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Avis 53.322 du 12 juillet 2019

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Texte intégral

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CONSEIL D’ÉTAT

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N° CE : 53.322

N° dossier parl. : 7425

Projet de loi sur les armes et munitions et portant :

1° transposition de la directive (UE) 2017/853 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 91/477/CEE du Conseil relative au contrôle de l'acquisition et de la détention d'armes ;

2° modification du Code pénal, et

3° abrogation de la loi du 20 avril 1881 concernant le transport et le commerce des matières explosives

Avis du Conseil d’État

(12 juillet 2019)

Par dépêche du 19 mars 2019, le Premier ministre, ministre d’État, a soumis à l’avis du Conseil d’État le projet de loi sous rubrique, élaboré par le ministre de la Justice.

Le texte du projet de loi était accompagné d’un exposé des motifs, d’un commentaire des articles, d’une fiche d’évaluation d’impact, d’une fiche financière, d’un tableau de concordance entre la directive 91/477/CEE du Conseil relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes, modifiée par la directive (UE) 2017/853 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 et le projet de loi sous avis, ainsi que du texte coordonné de la directive 91/477/CEE, précitée.

Dans la dépêche, le Premier ministre indique que le ministre de la Justice, ci-après le « ministre », attire l’attention du Conseil d’État sur le fait que le délai de transposition de la directive (UE) 2017/853 est venu à échéance le 14 septembre 2018 et que la Commission européenne a émis une mise en demeure au sens de l’article 258 TFUE à l’encontre du Luxembourg en date du 24 novembre 2018 pour non-transposition dans les délais de ladite directive.

L’avis de la Chambre de commerce a été communiqué au Conseil d’État par dépêche du 14 mai 2019.

Les avis des autorités judiciaires ont été communiqués au Conseil d’État par dépêche du 18 juin 2019.

L’avis de la Chambre des métiers a été communiqué au Conseil d’État par dépêche du 4 juillet 2019.

Les avis de la Chambre des salariés et de la Commission nationale pour la protection des données, demandés selon la lettre de saisine, n’ont pas encore été communiqués au Conseil d’État à la date d’adoption du présent avis.

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Considérations générales

Le projet de loi sous avis a pour objet de procéder à une refonte complète de la loi modifiée du 15 mars 1983 sur les armes et munitions, loi qui se trouvera remplacée par la loi en projet.

Il s’agit, d’abord, de transposer la directive (UE) 2017/853 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 91/477/CEE du Conseil relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes, ci-après la « directive 91/477/CEE modifiée ».

Le projet de loi vise en outre à prévoir les dispositions légales nécessaires pour appliquer le règlement d’exécution (UE) 2015/2403 de la Commission du 15 décembre 2015 établissant des lignes directrices communes concernant les normes et techniques de neutralisation en vue de garantir que les armes à feu neutralisées sont rendues irréversiblement inopérantes, tel qu’il a été modifiée par le règlement d’exécution (UE) 2018/337 de la Commission du 5 mars 2018 modifiant le règlement d’exécution (UE) 2015/2403 établissant des lignes directrices communes concernant les normes et techniques de neutralisation en vue de garantir que les armes à feu neutralisées sont rendues irréversiblement inopérantes, ci- après le « règlement d’exécution (UE) 2015/2403 », et pour transposer la directive d’exécution (UE) 2019/69 de la Commission du 16 janvier 2019 établissant des spécifications techniques relatives au marquage des armes d’alarme et de signalisation au titre de la directive 91/477/CEE du Conseil relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes.

Nombre de dispositions de la loi en projet se bornent à reprendre, telles quelles, les dispositions correspondantes de la directive 91/477/CEE modifiée.

D’autres reprennent les textes de la loi précitée du 15 mars 1983, en les adaptant aux fins de transposition correcte de la directive.

Des dispositions sont présentées comme nouvelles et sont destinées à consacrer, dans la loi en projet, certaines pratiques administratives qui se sont développées sur la base de la loi précitée du 15 mars 1983. Ce sont ces dispositions purement nationales qui posent un problème d’articulation avec la directive 91/477/CEE modifiée. Cette dernière a pour objectif d’harmoniser le contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes. Les articles 2 et 3 de la directive 91/477/CEE modifiée laissent aux États membres le droit de régler, par des dispositions nationales, le port d’armes, la chasse ou le tir sportif, à condition que les armes utilisées soient acquises et détenues dans le respect des conditions imposées par la directive 91/477/CEE modifiée, de même que le droit d’adopter des dispositions plus strictes que celles prévues par la directive 91/477/CEE modifiée. Ces dispositifs nationaux s’appliquent néanmoins sous réserve des droits conférés aux résidents des États membres dans les domaines visés à l’article 12, paragraphe 2, de la directive 91/477/CEE modifiée en ce qui concerne les chasseurs, tireurs sportifs ou acteurs de reconstitutions historiques. Se pose toutefois un problème de cohérence entre le dispositif législatif, repris de la directive 91/477/CEE modifiée, et les règles complémentaires ou plus strictes purement nationales. Le Conseil d’État aura l’occasion de revenir

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sur ces questions dans le cadre de l’examen des articles 22 et suivants de la loi en projet, relatifs à l’octroi des autorisations aux particuliers.

Examen des articles Article 1er

L’article sous examen comporte trente-six définitions. Parmi elles figurent les treize définitions indiquées à l’article 1er de la directive 91/477/CEE modifiée. Sur ces points, la directive 91/477/CEE modifiée est correctement transposée. Le Conseil État note que la numérotation des définitions figurant à l’article 1er du texte de la directive 91/477/CEE modifiée, tel qu’il a été ajouté par les auteurs en annexe du projet de loi, est entachée d’erreurs.

D’autres définitions sont reprises d’autres instruments juridiques européens pertinents, comme le règlement (UE) n° 258/2012 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2012 portant application de l’article 10 du protocole des Nations unies contre la fabrication et le trafic illicites d’armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée (protocole relatif aux armes à feu) et instaurant des autorisations d’exportation, ainsi que des mesures concernant l’importation et le transit d’armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions.

Les auteurs du projet de loi omettent d’expliquer la nécessité ou la pertinence des définitions supplémentaires, qui spécifient certaines armes ou munitions, comme les définitions sub 3° à 8°, sub 12° à 17° ou sub 18° à 21°.

Les points 22° et 23° distinguent entre le « permis de port d’armes » et

« l’autorisation de détention d’armes ». Le terme « autorisation » est utilisé dans plusieurs intitulés de chapitre et d’article ainsi qu’à l’article 1er, point 23° (définition de l’ « autorisation de détention d’armes »), à l’article 6 (armes et munitions de la catégorie A), à l’article 22 (conditions générales de l’octroi des autorisations aux particuliers), à l’article 23 (refus, révocation et retrait des autorisations) et à l’article 33 (autorisations de détention d’armes et de munitions). L’emploi du terme « autorisation » s’aligne d’ailleurs, dans ses grandes lignes, sur celui de la directive 91/477/CEE modifiée. Le terme « permis », défini à l’article 1er, point 22°, est repris à l’article 7, paragraphe 2 (permis de chasse), à l’article 15, paragraphe 3 (permis de transfert), à l’article 22, paragraphe 4 (permis d’acquisition), à l’article 23, paragraphe 5 (permis de port d’armes) et aux articles 25 à 32 (différents types de permis de port d’armes). Le Conseil d’État comprend le régime en ce sens qu’il opère une distinction entre l’autorisation de détenir des armes, impliquant uniquement le droit de garder ces armes et de les transporter, et le port d’armes, qui requiert une autorisation spécifique selon la finalité et qui se manifeste par un permis de port spécifique. Ainsi que le Conseil d’État aura l’occasion de le développer dans la suite, ces définitions ne sont pas sans poser problème en ce qui concerne leur articulation avec les articles 22 et suivants du projet de loi sous examen. Les termes utilisés pour les définitions figurant aux points 22°

et 23° ne sont pas, en tout point, cohérents avec ceux repris dans les articles

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subséquents de la loi en projet portant sur les différents types d’autorisation de détention et de permis de port d’armes.

