Chap.6 :
GRAPHES
Deux personnes prises au hasard peuvent être reliées par une chaîne de relations communes (A connaît B qui connaît C …) relativement courte : on utilise l’expression « six degré de séparation » pour indiquer que la distance sociale entre deux individus quelconques est toujours inférieure ou égale à 6.
On peut modéliser les relations sociales entre individus par un graphe : c’est le principe de
fonctionnement des « réseaux sociaux » comme Facebook et Linkedln. Activité 1 : Les aventuriers du Rail
Partie 1 : Graphes
a) Vocabulaire de base
Définition : graphe, sommets, arêtes, ordre, boucle, sommets adjacents et isolés
• Un graphe est un ensemble de sommets pouvant être reliés par des arêtes.
Les sommets sont généralement représentés par des points, les arêtes par des lignes.
• L’ordre d’un graphe est le nombre de ses sommets.
• Une boucle est une arête reliant un sommet à lui-même.
• Deux sommets reliés par une arête sont dits adjacents.
• Un sommet est dit isolé s’il n’est relié à aucun autre sommet du graphe.
Définition : différents types de graphe (simple, orienté, complet)
• Un graphe est simple s’il ne présente aucune boucle et tel qu’entre deux sommets, il y a au plus une arête.
• Un graphe orienté est un graphe tel que les arêtes ont un sens de parcours : on va d’un sommet vers l’autre (on parle alors d’arc plutôt que d’arête, et de l’origine et de l’extrémité d’un arc)
• Un graphe complet est un graphe dont tous les sommets sont adjacents les uns avec les autres.
Exemples :
Le graphe 1 est un graphe simple d’ordre 5, de sommets A, B, C, D et E. Les sommets A et B sont adjacents, A et C ne le sont pas, E est un sommet isolé.
Le graphe 2 est un graphe orienté ayant sept arcs.
Le graphe 3 est un graphe complet d’ordre 5. Activité 2 : Organisation d’un tremplin musical
b) Degré sur un graphe Définition : degré d’un sommet
Le degré d’un sommet est le nombre d’arêtes (ou d’arcs) dont ce sommet est une extrémité.
Remarque : une boucle compte deux fois !
Théorème : propriété de la somme des degrés (lemme des poignées de main).
La somme des degrés de tous les sommets d’un graphe est égale au double du nombre total d’arêtes.
Démonstration : lorsqu’on ajoute tous les degrés des sommets, on compte le nombre d’arêtes reliées à ces sommets. Chaque arête est ainsi comptée deux fois, car elle est comptée une fois avec chacun des sommets dont elle est issue.
Conséquence : la somme des degrés des sommets d’un graphe est donc un nombre pair.
Remarques : ce théorème permet par exemple de savoir si un graphe est constructible ou non : une condition nécessaire à la constructibilité d’un graphe est que la somme des degrés des sommets soit un nombre pair.
Exemples :
- Chaque sommet du graphe 3 est de degré 4.
- Dans le graphe complet d’ordre 𝑛, le degré de chacun des sommets est 𝑛 − 1 et le nombre d’arêtes est
$($&') ) .
- Dans le graphe orienté 2, le tableau des degrés des 5 sommets :
A B C D E
Degré 4 3 2 2 3
La somme des degrés est 14 et il y a bien 7 arêtes.
Partie 2 : notion de chaîne
Les graphes sont souvent utilisés pour modéliser des problèmes associés à des parcours ou à des successions d’actions. Pour cela, on introduit la notion de chaîne.
a) Chaîne et cycle Définition : chaîne et cycle
• Une chaîne est une liste ordonnée de sommets telle que chaque sommet de la liste soit adjacent au suivant.
• Une chaîne fermée est une chaîne dont l’origine et l’extrémité sont les mêmes.
• Un cycle est une chaîne fermée composée d’arêtes toutes distinctes.
Remarque : dans une chaîne, on peut prendre plusieurs fois la même arête.
Exemple 1 : dans le graphe ci-contre,
§ 𝐴 − 𝐵 − 𝐶 − 𝐷 − 𝐸 est une chaîne.
§ 𝐴 − 𝐵 − 𝐸 − 𝐷 − 𝐵 − 𝐴 est une chaîne fermée.
§ 𝐵 − 𝐶 − 𝐷 − 𝐸 − 𝐵 est un cycle.
Application 1 : trouver une chaîne, une chaîne fermée et un cycle dans le graphe ci-contre :
Solution :
𝐴 − 𝐵 − 𝐷 − 𝐹 − 𝐶 est une chaîne ;
𝐵 − 𝐷 − 𝐺 − 𝐹 − 𝐷 − 𝐵 est une chaîne fermée ; 𝐶 − 𝐸 − 𝐹 − 𝐷 − 𝐶 est un cycle.
