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LUTTER CONTRE LA DISCRIMINATION EN RÉPUBLIQUE DOMINICAINE

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LUTTER CONTRE LA DISCRIMINATION EN RÉPUBLIQUE DOMINICAINE

PROTECTION ET PROMOTION DES DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS HAÏTIENS ET DE LEURS DESCENDANTS

AMNESTY INTERNATIONAL Document public

AMR 27/003/2008 ÉFAI

Novembre 2008

Une fillette lave des vêtements. République dominicaine, 2006. Le racisme et les discriminations se fondant sur la race et la couleur de peau affectent profondément les migrants haïtiens et les Dominicains d'ascendance haïtienne.

© Gianni Dal Mas

« En apparence, il n'y a rien de mal à défendre les droits humains dans ce pays. On dirait que ce qui dérange c'est de défendre les droits des Dominicains d'ascendance haïtienne. »

Sonia Pierre

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© DR

Sonia Pierre est la directrice du Movimiento de Mujeres Dominico-Haitianas (MUDHA), une organisation de femmes dominicaines d'origine haïtienne. Cette organisation fait partie de la Red de Encuentro Dominico Haitiano Jacques Viau (réseau Jacques Viau de rapprochement dominicano-haïtien), qui s'efforce de combattre les préjugés et le racisme anti-haïtiens en République dominicaine.

Le Réseau s'est beaucoup impliqué dans des initiatives visant à faire en sorte que les descendants de migrants haïtiens obtiennent la nationalité dominicaine et qu'ils puissent exercer pleinement leurs droits de citoyens. Il s'est également associé à la Red Fronteriza Jano Siksè (le réseau transfrontalier Jano Siksè), qui regroupe des organisations populaires dominicaines et haïtiennes et recense les violations des droits humains, notamment les expulsions collectives ou arbitraires et les mauvais traitements dont les membres des forces de sécurité se rendent coupables le long de la frontière entre la République dominicaine et Haïti.

Les discriminations se fondant sur la race, la langue, la couleur de peau et la nationalité sont une réalité quotidienne pour de nombreux travailleurs migrants haïtiens et Dominicains d'ascendance haïtienne. Même les personnes en possession de documents légaux leur permettant de résider en République dominicaine ou bénéficiant de la nationalité dominicaine sont exposées au risque d'une expulsion arbitraire. Certaines pratiques administratives et législatives discriminatoires privent des milliers d'enfants dominicains du droit d'acquérir une nationalité, du droit à l'éducation ou encore du droit à la sécurité de la personne.

La question de la migration haïtienne vers la République dominicaine est sujette à polémique. Elle est souvent exploitée par des groupes nationalistes, qui font des migrants haïtiens les boucs émissaires des difficultés sociales et économiques, ainsi que de l'insécurité dans le pays. En réalité cependant, les migrants haïtiens contribuent de manière considérable à l'économie dominicaine, en exerçant des métiers pénibles, peu rémunérés et parfois dangereux que la vaste majorité des Dominicains refusent.

Au terme d'une visite en République dominicaine, en octobre 2007, le rapporteur spécial des Nations unies sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, et l'expert indépendant sur les questions relatives aux minorités désigné par les Nations unies ont conclu qu'il existait « un problème

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de racisme et de discrimination profond et persistant dans la société dominicaine ». Ils ont souligné les effets discriminatoires de certaines lois, en particulier celles en rapport avec la migration, l'état civil et la citoyenneté. Un rapport publié en février 2008 par le Comité des droits de l'enfant des Nations unies a fait ressortir certains faits inquiétants : l'accès des enfants d'immigrants haïtiens et des descendants de Haïtiens à l'éducation, à la santé et aux services sociaux est toujours restreint.

Dix ans après l'adoption de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'homme, ceux-ci continuent à voir leur travail entravé, et à faire l'objet de manœuvres de harcèlement et d'intimidation, ainsi que d'autres atteintes. Pourtant, en dépit des risques et des difficultés, l'action de ces militants continue à avoir des effets réels dans la vie de personnes du monde entier. Les défenseurs des droits humains s'efforcent de combler le fossé entre les promesses de justice et d'égalité en dignité et en droits énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH), et la réalité des atteintes aux droits humains qui persistent aujourd'hui encore. Le travail qu'ils accomplissent est vital pour la réalisation des droits humains pour tous.

Sonia Pierre et d'autres membres du MUDHA ont joué un rôle important en sensibilisant la communauté internationale à la question des atteintes aux droits fondamentaux des migrants haïtiens et de leurs descendants en République dominicaine. Le MUDHA était l'un des requérants dans une affaire dont la Cour interaméricaine des droits de l'homme a été saisie concernant deux mineures auxquelles les autorités refusaient de délivrer un certificat de naissance, comme c'est le cas pour de nombreux autres enfants d'ascendance haïtienne.

En octobre 2005, la Cour a tranché en faveur des deux mineures et a ordonné aux autorités dominicaines de mettre fin aux pratiques d'enregistrement des naissances induisant une discrimination à l'égard des enfants d'origine haïtienne.