Le Conseil d’État ajoute que la formulation du point 22° signifie que le permis de port d’armes vise uniquement le déplacement de l’arme et ne concerne pas le port de l’arme en tant que tel dans le cadre des finalités prévues par la loi ; en effet, le texte vise le transport « vers un autre lieu où [la personne concernée] peut en faire l’usage prévu ou autorisé par la loi ».

La question n’est pas réglée par les articles 30 et 31 du projet de loi sous examen, qui ne définissent pas le cadre du droit de porter sur soi des armes de défense et des armes professionnelles.

Les points 26° et 28° consacrent les concepts d’« armurier » et de

« courtier », qui figurent dans la directive 91/477/CEE modifiée. Le Conseil d’État relève que la définition du concept d’« armurier » dans le projet de loi sous avis diffère de la définition d’armurier qui figure à l’annexe A du règlement grand-ducal modifié du 1er décembre 2011 ayant pour objet : 1.

d’établir la liste et le champ d’application des activités artisanales prévues à l’article 12(1) de la loi du 2 septembre 2011 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales ; 2. de déterminer les critères d’équivalence prévus à l’article 12(3) de la loi du 2 septembre 2011 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu'’à certaines professions libérales ; 3. d’abroger le règlement grand-ducal du 4 février 2005 déterminant le champ d’activité des métiers principaux et secondaires du secteur artisanal ; 4. d’abroger le règlement grand-ducal du 4 février 2005 ayant pour objet d’établir une nouvelle liste des métiers principaux et secondaires, prévus à l’article 13(1) de la loi modifiée du 28 décembre 1988 ; 5. d’abroger le règlement grand-ducal modifié du 15 septembre 1989 fixant les critères d’équivalences prévues à l’article 13 de la loi modifiée du 28 décembre 1988. Étant donné que la définition prévue dans le projet de loi sous examen est directement issue de la directive 91/477/CEE modifiée, il y aura lieu d’adapter la définition dans le règlement grand-ducal précité du 1er décembre 2011.

Le point 27° définit la notion de « commerçant d’armes », qui ne figure pas dans la directive à transposer. Tant l’armurier que le commerçant d’armes sont soumis à la nécessité d’un agrément. Le point 27° prévoit que les dispositions relatives aux armuriers s’appliquent également aux commerçants d’armes, « sauf dérogation expresse ». La seule distinction réside dans le droit et la mission spécifiques confiés aux armuriers de procéder à une transformation ou à une modification d’arme, le seul acte de ce type envisagé par la loi en projet étant la neutralisation d’une arme ou la transformation d’armes à feu de la catégorie A en armes de la catégorie B.

Dans cette logique, le Conseil d’État ne comprend pas les raisons pour lesquelles la profession d’armurier peut être exercée par une personne physique ou morale, tandis que le commerce d’armes est réservé aux personnes physiques.

Article 2

L’article 2 prévoit la classification des armes et munitions en reprenant, en partie, celles prévues à l’annexe I de la directive 91/477/CEE modifiée.

Les auteurs ajoutent des références aux « armes non à feu », pour la définition desquelles la directive 91/477/CEE modifiée renvoie au droit

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national. Ils ont également intégré des catégories visées par divers instruments de droit international. Certaines catégories reprennent les définitions « nationales » consacrées à l’article 1er.

Le Conseil d’État relève que la loi en projet, dans la détermination des armes visées, va au-delà de la directive 91/477/CEE modifiée. La catégorie A reprend non seulement les armes de la même catégorie visées à l’annexe I de la directive 91/477/CEE modifiée, mais inclut aussi les « armes et munitions figurant sur la liste commune des équipements militaires de l’Union européenne », celles visées dans certaines conventions internationales ou encore, sans exception aucune, toutes les armes à feu automatiques transformées en armes à feu semi-automatiques, ce qui étend le champ de la catégorie A, au détriment des catégories B et C. Les catégories A et B incluent un nombre élevé d’instruments qui devront être considérés comme des armes blanches. La catégorie C, visant dans la directive 91/477/CEE modifiée sept groupes d’armes à feu qui sont uniquement soumises à déclaration, est réduite au seul point 6 de l’énumération figurant dans la directive, à savoir les armes à feu des catégories A ou B qui ont été neutralisées conformément au règlement d’exécution (UE) n° 2015/2403.

Comme relevé dans les considérations générales, les États membres peuvent adopter des réglementations nationales plus strictes. Il n’en reste pas moins que le Conseil d’État s’interroge sur l’articulation des catégories d’armes prévues dans la loi en projet avec la structure en partie différente des catégories prévues par la directive 91/477/CEE modifiée.

En ce qui concerne les aspects techniques de la classification, le Conseil d’État renvoie à l’avis du Parquet général qui s’interroge sur le caractère cohérent et complet de la classification qui est proposée.

Article 3

L’article sous examen étend, au paragraphe 1er, l’application du dispositif légal aux « parties essentielles » des armes et munitions.

Les paragraphes 2 et 3 sont censés reprendre l’article 10 de la directive 91/477/CEE modifiée. Le Conseil d’État s’interroge sur l’omission, au paragraphe 3, de la référence aux courtiers, expressément indiqués à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 91/477/CEE modifiée.

Le Conseil d’État doit s’opposer formellement au paragraphe 3 pour transposition incomplète de la directive.

Article 4

L’article 4 détermine les armes et munitions exclues du champ d’application de la loi en projet, en particulier celles utilisées par les membres de différents corps relevant de l’État luxembourgeois. Le dispositif reprend la logique de l’article 6 de la loi précitée du 15 mars 1983, en adaptant la terminologie.

En ce qui concerne les musées, le Conseil d’État note que ce concept est défini à l’article 1er, point 24°. Le dispositif sous examen exclut purement et simplement l’application de la loi en projet aux musées. Or, l’article 6, paragraphe 5, de la directive 91/477/CEE modifiée prévoit que

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les États membres peuvent autoriser les musées à acquérir et à détenir des armes de la catégorie A, sous réserve du strict respect des conditions de sécurité, ce qui signifie que les États soit soumettent les musées au droit commun de la directive soit prévoient un régime d’autorisation spécifique.

Le Conseil d’État en conclut que le dispositif de l’article 4 sous examen, qui exclut l’application de la loi en projet aux musées, sans prévoir un régime spécial d’autorisation, n’est pas conforme sur ce point au texte de la directive et il doit émettre une opposition formelle.

Se pose par ailleurs la question des collections du Grand-Duc.

L’article 6 de la loi précitée du 15 mars 1983 réserve un statut particulier, entre autres, aux collections et panoplies appartenant à l’État. Il est admis que les collections du Grand-Duc sont couvertes. La même question se pose pour les armes non à feu et munitions acquises et détenues par les exploitants de stands forains et ambulants de tir, également visées à l’article 6 de la loi actuelle, et à leur utilisation par le public.

Le Conseil d’État s’interroge encore sur le régime juridique à réserver aux collectionneurs, qui ne relèvent pas du régime des musées, visés à l’article 1er, point 25°, et dont l’article 4 ne fait plus mention. Or, l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/477/CEE modifiée prévoit la possibilité d’un régime particulier pour les collectionneurs. Le texte de la loi en projet signifie que les collectionneurs d’armes privés sont soumis au régime de droit commun, sans possibilité d’application d’un régime dérogatoire. Il est vrai que la loi en projet prévoit des dérogations spécifiques au profit des collectionneurs, qu’il s’agisse de l’article 33, paragraphe 2, qui autorise le collectionneur à acheter des munitions pour des armes détenues, ou de l’article 65, qui instaure un régime transitoire pour la détention de certaines armes de la catégorie A. Le Conseil d’État reviendra sur cette question à l’endroit de l’article 6.