Définition : graphe connexe
Un graphe non-orienté est connexe si on peut relier n’importe quelle paire de sommets par une chaîne.
Méthode : pour vérifier qu’un graphe est connexe, il faut vérifier que toute paire de sommets puisse être reliée par une chaîne.
Exemple 2 : les graphes représentés ci-dessous sont-ils connexes ?
1. 𝐶 − 𝐴 − 𝐵 − 𝐷 est une chaîne passant par tous les sommets du graphe. On peut relier n’importe quelle paire de sommets de ce graphe par une chaîne : ce graphe est connexe.
2. Pour montrer qu’un graphe n’est pas connexe, il suffit de donner un couple de sommets qui ne puissent être reliés par une chaîne. 𝐴 et 𝐷 ne peuvent être reliés par une chaîne : ce graphe n’est pas connexe.
b) Longueur d’une chaîne
Définition : longueur de chaîne ; distance entre deux sommets et diamètre d’un graphe connexe
• La longueur d’une chaîne est le nombre d’arêtes qui la constituent.
• Dans un graphe connexe :
- La distance entre deux sommets est la longueur de la plus courte chaîne reliant ces deux sommets.
- Le diamètre d’un graphe connexe est la plus grande distance entre deux sommets.
Exemple 1 : dans le graphe ci-contre :
a. Quelle est la longueur de la chaîne 𝐸 − 𝐶 − 𝐷 − 𝐵 − 𝐴 ? b. Quelle est la distance entre 𝐵 et 𝐸 ?
c. Quel est le diamètre du graphe ?
Solution :
a. 𝐸 − 𝐶 − 𝐷 − 𝐵 − 𝐴 est une chaîne de longueur 4.
b. La distance entre 𝐵 et 𝐸 est 2.
c. Le diamètre du graphe est 3 car 𝐴 et 𝐸 sont les sommets les plus éloignés du graphe et leur distance est 3.
Méthode : pour déterminer le diamètre d’un graphe, on peut dresser le tableau donnant les distances relatives entre les sommets.
Exemple 2 : diamètre d’un graphe
Déterminer le diamètre du graphe « taureau » représenté ci-contre.
Solution : on construit un tableau à double entrée dont on ne remplit que la partie supérieure avec les distances relatives entre les sommets du graphe : en effet, la distance de𝐴 à 𝐵 est la même que celle de 𝐵 à 𝐴 et la distance d’un sommet à lui-même est 0. Le diamètre est alors la plus grande de ces distances. Le diamètre du graphe « taureau » est donc 3.
Activité 3 : Réseau social et Activité 4 : Randonnée en haute montagne
Partie 3 : matrice d’adjacence
Définition : matrice d’adjacence
Soit 𝐺 un graphe dont les sommets sont numérotés de 1 à 𝑛.
La matrice d’adjacence de 𝑮 est une matrice carrée d’ordre 𝑛, remplie de sorte que le coefficient 𝑎78 situé à l’intersection de la ligne 𝑖 avec la colonne 𝑗 soit le nombre d’arêtes partant du sommet numéro 𝑖 et arrivant au sommet numéro 𝑗.
Propriétés :
• La matrice d’adjacence d’un graphe simple ne comporte que des 0 et des 1.
• Dans le cas d’un graphe non orienté, la matrice d’adjacence est symétrique.
Remarque : la matrice d’adjacence d’un graphe dépend de la façon dont les sommets sont ordonnés.
Exemples :
a) La matrice d'adjacence associée au graphe ci-contre est :
𝐴 =
⎝
⎜⎛ 0 1 1 0 0 0 1 1 0 0 1 0 1 1 1 0 1 1 0 0 1 1 0 1 0 0 1 1 0 0 0 1 1 0 1 0 1 1 0 0 0 1 0 1 0⎠
⎟⎞
Par exemple, le coefficient 𝑎'B est égal à 0 car aucune arête ne relie les sommets 1 et 4.
Le coefficient 𝑎B) est égal à 1 car une arête relie les sommets 4 et 2.
On constate que la diagonale est formée de 0 car aucun sommet n'est relié avec lui-même.
On constate également que la matrice est symétrique par rapport à la diagonale (𝑎78 = 𝑎87) car le graphe est simple.
b) La matrice d'adjacence associée au graphe ci-contre est 𝐵 = C1 22 0D.
