F.Bruchon  

Page 2 : photo 1 : Havre de Régneville (50) ©Larrey&Roger Conservatoire du littoral / photo 2 : Cordon de galets du Hourdel en 2006 (80) ©Altimage pour SMBSGLP

Page 3 : photo 1 : phoques en baie des Veys (50) ©Larrey&Roger Conservatoire du littoral / photo 2 : Angelica archangelica ©L. JB CBN Bailleul

Page 4 : photo 1 : Conchyliculture en baie du Mont Saint Michel (50) ©Larrey&Roger Conservatoire du littoral / Photo 2 : comptage wetlands - © C. Morey Rubio / photo 3 : Suivi Ache rampante dune d’Hatainville (50) ©CBN Brest / photo 4 : suivi IBIS ©M.Simon / photo 5 : estuaire de l’Orne ©Larrey&Roger Conservatoire du littoral

Contact

Réseau d’Observation du Littoral Normand et Picard 9, rue Pémagnie - 14000 Caen

Tél. 02 31 15 64 27 Fax. 02 31 15 30 99

rolnp@conservatoire-du-littoral.fr - www.rolnp.fr

> Zones d’intérêt paysager, écologique, économique et stratégique, les estuaires concentrent ressources et enjeux. Seule une connaissance fine du fonctionnement de ces milieux permettra une gestion intégrée de ces territoires complexes. Exemple de trois suivis menés localement.

Des suivis pour mieux comprendre

Témoignages

Mettre en évi- dence la trans- formation des estuaires

Les végétations sont des témoins incontournables de la qualité et de l’évo- lution des milieux. Elles constituent en outre dans les écosystèmes estuariens la base de leur très importante production primaire. Le suivi de la répartition et de la composition des végétations s’avère donc primordial pour cerner l’évolution des estuaires et de leurs fonctions éco- logiques. Les cartographies précises (méthode phytosociologique) réalisées notamment dans les sites Natura 2000 permettent d’ores et déjà de cerner dans les estuaires en dynamique active de comblement, les végétations en régres- sion et celles en développement (travaux en cours). Dans le cadre du programme BRANCH 2007 (Biodiversité et aménage- ment face au changement climatique) le Conservatoire Botanique National de Brest et le GEMEL (Groupe d’études des milieux estuariens et littoraux) ont établi une méthodologie pour la mise en place d’un monitoring sur 5 sites du littoral bas normand permettant d’envisager pour l’avenir des analyses diachroniques qui seront riches d’enseignements dans la perspective annoncée des changements globaux.

Catherine Zambettakis, Conservatoire botanique national de Brest

Flore Faune

Milieu ph ysique

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