Article 5

Cet article, relatif au marquage et au traçage, reprend en substance l’article 3 de la loi précitée du 15 mars 1983, en adaptant le libellé à celui de la directive n° 91/477/CEE modifiée.

Article 6

L’article 6 contient des dispositions relatives aux armes et munitions de la catégorie A. Il est censé reprendre les dispositions de l’article 4 de la loi précitée du 15 mars 1983, avec des reformulations et des compléments qu’impose la transposition correcte de la directive n° 91/477/CEE modifiée, en particulier l’article 6 remplacé par la directive (UE) 2017/853, précitée.

Le paragraphe 1er pose le principe de l’interdiction de toute opération relative à des armes et munitions de la catégorie A. Il s’agit d’une disposition essentielle de la loi en projet sachant que, comme déjà indiqué ci-dessus, la liste des armes à feu, de même que la liste des armes blanches, relevant de la catégorie A, se trouvent étendues par la loi en projet.

Le paragraphe 2 prévoit la possibilité pour le ministre d’accorder une autorisation pour certaines opérations relatives à ces armes. Les collectionneurs de telles armes sont tenus de les neutraliser ou de les transformer pour qu’elles relèvent de la catégorie B. L’article 65,

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paragraphe 4, institue un régime transitoire pour ce qui est des armes relevant des catégories A.5 à A.8. Or, la loi actuelle autorise la collection d’armes qui vont relever, à l’avenir, de la catégorie A. Le dispositif nouveau se traduit par une atteinte à la propriété, au sens de l’article 16 de la Constitution, de l’article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, dans la mesure où l’arme de collection neutralisée ou transformée voit sa valeur réduite. Certes, le Protocole additionnel n° 1 précité prévoit qu’il est possible de porter atteinte à la propriété pour des raisons impératives d’ordre public ou de sécurité publique. Il appartient au législateur de déterminer ces objectifs et de décider les mesures propres à les atteindre. Les choix du législateur restent toutefois soumis à un contrôle au titre de la nécessité de la mesure portant atteinte au droit de propriété et de sa proportionnalité. À cet égard, le Conseil d’État s’interroge sur la nécessité d’une neutralisation ou d’une transformation des armes de la catégorie A, faisant actuellement partie de collections, pour sauvegarder la sécurité publique ainsi que sur le caractère proportionnel du dispositif restrictif mis en place. Le régime transitoire prévu à l’article 65 n’est pas de nature à sauvegarder les droits des intéressés, qui seront obligés de vendre leurs collections à des amateurs à l’étranger dans des conditions qui risquent de ne pas être favorables.

L’existence d’un régime transitoire met toutefois en évidence que le risque d’une atteinte à l’ordre public et à la sécurité publique n’est pas tel qu’une prohibition immédiate s’imposerait. La loi omet encore de tenir compte, au niveau du régime de prohibition, du caractère historique de certaines collections, de leur finalité culturelle ou éducative et des conditions de sécurité mises en œuvre par les collectionneurs. Le système prévu ne saurait pas non plus être justifié par la considération que le maintien des droits des détenteurs actuels de ces armes créerait à leur profit une situation d’inégalité par rapport à un nouveau collectionneur potentiel. En effet, sous l’aspect de l’atteinte au droit de propriété, la situation du détenteur actuel d’une arme de la catégorie A se distingue de celle d’un amateur éventuel qui se voit interdire d’acquérir, à l’avenir, une telle arme. Par ailleurs, ainsi que le Conseil d’État l’a déjà exposé, se pose la question de la nécessité d’une prohibition totale par rapport à l’objectif du maintien de la sécurité publique ou de l’ordre public.

Au regard des considérations qui précèdent, le Conseil d’État doit émettre une opposition formelle par rapport au système prévu à l’article 6.

Dans le même ordre d’idées, le Conseil d’État note encore qu’aucune dérogation n’est prévue pour les tireurs sportifs, ce qui oblige ces personnes, dans l’hypothèse où elles détiendraient des armes à feu semi-automatiques, de s’en défaire ou de les transformer.

Le Conseil d’État note que la Chambre des métiers relève également l’impact négatif de la loi en projet, en particulier d’une classification plus stricte, sur les collectionneurs et les tireurs sportifs.

De façon plus générale, le Conseil d’État s’interroge sur l’articulation de l’article 6, paragraphe 2, avec l’article 25, paragraphe 5, qui interdit, sans dérogation aucune, l’inscription d’une arme de la catégorie A sur un permis de port d’armes ou une autorisation de détention d’armes. Or, le paragraphe 2 de l’article sous examen prévoit expressément, au point 2°, la délivrance d’une autorisation ministérielle pour les armes de la catégorie A destinées à

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des fins scientifiques, de formation professionnelle ou éducatives. Le Conseil d’État renvoie encore au régime transitoire, prévu à l’article 65, pour les armes des catégories A.5 à A.8.

Le Parquet général relève encore, dans son avis, que le dispositif de l’article 6 manque de clarté, en ce que le paragraphe 1er interdit la transformation des armes, tandis que le paragraphe 3 réserve cette opération aux armuriers agréés.

Si la loi en projet prévoit, pour les armes à feu, la solution d’une neutralisation ou d’une transformation, aucun régime n’est prévu pour les armes blanches qui constitueront à l’avenir des armes prohibées.

Le Conseil d’État s’interroge encore sur la mission de certification qui est confiée à la Police grand-ducale. S’il y a lieu de soumettre les armuriers à un contrôle particulier, malgré le fait qu’ils sont agréés, la certification ne devrait-elle pas être confiée au ministre ?

Article 7

L’article 7 porte sur les armes et munitions de la catégorie B. Il reprend en substance les dispositions de l’article 5 de la loi précitée du 15 mars 1983. Le nouveau paragraphe 3 dispense les titulaires d’un permis de port d’armes de l’autorisation d’acheter les munitions correspondant aux armes en cause.

Le Conseil d’État rejoint les observations du Parquet général, ce dernier s’interrogeant sur la nécessité du texte sous examen au regard des articles 26 et 33.

Article 8

L’article 8 relatif aux armes à feu anciennes et à leurs munitions reprend l’article 5-1 de la loi précitée du 15 mars 1983.

Le Conseil d’État n’a pas d’observation à formuler.

Article 9

L’article sous examen porte sur les armes non à feu de la catégorie B et reprend l’article 5-2 de la loi précitée du 15 mars 1983.

Le Conseil d’État n’a pas d’observation à formuler.

Article 10

L’article 10 organise la neutralisation des armes des catégories A et B et leur statut comme armes de la catégorie C. Il s’agit d’une disposition nouvelle par rapport à la loi précitée du 15 mars 1983, qui vise à assurer l’application du règlement d’exécution (UE) 2015/2403, tel qu’il a été modifié par le règlement d'exécution (UE) 2018/337 précité, qui prévoit la création d’un système national de neutralisation des armes à feu.

Le Conseil d’État, tout en se déclarant d’accord avec le régime mis en place, s’interroge sur certaines formulations.

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Les paragraphes 2 et 3 visent « l’Armurerie de la Police grand- ducale ». Or, la loi modifiée du 18 juillet 2018 sur la Police grand-ducale ne consacre plus ce concept. Dans ces conditions, le Conseil d’État insiste à ce qu’il soit simplement fait référence à la « Police grand-ducale ». Le paragraphe 3 vise l’équipement réglementaire des « administrations relevant de l’État », formulation différente de celle utilisée à l’article 4, qui énumère les différents services publics concernés. En vertu de l’article 4, paragraphe 2, les armes détenues par ces administrations sont en principe exclues du champ d’application de la loi en projet. Elles sont toutefois à nouveau soumises au régime légal si elles sont remises sur le marché. Le dispositif sous examen autorise la neutralisation de ces armes, sans devoir recourir à un armurier agréé. Se pose la question de savoir s’il n’y a pas lieu de définir plus exactement les « administrations relevant de l’État » ou d’opérer un renvoi à l’énumération de l’article 4, paragraphe 1er.

