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Evaluation des besoins de plaidoyer en appui à la couverture universelle santé in Burkina Faso, Mali, and Senegal

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Evaluation des besoins de plaidoyer en appui à la couverture universelle santé

in Burkina Faso, Mali, and Senegal

Rapport Mali

Version définitive

Laurence Touré, Valery Ridde et Ludovic Queuille

Janvier 2014

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2 Liste des abréviations

ABS Appui budgétaire sectoriel AMO Assurance Maladie Obligatoire AMV Assurance Maladie Volontaire

ANAM Agence Nationale d’Assistance Médicale ASACO Association de santé communautaire CANAM Caisse Nationale d’Assurance Maladie CMSS Caisse Malienne de Sécurité Sociale CNTS Centre national de transfusion sanguine CPN Consultation Pré natale

CPS Cellule de Planification et de statistique

CROCEP Comité Régional d’Orientation, de Coordination et d’Evaluation CSCOM Centre de santé communautaire

CSLP Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté CSREF Centre de santé de référence

CSTM Confédération Nationale des Travailleurs du Mali CU Couverture universelle santé

DNDS Direction Nationale du développement Social

DNPSES Direction Nationale de la Protection Sociale et de l’Economie Solidaire DNSI Direction Nationale de la Statistique et de l’Informatique

ECV Enfant complètement vacciné

EDS Enquête démographique et de la Santé

FENASCOM Fédération nationale des associations de santé communautaire IHP partenariat International pour la santé

INPS Institut National de Prévoyance Sociale

INRSP Institut national de recherche en Santé Publique

MTASH Ministère du travail, des affaires sociales et humanitaires MSHP Ministère de la Santé et de l’hygiène publique

OASIS Organizational Assessment for Improving and Strengthening Health Financing ODHD Observatoire du développement humain durable

OMS Organisation Mondiale de la santé ONG Organisation non gouvernementale P4H Provider for Health

PDSC Plan de développement sanitaire de cercle PDDSS Plan décennal de développement socio sanitaire PFT Partenaires techniques et Financiers

PNUD Programme des nations unies pour le développement P-RM Primature, République du mali

PRODESS Programme de Développement Sanitaire et Social RAMED Régime d’Assistance Médicale

Remed Réseau Médicaments et Développement

UEMOA Union Economique et Monétaire Ouest-Africain UNTM Union Nationale des Travailleurs du Mali UTM Union Technique de la Mutualité

VIH/SIDA Virus d’immunodéficience humaine/ Syndrome d'immunodéficience acquise

(3)

3 Table des matières

Introduction 4

Démarche méthodologique 4

Résultats 6

A. Présentation de la couverture universelle actuelle 6 1 Les statistiques sanitaires concernant la couverture universelle 6 2 Identification des interventions en matière de couverture universelle 6 2.1 Les principaux programmes de subvention de la politique national de santé 6 2.2 Les dispositifs assurantiels relevant du Minsitère du travail et des affaires sociales

et humanitaires 8

2.3 Les mécanismes d’assurance communautaire issus de la société civile 8 3 Situation en matière de couverture universelle des principales interventions étudiées 8

3.1 Les principales politiques d’exemption de paiement 9

3.2 Les dispositifs assurantiels 11

4 la couverture universelle et deux des éléments essentiels du système de santé 14

4.1 Le financement du système de santé 14

4.2 Le leadership et la gouvernance de la santé 20

B Sur la route de la couverture universelle (démarche prospective avec un horizon

temporel de 24 mois) 23

1 Mise en place d’une assurance maladie universelle (AMU) 24 2 Amélioration du niveau de financement public pour le développement

de la couverture universelle 25

3 Garantir une meilleure allocation des ressources 25

4 Le leadership et la gouvernance dans le système de santé 26

Discussion 27

Limites 27

Synthèses des résultats 27

Plaidoyer 29

Annexes 33

(4)

4 Introduction

Au Mali, les conditions d’accès aux infrastructures de base creusent les inégalités et compromettent sérieusement l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement à l’horizon 2015. Dans le domaine de la santé, et malgré une amélioration sensible de la couverture sanitaire, le taux de fréquentation des structures de soins demeure très en deçà des besoins1. Les raisons de cette faible demande de santé tiennent à plusieurs facteurs, parmi lesquels, la distance géographique, le sous-financement des services de santé, le manque de qualité des soins et le faible pouvoir d’achat de la population.

Conscient de cette situation, le gouvernement malien multiplie les initiatives ces vingt dernières années pour améliorer l’utilisation des services de santé et faciliter, notamment, l’accès financier aux soins, dans le cadre d’un plan décennal de développement sanitaire et social (PDDSS), mis en œuvre à travers le PRODESS2 1 (98-2002), le PRODESS II (2005 – 2009) et l’extension du PRODESS II (2009 – 2011). On peut noter également la mise en œuvre de politiques de décentralisation administrative et sectorielle afin de rapprocher les services de santé des populations, un effort sensible d’amélioration de la couverture sanitaire (meilleure accessibilité géographique) et des mesures d’exemption de paiement ambitieuses.

Parallèlement, depuis l’adoption en conseil des ministres en avril 2002 de la Déclaration de Politique Nationale de Protection Sociale, le Mali s’est engagé dans la mise en place d’un système de protection sociale efficace, efficient et profitable à l’ensemble de la population. La mise en oeuvre de cette politique se fait à travers des plans quinquennaux dénommés « Plan d’Action National d’Extension de la Protection Sociale », dont le premier a été exécuté et évalué sur la période 2005-2009.

Le Mali sort d’une crise institutionnelle et politique grave et bénéficie depuis juillet 2013 d’un gouvernement démocratiquement élu et légitime, ce qui autorise la reprise des activités et des processus de planification. Dans le domaine de la santé, 2013 constitue une période charnière qui devrait voir aboutir le nouveau PDDSS concernant la période (2014- 2023). Le contexte international3 est aujourd’hui favorable et assez unanime sur la nécessité d’aller maintenant vers la couverture universelle santé. Et c’est aussi dans cette perspective que s’inscrit ce nouveau plan décennal.

L’ONG Save the Children souhaite entreprendre une action de plaidoyer en appui à cette nouvelle initiative nationale concernant la couverture universelle santé. Dans cette perspective, une étude nous a été demandée avec pour objectifs :

- D’établir un bilan actuel des actions visant une amélioration de la couverture universelle santé au Mali et les perspectives qui se dégagent pour les années à venir - De présenter des recommandations opérationnelles pour optimiser le projet de

plaidoyer de STC en faveur de la CU en fonction du contexte Démarche méthodologique

Définition

Nous reprenons la définition donnée par l’OMS (WHR 2010, p.13-14), d’une couverture universelle de santé en trois dimensions. Dans son rapport sur la santé dans le monde 2010, l’OMS a imaginé l’objectif de couverture universelle de santé comme un cube dont les trois dimensions -population, service et coûts directs- seraient couvertes à 100%.

