• Aucun résultat trouvé

Séance 6 : Des mythes qui traversent les cultures (2) : La Tour de Babel

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Séance 6 : Des mythes qui traversent les cultures (2) : La Tour de Babel"

Copied!
6
0
0

Texte intégral

(1)

Séance 6 : Des mythes qui traversent les cultures (2) : La Tour de Babel

Parfois, ce ne sont pas des récits, comme celui du Déluge, qui voyagent entre les cultures, mais des images, des bâtiments ou des œuvres d’art. L’histoire de la Tour de Babel est en effet inspirée par une construction architecturale impressionnante, la ziggurat.

A. De la ziggurat de Babylone à la tour de Babel

Redécouverte en 1913, la plus célèbre des ziggurats est construite au début du IIe millénaire par l'un des rois les plus puissants de Mésopotamie, le roi Hammourabi. Elle est aujourd'hui presque totalement détruite et on ne la distingue que vue d'avion. Haute à l'origine de sept étages, elle a inspiré le mythe biblique de la Tour de Babel.

Reconstitutions de la ziggurat de Babylone :

(2)

Voici comment Hérodote, un historien et géographe grec du Ve siècle avant J.-C., décrit la ville de Babylone, qu'il a visitée au cours de ses voyages.

Les deux quartiers de la ville avaient en leur centre chacun une enceinte fortifiée : dans l’un, le palais royal entouré d’un mur haut et solide, dans l’autre un sanctuaire de Zeus Bélos aux portes de bronze, qui existait encore de mon temps. Le sanctuaire est un carré de deux stades de côté [soit 370 m] : au milieu se dresse une tour massive, longue et large d’un stade [soit 185 m], surmontée d’une autre tour qui en supporte une troisième et ainsi de suite, jusqu’à huit tours. Une rampe extérieure monte en spirale jusqu’à la dernière tour ; à mi-hauteur environ il y a un palier et des sièges, pour qu’on puisse s’asseoir et se reposer au cours de l’ascension. La dernière tour contient une grande chapelle, et dans la chapelle on voit un lit richement dressé, et près de lui une table d’or.

Mais il n’y a point de statue, et nul mortel n’y passe la nuit, sauf une seule personne, une femme du pays, celle que le dieu a choisie entre toutes, disent les Chaldéens qui sont les prêtres de cette divinité. Ils disent encore que le dieu vient en personne dans son temple et repose sur ce lit.

Hérodote, Histoires I, 181, traduction Andrée Barguet, Gallimard, 1964

1. En vous aidant du site http://passerelles.bnf.fr/batiments/ziggurat_ur_planche.php (cliquez sur la première image à gauche), et des documents précédents (texte et images) expliquez ce qu’est une « ziggurat ». Que signifie ce mot ? A quoi une ziggurat sert-elle ? Où trouve-t-on des ziggurats ? « Ziggurat » vient d’un verbe qui veut dire « construire en hauteur ». Ce sont des bâtiments sans doute religieux, dont on ne connaît pas bien les fonctions. C’étaient sans doute des temples, peut-être des observatoires astronomiques ; en tout cas, des édifices pour faire le lien entre terre et ciel, hommes et dieux. On trouve des ziggurats en Mésopotamie, dans l’empire babylonien, en Irak actuel.

2. Le peuple hébreu, chassé de ses terres du Proche-Orient, a vécu en exil en Mésopotamie, et notamment à Babylone. C’est là que les auteurs de l’Ancien Testament ont pu voir (ou que leurs ancêtres ont vu) la ziggurat de la ville. Pourquoi ce bâtiment a-t-il pu les impressionner ? Le peuple hébreu, à l’origine, est un petit peuple du Proche-Orient. La civilisation de Babylone, elle, au contraire, est très développée : la ville est immense pour l’époque, avec des constructions gigantesques, très impressionnantes pour un peuple rustique. On peut donc supposer que découvrir ces très grands bâtiments a fasciné les Hébreux en exil.