Au paragraphe 5, le Conseil d’État s’interroge sur la formule « à des fins privées et non commerciales ». Le recours au concept de « fins non commerciales » devrait suffire pour distinguer l’hypothèse envisagée au paragraphe 5 de celle visée au paragraphe 6, une « fin publique » ne pouvant, par essence, pas être commerciale. Il se pose également des questions sur le port en public de telles armes neutralisées sur autorisation du ministre. Pourquoi une autorisation du ministre serait-elle nécessaire pour le transport de ces armes qui, par ailleurs, peuvent être librement importées, exportées ou transférées à des fins non commerciales ? Comment opérer une différenciation entre un transport effectué lors de la prise de possession ou lors du dessaisissement et d’autres transports ? L’autorisation du ministre constituera un acte administratif. Comment s’opérera la saisine du ministre ? D’après quels critères va-t-il refuser ou accorder l’autorisation ? Qu’en est-il d’un recours en cas de refus d’autorisation ?

Article 11

L’article sous examen constitue une disposition nouvelle qui doit organiser la classification des armes et des munitions en cas de doute. Le Conseil État, sans contester l’existence de situations où la classification est difficile à opérer, a des sérieuses réserves sur la procédure mise en place.

Se pose, d’abord, la question de la procédure à suivre pour le classement qui ne soulève pas de doute. S’agit-il d’une déclaration unilatérale de la part du détenteur de l’arme ? Le classement doit bien être accepté par l’autorité publique sous la forme de la délivrance d’une autorisation. En cas de divergence de vues, l’autorité publique devra nécessairement retenir une qualification différente de celle proposée par le requérant et refuser la délivrance de l’autorisation qui est sollicitée. Cet acte administratif pourra faire l’objet d’un recours. Dans cette logique, le Conseil d’État a du mal à concevoir la pertinence de l’hypothèse particulière de doute. En quoi la décision du ministre et l’hypothèse d’une divergence de vues seraient-elles différentes de la situation ordinaire de demande d’une autorisation de détenir ou de porter une arme ? Le Conseil d’État note que le paragraphe 1er se réfère encore à l’« Armurerie de la Police grand-ducale ».

Le Conseil d’État renvoie à ses observations à l’endroit de l’article 10. Il ne comprend pas non plus la référence au « banc d’épreuves d’armes à feu » d’un autre État membre de l’Union européenne, concept qui n’est pas défini dans la loi en projet.

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Le paragraphe 2, qui se réfère au silence du requérant valant acceptation de la classification, est également surprenant. Le Conseil d’État comprend la lettre d’information en ce sens qu’il s’agit d’une décision adoptée par le ministre qui n’accepte pas la classification retenue par le demandeur de l’autorisation. Dans la logique du droit administratif, l’administré qui n’est pas satisfait d’une décision intervenue à son égard a le droit de la contester dans les délais prévus à cet effet.

Le paragraphe 3 vise le cas de figure où une arme peut relever de plusieurs catégories. Il ne s’agit pas d’une hypothèse particulière de doute en ce qui concerne la classification, mais d’une situation de « concours idéal » de classification. La classification la plus stricte doit prévaloir.

Il en va de même pour le paragraphe 4, qui ne vise pas l’hypothèse d’une classification en cas de doute, mais celle de la transformation d’une arme qui passe d’une catégorie à l’autre. Dans ce cas, d’après les règles du droit commun, il appartiendra à la personne titulaire d’une autorisation d’obtenir une nouvelle autorisation adaptée à l’arme transformée.

Article 12

L’article sous examen établit un régime de sécurité pour le transport des armes.

Le paragraphe 1er remplace le régime de l’article 6-1 de la loi précitée du 15 mars 1983 par un dispositif plus détaillé. En ce qui concerne le point 3°, le Conseil d’État s’interroge sur la portée de l’obligation de surveillance, en cas d’arrêt accompagné d’une sortie temporaire du véhicule par la personne qui opère le transport. Le Conseil d’État ajoute que le non-respect de ces obligations est pénalement sanctionné en vertu de l’article 57 du projet de loi sous examen.

Le paragraphe 2 constitue une disposition nouvelle, qui impose des règles de sécurité particulières pour le transport d’armes et de munitions pendant la nuit. Un régime particulier moins strict est prévu pour le transport d’armes dans le cadre de la chasse. Le Conseil d’État comprend que le critère ne réside pas dans la nature de l’arme, mais dans la finalité de son emploi, à savoir une activité de chasse. Se pose la question de l’articulation du dispositif prévu avec l’exigence d’un permis de port d’armes de chasse au sens des articles 28 et 29 de la loi en projet.

En ce qui concerne la dernière phrase du paragraphe 2, le Conseil d’État propose la formule introductive « En outre », pour clarifier que le dispositif établit un régime supplémentaire, qui s’ajoute à celui prévu dans la deuxième phrase.

Le Conseil d’État s’interroge sur la nécessité de ces dispositifs particuliers de sécurité, au regard d’un risque spécifique que présenterait le transport d’armes la nuit. Il en relève le caractère très strict et s’interroge surtout sur le contrôle du respect des règles prévues.

Le paragraphe 3, qui constitue également une disposition nouvelle, porte sur le transport d’armes et de munitions dans le cadre d’un voyage empruntant un moyen de transport collectif. En ce qui concerne la

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formulation, le Conseil d’État se demande s’il n’y a pas lieu de se référer au transporteur plutôt qu’à l’organisateur du voyage, l’opérateur du transport collectif n’étant pas nécessairement l’organisateur. Si le transport collectif doit viser le seul voyage organisé, se pose la question du transport d’armes dans le cadre des transports publics.

Article 13

Le Conseil d’État rappelle que la protection des données est régie par le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données), ci-après le « règlement général sur la protection des données ». Ce règlement est mis en œuvre, au Luxembourg, par la loi du 1er août 2018 portant organisation de la Commission nationale pour la protection des données et du régime général sur la protection des données.

Le règlement général sur la protection des données s’applique au secteur public et englobe, en vertu de la loi précitée du 1er août 2018, les traitements purement internes. Aux termes de l’article 6, paragraphe 1er, du règlement général sur la protection des données, la licéité du traitement de données dans le secteur public est vérifiée si le traitement est nécessaire au respect de l’obligation légale ou à l’exécution d’une mission d’intérêt public. Dans cette logique, il ne s’impose pas de donner à chaque traitement de données une base spécifique légale ou réglementaire nationale. Si l’article 6, paragraphe 3, du règlement général sur la protection des données n’exclut pas des bases juridiques nationales qui peuvent « contenir des dispositions spécifiques », la création d’un tel cadre légal ou réglementaire ne s’impose toutefois que s’il s’agit de prévoir des règles spécifiques ayant trait notamment aux conditions générales régissant la licéité du traitement par le responsable du traitement, aux types de données qui font l’objet du traitement, aux personnes concernées, aux entités auxquelles les données à caractère personnel peuvent être communiquées et aux finalités pour lesquelles elles peuvent l’être, aux durées de conservation ou encore aux opérations et procédures de traitement, y compris les mesures visant à garantir un traitement licite et loyal.

Le paragraphe 1er crée une base expresse pour le traitement de données en se référant au ministre, qui doit être considéré comme le responsable du traitement. Pour éviter l’impression d’un retour au système ancien d’une autorisation particulière pour chaque traitement de données, le Conseil d’État propose la formulation suivante : « Le ministre tient un registre […] ».