1 La fréquentation de la consultation curative primaire est passée de 0,18 nouveau cas par habitant et par an (NC/hab/an) en 1998 à 0,35 NC/hab/an en 2010 (source MSP 2010)

2 Programme de développement sanitaire et social

3Position OMS et principales coopérations bilatérales, démarrage dans l’espace UMOA d’un projet d’appui à l’extension de la couverture du risque maladie (PACRM)…

(5)

5 Ce cadre conceptuel peut être utile pour étudier des réformes sanitaires (rétrospectif), photographier une situation contemporaine (descriptif) et/ou indiquer la ou les directions à prendre pour un pays (prospectif).

Ce cadre conceptuel peut donc permettre d’établir la situation dans laquelle se trouve un pays en précisant les niveaux de couvertures pour les trois dimensions :

- Qui est couvert (population) ? - Quels services sont couverts ?

- Quelle est la proportion des coûts directs couverts ?

Il peut aussi permettre de réfléchir aux meilleures combinaisons possibles pour aller vers la couverture universelle :

- pour qui étendre la couverture ? - pour quels services ?

- et pour quelle réduction supplémentaire aux coûts et aux frais directs de santé ? Cadre d’analyse

Dans une première partie, nous proposerons une présentation de la couverture universelle à travers les statistiques sanitaires et une description bilan des principales interventions que nous aurons recensées. Nous mettrons également l’accent sur deux des éléments essentiels du système de santé :

- Le financement du système de santé (collecte, mise en commun et organisation du paiement

- Le leadership et la gouvernance du système de santé

Dans une seconde partie, nous ferons ressortir les perspectives à moyen terme (horizon temporel de 24 mois) de chacun des points précédents.

Une synthèse des résultats sera finalement établie et permettra d’analyser les résultats au regard des objectifs intermédiaires de la couverture universelle de santé.

Nous proposerons sur cette base des recommandations pour des actions de plaidoyer.

Méthodologie

L’étude repose sur l’analyse des documents de politique ou des écrits scientifiques (cf. annexe 1). L’élaboration du nouveau PDDSS, commencé avant les événements de 2012 a été finalisé

(6)

6 en 2013 et se poursuit par la finalisation des plans quinquennaux. Différentes études complémentaires ont été menées par ailleurs autour du thème de la couverture universelle et de son application au Mali. Elles présentent l’avantage d’être très récentes, largement débattues lors d’ateliers successifs en vue de leur validation et donc de proposer des positions assez consensuelles.

Nous avons réalisé parallèlement des entretiens semi structurés auprès de quinze acteurs clefs (cf. annexe 1). Les personnes rencontrées ont donné leur point de vue sur les différents processus de planification en cours et les prochaines échéances, le concept de la couverture universelle Santé et son application au Mali et les priorités dans la mise en œuvre des activités pour les deux années à venir. Nous nous sommes par ailleurs informés sur les actions de plaidoyer proposés par Save the Children au Mali, à partir des entretiens réalisés avec le responsable plaidoyer, des acteurs retenus comme cible de ces actions de plaidoyer et la documentation mise à notre disposition.

Enfin, nous avons assisté à une rencontre réunissant différents services techniques des ministères du secteur4 et certains PTF (membres du groupe d’appui aux DFM, canada, USAID, UNICEF, Pays bas, UNFPA) portant sur la validation de la politique de financement de la santé5.

Résultats

A. Présentation de la couverture « universelle » actuelle (démarche descriptive) 1 Les statistiques sanitaires concernant la couverture universelle

Cf. annexe 2

2 Identification des interventions en matière de couverture universelle (listing) L’Etat malien a mis en œuvre de nombreuses initiatives favorables à la couverture universelle santé (CU). On peut distinguer :

- Les principaux programmes de subvention de la politique nationale de santé (pilotés par le Ministère de la santé et de l’hygiène publique)

- Les dispositifs assurantiels relevant du Ministère du travail et des affaires sociales et humanitaires : l’assurance maladie obligatoire (AMO) et le régime d’assistance médicale (RAMED)

- Les mécanismes de tiers-payant issus de la société civile et notamment les mutuelles de santé

Dans cette section, nous listerons ces différents programmes. Les plus significatifs d’entre eux seront développés dans la section suivante (couverture notamment).

2.1 Les principaux programmes de subvention de la politique nationale de santé 6 Parmi ces mesures d’exemption de paiement, on peut distinguer :

4 Les ministères du secteur de la santé (cadre du PRODESS) sont le Ministère de la santé et de l’hygiène publique, Ministère du travail et des affaires sociales et humanitaires, Ministère de la promotion de la femme, de la famille et de l’enfant.

5 Politique nationale de financement de la santé pour la couverture universelle 2014-2023, Alexis Bigeard, Cheikna Touré.

6 Etude de la faisabilité de passerelles entre l’AMO, le Ramed et l’assurance mutualiste d’une part et les autres dispositifs de couverture sanitaire instaurés par l’Etat, nov 2012, MDSSPA

(7)

7 Les exemptions ciblant avant tout des personnes.

Les gratuités pour ces catégories socioprofessionnelles sont stipulées dans le décret n°02-311 du 04 juin 2002 et le décret n°95-368. Le second décret (décret n°95-368) concerne les personnes âgées (60 ans et plus).

Les exemptions relatives à des services.

Le gouvernement a consacré la gratuité de tout un ensemble de services dans une logique d’augmentation de l’utilisation des services et d’atteinte des OMD.

Les programmes verticaux gèrent les exemptions octroyées pour faciliter l’accès des populations à des services particuliers. Ils sont logés au sein de la Direction Nationale de la Santé ou au sein des différents programmes nationaux (lutte contre le paludisme, lutte contre la tuberculose, Cellule sectorielle de lutte contre le Sida du Ministère de la Santé, etc.). Le service est rendu gratuit aux usagers grâce à un pré-positionnement d’intrants dans les formations sanitaires et éventuellement un remboursement au prestataire du coût des actes posés.

On peut citer :

- La gratuité de la vaccination

- La gratuité de la prise en charge des « maladies sociales » (tuberculose, lèpre) - Le traitement du VIH sida.