3. Lisez l’épisode de la Tour de Babel dans la Bible :

La terre entière se servait des mêmes mots. Or en se déplaçant vers l'orient, les hommes découvrirent une plaine dans le pays de Shinéar et y habitèrent. Ils se dirent l'un à l'autre : « Allons ! Moulons des briques et cuisons les au four. » Les briques leur servirent de pierre et le bitume leur servit de mortier. « Allons ! dirent-ils, bâtissons-nous une ville et une tour dont le sommet touche le ciel. Faisons-nous un nom afin de ne pas être dispersés sur toute la surface de la terre. » Le Seigneur descendit pour voir la ville et la tour que bâtissaient les fils d'Adam. « Eh, dit le Seigneur, ils ne sont tous qu'un peuple et qu'une langue et c'est là leur première œuvre ! Maintenant, rien de ce qu'ils projetteront de faire ne leur sera accessible ! Allons, descendons et brouillons ici leur langue, qu'ils ne s'entendent plus les uns les autres ! » De là, le Seigneur les dispersa sur toute la surface de la terre et ils cessèrent de bâtir la ville. Aussi lui donna-t-on le nom de Babel car c'est là que le Seigneur brouilla la langue de toute la terre, et c'est de là que le Seigneur dispersa les hommes sur toute la surface de la terre.

Extrait de la Bible, Genèse 11, traduction Société biblique française et Éditions du Cerf, Paris a. Quel phénomène culturel ce mythe essaie-t-il d’expliquer ? Ce mythe essaie d’expliquer

pourquoi les hommes parlent différentes langues au lieu d’une seule pour toute l’humanité.

(3)

b. Pourquoi Dieu veut-il punir les hommes, dans cet extrait ? Les hommes deviennent si orgueilleux qu’ils décident de construire une ville gigantesque et une tour qui touche le ciel.

Dieu, pour les punir de vouloir être aussi puissants que lui, fait s’écrouler la tour, les disperse et les contraint à parler plusieurs langues pour ne plus se comprendre et collaborer entre eux.

c. Quel lien pouvez-vous faire entre la ziggurat et la tour de Babel ? On peut supposer que les Hébreux, qui découvrent la ville gigantesque de Babylone et ses tours, veulent se venger symboliquement de leurs vainqueurs en imaginant que toute leur puissance va être détruite par Dieu. En tout cas, la ziggurat a sans doute inspiré l’image de la tour de Babel.

d. Lisez l’explication suivante du chercheur Louis-Jean Calvet dans Il était une fois 7000 langues : « Bâbili, mot à mot « la porte de Dieu1 » en akkadien, est en fait Babylone […].

Mais le texte biblique joue sur la ressemblance entre bâbili et le verbe hébreu bâlal, « mélanger » : Dieu a donc mélangé les langues dans la ville de Bâbili. ». Sur quel jeu de mot se fonde le mythe de la tour de Babel ? Babel rappelle « Babylone », mais aussi le verbe

« mélanger » : c’est là où les langues de l’humanité se sont mélangées, là où Dieu a puni les hommes.

B. Les représentations artistiques de la tour de Babel

Regardez les différentes représentations de la tour de Babel à travers le temps.

1. Le tableau de Brueghel l’Ancien

1 L’akkadien est une langue sémitique. Comparez avec les mots ببا, bāb « porte » et ʾilâhū, ٌه َﻻِإ « dieu » en arabe, par exemple.

(4)

a. Qui est l’auteur de ce tableau ? De quand date-t-il ? Ce tableau a été peint par Pieter Brueghel l’Ancien et date de 1563.

b. Quels sont les points communs entre la ziggurat de Babylone et la tour de Pieter Brueghel l'Ancien ? On retrouve la même forme de l’édifice, avec des étages en colimaçon. En peignant le ciel à l’arrière-plan, Brueghel suggère que le bâtiment essaie de toucher le ciel.

c. Quels moyens l'artiste a-t-il utilisés pour montrer que la tour de Babel était un signe de l'orgueil des hommes ? La hauteur de la tour, le caractère gigantesque du bâtiment, disproportionné par rapport au reste de la ville, le fait qu’elle ressemble à une montagne sortie de terre en font un symbole de l’orgueil humain.

d. Cherche tous les détails qui montrent les moyens techniques utilisés pour construire la tour : que nous disent-ils sur l’ingéniosité humaine ? Le peintre condamne-t-il vraiment les architectes de la tour ? Le peintre a montré divers outils et techniques artisanaux employés pour construire la tour, comme les poulies, par exemple, pour montrer toute l’étendue et la variété de la capacité des hommes à inventer et construire du nouveau. En ce sens, on peut aussi comprendre ce tableau comme un hommage à l’ingéniosité, aux sciences et aux arts de l’Homme.

e. Quel indice, dans ce tableau, annonce que la tour sera détruite ? Le fait que la tour penche (un peu comme celle de Pise), alors qu’elle n’est même pas achevée, annonce son écroulement à venir.

