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Frontières culturelles et interculturalité

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Academic year: 2021

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HAL Id: hal-01790679

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01790679

Submitted on 13 May 2018

HAL

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Frontières culturelles et interculturalité

Augustin Lefebvre

To cite this version:

Augustin Lefebvre. Frontières culturelles et interculturalité. Cahiers de la Nouvelle Europe, Harmat-

tan Editions, 2017. �hal-01790679�

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Pour citer cet article :

Lefebvre, Augustin. 2017. Frontières culturelles et interculturalité, in FRONTIÈRES ET TRANSFERTS CULTURELS DANS L'ESPACE EURO-MÉDITERRANÉEN : Dynamiques transfrontalières des pratiques culturelles à l'époque contemporaine. Lefebvre, A. et Maar, J.

(Eds.), Cahier de la Nouvelle Europe, 24, 7-13.

http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=54003

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Frontières culturelles et interculturalité

Augustin Lefebvre, CIEH&Fi, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3

Les contributions du présent ouvrage examinent les transferts culturels et les dynamiques transfrontalières des pratiques culturelles dans l’espace euro-méditerranéen à l’époque contemporaine. Elles examinent toutes des contextes où deux cultures au moins – représentées par un individu ou par des groupes – se retrouvent en contact, faisant émerger des problèmes de catégorisation de l’autre, de relation de domination, de lutte de pouvoir, d’opacité du comportement de l’autre, ou au contraire des logiques d’attraction, voire de fascination, pour l’autre. Ces contributions se situent ainsi dans un domaine de recherche relativement nouveau et en pleine expansion, celui de l’interculturalité ou des études interculturelles.

Ce domaine est né du constat que si la mondialisation ne fait pas tomber toutes les frontières, les mouvements de population n’ont cessé de s’accroître après la seconde guerre mondiale, donnant naissance à des sociétés où, de façon massive, se côtoient des groupes culturels d’une grande diversité. La diversité culturelle devient ainsi logiquement un objet de réflexion dans tous les domaines de la société et pas seulement dans le champ universitaire.

Qu’il s’agisse de l’entreprise, de la santé ou des relations internationales, la diversité culturelle peut être traitée aussi bien comme une opportunité que comme une source de conflits. Examinons quelques exemples.

Dans le « monde de l’entreprise » les conflits liés au contact de différentes cultures peuvent être pris en charge par des associations qui s’attachent par exemple à promouvoir l’égalité des chances et la lutte contre le racisme en développant des pratiques de conciliation (ou aménagements

1

). La diversité culturelle peut aussi être perçue comme une source de richesse, dont la compréhension et la gestion demande une formation universitaire. Ainsi, par exemple, le Centre de formation universitaire Teluq et l’Université de Laval, toutes deux situées au Québec, offrent une formation en gestion de la diversité culturelle en entreprise.

Le contact des cultures est également source de nombreuses problématiques dans le domaine de la santé qu’il s’agisse pour les professionnels de développer des modes d’intervention adaptés auprès de populations provenant de cultures éloignées

2

, ou qu’il s’agisse, comme pour l'entreprise, de développer de nouveaux cursus de formation professionnelle adaptés à l’interculturalité

3

.

Le développement de la mixité culturelle dans les démocraties occidentales pose aussi des questions autour de la citoyenneté et notamment de nombreuses questions d’ordre juridique. Emergent en effet des tensions entre valeur « universalisante » des droits fondamentaux et valeurs culturelles autochtones liées à des cultures spécifiques

4

. De fait, le développement des mouvements des populations, des richesses et des connaissances remet en question les repères institutionnels hérités des 18

ème

et 19

ème

siècles tel le lien Etat-Nation-

1Voir par exemple les pratiques développées par l’association Belge UNIA: http://unia.be/fr

2Problématique abordée en Suisse notamment par le CEDIC - Centre d’études de la diversité culturelle et de la citoyenneté dans la santé et le social et par la HES SO - Haute Ecole Spécialisée de Suisse Occidentale.

3Voir par exemple les formations en psychologie clinique et psychologie interculturelle de l’Université de Picardie.

4 Voir par exemple les recherches du CIRID de l’université Laurentienne, Canada.

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Territoire

5

. Plus généralement, la mondialisation reconfigure la géométrie des instances de décision supranationales ou internationales et accroit l’importance des réseaux transnationaux dans les échanges économiques, culturels ou religieux

6

.