Le paragraphe 2 de l’article sous examen constitue une disposition spécifique au sens de l’article 6, paragraphe 3, du règlement général sur la protection des données, en ce qu’il a pour objet de déterminer les conditions générales régissant la licéité du traitement par le responsable du traitement, les types de données qui font l’objet du traitement ainsi que la durée de conservation de ces données. Le règlement général sur la protection des données exige que la durée de conservation des données soit limitée au strict minimum. Certes, le dispositif sous examen indique une durée maximale, ce qui oblige le responsable à mettre un terme au traitement si ce dernier n’est plus nécessaire. Le Conseil d’État s’interroge, à cet égard, sur la

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consécration d’un délai maximum de trente ans, étant donné qu’il a du mal à envisager, dans la matière en cause, la nécessité objective de conserver des données pour une période aussi longue.

Quant au paragraphe 3, alinéa 1er, de l’article sous examen, il prévoit des règles spécifiques relatives aux entités auxquelles les données à caractère personnel peuvent être communiquées et aux finalités pour lesquelles elles peuvent l’être. Si le texte sous examen renvoie aux finalités poursuivies par l’administration bénéficiant d’un accès, il ne précise pas quelles sont les administrations concernées. Le Conseil d’État considère que, dans une logique de dispositions spécifiques nationales adaptant l’application du règlement européen, une détermination de ces administrations aurait été nécessaire.

Le Conseil d’État s’interroge surtout sur l’articulation du dispositif avec l’article 48-24 du Code de procédure pénale, l’article 10 de la loi modifiée du 5 juillet 2016 portant réorganisation du Service de renseignement de l’État et l’article 43 de la loi précitée du 18 juillet 2018, qui organisent l’accès des parquets, du Service de renseignement de l’État et de la Police grand-ducale au fichier des armes prohibées. Ce droit d’accès vaut pour la période au cours de laquelle les données sont conservées.

À l’alinéa 2 du même paragraphe, il est précisé que « [l]es données à caractère personnel sont effacées du fichier à l’issue des périodes visées à l’alinéa 2 ». Cette précision est redondante par rapport au paragraphe 2, alinéa 2, qui détermine la durée de conservation.

Dans ces conditions, le Conseil d’État propose de supprimer le paragraphe 3.

Le paragraphe 4 précise que la personne concernée consent au traitement de ses données à caractère personnel, y compris à ce que le bulletin N° 2 du casier judiciaire soit délivré au ministre lorsqu’elle appose sa signature sur la demande introduite en application de la loi en projet. Ce dispositif doit être lu en relation avec l’article 8 de la loi modifiée du 29 mars 2013 relative à l’organisation du casier judiciaire. Le Conseil d’État rappelle que l’article 19 de la loi du 8 mars 2017 sur la nationalité luxembourgeoise, telle que modifiée par la loi du 20 juillet 20181, prévoit que, « à l’appui de sa demande de naturalisation, le candidat remet à l’officier de l’état civil […] l’autorisation pour le ministre de demander le bulletin N° 2 du casier judiciaire ». Dans un souci tant de la cohérence des dispositifs légaux que de respect de la nécessité d’une autorisation particulière, le Conseil d’État propose de reprendre le régime introduit en 2018 dans la loi sur la nationalité, plutôt que de faire découler l’autorisation de la seule introduction de la demande.

Le paragraphe 5 confère une autorisation générale au ministre d’échanger toutes les données à caractère personnel avec les autorités compétentes nationales, étrangères et internationales nécessaires à l’exécution de la loi en projet, de ses règlements d’exécution, de la directive 91/477/CEE modifiée et de ses actes délégués et d’exécution, du règlement (UE) n° 258/2012 précité, ainsi que de tout autre instrument juridique international auquel le Luxembourg est partie. L’article 13, paragraphe 4, de

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la directive 91/477/CEE modifiée, que le texte sous examen est censé transposer, se limite à viser les « autorisations de transfert d’armes à feu » et les « refus d’octroyer des autorisations ». Le dispositif sous examen a dès lors une portée beaucoup plus large. Il ne précise ni les données objet de l’échange, ni les finalités d’un tel échange, ni les autorités étrangères concernées qui peuvent englober des États tiers à l’Union européenne. Un tel système général d’échange ne saurait être justifié ni au titre du règlement général sur la protection des données ni au titre de la directive 91/477/CEE modifiée. Le Conseil d’État renvoie encore aux lois citées dans les observations à l’endroit du paragraphe 3, qui organisent un droit d’accès des parquets, de la Police grand-ducale et du Service de renseignement de l’État au registre tenu par le ministre. Il ne comprend pas la logique d’un système d’échange général de données avec des autorités compétentes nationales non autrement déterminées.

Le Conseil d’État considère que le régime d’échange de données visé dans le dispositif sous revue doit être soumis à un cadre légal, national ou supranational, suffisamment précis, pour garantir les droits individuels. Il renvoie, à cet égard, aux règles particulièrement strictes de l’entraide judiciaire et au mécanisme de la coopération policière en matière internationale, objet de la loi modifiée du 22 février 2018 relative à l’échange de données à caractère personnel et d’informations en matière policière. Dans son avis du 15 novembre 2016 et dans son deuxième avis complémentaire du 15 décembre 2017 relatifs au projet de loi n° 69762, le Conseil d’État avait d’ailleurs émis une opposition formelle au motif, entre autres, que les finalités de l’échange de données n’étaient pas suffisamment précisées.

Le Conseil d’État doit émettre une opposition formelle à l’endroit du dispositif prévu qui ne respecte pas les droits des personnes concernées au titre du règlement général sur la protection des données et de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Le paragraphe 6 prévoit, pour le surplus, l’application du règlement général sur la protection des données. Cette précision est superfétatoire.

Article 14

L’article 14 est une disposition nouvelle par rapport à la loi précitée du 15 mars 1983 et transpose l’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/477/CEE modifiée.

Le Conseil d’État propose de reprendre, à l’endroit du paragraphe 1er, les termes exacts de la directive 91/477/CEE modifiée, qui vise le danger pour soi-même ou pour autrui. La notion de « danger pour l’intégrité physique », en ce qu’elle exclut en particulier l’atteinte à l’intégrité psychique, est plus restrictive.

2 Projet de loi relative à l’échange de données à caractère personnel et d’informations en matière policière et portant : 1) transposition de la décision - cadre 2006/960/JAI du Conseil du 18 décembre 2006 relative à la simplification de l’échange d’informations et de renseignements entre les services répressifs des États membres de l’Union européenne ; 2) mise en œuvre de certaines dispositions de la décision 2008/615/JAI du Conseil du 23 juin 2008 relative à l’approfondissement de la coopération transfrontalière, notamment en vue de lutter contre

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Le Conseil d’État s’interroge sur la nécessité du paragraphe 2, qui instaure un régime complexe sur la qualité du médecin appelé à émettre une attestation médicale dans le cadre de la procédure d’autorisation.

Le Conseil d’État note encore que l’article 5, paragraphe 1er, lettre b), de la directive 91/477/CEE modifiée prévoit qu’« une condamnation pour infraction intentionnelle violente est considérée comme une indication d’un tel danger », dispositif qui n’est pas transposé.

L’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/477/CEE modifiée impose la mise sur pied « d’un système de suivi, qui fonctionne de manière continue ou périodique, visant à garantir que les conditions d’octroi d’une autorisation fixées par le droit national sont remplies pour toute la durée de l’autorisation et que, notamment, les informations médicales et psychologiques pertinentes sont évaluées ». Ce dispositif n’est pas non plus transposé.

Le Conseil d’État doit dès lors émettre une opposition formelle sur les points mentionnés ci-dessus pour transposition incomplète de la directive 91/477/CEE modifiée.

Le paragraphe 4 prévoit que le ministre peut demander une nouvelle attestation médicale, s’il reçoit des informations mettant en doute la pertinence de l’attestation délivrée initialement. Le Conseil d’État comprend en principe le bien-fondé de ce dispositif. Il note toutefois que le dispositif ne précise pas le type d’informations reçues par le ministre.