𝐴 𝐵 𝐶 𝐷 𝐸 𝐴 × 1 1 2 1 𝐵 × × 2 3 2 𝐶 × × × 1 1 𝐷 × × × × 2 𝐸 × × × × ×
Méthode : pour écrire la matrice associée à un graphe :
• On ordonne la liste des sommets du graphe ;
• L’ordre du graphe donne l’ordre de la matrice ;
• Le coefficient 𝑎78 de la matrice est alors le nombre d’arêtes issues du 𝑖-ème sommet et arrivant au 𝑗-ème sommet.
Application 1 : voici le plan d’une salle d’exposition, traduit par un graphe.
Ecrire la matrice associée à ce graphe.
Solution : en considérant que l’ordre des sommets est le suivant : Entrée – Salle 1 – Salle 2 – Mezzanine – Salle 3 – Salle 4 – Sortie On obtient la matrice suivante :
Méthode : pour représenter le graphe associé à une matrice :
• On commence par choisir autant de noms de sommets que l’ordre de la matrice ;
• Le coefficient 𝑎78 de la matrice détermine ensuite l’existence d’arêtes partant du 𝑖-ème sommet et arrivant au 𝑗-ème sommet.
Application 2 : représenter le graphe associé à la matrice ci-dessous :
Solution : c’est une matrice d’ordre 7 : le graphe associé a donc 7 sommets.
Cette matrice est symétrique. Le graphe associé est donc non orienté.
De plus, elle ne comporte que des1 et des 0 : il s’agit d’un graphe simple.
Enfin, la diagonale est remplie de 0 : ce graphe ne comporte donc pas de boucle.
On nomme le 1er sommet 𝐴 , le 2e sommet 𝐵, …, le 7e sommet 𝐺.
La première ligne de la matrice montre que le sommet 𝐴 est relié aux sommets 𝐵, 𝐶, 𝐷 et 𝐸 (on prend en compte les 1 de cette ligne). On opère de même pour les autres sommets.
Théorème : coefficient de la matrice
Soit 𝑀 la matrice d’adjacence d’un graphe 𝐺 et 𝑝 un entier naturel non nul.
Dans la matrice 𝑀K, le coefficient situé à l’intersection de la ligne 𝑖 avec la colonne 𝑗 est égal au nombre de chaînes de longueur 𝒑 partant du sommet numéro 𝑖 et arrivant au sommet numéro 𝑗.
Exemple 1 : on cherche le nombre de chaînes de longueur 4 reliant les sommets 1 et 3 dans le graphe de l’exemple précédent. A l'aide de la calculatrice, on calcule la matrice .
Le nombre de chaîne de longueur 4 reliant le sommet 1 au sommet 3 est égal au coefficient 𝑎'M ou 𝑎M' de la matrice 𝐴B.
Ainsi, il existe 11 chaînes de longueur 4 reliant les sommets 1 et 3.
Par exemple : 1 − 2 − 5 − 4 − 3 ou encore 1 − 2 − 3 − 2 − 3.
Méthode : pour déterminer le nombre de chaînes de longueur 𝑝, on commence par calculer la puissance 𝑝-ème de la matrice d’adjacence à l’aide de la calculatrice.
Exemple 2 : à l’aide de la matrice d’adjacence 𝐴 donnée ci-dessous, déterminer le nombre de chaînes de longueur 4 du graphe associé.
𝐴 = O 1 2 0 1 1 2 0 1 0 0 1 0 1 2 0 1 2 3 0 1 1 2 0 1 0 1 1 0
P
Combien partent du deuxième sommet de la liste et arrivent au dernier ?
Solution : A l’aide de la calculatrice, on calcule 𝐴B :
Le coefficient situé à l’intersection de la deuxième ligne et de la quatrième colonne donne alors la réponse.
Il y a 23 chaînes de longueur 4 qui partent du deuxième sommet et arrivent au quatrième sommet de la liste.
Partie 4 : Chaînes et cycles eulériens.
Activité 5 : Le jeu des enveloppes et Activité 6 : Le jeu des dominos »
Définitions : chaîne eulérienne et cycle eulérien
• Une chaîne eulérienne est une chaîne contenant toutes les arêtes du graphe une fois et une seule.
• Un cycle eulérien est une chaîne eulérienne fermée (les extrémités coïncident).
