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Saga pedo, sauterelle géante du Valais

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Academic year: 2022

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La quantité d'eau attribuée à Bagnes est de 540 litres-seconde, à Vollèges 220 litres-seconde durant trois mois. Cette convention est faite pour une durée illimitée.

On assistera donc, à brève échéance, à l'inauguration du plus remar- quable ensemble d'irrigation et d'aduction d'eau potable réalisé en Suisse, puisqu'il intéresse toute la rive droite de la Dranse et que le coût total des travaux, canaux de répartition compris, s'élèvera à plus de 12 millions.

Ce qui réjouit, c'est de voir dans quel esprit d'entente ont été réglés, entre les représentants des deux communes de Bagnes et de Vollèges et les Forces motrices du Mauvoisin, les nombreux problèmes qu'il fallait résoudre.

« Hommage en soit rendu à A. Maret : l'irrigation intégrale de toute la rive droite de la Dranse est son œuvre, il ne faudra pas l'oublier » (C. Bérard).

SAGA PEDO,

SAUTERELLE GEANTE DU VALAIS

1 par Hermann Gisin

Le 7 juillet 1907, au cours d'une chasse aux papillons organisée par la Société lépidoptérologique de Genève dans le Bas-Valais, le chef de course, M. Charles Lacreuze — qui est encore aujourd'hui un actif amateur de papillons et collaborateur auxiliaire de notre Muséum — eut son attention attirée par un étrange insecte, mesurant une dizaine de centimètres et ressemblant à une sauterelle dépourvue d'ailes. Bien que ne collectionnant pas ces insectes et sans doute mal équipé pour emprisonner l'encombrante trouvaille, il la rapporta à l'entomologiste du Muséum de Genève, M. E. Frey-Gessner, qui reconnut qu'il s'agissait de Saga pedo, représentant une sous-famille de sauterelles qu'on n'avait encore jamais trouvée auparavant en Suisse. Au moment de la décou- verte, l'insecte, perché sur le sommet d'une touffe d'herbe, venait de muer, la dépouille traînant encore sur l'herbe ; dans cet état les insectes sont toujours spécialement délicats, de sorte que la sauterelle supporta

1 Reproduction d'un article publié dans « Musées de Genève », No 37, juillet 1963,

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mal le transport; passablement avariée, elle prit place dans nos col- lections scientifiques plutôt que dans les vitrines d'expositions. Dans les galeries du nouveau Muséum, nous pourrons combler cette lacune grâce au don d'un spécimen de cette sauterelle rarissime fait par le Musée zoologique de Lausanne (directeur, M. J. de Beaumont).

Frey-Gessner explora immédiatement la région de la première trou- vaille, les Follatères, colline ensoleillée près de Martigny, avec l'espoir de trouver d'autres spécimens; ni lui, ni d'autres chasseurs d'insectes n'avaient réussi à en apercevoir jusqu'à ce que, vingt ans plus tard, en 1928, un entomologiste du Valais, M. Leuzinger, reçût une femelle de la fameuse Saga de la part d'un agriculteur de Saxon qui faisait de- mander si c'était peut-être le dangereux phylloxera de la vigne, dont on parlait beaucoup à l'époque. Rendu attentif, M. Leuzinger fit des recherches minutieuses dans les environs de Saxon et finit par trouver un troisième spécimen; trois ans plus tard, un membre de la Société valaisanne d'histoire naturelle en dénichait un quatrième dans les gorges du Trient. Ces captures alertèrent le professeur de zoologie de l'Université de Lausanne, M. R. Matthey, qui comprit que le problème faunistique posé par cet insecte se doublait d'un problème biologique.

La sous-famille des Saginae comprend trois genres australiens, quatre de l'Afrique du Sud, un indien et enfin le genre Saga, dont une

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q u i n z a i n e d'espèces vivent en Asie M i n e u r e et aux B a l k a n s . U n e seule espèce, j u s t e m e n t Saga pedo ( = Saga serrata), e n v a h i t des régions encore plus occidentales et septentrionales. De plus, Saga pedo se sin- gularise p a r m i tous ses congénères p a r sa faculté de se r e p r o d u i r e sans le concours de mâles ( p a r t h é n o g e n è s e ) . On n'a en effet signalé dans la l i t t é r a t u r e scientifique q u o deux spécimens s e m b l a n t pouvoir se r a p p o r t e r à des mâles de cette espèce; tous les Saga trouvés en Espa- gne, dans le m i d i de la F r a n c e et au Valais é t a i e n t des femelles complè- t e m e n t d é p o u r v u e s d'ailes, mais m u n i e s d'un long oviscapte (servant à la p o n t e des œufs).