- La gratuité de la césarienne

- La gratuité du traitement du paludisme pour les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes

Chaque mesure d’exemption a été légiférée, de manière plus ou moins aboutie (loi, décret, arrêté). On remarquera l’absence de texte légiférant la lutte contre le Cancer et la prise en charge des fistules obstétricales

Tableau récapitulatif des exemptions pratiquées au Mali

Dispositifs Paquets de service Cible Année

Césarienne Examen pré et post opératoire, kits médicament, hospitalisation, acte

Femmes enceintes 2005

Paludisme MII, TDR, SP

CTA, kit medicament,

Enfants de 0-5 ans, femmes enceintes

2002 2007 VIH/SIDA Dépistage, ARV, suivi biologique,

traitement des infections opportunistes

Tout âge 2004

Vaccination Vaccins contre les maladies du PEV

Enfants de moins d’un an, femmes 15-49 ans

2002

Tuberculose Examen, médicaments Tout âge 2002

Lèpre Examen, médicaments Tout âge 2002

Cécité Médicament contre le trachome,

intrant pour la chirurgie du trichiasis et de la cataracte

Tout âge (pendant des campagnes)

Fistule Examen pré et post opératoire,

hospitalisation, médicament et acte

Femmes en âge de procréer Ver de Guinée Médicaments, filtres et tamis Tout âge

Maladie tropicales négligées (filariose, onchocercose, schistosomiase et géo helminthiase)

Médicament Tout âge (pendant des campagnes)

Malnutrition Farines enrichies, aliments

thérapeutiques, micronutriments, Médicaments

Enfants de moins de 5 ans, femmes enceintes et allaitantes

Épidémie et catastrophe Médicaments, vaccins, intrants Tout âge pendant la crise

(8)

8

Cancer Examens, chimiothérapie et

médicaments

Tout âge Gratuités ciblant des catégories

socio professionnelles

2002

Gratuité des examens, y compris radio et scanner

Agents socio sanitaire 2002

examens Élèves et étudiants 2002

examens Enfants de 0-14 ans 2002

examens Soldats en formation de base 2002

80% Frais d’hospitalisation (lit) Fonctionnaires et travailleurs retraités

2002

50% consultations et examens (formations publiques)

Personnes âgés (plus de 60 ans) 2002

Source : Etude de la faisabilité de passerelles entre l’AMO, le Ramed et l’assurance mutualiste d’une part et les autres dispositifs de couverture sanitaire instaurés par l’Etat

2.2 Les dispositifs assurantiels relevant du Ministère du travail et des affaires sociales et humanitaires

L’assurance maladie obligatoire (AMO). L’AMO est un régime institué en 2009 par la loi n°09-15 qui vise à permettre la couverture de soins de santé inhérents à la maladie et à la maternité des assurés et des membres de leur famille à charge. L’AMO est gérée par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CANAM) qui est un établissement public doté d’une personnalité juridique et d’une autonomie de gestion (loi n°09-16). La CANAM s’appuie sur des organismes gestionnaires délégués OGD que sont l’Institut National de Prévoyance Sociale (INPS) et la Caisse Malienne de Sécurité Sociale (CMSS). Ces deux structures jouent le rôle d’opérateur technique pour la collecte des cotisations et la liquidation des prestations.

L’assurance maladie obligatoire (AMO) a officiellement démarré le 1er mai 2011.

Le Régime d’assistance médicale (RAMED). C’est un dispositif non contributif destiné aux indigents, institué en 2009 par la loi n°09-30. Il est géré par l’Agence Nationale d’Assistance Médicale (ANAM) et a été lancé officiellement en octobre 2011.

2.3 Les mécanismes d’assurance communautaire issus de la société civile

Il s’agit principalement des mutuelles de santé. La stratégie mutualiste est régie par la loi n°

96-022 du 21 février 1996 et a été adoptée pour la protection sociale du secteur informel et agricole, soit 78 % de la population malienne. Les mutuelles du Mali se sont regroupées et ont coordonné leurs interventions au sein d’une structure faitière, l’Union technique de la mutualité (UTM) qui les représente notamment dans les instances du PRODESS.

3 Situation en matière de couverture universelle des principales interventions étudiées (descriptif)

Pour le descriptif, nous retiendrons les trois dispositifs assurantiels qui permettent de couvrir potentiellement le risque maladie pour l’ensemble de la population malienne et certaines exemptions de paiement. Certaines sont en effet peu appliquées ou très peu documentées, notamment celles en faveur de catégories socio professionnelles. Parmi les exemptions

(9)

9 relatives à des services, on peut distinguer celles qui couvrent une frange importante de la population (PEV, Paludisme, césariennes, etc.) et celles dont la portée est beaucoup plus limitée.

Les chiffres mentionnés dans cette section ont été tirés de l’état des lieux de la couverture maladie universelle au Mali7, sauf mention contraire.

3.1 Principales politiques d’exemption de paiement La gratuité des soins pour les malades du VIH/sida

- 62% des personnes vivant avec le VIH et initiés au traitement antirétroviral (ARV) ont été soignées gratuitement en 2011.

- Les services couverts par l’intervention sont le dépistage, le traitement, le suivi biologique et le traitement des infections opportunistes.

- La proportion des coûts directs restant à la charge de l’usager est théoriquement nulle mais dépend de la disponibilité des intrants gratuits, notamment des médicaments destinés au traitement des infections opportunistes.

- Equité : on observe un effort important de décentralisation de cette prise en charge gratuite à l’échelle du pays mais le processus est en cours et reste inabouti. Cette situation rend l’accès à ces prestations difficile pour les populations rurales, distantes des chefs lieux de cercle ou les populations pauvres pour lesquelles le coût du déplacement est dissuasif.

La gratuité de la césarienne

- Cette mesure concerne toutes les parturientes dont l’état médical nécessite une césarienne. 2,4% des femmes enceintes ont été césarisées gratuitement sur une prévision de 5% en 2011.

- Les services couverts par l’intervention sont la référence évacuation, l’hospitalisation, l’acte chirurgical et les examens préparatoires, le kit pour l’intervention chirurgicale et le traitement post opératoire.

- La proportion des coûts directs restant à la charge de la parturiente dépend de la fonctionnalité du système de référence évacuation et de la disponibilité des intrants gratuits, qui ne sont pas toujours effectives.

- Equité : Certaines études font ressortir un inégal accès aux prestations gratuités, en fonction du lieu de résidence, urbain ou rural, des parturientes,8 du fait notamment du dysfonctionnement du système de référence évacuation et de l’absence de transport organisé entre les villages et les formations sanitaires de première ligne.

La gratuité des traitements du paludisme (forme simple et grave)

- Cette gratuité concerne les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans.

o Enfants de 0 à 5 ans : 79% des cibles ont été traités gratuitement sur une prévision de 100% en 2011

o 40% des femmes en consultations prénatales (CPN) ont reçu gratuitement deux doses de SP sur une prévision de 80% en 2011

- Le paquet de prestations comprend les soins préventifs et les soins curatifs.

o Pour les soins préventifs, il s’agit de la sulfadoxine pyréméthamine pour les femmes enceintes et d’une moustiquaire imprégnée à la première consultation

7 Etat des lieux de la couverture maladie universelle au Mali. rapport final, septembre 2011

8 La gratuité de la césarienne sauve des vies, surtout dans les villes, Fournier, P., Philibert, A., Tourigny, C., Coulibaly, A., Traoré, M., Dumont, A., Note de synthèse, Mars - 2012

(10)

10 prénatale. Pour les enfants de moins de 5 ans, il s’agit d’une moustiquaire imprégnée.

o Les services curatifs couverts par l’intervention sont le traitement des formes simples et graves de paludisme et le test de dépistage rapide.

