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Les hommes
SAUTER, Marc-Rodolphe
SAUTER, Marc-Rodolphe. Les hommes. In: Société suisse de préhistoire et d'archéologie. Le haut Moyen-Age : (IVe-Xe siècles) : 6e cours d'initiation à la préhistoire et à
l'archéologie de la Suisse, Fribourg, 12 et 13 novembre 1977 . Genève : Département d'anthropologie de l'Université de Genève, 1977.
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:96155
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ET D'ARCHEOLOGIE
6e COURS D'INITIATION A LA PREHISTOIRE ET A L'ARCHEOLOGIE DE LA SUISSE
LE HÀUT MOYEN AGE
(IVe-Xe siècles)
Fribourg, 12 et 13 novembre 1977 Résumé des exposés.
DEPARTEMENT D'ANTHROPOLOGIE DE L'UNIVERSITE
de GENEVE
1977
10.l
LES HOMMES
par Marc-R. SAUTER (Genève)
1 .. La documentation. On dispose d'un très grand nombre de squelet- tes du haut moyen âge, ce qui est dû à plusieurs raisons
disparition de la coutume de l'incinération, reprise de la cou- tume des grands cimetières, réutilisation fréquente des tombes avec restes du (des) squelette(s) précédent(s) laissé(s) sur place. Malheureusement i l y a de sérieux handicaps à l'étude de ces documents. Les anciens fouilleurs ont souvent négligé de conserver l'ensemble du squelette, se contentant du crâne, ou bien i l s n'ont pas indiqué de quelle tombe provenait chaque squelette, donc aussi sa relation avec le mobilier funéraire.
Enfin dans certains cimetières les squelettes sont mal conser- vés, donc peu favorables à l'étude anthropologique; c'est par exemple le cas, très fâcheusement, pour le cimetière de Sézegnin
(Avusy GE), qui se signale pourtant par le nombre très grand des sépultures (près de 700) du Ve au VIIIe siècle, mais dont la majorité des squelettes est pratiquement inutilisable.
2. Les groupes ethniques. Il se pose pour chaque cimetière un pro- blème c'est de savoir à quel peuple i l a appartenu. On s ' e s t trop souvent contenté, par exemple en Suisse occidentale, de parler de "cimetière burgonde" parce qu'il se trouvait sur ce qui avait été le territoire occupé à partir du Ve siècle par les Burgondes en extension à partir de leur première installa- tion en Sapaudia. Actuellement on est plus conscient du fait que les "tombes burgondes", en dalles, ont commencé dès la fin du Bas-Empire, d'une part, et que d'autre part elles ont pu recevoir non seulement des corps de Burgondes mais aussi d'Alamans ou de Francs, sans compter les "indigènes", descen- dants des Celtes plus ou moins métissés avec des "Romains"
(mais qu'est-ce qu'un Romain, de quelle province provenait-il . . . ?)
L'archéologue ne peut le plus souvent être d'un grand secours, car ou bien i l n'y a pas de mobilier funéraire, ou bien celui- ci n'est pas significatif~ ou enfin on discute encore de son appartenance ethnique (sans compter que plusieurs grands cime- tières romands attendent l'étude archéologique). Comme on peut en outre dans certains cas penser à une continuité de l'emploi d'un cimetière en dépit de changements ethniques, à cette épo~
que mouvementée, on voit qu'il n'est pas facile d'avoir une idée claire de l'image des populations qui se sont succédé ou coudoyées dans notre pays.
La situation est un peu moins confuse en Suisse centra-orientale, où les Burgondes n'ont pas pénétré. Quant au territoire rhétique, i l a conservé jusqu'au IVe siècle une relative indépendance,
qui a probablement protégé son caractère indigène et romain (cimetière de Bonaduz GR).
Au sud des Alpes les Lombards se sont installés sans pénétrer dans les vallées, sauf dans la Mesolcina. On dispose de trop peu de restes squelletiques dans cette région pour pouvoir se faire une idée des transformations ethniques et anthropologiques que ces immigrants auraient'pu déclencher~ elles n'ont pas dû être importantes.
3. Les types humains. Les peuples germains qui ont pénétré sur le territoire de la Suisse actuelle provenaient de régions où dominait la race nordique qui est encore en place aujourd'hui dans la plus grande partie de la Scandinavie, de la Grande- Bretagne et de l'extrême nord du continent européen (Prusse, Schleswig-Holstein, Pays-Bas, par exemple) de grande t a i l l e , à la pigmentation claire des yeux et des cheveux, i l s ont im- pressionné les Gal~o-Romains, tels le poête et patrice Sidoine Apollinaire qui, vers 460, moquait la grossièreté des Burgondes et leur stature de 7 pieds, comme i l l'avait fait peu avant des "monstres" francs aux yeux glauques où luit une prunelle couleur d'eau
On a trop souvent déduit de ces propos que tous les Germains envahisseurs ou immigrants répondaient à cette description.