Les Saga du Valais p r o m i r e n t ainsi un sujet de r e c h e r c h e s passion- n a n t e s p o u r u n biologiste a v e r t i : é t u d e du m é c a n i s m e de la r e p r o d u c - tion p a r t h é n o g é n é t i q u e , explication de la d i s t r i b u t i o n g é o g r a p h i q u e et des exigences de l'insectei envers son m i l i e u ; à cela s'ajoutaient p o u r l ' h o m m e de science le plaisir de la chasse à l'insecte r a r e , la perspec- tive d'intéressants élevages au l a b o r a t o i r e , etc. On c o m p r e n d l'enthou- siasme avec lequel l e professeur M a t t h e y s'était mis à ses rerh~~ches sur les Saga du Valais.

P o u r t a n t , p e n d a n t dix ans, de 1929 à 1939, il ne lui fut pas d o n n é d'en r e n c o n t r e r u n seul e x e m p l a i r e , m a l g r é plusieurs j o u r n é e s entomo- logiques consacrées c h a q u e été dans les régions favorables. M. M a t t h e y écrit l u i - m ê m e : « L ' e s p è c e était devenue, p o u r mes c o m p a g n o n s de course et p o u r m o i , u n l é g e n d a i r e sujet de plaisanteries, u n a n i m a l p r e s q u e f a b u l e u x ». E n f i n , le 23 j u i n 1939, vers 11 h e u r e s , la p r e m i è r e fut prise, et trois h e u r e s de fauchage i n i n t e r r o m p u au filet f o u r n i r e n t encore q u a t r e larves, toutes f r a î c h e m e n t m u é e s ; quelques j o u r s plus t a r d , u n e nouvelle larve fut trouvée au m ê m e e n d r o i t . P o u r m u e r , les Saga m o n t e n t au s o m m e t des h e r b e s . La r i c h e récolte était sans d o u t e due à cette circonstance, t a n d i s q u ' e n t r e les m u e s , ces sauterelles se t i e n n e n t i m m o b i l e s dans l'épaisseur de la végétation où elles é c h a p p e n t au r e g a r d grâce aussi à l e u r coloration qui se confond avec l e u r am- biance.

C o m m e les chasses de l ' a n n é e s u i v a n t e é t a i e n t de n o u v e a u déce- vantes et le m a t é r i e l insuffisant p o u r les études envisagées, le profes- seur M a t t h e y eut l'idée d'insérer u n e a n n o n c e dans des j o u r n a u x valai- sans, p r o m e t t a n t u n e r é c o m p e n s e à q u i lui e n v e r r a i t des Saga vivantes.

A u cours des trois années suivant cette a n n o n c e , unei v i n g t a i n e de sujets furent adressés à L a u s a n n e p a r des h a b i t a n t s des régions de M a r t i g n y et de Saxon. I l est donc certain q u e cette curieuse sauterelle est bien établie au Valais, mais e x t r a o r d i n a i r e m e n t difficile à découvrir.

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Mises en cages, les Saga firent de nouvelles difficultés: les pen- sionnaires se révélèrent non seulement ennuyeuses, mais maladroites au point de se montrer incapables de se nourrir toutes seules ! Immo- biles des heures durant à l'affût d'une proie, elles cherchent, au moyen des pattes de devant, à se saisir d'un criquet qui passe, un peu à la manière d'une mante religieuse. Les tibias et les fémurs sont en effet garnis de rangées de dents formant un organe préhensile, moins bien perfectionné toutefois que chez les mantes, et n'exécutant que des mou- vements très lents. Dans les terrariums, les Saga s'installent d'habitude sur les parois verticales, position dans laquelle il leur est impossible de maîtriser une proie; ce n'est qu'en pleine nature, cramponnées à quelques chaumes, que leurs pattes prédatrices ont la liberté d'action nécessaire à leur efficacité.