- Equité :

o La proportion des coûts directs restant à la charge de l’usager reste non négligeable9. Les usagers ont à leur charge la consultation mais surtout les médicaments prescrits, autre que les antipaludéens (antalgiques, antibiotiques souvent prescrits en complément). Par ailleurs, la faible disponibilité d’intrants gratuits, notamment dans les centres de santé communautaire, premier niveau de la pyramide sanitaire, accentue la part des coûts payés par l’usager.

La gratuité de la vaccination

- Les performances du Mali en termes de vaccination des enfants sont satisfaisantes.

Depuis 2007, le pays a atteint le statut de pays sans polio et en 2009, les maladies évitables par la vaccination ne sont plus une des principales causes de mortalité.

En 2011, 88% d’enfants de moins d’un an ont reçu le Penta 3 sur une prévision de 100% d’enfants.

- La proportion des coûts directs restant à la charge de l’usager est négligeable (carnet de vaccination)

- Equité : la stratégie avancée, organisée à partir des centres fixes vers les villages, dans le cadre de la vaccination de routine n’est pas régulièrement menée en raison des difficultés financières et des problèmes de moyens de déplacement que connaissent certaines formations sanitaires de première ligne. Il est par ailleurs difficile d’obtenir un taux satisfaisant de vaccination des populations nomades, lors des campagnes de vaccination de masse.

Bilan

- De nombreuses exemptions de paiement ont été introduites pour essayer de réduire les barrières financières d’accès aux services de santé. La plupart parviennent à obtenir des résultants satisfaisants en termes de couverture de la population cible.

- Certains problèmes d’équité se posent, dépendant largement de l’application qui est faite de ces politiques d’exemption dans les formations sanitaires.

« Nombre d’études montre le lien positif entre l’introduction de la gratuité et l’amélioration de l’utilisation des services de santé. Finalement c’est la manière dont les gratuités sont pratiquées qui aurait tendance à produire les effets contraires à un accès équitable aux soins de santé de qualité. Surtout lorsque le dispositif n’est pas financé, le pooling de ressources devient inexistant. Les retards ou défauts de remboursement incitent peu les prestataires à donner des services pour lesquels ils ne reçoivent pas de rémunération. »10

9 L’exemption de paiement du traitement du paludisme pour les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes : une politique qui dérange, Laurence Touré, Youssouf T Sanogo, in « Diagnostic d’une politique publique : les exemptions de paiement pour les soins de santé au Sahel », ouvrage coordonné par Valery Ridde et Jean Pierre Olivier de Sardan, à paraitre en 2013.

10 Etat des lieux du système de financement de la santé au Mali, p 24

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11 3.2 Les dispositifs assurantiels

AMO

- Le régime de l’AMO concerne les fonctionnaires civils de l’État et des Collectivités territoriales, les militaires et les députés, les travailleurs au sens du code du Travail, les titulaires de pensions des secteurs publics et privés, les titulaires de pensions parlementaires et les titulaires de pensions militaires soit 17% de la population malienne totale.

- L’AMO procure à l’assuré et à ses bénéficiaires (conjoint(es), enfant(s) et ascendant(s) direct(s), une prise en charge des soins curatifs, préventifs et de réhabilitation médicalement requis. Pour le traitement ambulatoire, la prise en charge est à hauteur de 70% de l’ensemble des dépenses de santé en ambulatoire et de 80% lorsqu’il s’agit d’un traitement en hospitalisation. La liste des médicaments remboursés par l’AMO a été révisée. Elle ne comprenait au départ qu’une liste restreinte de médicaments génériques mais elle a été élargi et depuis décembre 2012, comprend 95% des produits de la place.

« Dans un contexte où l’on ne peut discipliner les prescripteurs, on a été obligé d’élargir la liste prévue au départ pour ne pas se mettre en porte à faux avec les assurés. »11. - Pour bénéficier des services de l’AMO, les assurés et leur employeur paient une

cotisation proportionnelle au salaire. Une étude va démarrer prochainement pour évaluer si la nouvelle liste de médicaments remboursés doit générer une augmentation des cotisations.

- Depuis son démarrage en mai 2011, jusqu’à fin 2012, 3% de la population d’assurés était affiliée sur les 12% attendus à cette date. Dans un contexte de défiance totale de la population envers le gouvernement, les premiers prélèvements sur les salaires des fonctionnaires ont suscité une fronde et la réaction violente de certaines catégories de fonctionnaires dont la police (saccage du siège de la CANAM) et un refus massif d’affiliation.

- En réaction, un communiqué de la présidence a remis en cause, de fait, mais non de droit, le caractère obligatoire de l’AMO, laissant libre choix aux travailleurs, d’adhérer ou non à l’AMO. Suite à cette déclaration, l’AMO a du arrêter le prélèvement sur les salaires de travailleurs non désireux d’adhérer et procéder au remboursement des cotisations déjà prélevées. En septembre 2012, la CANAM recensait ainsi 58 387 cas de retrait soit 17% des adhérents affiliés. Depuis que le dispositif a commencé à offrir des prestations, on assiste à un mouvement de retour des personnes qui avaient refusé l’affiliation. En septembre 2013, sur 350 000 cotisants potentiels, 80% cotisent.

Cette situation rend cependant la maîtrise des effectifs et la planification impossibles.

- Un processus d’accréditation systématique des structures de santé est en cours.

- Equité :

o La suppression du principe d’adhésion obligatoire s’avère sources d’iniquité puisque prétexte à exclusion volontaire ou auto exclusion des groupes vulnérables.

Les employeurs peuvent également encourager leurs salariés à ne pas cotiser pour ne pas avoir à payer la part patronale.

o Du fait de la faible fonctionnalité de la mutualité, ce régime creuse les inégalités entre les maliens qui travaillent dans le secteur formel et les 78% qui évoluent dans l’agriculture ou le secteur informel et ne peuvent en bénéficier.

11 Entretien réalisé avec le Directeur général de la CANAM

(12)

12 Le RAMED

- Le RAMED est un régime qui concerne les indigents, c'est-à-dire toute personne dépourvue de ressources et reconnue comme telle par la collectivité territoriale dont elle relève, soit environ 5% de la population malienne (600 000 personnes). Ce chiffre résulte d’une évaluation basée, non pas sur la base d’un recensement des indigents qui n’a jamais été décidé12 mais sur la capacité maximale de l’Etat à faire face à cette charge financière.