Article 15

L’article sous examen vise l’agrément des armuriers et des commerçants d’armes. Le Conseil d’État rappelle qu’en vertu de l’article 1er, point 27°, les dispositions s’appliquant à l’armurier valent également pour le commerçant d’armes, sauf dérogation expresse. Le paragraphe 4, alinéa 2, prévoit une telle dérogation en réservant à l’armurier le droit de neutraliser les armes.

Le Conseil d’État s’interroge sur la signification et sur l’application pratique du paragraphe 4, alinéa 2, qui, d’après le commentaire, vise à interdire complètement l’autorisation d’armes à feu de la catégorie A dans le cadre de l’activité des armuriers et des commerçants d’armes. Une arme de la catégorie A qui est transformée en arme de la catégorie B ne relève plus de la catégorie A. Si une arme de cette catégorie est neutralisée, quelle est la classification applicable ?

Le Conseil d’État s’interroge sur l’articulation entre l’autorisation d’établissement au sens de la loi modifiée du 2 septembre 2011 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales et l’octroi de l’agrément. Alors que le paragraphe 6 fait dépendre l’agrément de l’existence d’une autorisation, le paragraphe 10 fait référence à un « accord de principe » d’une telle autorisation permettant de délivrer un « accord de principe » pour un agrément. Le Conseil d’État a des réserves sérieuses par rapport à un tel régime d’accord de principe dont la nature juridique prête à confusion et qui ne trouve pas sa place dans la systématique du droit administratif luxembourgeois.

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D’après le commentaire, le paragraphe 10 « vise à tenir compte du fait que l’ouverture d’une armurerie ou d’un commerce d’armes requiert l’octroi de plusieurs autorisations relevant de la compétence de différents Ministères ». Le Conseil d’État a du mal à retrouver cette logique dans le texte sous examen, qui ne se réfère à aucun ministre particulier. Le Conseil d’État comprend que tant l’armurier que le commerçant d’armes ont besoin d’une autorisation d’établissement au sens de la loi précitée. L’agrément est une procédure particulière, relevant de la compétence du ministre de la Justice, qui s’ajoute à l’autorisation d’établissement et cela pour les deux types d’activités. Le Conseil d’État comprend que l’octroi de l’agrément est conditionné par l’obtention d’une autorisation d’établissement. Celle-ci ne peut, juridiquement, qu’être conditionnelle.

Le paragraphe 10, point 1°, vise une enquête administrative aux fins d’établir l’honorabilité. Or, le paragraphe 2 vise déjà les garanties d’honorabilité, dont l’existence est constatée à la suite d’une enquête administrative.

Le paragraphe 11 renvoie aux locaux adéquats et à l’autorisation au titre de la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés.

Or, la condition de l’existence des locaux adéquats figure déjà au paragraphe 2, sans référence toutefois à la loi précitée du 10 juin 1999. La référence à cette loi pose, à son tour, un problème d’articulation avec l’agrément. Que signifie la formulation selon laquelle « l’exploitation du commerce est couverte, si nécessaire, par l’autorisation prévue par la loi modifiée du 10 juin 1999 » ?

Le Conseil d’État relève l’absence de cohérence et de lisibilité du dispositif sous examen en ce qui concerne l’application du régime de l’agrément, de l’autorisation d’établissement et de l’autorisation

« commodo » et doit émettre une opposition formelle pour atteinte au principe de la sécurité juridique.

Article 16

L’article sous examen porte sur le refus, le retrait et la révocation des agréments. Il reprend le dispositif des articles 13 et 14 de la loi précitée du 15 mars 1983.

Le paragraphe 1er complète les critères de refus. Le Conseil d’État s’interroge sur la substitution du critère d’âge de dix-huit ans, qui est celui de la majorité civile et pénale, par celui de vingt-et-un ans et sur la justification avancée par les auteurs consistant dans la nécessité d’avoir

« une certaine expérience de la vie ». Il y a assurément d’autres professions pour lesquelles ce critère devrait jouer. Les auteurs ajoutent également, comme nouveaux critères de refus, l’interdiction judiciaire de porter une arme et les fausses déclarations dans le cadre de la procédure d’agrément.

Le paragraphe 2 reprend le dispositif de l’article 14 de la loi précitée du 15 mars 1983, en ajoutant l’hypothèse du point 3°. Le Conseil d’État note, d’abord, que le dispositif sous examen, tout comme celui de la loi actuelle, consacre la faculté pour le ministre d’opérer un retrait. Il s’interroge sur les critères d’après lesquels le ministre va exercer cette faculté, étant donné que l’absence de remplir les conditions d’octroi dans le

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chef du professionnel devrait se traduire nécessairement par un retrait de l’autorisation. Ensuite, le Conseil d’État ne saisit pas la portée de l’ajout du terme « révoqué » à celui de « retiré ». De même, il ne voit pas la nécessité de viser spécifiquement le refus de renouvellement, étant donné que, pour chaque demande de renouvellement, les conditions de l’octroi initial de l’agrément s’appliquent. En ce qui concerne le point 1°, le Conseil d’État ne comprend pas pourquoi les auteurs ont limité le retrait aux hypothèses des points 3° et 4° du paragraphe 1er, étant donné que le défaut de remplir les conditions visées aux points 2° à 6° devrait donner lieu à un retrait.

Les auteurs ajoutent, comme nouvelle raison d’un retrait de l’agrément, l’opposition « persistante, sans motifs réels et sérieux », par la personne concernée, à des mesures de contrôle opérées par la Police grand- ducale ou par l’Administration des douanes et accises. Or, les articles 51 à 53 investissent la Police grand-ducale et l’Administration des douanes et accises d’un pouvoir de contrôle, combiné à une obligation de coopération, sans prévoir la possibilité d’une opposition au motif que ce contrôle ne serait pas justifié. Certes, l’article 51, paragraphe 1er, exige l’existence d’« indices suffisants ou de[s] motifs légitimes de considérer qu’un contrôle du respect des dispositions de la présente loi ou des règlements pris en son exécution s’impose » ou une requête du ministre. Toutefois, il appartient au seul juge, dans le cadre d’un recours, d’examiner l’existence de ces critères.

Seul l’article 51, paragraphe 3, du projet de loi sous examen prévoit que les contrôles dans des locaux d’habitation ne peuvent être effectués qu’avec l’accord de l’habitant. L’exigence de cet accord est juridiquement différente d’une opposition au motif que le contrôle ne serait pas justifié.

La possibilité de s’opposer, de façon générale, aux contrôles prévus aux articles 51 et 52 du projet de loi sous examen pose problème en rapport avec l’obligation de coopération des personnes concernées, prévue à l’article 53 du projet de loi sous examen. Le non-respect de cette obligation de coopération est d’ailleurs pénalement sanctionné par l’article 57, paragraphe 1er, du projet de loi sous avis. Le Conseil d’État reviendra sur cette question dans le cadre de l’examen de l’article 53.

Le Conseil d’État constate que la formulation de l’article 51 est fortement inspirée de dispositions similaires d’autres lois relatives à des mesures de contrôle effectuées par les agents de la Police grand-ducale et, selon les cas, des fonctionnaires d’autres administrations. Le Conseil d’État renvoie, notamment, aux articles 10 et suivants de la loi du 28 juillet 2018 instaurant un système de contrôle et de sanctions relatif aux denrées alimentaires, les articles 12 et suivants de la loi du 17 novembre 2017 relative à la commercialisation des matériels de multiplication de plantes fruitières et des plantes fruitières destinées à la production de fruits, l’article 4 de la loi du 21 juillet 2012 concernant certaines modalités d’application et la sanction du règlement (CE) n° 2173/2005 du Conseil du 20 décembre 2005 concernant la mise en place d’un régime d’autorisation FLEGT relatif aux importations de bois dans la Communauté européenne et l’article 11 de la loi modifiée du 4 septembre 2015 relative aux produits biocides. Aucun des textes de loi précités ne prévoit toutefois la possibilité, pour la personne contrôlée, de s’opposer à ces contrôles, pas plus que le retrait d’une autorisation ou d’un agrément pour s’être opposé à de tels contrôles. Un tel dispositif est néanmoins prévu à l’article 9 de la loi du 15 décembre 2017 portant réglementation de l’activité d’assistance parentale.