En tout cas, sous peine de voir ses captives mourir de faim, le pro- fesseur Matthey dut se faire leur nourrice ! Deux ou trois fois par jour, il devait saisir chaque animal à plein corps et lui tendre un criquet devant les mandibules. Après quelques minutes de convulsions de dé- fense, les Saga acceptent la proie, tuent la victime par de profondes morsures à la nuque et au thorax et la dévorent. La pulpe de fruit est parfois aussi consommée.

Vers l'automne, les Saga se mettent à pondre une vingtaine à une cinquantaine d'œufs bruns, sans avoir été fécondées. Les œufs sont enfouis dans le sable, isolément ou par paquets, au moyen du sabre (l'oviscapte) dont elles sont munies. La taille des œufs est digne de celle de l'insecte: un bon centimètre de longueur pour trois millimètres de largeur. Malheureusement, les savants de Lausanne n'ont pu obtenir l'éclosion des œufs; il faut sans doute à ceux-ci, pour éclore, des condi- tions de milieu encore inconnues et peut-être difficiles à réaliser au laboratoire.

L'analyse microscopique a révélé que le nombre normal de chromo- somes des noyaux cellulaires — les principaux porteurs de facteurs de l'hérédité — est de 68, et ce nombre n'est pas réduit de moitié dans les œufs, contrairement à ce qui se passe chez les animaux bisexués.

D'autre part, ce nombre est à peu près deux fois plus élevé que chez toutes les autres sauterelles. Les recherches du professeur Matthey ont donc rendu très probable l'idée que Saga pedo a une constitution chro- mosomiale apparemment doublée (polyploïde), et, on sait que des ani- maux ainsi constitués ont souvent une reproduction parthénogénétique, et que ces particularités ont été acquises relativement récemment dans l'évolution des espèces.

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D'autre part, rappelons que Saga pedo a l'extension géographique la plus périphérique par rapport à ces congénères. D'après les données de l'histoire géologique des pays méditerrannéens (formation des mers et des terres), cette extension a dû avoir lieu à des époques géologiques récentes (après le tertiaire), ce qui corrobore les précédentes conclu- sions sur l'origine de l'espèce.

Ainsi l'étude des Saga du Valais a ouvert d'intéressantes perspec- tives sur l'évolution biologique.

MASQUES VALAISANS ET NOUVELLE ANNEE

1

par R. Christinger

Les masques du Lötschental, portés en hiver avant le mercredi des Cendres par des groupes de jeunes gens, sont sans doute les mieux connus de Suisse; le Musée d'ethnographie en possède plusieurs beaux exemplaires. Sans le savoir, les porteurs de masques nommés Roitscheg- geten, c'est-à-dire « ceux qui sont tachés de suie », perpétuent à cette occasion, dans cette région du Valais, des coutumes observées par cer- taines confréries de jeunes gens, dès l'âge du bronze, sinon plus tôt.

Si la signification des masques, du costume et du comportement des Roitscheggeten a déjà fait l'objet de plusieurs études, un élément par- ticulier semble avoir échappé aux spécialistes. Il s'agit de l'épreuve que devaient autrefois subir ceux qui voulaient appartenir à ce groupe:

franchir la Lonza en portant une lourde charge.

Cette épreuve, tombée sauf erreur en désuétude, souligne encore le rôle primitif de ces confréries qui consistait à stimuler l'action béné- fique du peuple des seprits à l'occasion d'un changement d'année. Le passage d'une année à l'autre était en effet considéré comme une pé- riode critique, un retour au chaos primordial, une confusion des va- leurs, une interpénétration du monde des vivants et de celui des esprits et des morts.

Le franchissement de la rivière Lonza appelle plusieurs comparai- sons, et notamment avec la légende de saint Christophe. C'était un géant, armé d'une massue ou d'un bâton, qui avait entendu la voix d'un enfant lui demander de le transporter de l'autre côté de l'eau. Il avait

1 Reproduction d'un article paru dans « Musées de Genève », No 31, janvier 1963.

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