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Submitted on 1 Jun 2020
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Mesure de la colonisation saprophytique en compétition de Rhizoctonia solani Kühn dans les sols et substrats
P. Camporota
To cite this version:
P. Camporota. Mesure de la colonisation saprophytique en compétition de Rhizoctonia solani Kühn
dans les sols et substrats. Agronomie, EDP Sciences, 1981, 1 (6), pp.513-517. �hal-02719154�
Mesure de la colonisation saprophytique
en compétition de Rhizoctonia solani Kühn dans les sols et substrats
Pierre CAMPOROTA
Reine CAMPOROTA
LN.R.A., Station de Recherches sur la Flore pathogène dans le Sol, B.P. 1540, F21034 Dijon Cedex
RÉSUMÉ R. solani, Piégeage,
Compétition saprophy- tique
Une méthode de piégeage de Rhizoctonia solani Kühn a été mise au point afin de pouvoir estimer son aptitude à la compétition saprophytique dans les sols et substrats. Le parasite est piégé au moyen de rondelles de
papier filtre imprégnées de milieu sélectif et enfouies dans la terre à analyser ; les rondelles sont retirées au
bout de 5 jours et déposées sur un milieu gélosé afin de déterminer le pourcentage de pièges colonisés par le Rhizoctonia solani.
La méthode est quantifiée en faisant varier la concentration de terre à analyser par dilution avec un sol désinfecté. Une relation linéaire est calculée entre les pourcentages de pièges colonisés et les concentrations de terre correspondantes. Quatre sols ont été analysés par cette méthode ; l’interprétation et l’utilisation des résultats sont discutés.
SUMMARY
R. solani, Trapping off,
Competitive saprophytic ability
Measure of the competitive saprophytic colonization of Rhizoctonia solani in soils and cultural substrates
To estimate the competitive saprophytic ability of Rhizoctonia solani for the characterization of soils and cultural substrates, a trapping method is described. Paper discs, previously soaked in a selective solution, are planted vertically in the analysed soil. After 5 days incubation period, discs are picked up and placed on agar medium to determine a percentage of colonized discs.
To quantify the method, the analysed soil is diluted by a disinfected soil. A linear regression is calculated between the percentages of colonized baits and soil dilutions. Four soils have been analysed by this method :
the interpretation and utilization of the results are discussed.
1. INTRODUCTION
La caractérisation de l’inoculum d’un champignon phyto- pathogène dans un sol peut se faire en mesurant séparément
sa densité, sa capacité saprophytique et sa capacité infec- tieuse ; par contre, la mesure du potentiel infectieux d’un sol infesté par un parasite (soil infectivity
=HORNBY, 1975 ; BoU
HOT & J OANN ES, 1980), intègre ces 3 composantes de l’inoculum et permet de connaître l’énergie pathogène présente dans un sol (BoUHO’r, 1979).
Dans les études écologiques, l’aptitude du parasite à se développer dans un sol en présence de la microflore naturelle permet d’expliquer de quelle façon il se multiplie
dans le temps. Cette aptitude est sous la dépendance de
différents facteurs tels que compositions physico-chimique
et microbiologique du sol, humidité, température, présence
ou absence de plante-hôte, etc... La connaissance de l’influence de ces facteurs pourrait aider à comprendre le déterminisme et la dynamique de l’inoculum.
G
ARRETT (1950) a nommé cette aptitude :
«competitive saprophytic ability » (CSA) ce qui est traduit en français
par : aptitude à la compétition saprophytique. La CSA est définie ainsi par G ARRETT : c’est l’addition des caractères physiologiques propres à un parasite qui lui permettent de triompher dans une compétition avec le reste de la micro- flore du sol pour coloniser des débris organiques morts.
Il faut préciser que cette notion de CSA est un concept théorique ; elle a été estimée par la colonisation de pièges
dans la méthode dite de Cambridge (G ARRETT , 1950 ; BUTLER, 1953 ; LUCAS, 1955 ; GARRET, 1956) : un inoculum du champignon dont on veut étudier la CSA est produit sur
du sable additionné de farine de maïs ; on le dilue au moyen de sol non stérile de façon à faire varier sa concentration de 100 p. 100 à 0 p. 100. Dans chacune des dilutions, on enfouit
des pièges constitués par des fragments de tissus végétaux
morts et, après un temps d’incubation, on détermine par isolement sur milieu gélosé, un pourcentage de pièges
colonisés par concentration. On observe généralement une
baisse de ce pourcentage à mesure que la dilution de l’inoculum augmente. Il est commode de pouvoir rendre compte de ce phénomène par une seule valeur, ce qui permet de comparer la CSA de différentes souches d’une même espèce ; pour cela, certains auteurs ont proposé des
indices de colonisation déterminés à partir de la relation
existante entre les pourcentages de pièges colonisés et les concentrations correspondantes de l’inoculum (MI’rCHELL
& Dix, 1975 ; D HINGRA et al., 1976).