Les conséquences de la diversité culturelle sont aussi observables à l’articulation des politiques d’urbanisation et des pratiques urbaines des habitants. La ville ou les banlieues offrent des cas particulièrement pertinents pour observer, ou imaginer, de nouvelles formes culturelles

7

.

Enfin, le développement des sociétés multiculturelles a des conséquences sur le développement des politiques éducatives et culturelles encouragées par les institutions internationales. Par exemple, l’acte constitutif de l’UNESCO mentionne la diversité culturelle dès 1946. De son côté, l’organisation de la Francophonie se présente comme une zone de rencontre des cultures : l’espace défini par la présence du français devient l’espace de rencontre et de reconnaissance mutuelles d’autres langues et cultures.

Une fois établi ce bref panorama des champs sociaux impliqués par le contact des cultures, se pose la question de savoir quels outils conceptuels permettent de dégager ce qu’il y a de commun dans cette multitude de domaines. Peut-être faut-il d'abord définir ce qu'on entend exactement par culture et par différence culturelle. L’anthropologue américain Edward T. Hall est l’un des pionniers d’une approche contrastive des cultures. Selon lui, les anthropologues définissent la culture selon trois traits. La culture affirme-t-il « n'est pas innée, mais acquise ; les divers aspects de la culture constituent un système - c'est à dire que tous les aspects de la culture sont solidaires; enfin elle est partagée et, par là, délimite les différents groupes. » (Hall, 1976:21).

Hall ajoute que l'homme communique au moyen de la culture et donc qu’aucun aspect de la vie humaine ne lui échappe. L'anthropologue a montré par exemple comment la perception de l’espace par les humains, au delà du substrat physiologique, est configurée spécifiquement par les différentes cultures (voir la notion de proxémique, Hall, 1971). Ainsi, par exemple, la distance que deux personnes qui ne se connaissent pas sont censées maintenir entre elles varie selon leur culture. Dans une rencontre interculturelle de telles variations peuvent engendrer des tensions si celui qui vient d'une culture où la peau délimite la sphère personnelle s'approche de trop près de tel autre dont la sphère individuelle s'étend à un mètre tout autour de lui. C'est que chaque culture structure les perceptions et les comportements sociaux des individus d’un même groupe de façon si évidente de leur point de vue que leurs modes d'appréhension de la réalité leur semblent naturels, innés:

« une fois acquis, ces modèles de conduite, ces réactions usuelles, ces modes de relation s’enfouissent peu à peu sous la surface de l’esprit et, comme l’amiral d’une escadrille de sous-marins en plongée, commandent des profondeurs. Ces systèmes de contrôle cachés sont en général considérés comme innés pour la simple raison qu’ils sont omniprésents et familiers. » (Hall 1976 : 48)

Souvent ne prend-on conscience que nos modes de perception et nos modèles d’action ne sont pas naturels que lorsque des problèmes adviennent. C’est précisément dans le contact

5C’est l’angle de réflexion que développe le MAPS (Maison d’Analyse des Processus Sociaux) de l’université de Neuchâtel.

6Voir par exemple les travaux de l’unité de recherche URMIShttp://urmis.revues.org/

7 Voir par exemple les activités du réseau « banlieues d’Europe ».

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avec les membres d’autres cultures que de telles prises de conscience peuvent advenir.

Certains individus peuvent nier le problème en qualifiant la situation d’incompréhension de

« ridicule », tourner en dérision toute tentative d’élucidation dans un réflexe d’autoprotection.

Hall souligne en effet que, pour certaines personnes, l’identification au modèle culturel est si forte que la simple révélation que leurs schémas ne sont pas naturels peut être perçue comme une menace pour leur individualité (Hall 1971 :59). Pourtant, c’est à cette condition qu’il devient possible de comprendre l’autre et son système culturel. La première étape cruciale pour tout individu s’engageant dans cette voie est donc de prendre conscience que ses propres actions ne sont pas « naturelles » mais dépendent d’un système culturel qu’il a intériorisé au cours de sa socialisation. En adoptant une telle perspective, l'individu en question ouvre la possibilité de catégoriser les actions de l'autre, non pas comme irrationnelles mais plutôt comme relevant d'une logique d'action avec laquelle il faut se familiariser et qu'il s'agit de comprendre, même si la tâche est ardue.