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Il n’en reste pas moins que le Conseil d’État s’interroge sur l’application de ce régime, en particulier en relation avec la détermination des termes « opposition persistante, sans motifs réels et sérieux ». Cette formulation risque de donner lieu à des divergences d’interprétation récurrentes.

Par ailleurs, il conviendra encore de préciser la personne qui peut s’opposer à un contrôle. S’agira-t-il du titulaire de l’agrément, de la personne qui le remplace ou du responsable trouvé sur place ? Qui se verra retirer l’agrément, le salarié ou le collaborateur qui s’est opposé ou l’armurier ou commerçant d’armes ?

L’absence de précision du dispositif prévu est source d’insécurité juridique et le Conseil d’État doit dès lors s’y opposer formellement.

En ce qui concerne le paragraphe 2, le Conseil d’État constate encore une inadéquation des hypothèses de retrait ou de révocation avec les conditions prévues au paragraphe 1er pour l’octroi de l’agrément. Ainsi, l’interdiction judiciaire de porter ou de détenir une arme n’est pas visée par le paragraphe 2. Il en va de même pour les condamnations à des peines criminelles. La logique du dispositif impliquerait que, dès lors que les conditions d’octroi de l’agrément ne sont plus remplies, il y a lieu à retrait ou révocation.

Article 17

L’article sous examen constitue une disposition nouvelle par rapport à la loi précitée du 15 mars 1983 et vise à étendre aux salariés et collaborateurs des armuriers la condition d’un agrément par le ministre compétent.

Le Conseil d’État, tout en comprenant le souci des auteurs du texte, marque ses réserves par rapport au dispositif prévu. À quel titre peut-on étendre une procédure d’agrément à des personnes qui ne bénéficient pas, à titre individuel, d’une autorisation d’exercer une profession au titre de la loi précitée du 2 septembre 2011 ? Le système signifie-t-il que seules les personnes titulaires de l’agrément peuvent être engagées par le professionnel ou que ces derniers, quand ils veulent conclure un contrat de travail, doivent, au préalable, obtenir l’agrément pour le futur salarié ? Quel sera le sort de ces agréments si le contrat de travail prend fin ? Le dispositif prévu soulève encore la question, plus fondamentale, de la responsabilité particulière du professionnel agréé par rapport à ses salariés, eux-mêmes agréés. La directive 91/477/CEE modifiée vise uniquement une habilitation pour l’armurier, sans envisager l’extension de cette condition à ses salariés.

Le Conseil d’État comprend le dispositif en ce sens que les titulaires d’une autorisation ou d’un permis sont dispensés de l’obligation d’obtenir un agrément. Cette formulation est d’ailleurs à préférer à celle retenue au paragraphe 2 qui assimile l’autorisation à l’agrément.

Le Conseil d’État s’interroge encore sur la référence, dans le dispositif sous examen, au collaborateur qui ne serait pas un salarié engagé par contrat de travail. Quel est le groupe des personnes visées ? Comment constater, en l’absence de relations juridiques clairement établies, que la personne revêt la qualité de collaborateur d’un professionnel ? Comment, et à quel titre,

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l’agrément peut-il être délivré à de tels collaborateurs qui ne sont pas engagés dans une relation de travail ?

Le dispositif prévu, notamment avec ses critères d’âge, pose encore problème en relation avec le régime du contrat d’apprentissage dans la profession de l’armurier.

Le Conseil d’État renvoie encore à l’avis de la Chambre des métiers en ce qui concerne la pertinence du seuil d’âge.

Article 18

L’article sous examen reprend, avec d’importants compléments, le dispositif de l’article 11 de la loi précitée du 15 mars 1983.

La formulation du paragraphe 1er pose le problème, déjà énoncé par le Conseil d’État dans ses considérations relatives à l’article 17, de l’articulation entre la responsabilité de l’armurier, celle de ses salariés et celle de ses collaborateurs. Le texte sous examen vise tantôt la remise, tantôt la remise « matérielle », sans que l’on comprenne la plus-value de l’ajout de ce qualificatif. De même, sont visés tantôt « l’autorisation ministérielle », tantôt le « certificat » ministériel. Une harmonisation des concepts s’impose.

En ce qui concerne la dernière phrase du paragraphe 1er, le Conseil d’État renvoie à l’avis du Parquet général qui relève l’incohérence entre le dispositif prévu qui permet la vente de munitions aux titulaires d’une autorisation de détention d’armes, ce que l’article 33 semble exclure.

Le paragraphe 2 est destiné à régler les ventes au moyen d’un contrat conclu à distance. Il exige une vérification du client par l’armurier. Le Conseil d’État ne saisit pas la pertinence de la différence de formulation entre les deux paragraphes en ce qui concerne le contrôle à opérer par le vendeur. Qu’il s’agisse d’une vente directe ou d’une vente par correspondance, l’armurier, de même que le commerçant d’armes, doit vérifier que l’acheteur dispose de l’autorisation nécessaire. Il suffirait de maintenir le texte actuel, qui se borne à étendre l’obligation de vérification à celle d’un contrat conclu à distance sans modifier le dispositif de contrôle.

Article 19

L’article sous examen reprend l’article 12 de la loi précitée du 15 mars 1983 et vise à transposer l’article 4, paragraphe 4, alinéa 5, de la directive 91/477/CEE modifiée.

Le Conseil d’État note que le dispositif sous examen se limite à citer l’armurier. Or, la directive 91/477/CEE modifiée vise, à l’article 4, paragraphe 4, alinéa 5, les courtiers, profession qui n’est pas reprise.

L’extension du régime prévu pour les armuriers aux commerçants d’armes au titre de l’article 1er, point 27°, ne joue pas pour les courtiers. Il est vrai que l’article 21, paragraphe 2, du projet de loi sous examen prévoit que l’exercice exclusif de l’activité de courtage est exclu.

Le Conseil d’État relève que le dispositif sous examen ne correspond pas, au niveau de son contenu et de son libellé, à celui de l’article 4 de la directive 91/477/CEE modifiée. Ainsi, le paragraphe 1er, point 1°, vise le

« genre », tandis que l’article 4 de la directive 91/477/CEE modifiée parle

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du « type » de l’arme. La directive vise encore le numéro de série ainsi que le marquage appliqués sur la carcasse ou sur la boîte de culasse, termes qui n’apparaissent pas dans le dispositif sous examen. Il en va de même en ce qui concerne l’indication des transformations ou modifications apportées à l’arme, y compris la neutralisation.

Le Conseil d’État doit émettre une opposition formelle pour absence de transposition correcte de la directive 91/477/CEE modifiée.

Le Conseil d’État s’interroge encore sur la signification et la portée du concept d’« identification » de l’arme et le contenu des données relatives à son « traçage ». Il ne comprend pas davantage pourquoi l’indication de l’autorisation ministérielle du client revêt une nature purement facultative.

Alors que l’article 18 du projet de loi sous examen vise la remise ou la remise matérielle d’armes par l’armurier, l’article 19, paragraphe 2, du projet de loi sous examen met l’accent sur le « dessaisissement matériel ».

Le Conseil d’État réitère sa considération qu’une harmonisation des formulations serait appropriée. Le paragraphe 2 étend l’obligation d’enregistrement aux ventes à distance et aux opérations de courtage. En cas de dépôt-vente d’une arme, le professionnel doit informer le ministre. Le dispositif sous examen ne prévoit toutefois pas les mesures que le ministre peut adopter et les obligations éventuelles de l’armurier.