Dans le cas de Rhizoctonia solani Kühn, de nombreux
auteurs ont employé le principe de piégeage de la méthode
de Cambridge (WILHEL M , 1956 ; MESSIAE N , 1957 ; KEN-
DRICK & JACKSON, 1958 ; PAPAVIZAS & DAVEY, 1959 à 1962 ; EL ZARKA, 1963 ; DOW N ES & LOUGHNANE, 1965 ; S
N
EH et al., 1966 ; CHU, 1966). Une variante de cette
méthode consiste à utiliser comme pièges, des supports
inertes imprégnés ou non d’éléments sélectifs (VARNEY, 1961 ; OLD & NICOLSON, 1962 ; GOCHENAUR, 1964 ; MAIER, 1970 ; H ERR , 1973).
Cet article a pour objet d’exposer les premiers résultats
obtenus avec une technique d’estimation de l’aptitude à la compétition saprophytique de R. solani au moyen de la
mesure de la colonisation saprophytique en conditions de
compétition : le parasite est piégé dans les sols naturels par des rondelles de papier filtre imprégnées de milieu sélectif.
C’est une adaptation de la méthode décrite par HER R (1973).
II. MATÉRIEL ET MÉTHODE A) Mode opératoire
Des rondelles de papier filtre de 10 mm de diamètre sont stérilisées à l’autoclave 20 min à 120 °C. Elles sont placées
dans un milieu Richard (in R AP ILLY, 1968) additionné des éléments sélectifs suivants : rose bengale (1 p. 1 000), strep-
tomycine (1 p. 1 000), bénomyl (0,05 p. 1 000), sulfate de cuivre (0,05 p. 1 000) et propamocarb (0,5 p. 000). Au bout de 30 mn, les rondelles sont essorées sous aspiration dans
un filtre Büchner puis mises à sécher pendant 2 h, à 45 °C.
La terre à analyser est déposée dans des boîtes de Petri en
matière plastique de diamètre 60 mm, sur une épaisseur de
1 cm. Son humidité est ajustée à 60 p. 100 de sa capacité de rétention avec de l’eau distillée. Chaque boîte reçoit
5 rondelles enfoncées verticalement jusqu’à la moitié de
leur hauteur et disposées de façon régulière sur la surface.
Les boîtes sont alors fermées et placées en étuve obscure pendant 5 j à 25 °C (justification au paragraphe suivant).
Les rondelles sont ensuite retirées, lavées sous un jet d’eau stérile pour éliminer la majorité de la terre adhérente, puis déposées dans des boîtes de Petri de diamètre 90 mm contenant 10 ml du milieu suivant : gélose 2 p. 100, extrait de malt 1 p. 100, streptomycine 100 ppm, chlortétracycline
50 ppm, à raison de 5 rondelles par boîte. Ces boîtes sont
placées à l’étuve obscure à 25 °C pendant 24 h ; après
lecture au microscope (G = x 100), on obtient un pourcen-
tage de pièges colonisés par le parasite.
B) Quantification
La méthode est quantifiée en diluant la terre à analyser au
moyen d’un mélange de sable limoneux (50 p. 100) et de tourbe (50 p. 100) désinfecté par 3 passages successifs à 100°C. Sachant que le pourcentage de pièges colonisés
varie en fonction du logarithme de la densité de l’inoculum,
nous avons utilisé les concentrations de terre suivantes dans le mélange à analyser : 100, 30, 10, 3 et 1 p. 100. Afin de calculer les taux de colonisation, on utilise, pour chaque
concentration de terre, 4 boîtes de 5 rondelles (fig. 1).
Sur un graphique sont portés : en ordonnées, les pourcen-
tages de pièges colonisés et, en abscisses, les concentrations
correspondantes de terre.
La régression liant ces 2 variables est calculée, sans opérer de transformations des données, sur la partie de la
courbe où la relation dose-effet est effective et linéaire. La gamme des concentrations choisies permet, pour la plupart
des sols, d’obtenir une droite pour au moins 3 concentrations de terre successives (fig. 1 bis). La formule
de la droite de régression s’écrit ainsi
Pourcentage de colonisation
=a + b.log des concentra-
tions de terre .
La droite est résolue pour un taux de colonisation de
50 p. 100 définissant ainsi « l’unité de colonisation 50
»(UC 50) qui est le poids de terre nécessaire pour provoquer
une colonisation de 50 p. 100 des pièges.
Poids de terre correspondant à 1 UC 5 0
=100 HJU x P
Dans cette formule, P est le poids (en g) de terre utilisée dans un godet recevant l’échantillon non dilué (concentra- tion 100 p. 100).
Chaque sol est caractérisé par un nombre d’UC 50 par g.
Nombre d’UC 50 par g de sol
=III. RÉSULTATS
La méthode décrite a été appliquée à 4 sols silico humifè-
res de la région d’Avignon naturellement infestés par R. solani.