- L’État contribue à hauteur de 65% du montant total nécessaire au fonctionnement du RAMED et les Collectivités Territoriales pour 35%. La commune a la charge du recouvrement des 35% répartis entre communes, Associations de santé communautaires et cercles.

De nos entretiens, il ressort que les collectivités semblent avoir été très peu associées à la décision concernant cette répartition 65/3513. Lors d’un voyage d’étude au Maroc, certains de leurs représentants ont appris que la part de contribution des collectivités ne dépassait pas 5% dans ce pays, schéma qui a retenu toute leur attention.

- Le panier de soins concerne les soins ambulatoires et les hospitalisations (avec intervention chirurgicale ou non).

Le RAMED est en phase de démarrage mais rencontre des problèmes de fond, d’ordre structurel (conception institutionnelle et organisationnelle). On peut noter ainsi une non validation des critères d’indigence et un besoin de clarification des procédures de gestion. Par ailleurs, l’absence de représentation déconcentrée de l’ANAM a obligé l’organisme à déléguer certaines fonctions (identification et immatriculation des indigents qui expriment un besoin d’affiliation) aux services techniques du Ministère du Travail, des affaires sociales et humanitaires) placés sous la responsabilité des autorités communales, sans pour autant les doter d’un budget afférant.

Il semble par conséquent indispensable de prévoir de nouvelles discussions et négociations entre l’Etat et les collectivités, tant pour la répartition des contributions que pour la responsabilité de l’identification des indigents et de ses modalités.

- Du démarrage en Janvier jusqu’en Septembre 2012, le RAMED a accordé une assistance médicale totale et gratuite à 1015 personnes, essentiellement de Bamako et Kati, proche de la structure de gestion à Bamako.

- Equité : l’absence de représentations déconcentrées de l’ANAM au niveau communal, cercle ou même régional rend de fait difficile l’accès les services du RAMED pour les populations censées être couvertes.

Les mutuelles de santé

- Les mutuelles de santé existent au Mali depuis une vingtaine d’années, au départ destinées à assurer une couverture maladie à différents types de public (secteur formel et informel, populations urbaines ou rurales). Le bilan fait donc ressortir un paquet de soins couverts très variable, particulièrement entre les mutuelles rurales (paquet de bénéfice limité aux soins ambulatoires pratiqués au premier niveau de la pyramide) et les mutuelles urbaines (prise en charge des soins ambulatoires et hospitaliers effectués à tous les échelons de la pyramide sanitaire). Le montant des cotisations des adhérents

12 A force de fuir les indigents, on ne les connait pas… ». La difficile question de l’identification des indigents au Mali, Laurence Touré, in « les indigents et la santé en Afrique de l’ouest », ouvrage collectif sous la direction de V. Ridde et JP. Jacob, à paraitre en 2013, l’Harmattan

13 Communication orale de Saleck ould Dah, information obtenue lors d’une activité de plaidoyer avec les collectivités décentralisées

(13)

13 défini par chaque mutuelle peut ainsi varier de 1500 FCFA pour une mutuelle à Kolokani à 5520 FCFA en moyenne pour des mutuelles bamakoises.14

Le coût de l’adhésion à la mutuelle totalement à la charge de l’assuré, conjugué au faible paquet de soins couvert explique, entre autres, la faible attractivité du dispositif.

Ainsi, malgré un nombre relativement élevé de mutuelles (163 agréées en fin 2011), mais très inégalement réparties sur le territoire, leur couverture reste très faible. Il y aurait 510.000 mutualistes fin 2012. Avec ce niveau de couverture, la mutualité couvrirait environ 4% de sa population ciblée.15

- La mise en œuvre de l’AMO et le RAMED qui proposent un paquet de bénéfices bien plus large que celui offert par la plupart des mutuelles à leurs adhérents, pose la question de l’équité entre les différents dispositifs. Pour tenter de réduire les inégalités constatées, l’État élabore en 2010 une stratégie nationale d’extension de la couverture maladie par les mutuelles de santé,16 mise en œuvre pendant une phase pilote de trois ans (2012-2014) dans les trois régions de Sikasso, Ségou et Mopti. Elle prévoit une subvention par l’Etat aux mutuelles à hauteur de 50% des cotisations, à condition que celles-ci offrent un paquet de bénéfices équivalent à celui de l’AMO (stratégie nationale d’harmonisation des paquets au sein de la Mutualité). La stratégie prévoit également d’aller vers une couverture communale (créer une mutuelle par commune soit 703 au total) avec des unions de districts pour assurer la prise en charge au niveau CSREF et hôpital régional.

En 2013, sur 172 mutuelles existantes, 70 ont bénéficié du cofinancement de l’Etat.

Les résultats semblent mitigés, faute d’une politique de communication adéquate et suffisante et du fait d’un contexte conjoncturel difficile en 2012 (retard de paiement de la part de l’Etat). On relève moins de la moitié des 25 000 adhésions attendues, avec néanmoins un taux de fidélisation assez élevé.

Bilan

- Ces dernières années ont vu une concrétisation de la mise en œuvre des dispositifs AMO et RAMED, qui concernent essentiellement les deux extrêmes de la population malienne (fonctionnaires et salariés du secteur formel d’une part, indigents d’autre part). La mutualité, qui concerne potentiellement près de 80% de la population malienne, fait seulement l’objet d’un projet pilote.

- On note une faible pénétration des régimes assurantiels, situation que l’on peut attribuer aux problèmes de conception du RAMED, au démarrage difficile de l’AMO et à la faible attractivité de l’assurance mutualiste, privée d’implication réelle de l’Etat - L’Etat a consenti certains efforts, en faveur d’une plus grande équité entre les trois

régimes assurantiels. La stratégie adoptée dans la phase pilote prévoit une contribution de l’Etat à hauteur de 50% du montant de la cotisation et une harmonisation du paquet avec celui de l’AMO.

14 Etude sur la contribution des mutuelles dans l’extension de la protection sociale, Cheickna TOURE, Juin 2010

15 Entretien avec le chef de la division mutualité de la DNDES

16 Programme quinquennal de mise en œuvre de la stratégie nationale d’extension de la couverture maladie aux secteurs agricole et informel par les mutuelles au Mali, (2011-2015)

(14)

14 4 La couverture universelle et deux des éléments essentiels du système de santé 4.1 Le financement du système de santé

Selon l’OMS17, pour la réalisation de couverture universelle, le système de financement de la santé doit être conçu spécifiquement pour :

- fournir un accès aux services de santé nécessaires d’une qualité suffisante pour être efficaces pour tous (y compris la prévention, la promotion, le traitement et la rééducation)

- veiller à ce que l’utilisation de ces services n’expose pas l’utilisateur à des difficultés financières.

Plus les pays dépendent des paiements directs pour financer leurs systèmes de santé, plus il leur est difficile d’atteindre ces deux objectifs.