Le paragraphe 3 n’appelle pas d’observation.

Le paragraphe 4 renvoie à un règlement grand-ducal pour déterminer le modèle du registre, sa tenue sous une forme informatisée, y compris la connexion électronique avec le fichier prévu à l’article 13 de la loi en projet.

Le Conseil d’État émet des réserves sérieuses par rapport au recours au concept de « connexion ». Dans la matière de la protection des données, le concept de « connexion » ou « interconnexion » signifie que des traitements de données sont reliés et peuvent être gérés par les responsables des différents traitements concernés. Les conditions de mise en place d’un tel système d’interconnexion sont très strictes. Ce n’est d’ailleurs pas l’objectif prévu par les auteurs du dispositif sous examen, qui visent en réalité un système de transmission de données ou d’informations par une voie électronique sécurisée, comme il en existe dans d’autres matières. Il y a dès lors lieu d’adapter la terminologie.

Article 20

L’article sous examen constitue encore une disposition nouvelle par rapport à la loi précitée du 15 mars 1983 et vise à transposer l’article 5bis de la directive 91/477/CEE modifiée, qui exige un stockage adéquat des armes dans des conditions sûres.

Le paragraphe 1er détermine les critères que doivent remplir les locaux professionnels. Le Conseil d’État, tout en comprenant le souci des auteurs du texte, se doit de relever le caractère complexe des exigences techniques.

Il renvoie à l’avis de la Chambre des métiers qui souligne les conséquences non négligeables du dispositif sous examen sur les armuriers.

Le Conseil d’État considère que le paragraphe 2 est superflu au regard du dispositif plus général de l’article 51 de la loi en projet.

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Article 21

L’article sous examen reprend le dispositif de l’article 27-1 de la loi précitée du 15 mars 1983 sur l’activité de courtier d’armes, dispositif qui a été ajouté à cette loi par une loi du 3 août 20113. Il n’appelle pas de commentaire particulier.

Article 22

L’article 22 constitue la première disposition d’un chapitre relatif à l’octroi des autorisations aux particuliers.

L’articulation de ce chapitre, qui distingue entre des « conditions générales » (article 22), des « dispositions communes aux autorisations de port et de détention d’armes » (article 25), des « dispositions communes aux permis de port d’armes » (article 26) et encore des « dispositions particulières » (articles 27 à 35) est souvent difficilement intelligible, étant donné que les divers types d’autorisations et de permis se recouvrent partiellement et que l’articulation des différentes conditions prévues n’est pas claire. Dès lors que tout particulier doit remplir, sur la base de l’article 22, des conditions pour obtenir l’autorisation « d’acquérir, d’acheter, d’importer, d’exporter, de transférer, de détenir, de porter, de vendre et de céder des armes et munitions », se pose la question de la combinaison de ce dispositif avec les régimes des différents permis de port d’armes et autorisations. La seule lecture permettant de donner une cohérence au régime prévu est d’admettre que le dispositif de l’article 22 ne peut pas s’appliquer en dehors du cadre légal des différents types de permis de port d’armes et autorisations spécifiques. Or, même dans cette logique, le Conseil d’Etat note que la définition de l’autorisation dans l’article sous examen n’est pas conforme aux définitions utilisées dans les dispositions sur les différents « permis de port d’armes » et « d’autorisations de détention d’armes ». De même, les concepts définissant les différents types de permis (sport, chasse, autodéfense, etc.) ne figurent pas à l’article 22. Certes, la directive 91/477/CEE modifiée permet, à l’article 2, paragraphe 1er, aux États membres d’appliquer des règles nationales sur le port d’armes, la chasse ou le tir sportif et, à l’article 3, d’adopter des dispositions plus strictes. Le Conseil d’État se doit toutefois de relever le régime particulièrement strict et complexe du système prévu par la loi en projet par rapport aux conditions de base prévues dans la directive 91/477/CEE modifiée.

Le paragraphe 1er, qui est une reprise de l’article 16 de la loi précitée du 15 mars 1983, exige, au point 1°, la fourniture d’un motif reconnu valable. Ce motif est repris dans le cadre des différents types de permis de port d’armes énumérés aux articles 27 et suivants, à savoir le sport, la chasse, la défense, le besoin professionnel, l’utilisation d’armes à des fins historiques ou culturelles. Se pose la question de la portée propre du critère du motif valable par rapport à la liste des différents permis de port d’armes énumérés dans la suite de la loi en projet ou celle de savoir si d’autres motifs pourront être admis. Dans ce dernier cas, l’autorisation de l’article 22

3 Loi du 3 août 2011 portant : - transposition de la directive 2008/51/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 modifiant la directive 91/477/CEE du Conseil relative au contrôle de l’acquisition et de détention

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se suffirait à elle-même. Le Conseil d’État reviendra à cette question à l’endroit de l’article 33.

Le renvoi, au point 3°, à l’attestation médicale visée à l’article 14 est juridiquement superfétatoire, au vu du dispositif explicite de cet article 14.

Le point 4° ajoute le respect des conditions de stockage des armes et l’existence d’un contrat d’assurance en responsabilité civile.

Le paragraphe 2 met en place une procédure d’enquête administrative pour contrôler si les conditions prévues au paragraphe 1er sont remplies. Le ministre est autorisé à consulter le registre spécial prévu par l’article 15 de la loi modifiée du 10 août 1992 relative à la protection de la jeunesse et cela jusqu’à l’âge de vingt-et-un ans de l’intéressé. L’article 15 précité, qui est maintenu dans le projet de loi n° 7276 instituant un régime de protection de la jeunesse et portant modification de la loi modifiée du 7 mars 1980 sur l’organisation judiciaire, prévoit que les données de ce registre peuvent être

« portées à la connaissance des autorités administratives dans les cas où ces renseignements sont indispensables pour l’application d’une disposition légale ou réglementaire, […] (si elles) le demandent ».

Le paragraphe 3 reprend le dispositif de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/477/CEE modifiée.

Le paragraphe 4 est censé transposer l’article 5, paragraphe 3, de la directive 91/477/CEE modifiée. Le dispositif prévoit une « autorisation de cession ou de vente », qui pose, une nouvelle fois, le problème du lien entre cette autorisation spécifique et l’autorisation générale définie au paragraphe 1er. Le texte ajoute l’expression de « permis d’acquisition », sans définir la nature et la portée de ce permis spécifique. Ce texte constitue une nouvelle fois une illustration de la question plus fondamentale portant sur la distinction entre l’autorisation du paragraphe 1er et les différents types d’autorisations et de permis de port d’armes.

Le paragraphe 5 reprend le dispositif de l’article 20, alinéas 2 et 3, de la loi précitée du 15 mars 1983 et n’appelle pas d’observation de la part du Conseil d’État.

Les paragraphes 6 et 7 sont également destinés à reprendre des articles de la loi précitée du 15 mars 1983 en apportant des compléments visant à transposer l’article 7, paragraphe 4, de la directive 91/477/CEE modifiée. Le Conseil d’État note que ces textes visent « les autorisations » au titre de la loi en projet, ce qui fait penser à une pluralité d’autorisations, ce qui est le corollaire de la pluralité de permis de port d’armes. Se pose, une nouvelle fois, la question de l’articulation de ce régime avec le mécanisme de délivrance d’une autorisation ministérielle au sens des paragraphes 1er et 2.

Article 23

L’article sous examen reprend, avec certaines adaptations, le dispositif des articles 20 et 21 de la loi précitée du 15 mars 1983.

La liste des critères de refus, visée au paragraphe 1er, est étendue aux hypothèses d’interdiction judiciaire de porter ou de détenir une arme et de fausses déclarations dans la procédure de demande. Le Conseil d’État réitère

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