2. Voici maintenant une représentation du XVIIIe siècle :

a. Quelle est la technique artistique employée, ici ? Il s’agit d’une gravure.

b. Que reconnaît-on, au premier plan de l’image ? L’artiste fait ici le lien entre le mythe de la tour de Babel et un autre récit que nous avons étudié : lequel ? Pourquoi, selon vous ? On reconnaît l’arche de Noé au premier plan. L’artiste montre ainsi deux exemple de punitions divines pour condamner les crimes et l’orgueil des hommes : le déluge et l’écroulement de la Tour de Babel.

c. Cherchez ce qu’est l’histoire de l’échelle de Jacob. Quel lien pouvez-vous faire avec l’histoire de la Tour de Babel ? Dans la Genèse, Jacob fait un rêve : il voit une échelle entre ciel et terre, d’où montent et descendent des anges. On peut faire le lien avec la Tour de Babel, qui cherche aussi à relier le ciel à la terre. On voit l’échelle de Jacob à l’arrière-plan de la gravure.

Manuscrit FM IMPR BAYLOT 323 (f), Paris, BNF

(5)

3. Un fanal du XVIIIe siècle :

4. Une fresque du XXIe siècle :

Voici la fresque réalisée par l’artiste et dessinateur de bande dessinée François Schuiten pour l’Université Catholique de Louvain, en Belgique, en 2010 :

1. Qu’est-ce qu’un fanal ? A quoi cela sert-il ? Un fanal est le feu d’un phare : on y allume un feu pour guider les bateaux et les empêcher de s’échouer.

2. Qu’est-ce qui rappelle la Tour de Babel, dans cette image ? Boullée s’est inspiré de la forme en colimaçon de la Tour de Babel pour montrer, là encore, l’aspiration de l’Homme à dépasser ses limites.

3. Qu’est-ce qui est gravé sur la surface du bâtiment ? Qu’est- ce que cela symbolise, selon vous ? On voit des êtres humains se tenant la main former une frise sur la surface du phare. Cela symbolise ce qui a été perdu avec l’écroulement de la Tour de Babel : la solidarité entre les hommes.

4. L’artiste nous présente-t-il une vision négative de la tour de Babel ? Que représente-t-elle, pour lui ? Justifiez et faites le lien avec l’usage du fanal. Le phare, qui guide dans la nuit, est un symbole d’entraide et d’espérance. L’artiste montre que l’union des hommes pour construire la tour, le rêve d’harmonie entre des hommes qui se comprennent (ce que représente pour lui le mythe de Babel), peut être retrouvé.

Etienne-Louis Boullée, fanal, entre 1781 et 1793, BNF

1. Expliquez ce qu’est une fresque. Une fresque est une peinture réalisée sur un mur ou une paroi. Le mot vient de l’italien « affresco », « au frais » : on peint très vite, quand la peinture est encore fraîche. En séchant, les couleurs se fixent au mur.

2. De quel tableau cette œuvre s’inspire-t- elle ? Elle s’inspire du tableau de Brueghel : on reconnaît la tour.

3. Qu’est-ce qui se trouve au sommet de la tour ? Qu’est-ce que cela représente ? Au sommet de la tour, on voit une femme en train de lire, qui représente l’aspiration au savoir, toujours renouvelée.

4. L’artiste représente-t-il, selon vous, une vision positive ou négative du mythe de Babel ? L’artiste représente une vision positive du mythe, qui symbolise, là encore, la volonté de l’humanité de dépasser ses limites pour toucher le ciel, de savoir et de créer toujours plus.

5. A votre avis, pourquoi avoir choisi ce mythe pour décorer les murs d’une université ? L’université est le lieu de la découverte de la science et de la connaissance. C’est donc un bon endroit pour aspirer à en savoir toujours plus !

(6)

Synthèse

Le mythe de la Tour de Babel a-t-il gardé la même signification symbolique à toutes les époques ? Comment expliquez-vous l’évolution de son sens ? A votre avis, pourquoi a-t-il inspiré tant d’artistes ? Le mythe de la Tour de Babel change donc de sens avec le temps : si, au départ, il symbolise le danger de l’orgueil humain puni par Dieu (si les hommes ne savent pas rester à leur place, Dieu les châtiera), il en vient ensuite à représenter la soif de connaissance et de dépassement de soi de l’humanité. On relit alors positivement le mythe, comme l’histoire du désir immémoriel de l’humanité de créer, d’inventer, d’en savoir toujours plus. Il signifie aussi l’espoir d’une nouvelle solidarité et d’une nouvelle harmonie entre les hommes, comme au temps de Babel, quand tout le monde parlait la même langue et donc se comprenait.