Le financement de la santé est plus qu’une simple question de collecte de fonds pour la santé, même si cette dernière est essentielle. Il s’agit également de savoir qui reçoit la facture, quand elle sera réglée et comment l’argent recueilli est dépensé.

Les trois domaines fondamentaux du financement de la santé sont :

 collecter suffisamment d’argent pour la santé

 supprimer les barrières financières à l’accès et réduire les risques financiers liés à la maladie

 faire un meilleur usage des ressources disponibles.

Nous chercherons à établir un bilan du financement de la santé au Mali pour chacun de ces trois domaines

La collecte de fonds ou mobilisation des ressources (« raising revenues ») 18

« La collecte des fonds est ce que l’on associe au financement de la santé : la façon dont l’argent est collecté pour payer des dépenses du système de santé. L’argent provient généralement des particuliers, des organisations ou des entreprises, et quelquefois de contributeurs à l’étranger (appelés «sources externes»). Les ressources peuvent être recueillies au moyen d’un impôt général ou spécifique, de cotisations obligatoires ou volontaires d’assurance maladie, de paiements directs des usagers et de dons. » 19

Au Mali, plusieurs acteurs contribuent au financement de la santé :

- Le budget d’Etat fournit 52% des dépenses totales de santé. Selon le Ministère de l’économie et des finances, « la part du budget de l’Etat attribuée à la santé est de 15,7% mais 30% de cette part n’est pas gérée par les départements du secteur de la santé. » Les dépenses publiques de santé varient ainsi dans une proportion de 50 milliards selon que l’on comptabilise ou non les fonds destinés à la fonction santé mais distribués aux autres ministères (essentiellement le ministère de l’éducation et le ministère des armées), que ceux du secteur santé. Tous ministères confondus, les dépenses publiques de santé représentent 3,3% du PIB. Et les dépenses de santé par an et par habitant s’élèvent à environ 40$.

17 La couverture universelle de santé sous l’angle du financement du système de santé (WHR 2010, p.5-6)

18 Sauf mention contraire, les informations et données chiffrées contenues dans ce paragraphe sont tirées du document « Politique nationale de financement de la santé pour la couverture universelle 2014-2023, p12

19 La couverture universelle de santé sous l’angle du financement du système de santé (WHR 2010, p.5-6)

(15)

15 On relève également une forte dépendance de l’aide internationale, le financement des PTF représentant environ 50% des dépenses publiques totales en 2010.

- Les collectivités territoriales contribuent au financement de la santé dans le cadre de la décentralisation, processus par lequel l’Etat central leur a transféré certaines compétences. Les sommes mobilisées par les collectivités territoriales dans la santé demeurent très faibles (moins de 3% en 2011), assez mal renseignées au niveau local et sont surtout consacrées à la réalisation d’infrastructures presqu’exclusivement au niveau périphérique (construction de CSCom) 20.

- Les comptes nationaux de la santé (dernière publication en date disponible) publiés en 2006 pour la période 1999-2004 faisaient déjà ressortir la part prépondérante des ménages dans les dépenses de santé (57% des dépenses de santé)21. En 2009, l’effort des ménages est évalué à 47% du total et en 2011, les dépenses directes des ménages représentent 44% du total. Plus précisément, une étude sur « l’estimation des dépenses de santé des ménages montre que les dépenses en médicaments constituent le poste le plus important et représentent 40% de l’ensemble suivies des dépenses d’automédication (36%), des frais de consultation (12%), des dépenses de transport (7%) et des frais d’hospitalisations (4%). Deux raisons expliquent l’importance des dépenses de médicaments. Ce sont la prescription inadéquate des médicaments et la non utilisation des guides standardisés. »22 Un autre élément d’explication peut être avancé : la très faible adéquation des listes nationales des médicaments essentiels (LNME) avec la liste actualisée proposée par l’OMS, ainsi que le montre une étude réalisée par le Remed en 2009 23

- Les cotisations du secteur privé aux mécanismes d’assurance maladie sont limitées et estimées à environ 4% du total des dépenses totales de santé.

On note une forte capacité d’absorption des ressources avec par exemple en 2011, un taux de mobilisation et d’exécution des ressources du PRODESS de 95%.

L’allocation des ressources publiques est en revanche profondément inéquitable.

La cellule d’appui à la décentralisation et à la déconcentration24 prévoyait une affectation de 40% seulement des ressources au niveau central et 60% au niveau déconcentré (région et district). 20% de la part du niveau déconcentré devraient être alloués aux régions et 80% aux niveaux districts et communes ; les districts conserveraient 40% de cette tranche contre 60%

affectés au niveau commune. La réalité est assez éloignée de ces prévisions :

20 La gouvernance de la santé dans la région de Sikasso, Laurence Touré, Mars 2011, Miseli

21 Les comptes nationaux de la santé du Mali 1999-2004, Octobre 2006, p 33

22 Etude de la qualité de la prescription des médicaments, Maïga M et al, 2006

23 Impact de la liste modèle OMS des médicaments essentiels sur la sélection et l’utilisation des médicaments essentiels dans les pays de l’UMOA, Bruneton Carine, Remed (Réseau Médicaments et Développement), 2009

24 Rapport d’évaluation financière des ressources budgétaires liées aux compétences et ressources de l’Etat transférées aux collectivités territoriales niveaux Cercle et commune, Koulouba – Novembre 2009, Page 6 et 7 cité in Etat des lieux du système de financement de la santé au Mali, description, Analyse et Performance, page12.

(16)

16 Evolution des dépenses effectuées par le Ministère de la Santé en part relative par niveau25

Source : Rapport d’évaluation du plan de développement sanitaire et social.

Selon le rapport d’évaluation du plan de développement sanitaire et social26, 71% du financement a bénéficié au niveau central. Le niveau déconcentré, qui couvre tous les coûts opérationnels, n’a obtenu que 29% du financement. Selon une cadre de la DFM que nous avons rencontré, cette situation s’explique par les dépenses d’investissements exécutées au niveau central pour le compte niveau opérationnel (achats groupés de médicaments, vaccins, équipements, etc.), situation qui est en train d’évoluer. Le processus vers la déconcentration des fonds est en cours avec par exemple, la création de directions régionales de la DPM mais il reste lent.