En réalité si les analyses anthropologiques des squelettes du haut moyen âge trouvés en Suisse montrent une augmentation de la proportion du type nordique, - ce qui ne peut se faire au niveau de la pigmentation, mais plutôt à l'aide de la t a i l l e reconstituée et des caractères de la tête, dont l'allongement relatif (mésa- à dolichocéphalie) de celle-ci - on en retire aussi la constatation que dans la plupart des cas i l y a un mélange anthropologique; celui-ci peut s'expliquer d'une part en pensant que les groupes humains en migration ont dû entraî- ner beaucoup d'hommes et de femmes provenant des peuples "in- digènes" qu'ils traversaient depuis le début de leur migration,
et d'autre part en tenant compte de ce que leur installation en territoire suisse s'est faite dans des régions habitées par des ''indigènes" avec lesquels ils se sont mélangés - et métis- sés - plus ou moins fortement au gré de leur cohabitation.
On peut imaginer aussi - i l y a des indices historiques, arché- ologiques et anthropologiques dans ce sens - et surtout en territoire alaman - que l'implantation des Germains a eu pour conséquence partielle la formation d'une stratification sociale, les envahisseurs prenant la direction politique et socio-écono- mique du pays; cela peut être la raison de différences anthropo- logiques entre deux cimetières assez proches, l'un (qui serait celui de la classe dominante plus purement germanique, (donc plus nettement nordique), l'autre étant réservé au reste du peuple
(où les éléments de race alpine, brachycéphale et méditérrané- enne, dolichocéphale de petite taille, entre autres, sont mieux représentés).
En territoire alaman on trouve fréquemment une variété de la race nordique le type des tombes à rangées (Reihengrabertypus) caractérisé par une grande robustesse et un crâne très allongé aux reliefs accentués; i l n'est pas absent de la Suisse occiden- tale et pourrait être là l'indice de la sédentarisation de petits gaupes alamans.
Nous avons émis l'hypothèse que les Burgondes - à propos du cime- tière de St-Prex VD qui contient de leurs représentants du Ve s . , donc des premières générations - auraient dans leur installation antérieure (le royaume de Worms), eu des relations autres que guerrières avec les Huns (d~Etzel =Attila), qui se seraient traduits par l'apport de traits génétiques plus fréquents chez les Mongoloïdes (les Jaunes), par exemple au niveau des dents;
10.3
ia présence d'une coutume ethnographique - la déformation artificielle du crâne - empruntée aux Huns (et aux Alains), dans plusieurs cimetières de la région lémanique, pourrait dériver de ces contacts.
A l'époque carolingienne une certaine homogénéisation se fait dans la population - sauf au niveau de la classe domi- nante, où se perpétuent les noms germaniques - mais nous sommes encore trop.ignorants de l'anthropologie de cette époque pour en saisir les conséquences biologiques. A la fin de cette époque commence à se manifester un phénomène dont on discute encore les causes la brachycéphalisation
(l'élargissement relatif et la "sphérisation" du crâne),
qui modifie l'image raciale des Suisses (et de leurs voisins).
Bibliographie sommaire
PITTARD, Eug. Les races et l'histoire. (L'évolution de l'huma- nité, 5). Paris, 1924 (réimprimé avec quelques compléments bibliographiques en 1953).
SALIN, Ed. La civilisation mérovingienne . . . Paris, 4 vol., 1950-1959 (t. I, 1950, chap. 3, L'aspect de nouveaux venus;
chap. 10, Données tirées de l'anthropologie. - t . II, 1952, chap. 4, Lésions et déformations osseuses).
SAUTER, M.-R. Le problème des Burgondes, recherches d'an-
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thropologie historique. Thèse 1941, et Archives suisses d'Anthropologie générale, 10, 1941, pp. 1-137.
Les races de l'Europe. Paris, Payot, 1952.
Quelques contributions de l'anthropologie à la connaissance du haut moyen âge. Mélanges •.. P.-E. Martin 1961, et Mém.
Soc. d'Hist. et d'Archéol. Genève, 40, 1961, pp. 1-18.
Histoire anthropologique de la Suisse. Dans (SCHWIDETZKY, Ilse, dir.) Rassengeschichte der Menschheit. München-Wien, R. Oldenbourg (à paraître en 1978 ?) .
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Suisse et Allemagne Sud. Distribution de l'indice céphalique à l'époque romaine (-.-, moyenne 77.6), au haut moyen âge (--, moy. 75.6) et aux XVI-XVIIIe S. ( - - - - , moy. 83.8).
Crâne déformé artificiellement. Saint-Prex VD.