C. Bilan de la séquence

1. Complétez le texte suivant, qui résume ce que nous avons vu dans cette séquence.

Les récits de création appartiennent à des civilisations anciennes. Ils sont parfois transmis uniquement oralement ; parfois, ils sont mis à l’écrit dans un second temps, sur des tablettes, comme l’épopée de Gilgamesh, l’un des textes les plus anciens de la littérature mondiale, ou sur des papyrus, des parchemins, puis des codex, les ancêtres des livres actuels.

La plupart du temps, les auteurs de ces textes sont inconnus. Parfois, il y en a plusieurs, parfois, un poète ou un narrateur décide de raconter un mythe déjà connu.

Les récits de création sont connus à travers plusieurs sources : les mythologies (l’ensemble des mythes) de différentes civilisations, ou bien des livres sacrés, comme la Bible pour les Juifs et les chrétiens ou le Coran pour les musulmans. On retrouve des histoires communes à ces deux livres, comme celle de l’arche de Noé, par exemple. Le premier livre de la Bible s’appelle la Genèse. Il raconte la création du monde, celle des hommes et des femmes, et l’histoire des patriarches.

Les récits de création permettent de répondre aux grandes questions de l’humanité :

- pourquoi et comment le monde existe-t-il ? C’est ce qu’on trouve dans les cosmogonies ;

- comment sont apparus les dieux ? C’est ce qu’on trouve dans les théogonies ;

- pourquoi les hommes et les femmes connaissent-ils la souffrance et la mort ? C’est ce qu’explique l’histoire de la Chute de l’homme ;

- Pourquoi les êtres humains parlent-ils tous des langues différentes ? C’est ce que raconte le mythe de la Tour de Babel ;

- Qu’est-ce qui explique l’intelligence et les qualités des hommes ? C’est ce qu’expliquent des mythes comme l’histoire de Prométhée ou encore celle de la naissance du peuple Yanomami.

Les récits de création nous permettent donc de réfléchir à la place de l’homme dans le monde et la nature. C’est pourquoi ils inspirent les artistes de toutes les époques : les questions qu’ils posent restent très actuelles pour nous !

2. Vocabulaire

Expliquez le sens des expressions suivantes :

• « le fruit défendu » : dans la Bible, le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal ; par extension, un plaisir immoral ou illicite

• « une époque antédiluvienne » : une époque très ancienne (censée être avant le Déluge)

• « attendre le déluge » : attendre quelque chose pendant très longtemps (« Qu’est-ce que tu attends pour te lever, le déluge ? »)

• « C’est la tour de Babel ! » : quand tout le monde parle en même temps, sans qu’on puisse comprendre ce qui est dit.

Références

Documents relatifs

Charlotte de Castelnau‑L’Estoile et Fabien Simon COLLECTER, ÉCRIRE, IMPRIMER DEPUIS L’EUROPE LES LANGUES DES QUATRE PARTIES DU MONDE 9h30 Giovanni Pizzorusso Université de Chieti

ption & impression : imprimerie Paris Diderot OCT 2017 | 01 57 27 63 06 | imp7@univ-paris-diderot.fr Gottfried Hensel, Synopsis universae philologiae, 1741.

Cette forme, Kertész l’imaginait atonale : dans Être sans destin, il avait tenté de transposer le modèle de la musique sérielle dans la composition structurale et linéaire

S’interroger sur « la dimension européenne de la culture administrative », comme nous y invitent les organisateurs du colloque, c’est prendre acte de deux faits

» Puis je regardai sans comprendre le visage blafard, usé, de la femme avec son châle mauve sur les épaules, ses cheveux d’un blanc pisseux, sans parvenir à saisir le sens des

Cette pro- position de validation nous semble seule à même, pour des serveurs qui, répétons-le, sont sous la responsabilité de l'institution, de garantir une qualité qui évitera

Dieu se donnera en effet pour mission dans le Nouveau Testament de rassembler à nouveau l’humanité, « d’une cacophonie de nations divisées et éparpillées dans leur

Maintenant, la nature met un esprit là-dedans qui vous fait aimer les choses du monde, et vous savez que vous avez tort quand vous faites cela!. Que vous soyez un