L’état des lieux de la couverture universelle au Mali fait en outre ressortir, sur la base des comptes nationaux de la santé, qu’en 2004 « les dépenses de santé par habitant, toutes sources et toutes formes confondues, varient dans le rapport de 1 à 3 entre la zone la plus pauvre et la zone intermédiaire, dans le rapport de 1 à 13 entre la zone la plus pauvre et le district de Bamako…Si on s’en tient à ce que l’Etat lui-même fait des moyens dont il dispose, la situation est encore préoccupante : ici les dépenses publiques de santé par tête varient entre les zones 1 et 2 dans le rapport de 1 à 2, mais entre la zone 1, la plus pauvre et le district de Bamako, les dépenses sont dans le rapport de 1 à 39.»27

Dépenses de santé totale par habitant et par zone, et dépenses de santé financées par l’Etat par habitant et par zone

Dépenses de santé totales par habitant (en FCFA)

Dépenses de santé provenant du Ministère des Finances (en FCFA)

Zone 1 5 501 621

Zone 2 15 995 1 293

Zone 3 71 588 24 523

Source : comptes nationaux de la santé 1999-200428

Le tableau ci-dessous donne une idée des volumes engagés pour la dispensation des gratuités, d’une part, pour la prise en charge des assurés d’autre part29. Elle fait ressortir la place prépondérante du coût de la vaccination et de la prise en charge des malades du sida qui représentent à eux seuls 65% du montant total engagé en 2011. A la même date, la part des mécanismes de tiers payant s’établie à 13% de l’ensemble de ces dépenses.

25 La DNSI a divisé le pays en 3 zones, en fonction de la proportion de population en capacité de payer une ration alimentaire de 2450 kcal par jour et par adulte bien portant (ou son équivalent-riz). La zone la plus pauvre (zone 1) regroupe les régions administratives de Koulikoro, Sikasso, Ségou et Mopti. La zone 2 regroupe les régions de Kayes, Tombouctou et Gao. Enfin, la zone 3 se réduit au district de Bamako

26 Evaluation du plan de développement sanitaire et social, Août 2011, p 49

27 Etat des lieux de la couverture maladie universelle au Mali, rapport final, septembre 2011

28 Il n’y a pas eu de comptes nationaux de la santé depuis ceux portant sur cette période

29 Etude de la faisabilité de l’établissement de passerelles entre AMO, le Ramed et l’assurance mutualiste d’une part et les autres dispositifs de couverture sanitaire instaurés par l’Etat. novembre 12, p 29

(17)

17 Comparaison des valeurs d’intrants et kits avec les montants des

prestations de tiers payant

En FCFA

Coût VIH sida (ARV, tests, réactifs) en 2011 5 406 194

Coût cancer (médicaments) en 2011 1 369 665

Coût tuberculose (médicaments) en 2011 909 676

Coût vaccination (vaccin et seringues) en 2011 5 561 171

Coût des kits paludisme grave en 2011 511 996

Coût des kits césarienne en 2011 993 037

Montant des prestations payées par les mutuelles en 2011 1 273 908 Montant des prestations par l’ANAM de janvier à octobre 2012 117 786 Montant des prestations par la CACAM de mai 2011 à novembre 2012 782 897

Bilan :

- Le financement de la santé repose très largement sur les ménages ce qui est le système de financement le plus inique qui soit.

- Le financement est insuffisant : le taux de la santé dans le budget d’Etat reste de 50% inférieur aux engagements d’Abuja mais les modes de calcul de la part du budget national consacré à la santé sont multiples et font débat.

- L’allocation de ressources est inéquitable. Même si certains progrès ont été réalisés, elle favorise encore largement le niveau national au détriment des niveaux opérationnels et Bamako plutôt que les zones de plus grande pauvreté. Elle est en outre largement orientée vers l’offre au détriment de la demande.

La mise en commun des fonds ou mutualisation des ressources (« Pooling risk »)

« La mise en commun des fonds est le cumul et la gestion des ressources financières permettant de garantir que le risque financier lié à l’obligation de payer pour des soins médicaux repose sur tous les membres de la communauté et pas seulement sur les personnes malades. Le but principal de la mise en commun est de répartir le risque financier associé à la nécessité d’utiliser les services de santé. Si les fonds sont mis en commun, ils doivent être prépayés, avant que la maladie ne survienne – par des impôts et/ ou une assurance, par exemple. La plupart des systèmes qui financent la santé comprennent un élément de mise en commun financé par prépaiement, combiné à des paiements directs des personnes aux prestataires de services de santé, parfois appelé participation aux coûts ou recouvrement des coûts. »30

30La couverture universelle de santé sous l’angle du financement du système de santé (WHR 2010, p.5-6)

(18)

18 Au Mali, le système est très fragmenté31.

- Pour le Ministère de la santé, la mise en commun des ressources est assurée par la DFM (Direction des finances et du matériel) qui mobilise en particulier les financements disponibles pour la mise en œuvre des mesures d’exemptions de paiement. Les DFM exécutent certaines dépenses directement au niveau central (achat d’intrants, de médicaments, de matériels), le reste des fonds étant transféré aux services déconcentrés (Directions Régionales et districts sanitaires), aux établissements publics autonomes (hôpitaux et diverses administrations) et enfin aux collectivités territoriales.

- Dispositifs assurantiels

L’autre centre de mutualisation des ressources pour la santé est constitué par les assurances maladies. Les principaux acteurs sont la Caisse nationale d’assurance maladie (CANAM) qui gère l’AMO, l’Agence nationale d’assistance médicale ANAM qui gère le RAMED et les mutuelles de santé qui mettent en commun les cotisations des membres.

Actuellement, les trois régimes d’assurance existants fonctionnent comme des systèmes cloisonnés pour lesquels il n’existe pas véritablement de passerelles. Aucune mise en commun n’est effective.

Bilan:

- On note un cloisonnement et une fragmentation extrême du système de financement (assurance maladie, fonds d’aide, exemptions) entre plusieurs agences (CANAM, ANAM, Mutuelles, Directions centrales des Ministères).

- L’émergence de nouvelles institutions sans recherche d’articulation avec les dispositifs antérieurs, notamment les gratuités, entraîne beaucoup d’incohérences, notamment dans les textes législatifs. Par exemple, « pour le personnel de santé, le décret n°02-311 accorde une gratuité sur l’ensemble des examens y compris la radiologie et le scanner alors que l’AMO ne leur accorde qu’une dispense de 70 à 80% sur les tarifs normaux applicables… ». Par ailleurs, « certaines exemptions mal appliquées jusqu’à présent et pratiquement oubliées peuvent en toute légitimité redevenir objet de revendication.

Par exemple l’application du décret n°95-368 accordant aux personnes âgées une demi-tarification sur certaines prestations dans les formations sanitaires publiques n’est plus réellement intéressante pour ceux qui sont à présent affiliés à l’AMO ».

Enfin,… « la loi n°09-015 du 26 juin 2009 instituant l’AMO indique que toutes les dispositions antérieures contraires sont abrogées, mais sans préciser lesquelles sont visées. Le décret n°02-311 au moins était sans doute en ligne de mire. Or en 2011 l’arrêté interministériel n°2011-1644 pris entre le Ministère du Développement Social, de la Solidarité et des Personnes Âgées, celui de la Santé et celui de l’Économie et des Finances pour la mise en oeuvre de l’AMO est venu réactiver le décret n°02-311 car il reconnait son application en dehors du champ de l’AMO. »32 - La question de l’intégration des « gratuités » dans les dispositifs assurantiels est

envisagée.