4
4
0 1 1 0 0 11 13 14 9 1 0 1 1 1 1
11 11
3 26 19 19 13 1 1 0 1 0 19 19 14 14 0 1 1 0 1 14 19 14 19 11 0 1 0 1 0 9 13 14 11 11 A
æ ö æ ö
ç ÷ ç ÷
ç ÷ ç ÷
ç ÷ ç ÷
= =
ç ÷ ç ÷
ç ÷ ç ÷
ç ÷ ç ÷
è ø è ø
Remarque : le qualificatif « eulérien » est dérivé du nom de Leonhard Euler, qui est le premier à avoir résolu le problème des ponts de Königsberg en représentant d’une manière
convenable les divers chemins passant par ces ponts.
Exemples :
1) Une chaîne eulérienne peut être tracée d'un trait continu sans repasser par une arête déjà tracée. C'est le cas du célèbre jeu de la maison où l'on doit tracer l'enveloppe sans lever le stylo ni repasser sur un trait déjà tracé : La chaîne 𝐵 − 𝐴 − 𝐷 − 𝐵 − 𝐶 − 𝐷 − 𝐸 − 𝐴 − 𝐶 est par exemple une chaine eulérienne.
2) Dans le graphe ci-contre, la chaîne 𝐴 − 𝐵 − 𝐶 − 𝐷 − 𝐸 − 𝐹 − 𝐴 est un cycle eulérien.
3) Le graphe complet d’ordre 5 admet un cycle eulérien :
Théorème : théorème d’Euler
• Un graphe connexe admet une chaîne eulérienne si et seulement si le nombre de sommets de degré impair est 0 ou 2.
• Un graphe connexe admet un cycle eulérien si et seulement si tous les sommets sont de degré pair.
Méthode : pour prouver l’existence d’un cycle eulérien, il faut : - vérifier que ce graphe est connexe ;
- prouver que tous les degrés des sommets sont pairs.
Exemple : Le graphe représenté ci-dessous admet-il un cycle eulérien ?
Solution : Ce graphe est connexe car il existe toujours une chaîne entre deux sommets quelconques du graphe. On dresse le tableau des sommets et de leur degré :
Sommet 1 2 3 4 5 6 7
Degré 2 4 4 4 4 2 4
Tous les sommets sont de degré pair donc, d’après le théorème d’Euler, le graphe admet un cycle eulérien.
Remarques :
- Le théorème d’Euler assure seulement l’existence d’une chaîne eulérienne ou d’un cycle eulérien.
Pour les déterminer de façon pratique, on utilise généralement l’algorithme suivant :
Algorithme d’Euler
- Cet algorithme s’applique avec un cycle eulérien, en supprimant l’étape 1.
- La chaîne obtenue n’est pas unique.
Méthode : mettre en évidence une chaîne eulérienne
Le cycle 𝑆'− 𝑆S− 𝑆T− 𝑆U− 𝑆M− 𝑆B− 𝑆)− 𝑆' contient tous les sommets du graphe ci-contre.
Donc ce graphe est connexe.
Il n’y a que deux sommets de degré impair : 𝑆' et 𝑆T.
Il existe donc une chaîne eulérienne d’après le théorème d’Euler.
Étape 1 :
Les deux sommets de degré impair sont 𝑆' et 𝑆T.
On construit une chaîne simple joignant ces deux sommets : 𝐶 = 𝑆'− 𝑆)− 𝑆S− 𝑆M− 𝑆B− 𝑆T
Étape 2 :
Le cycle simple 𝐶'= 𝑆)− 𝑆B− 𝑆'− 𝑆S− 𝑆T− 𝑆) ne contient aucune des arêtes de la chaîne 𝐶.
On fusionne la chaîne 𝐶 avec le cycle 𝐶' en remplaçant le sommet 𝑆) dans la chaîne 𝐶 par le cycle 𝐶'.
𝐶 = 𝑆'− 𝑆)− 𝑆B− 𝑆'− 𝑆S− 𝑆T− 𝑆)− 𝑆S− 𝑆M− 𝑆B− 𝑆T
Il reste encore des arêtes non marquées, on recommence l’étape 2 Étape 3 :
Le cycle 𝐶) = 𝑆M− 𝑆U− 𝑆T− 𝑆M ne contient aucune des arêtes de la chaîne 𝐶.
On fusionne la chaîne 𝐶 avec le cycle 𝐶) en remplaçant le sommet 𝑆M dans la chaîne 𝐶 par le cycle 𝐶).
𝐶 = 𝑆'− 𝑆)− 𝑆B− 𝑆'− 𝑆S− 𝑆T− 𝑆)− 𝑆S− 𝑆M− 𝑆U− 𝑆T− 𝑆M− 𝑆B− 𝑆T
Toutes les arêtes sont marquées : 𝐶 est une chaîne eulérienne.