A) Etude de la dynamique de la colonisation saprophytique L’aptitude à la colonisation saprophytique est une compo- sante essentielle de l’inoculum de R. solani pour la compré-
hension des variations de sa densité ; c’est pourquoi, nous
avons étudié sa dynamique temporelle. Pour cela, l’ensem- ble des pièges a été placé dans les différents sols et retiré
après 2, 3, 4, 5 et 6 j de présence dans la terre.
La figure 2 présente, pour chaque sol, les courbes reliant les taux de colonisation et les différentes concentrations de
terre.
A partir du 4 e jour de présence des pièges dans l’échantil- lon de sol, le taux de colonisation devient proportionnel aux
concentrations de terre à analyser. Puis le niveau moyen de la colonisation des pièges augmente au 5 e jour pour les 4 sols et se stabilise (sols A et B) ou décroît (sols D et E) lors du 6 e jour. Ces résultats nous ont conduits au choix de la durée de 5 j de présence des pièges dans l’échantillon de terre.
B) Calcul de la relation : Taux de colonisation - Concentra- tion de terre
Le tableau 1 rassemble les résultats et la figure 3 en donne
la représentation graphique. Cette dernière révèle l’exis-
tence de 2 types de relations
«Colonisation - Concentra- tions de terre » : :
Pour le sol E, la relation est linéaire pour l’ensemble des concentrations de terre utilisées et le coefficient de corréla- tion est hautement significatif (tabl. 1). Pour les trois autres
sols (A, B, D), la relation présente, à partir de la concentra-
tion de sol de 30 p. 100, soit un plateau (sol B) soit une
relation inverse (sols A et D). Nous avons donc utilisé pour
nos calculs, la partie « linéarisable » de la courbe en
éliminant le pourcentage de colonisation obtenu à la concen-
tration 100 p. 100 : les relations sont linéaires et les coeffi- cients de corrélation significatifs (sols A et D) ou hautement significatifs (sol B) sans qu’il ait été nécessaire, de même
que pour le sol E, d’opérer des transformations sur les pourcentages de colonisation (tabl. 1). L’application du test
de non-parallélisme (F calculé : 0,76, F tabulaire : 2,84) démontre que les 4 droites sont parallèles. Les nombres d’UC 50/g de sol ont été calculés et sont portés sur le
tableau 1.
IV. DISCUSSION
Le but de ces recherches est de trouver une technique
pour mesurer la capacité à la colonisation saprophytique en compétition de R. solani. Deux préoccupations nous ont
incités à choisir de mettre au point la méthode en l’appli-
quant à des sols naturellement infestés :
-
Obtenir une sensibilité suffisante pour détecter les niveaux d’infestation relativement bas généralement ob-
servés.
-
Permettre de rendre compte du fait que l’inoculum de R. solani est la plupart du temps représenté par une
population de souches non homogènes.
La technique que nous proposons est une adaptation de
celle décrite par H ERR (1973). Nous avons ajouté dans le
milieu sélectif, un fongicide spécifique des Pythiacées (propamocarb) qui envahissent souvent les boîtes d’ana-
lyse. La quantification a été obtenue en faisant varier la densité de l’inoculum au moyen de dilutions de la terre
analysée par de la terre désinfectée.
Les résultats obtenus appellent 2 remarques importantes :
1° La 1 è’ e concerne la dynamique de la colonisation
saprophytique : le choix de la durée de 5 j de présence des pièges dans la terre analysée est en accord avec les travaux
de HE RR qui obtient un maximum de piégeage pour une durée voisine ; P APAV IZ A S & AYEItS (1965) ont observé le même phénomène (optimum de colonisation des pièges
entre 4 et 5 j) en utilisant une technique de piégeage de
R. solani par des segments de tige de sarrasin. Ces auteurs ont travaillé avec des sols naturels dans lesquels ils ont introduit un inoculum artificiel, ou avec des échantillons de sol provenant de parcelles d’expérimentation très contami-
nées à la suite d’apports réguliers d’inoculum et de rotations de cultures sensibles. La concordance de nos résultats, révèle un comportement similaire de l’inoculum introduit et de l’inoculum naturel.
2° La 2 e est relative à la fidélité de la méthode : les droites de régression sont parallèles ; cela dénote une certaine
identité des sols analysés qui proviennent effectivement d’un même site géographique. Cependant, le sol E se distingue des 3 autres (A, B, D) par une valeur d’UC 50/g de
sol nettement supérieure (tabl. 1) ; cette constatation cor-
respond à une réalité sur le terrain : les sols A, B et D proviennent de parcelles cultivées régulièrement, tandis que
le sol E a été prélevé dans une parcelle en friche depuis
environ 20 ans. Cette méthode permet donc de séparer
différentes utilisations du même sol et, vraisemblablement, des sols de nature distincte comme l’indiquent des résultats obtenus dans des expérimentations en cours.
Le fait de disposer d’une technique de piégeage sélective
et quantitative de R. solani autorise la poursuite de nos
recherches dans 2 directions :
-
Déterminer la faculté de différents écosystèmes sol à permettre ou empêcher la colonisation saprophytique d’un
inoculum connu, en d’autres termes, juger de la réceptivité
de ces sols à R. solani.
-