31 Etude de la faisabilité de l’établissement de passerelles entre l’AMO, le RAMED, et l’assurance mutualiste d’une part, et les autres dispositifs de couverture sanitaires instaurés par l’Etat, Nov 2012, p32

32 Idem, p30

(19)

19 Achat des services (« Purchasing service »)

« L’achat des prestations est l’acte de payer/financer les services de santé. Il existe trois façons principales de le faire. La première concerne le gouvernement qui doit fournir directement des budgets à ses prestataires de service de santé (intégration de l’achat et de la fourniture) en utilisant les recettes publiques générales et, parfois, les cotisations d’assurance. La deuxième concerne un organisme d’achat distinct du point de vue institutionnel (par exemple, un fonds d’assurance maladie ou une autorité gouvernementale) qui achète des services au nom d’une population (séparation entre acheteur-prestataire). La troisième concerne les personnes qui doivent directement payer pour les services auprès d’un prestataire. De nombreux pays combinent les trois. Dans ces domaines généraux, les prestataires de services de santé peuvent être payés de différentes façons. Acheter implique aussi décider quels services doivent être financés, notamment par un panachage de prévention, de promotion, de traitement et de rééducation. »33

L’achat en direct

Au Mali, une très large majorité de la population paie directement les prestations de santé au point de service (paiement direct). Les charges de fonctionnement du niveau le plus périphérique (et notamment les intrants médicaux) dépendent largement du recouvrement des coûts. C’est ce que confirme une étude réalisée en 2012 qui montre aussi que les craintes exprimées par la Fenascom34 concernant un impact négatif de la politique de gratuité du paludisme sur les finances des centres de santé communautaire (CSCOM) ne sont pas confirmées. Selon cette étude, « la politique de gratuité du paludisme mise en oeuvre par l’État Malien ne semble pas avoir eu d’effets négatifs sur la capacité financière des CSCom étudiés. Leur trésorerie reste positive et le niveau de recettes se maintient toujours au dessus du niveau des dépenses. La dotation des CSCom en médicaments pour la prise en charge du paludisme n’a pas réduit significativement les recettes des formations sanitaires. Les consultations restant payantes, la gratuité a attiré beaucoup plus de patients, ce qui a favorisé le maintien du niveau des recettes de la tarification et augmenté le niveau de recettes issues de la vente des médicaments. » 35

En outre, la tarification se fait largement à l’acte, « facteur d’inflation des consommations et d’irrationalité dans les prescriptions »36.

L’achat en tiers-payant

Le faible niveau de couverture des mécanismes de tiers-payant et le démarrage difficile de l’AMO et du RAMED expliquent la part importante du recouvrement des coûts dans le financement des formations sanitaires.

Les dispositifs de tiers-payant représentent une faible part du montant total des dépenses de santé37.

- L’AMO peine à donner les services à la hauteur de ses capacités. Les montants des dépenses de prestations remboursées aux formations sanitaires conventionnées ont été de 629 millions F CFA en 2011. Le taux de sinistralité (montant de prestations / cotisations) est seulement de 4% en 2011.

33La couverture universelle de santé sous l’angle du financement du système de santé (WHR 2010, p.5-6)

34 Fédération nationale des associations de santé communautaire

35La politique de gratuité du paludisme n’a pas eu d’effets sur les finances des CSCom au Mali. Kafando Y., Touré L., Ridde V. juillet 2012

36 Politique nationale de financement de la santé pour la couverture universelle 2014-2023, p13

37 Etat des lieux du système de financement de la santé au Mali. Descriptif, analyse et performances. p16

(20)

20 - Actuellement, 1 526 personnes sont inscrites dans le répertoire du RAMED qui n’a pu couvrir que 0,2% de sa population cible (indigents). Les dépenses de prestations pour les usagers du régime ont été également faibles pendant les deux dernières de fonctionnement du RAMED. En 2011 et 2012, le montant des prestations étaient de 336 et 675 millions CFA. Le taux de sinistralité a été de 37% et 52% pour la même période.

- Enfin, selon la Direction nationale de la Protection sociale, « les 168 mutuelles de santé agréées ont dépensé 289 millions F CFA dans les prestations servies dans les formations sanitaires conventionnées au cours de l’année 2012 »38.

Bilan

- L’achat des services se fait très généralement par paiement direct au point de service.

Cette situation explique largement que le Mali connaisse une incidence de dépenses catastrophiques parmi les plus élevées (19%) au monde.39

4.2 le leadership et la gouvernance de la santé

L’OMS40 considère que « sans politiques solides et un « leadership » fort, les systèmes de santé ne répondent pas spontanément de façon équilibrée aux besoins et aux attentes de la population et n’utilisent pas non plus leurs ressources de manière optimale ». Ainsi elle considère le Leadership et la gouvernance comme un des six éléments essentiels au bon fonctionnement d’un système de santé.

L’exercice du leadership et de la gouvernance est bien évidemment déterminé par le contexte et l’histoire de chaque pays. Néanmoins l’OMS a défini les éléments généraux d’une bonne pratique dans ce domaine :

 Veiller à ce que les autorités sanitaires se chargent de diriger l’ensemble du secteur de la santé (pas seulement la prestation de services dans le secteur public), soient prêtes à faire face à des difficultés futures (y compris à des événements imprévus ou à des catastrophes) et soient en mesure de régler les problèmes actuels ;

 Définir, dans le cadre de processus transparents et participatifs, des politiques, une stratégie et un plan sanitaire national qui déterminent une orientation claire pour le secteur de la santé :

- en formulant un engagement du pays en faveur de buts politiques de haut niveau (équité en matière de santé, priorité à une approche centrée sur la personne, politiques de santé publique rationnelles, gouvernance efficace et redevable)

- en mettant au point une stratégie qui permette de traduire à travers des lignes directrices, des plans et des cibles pertinents, les implications de ces buts au plan du financement, des ressources humaines, des produits pharmaceutiques, de la technologie, de l’infrastructure et de la prestation des services

- en créant des mécanismes de reddition de compte (redevabilité) et d’adaptation à l’évolution des besoins ;

 Assurer une réglementation efficace grâce à un ensemble de lignes directrices, de mandats et de mesures incitatives qui s’appuient sur des mesures juridiques et des mécanismes d’application ;

 Instaurer un dialogue politique efficace avec d’autres secteurs ;

38 Cité in Etat des lieux du système de financement de la santé au Mali. Descriptif, analyse et performances. p16

39 Politique nationale de financement de la santé pour la couverture universelle, 2014-2023, oct. 2013, p12

40 Leadership et gouvernance (OMS, 2010. Éléments essentiels au bon fonctionnement d’un système de santé)

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