Un exemple avancé par Hall pour faire comprendre l’influence des cultures sur l’organisation de la vie quotidienne est la façon dont les cultures structurent le temps. Selon Hall, on peut distinguer des cultures au temps « monochrone » et des cultures au temps

« polychrone ». Les premières mettent l’accent sur « les horaires, le découpage et le rendement des activités » (Hall 1976 :22) alors que les secondes « insistent sur la vocation des hommes à mener des transactions à bout » (ibid.). Hall donne cet exemple, parmi tant d’autres :

« Un économiste m’a un jour raconté que les Esquimaux qui travaillaient dans une conserverie de poissons en Alaska trouvaient ridicule le sifflet de l’usine. L’idée que les hommes pouvaient se mettre au travail ou s’arrêter à cause d’un coup de sifflet leur semblait relever de la folie pure. Pour l’Esquimau, ce sont les marées qui déterminent les activités humaines, leur durée et leur moment. La marée basse entraine une série d’activités, la marée haute une autre » (Hall 1976 :25).

Ces conceptions radicalement opposées du temps entrainent inévitablement chez les individus qui les ont intériorisées des logiques d’action qui, lorsqu’elles se rencontrent, peuvent générer de grandes incompréhensions, voire des conflits.

Une autre caractéristique structurant la façon dont les cultures organisent la communication au sein du groupe concerne l’importance qu’elles accordent au contexte. Là encore, Hall présente deux types de cultures : les cultures à « contexte riche » et les cultures à

« contexte pauvre ». Pour le dire simplement, dans le premier type de culture, le contexte est porteur d’une grande quantité d’informations, et la communication repose sur la référence permanente à ce contexte. La conséquence est que les messages contiennent en eux-mêmes peu d’information, ce qui rend leur interprétation très compliquée pour qui n’a pas accès aux informations nécessaires contenues dans le contexte de leur production partagées par les membres de la culture en question. Au contraire, dans les cultures à contexte « pauvre », le contexte contient très peu d’informations, ce qui conduit les individus à produire des messages le plus explicites possible. Ainsi, par exemple,

« Dans une conversation libre, un individu dans une société à contexte riche s’attendra que

son interlocuteur devine ce qui le tourmente, aussi n’a-t-il pas à être trop précis. Il tournera

donc autour du pot, en avançant toutes les pièces sauf la principale. La placer

convenablement – cette clef de voûte – est le rôle de son interlocuteur. Le faire à sa place est

une insulte et une violation de son individualité » (Hall 1976 :112).

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On le voit, constituer les cultures en objet de recherche implique d’entrer dans l’observation concrète des pratiques sociales, des savoirs et des croyances qu’elles manifestent, et de la façon dont les membres des sociétés mobilisent ces ressources pour organiser leur communication et l'accomplissement de leurs activités. Envisager les frontières sous l’angle d’une approche culturelle implique donc d'entrer dans une observation fine, qualitative, des pratiques sociales. D'autre part, dans la mesure où, comme on vient de le suggérer, les cultures structurent l’ensemble de la vie sociale, une approche culturelle des frontières et des interactions qui s’y jouent implique de développer une approche pluridisciplinaire.

C'est ce que tentent les contributions de cet ouvrage, en étudiant comment dans leurs pratiques quotidiennes ou artistiques, les individus vivent, créent ou abolissent les frontières culturelles, comment s’expriment les pensées et les pratiques transgressives dans les relations et dans les échanges interculturels, comment la frontière culturelle apparaît comme facteur d’identité possiblement multiple ou plurielle, comment la frontière, en tant qu’« espace liminal » (Fourny, 2013), peut devenir non seulement un facteur de cloisonnement mais aussi un lieu d’ouverture. Ces contributions ont été regroupées selon les quatre axes suivants : I. Frontières réelles et frontières mentales : le problème de la relation à soi-même et à l’Autre ; appartenances plurielles, par le biais de déplacements, d’échanges, de séparations, de fermetures et d’ouvertures – témoignages et expériences de la réalité de la frontière.

II. L’Imaginaire de la frontière dans la littérature et les arts : franchissement, transgression, passage et passeur – comment apparaît dans la représentation littéraire et/ou artistique tout ce que l’axe premier évoque comme réalité.

III. La frontière comme enjeu linguistique : traduction, herméneutique, compréhension.

IV. Canons culturels et leur diffusion ou le problème du cosmopolitisme artistique – identité nationale et frontières culturelles franchissables ou infranchissables.

Bibliographie

Fourny, M.C. 2013, La frontière comme espace liminal, Journal of Alpine Research | Revue de géographie alpine [En ligne], 101-2, URL : http://rga.revues.org/2115 ; DOI :

10.4000/rga.2115

Hall, T. 1971, La dimension cachée. Editions du Seuil, Paris.

Hall, T. 1976, Au-delà de la culture. Editions du Seuil, Paris.

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