Cependant, loin d'avoir amélioré leurs procédures d'enregistrement, les autorités dominicaines ont augmenté le nombre de mesures et pratiques discriminatoires ces dernières années.

En mars 2007, la Junta Central Electoral (JCE), le conseil électoral dominicain, a diffusé une circulaire donnant aux fonctionnaires l'instruction d'examiner scrupuleusement tous les documents d'identité présentés en vue d'un renouvellement ou d'un enregistrement, au motif que ce type de document avait été délivré indûment par le passé. Dans la pratique, les services concernés se réfèrent à cette recommandation afin de systématiquement refuser des papiers d'identité à des milliers de Dominicains d'origine haïtienne, ce qui, par la suite, les prive du droit de vote et du droit à une éducation, et les empêche de se lancer sur le marché du travail formel. Cela leur fait également courir le risque d'expulsions de masse, sans pouvoir bénéficier d'un réexamen judiciaire.

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Le MUDHA prête assistance à des Dominicains qui se sont trouvés dans l'incapacité de renouveler leurs papiers d'identité ou de faire enregistrer la naissance de leurs enfants.

Des migrants haïtiens reviennent du marché de Dajabon. République dominicaine, 2006.

© Amnesty International

MENACES ET INTIMIDATION

L'an dernier, la nationalité dominicaine de Sonia Pierre elle-même a été remise en question.

En février 2007, le président du Conseil national de la frontière a déclaré publiquement que plus d'un million de Haïtiens vivant en République dominicaine étaient en possession de papiers d'identité frauduleux et a spécifiquement désigné Sonia Pierre comme étant l'un d'entre eux. En mars 2007, la JCE a ordonné l'ouverture d'une enquête sur la validité du certificat de naissance de Sonia Pierre, au motif que ses parents avaient des documents d'identité falsifiés au moment de sa naissance. Après plusieurs mois d'incertitude, le vice- président de la Cour suprême dominicaine s'est prononcé en faveur de Sonia Pierre et l'affaire a été classée. Le but de l'enquête était, semble-t-il, d'essayer d'intimider Sonia Pierre et des membres de MUDHA, et de les dissuader de mener à bien leur action, pourtant légitime.

La Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'homme (DDDH) a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998. L'expression

« défenseur des droits humains » y désigne des personnes qui agissent de multiples façons et à différents titres pour protéger et promouvoir les droits humains.

Certains défenseurs luttent contre des atteintes spécifiques, comme la torture ou les expulsions forcées. D'autres œuvrent pour faire respecter les droits de groupes ou catégories de la population qui sont désavantagés et soumis à la discrimination, comme les populations autochtones, les minorités ethniques ou religieuses, les femmes vivant dans les zones rurales, les enfants des rues ou encore les lesbiennes, les gays, les personnes bisexuelles et transgenres.

Malgré leur diversité, tous les défenseurs des droits humains – peu importe qui ils sont et ce qu'ils font – ont des traits communs. Tous défendent le principe fondamental d'universalité, selon lequel tous les êtres humains sont égaux en dignité et en droits, sans distinction de genre, de race, d'appartenance ethnique ou de toute autre situation. Ils sont tous déterminés à respecter les droits et les libertés d'autrui dans le cadre de leurs propres actions.

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Peu avant que sa nationalité ne soit remise en question, Sonia Pierre avait reçu le 23e prix annuel Robert F. Kennedy pour les droits humains. Du point de vue des autorités dominicaines, cette récompense éveillait un intérêt international malvenu autour de la question. Tentant de porter atteinte à la légitimité du travail de Sonia Pierre en faveur des droits humains, le ministre dominicain des Affaires étrangères a écrit au Robert F. Kennedy Center for Human Rights, déclarant qu'il faisait erreur en distinguant la militante et qu'il

« était malheureusement mal informé sur les conséquences du travail de Mme Pierre sur place ».

Sonia Pierre a été la cible de menaces répétées en raison de son travail. La Cour interaméricaine des droits de l'homme a d'ailleurs demandé aux autorités dominicaines en août 2000 de la faire bénéficier de mesures de protection. Malgré cela, Sonia Pierre a dû fuir la République dominicaine avec ses enfants en 2005 à la suite de nouvelles menaces.

Les mesures de protection ont été étendues à ses enfants en février 2006. À ce jour, les autorités dominicaines n'ont rien fait pour mettre en œuvre les mesures de protection concernant Sonia Pierre et ses enfants.

Une carte d’identité déchirée, en 2005. Pendant les vagues d’expulsions, les Dominicains d’ascendance haïtienne risquent d’être renvoyés arbitrairement de République dominicaine car les fonctionnaires détruisent ou refusent de reconnaître leurs papiers d’identité.

© Gianni Del Mas

Défendre les droits humains dans un monde en pleine mutation (ACT 30/006/2008). Disponible sur : www.amnesty.org/library

PASSEZ À L'ACTION

VEUILLEZ ÉCRIRE AUX AUTORITÉS DOMINICAINES :

 Mettez en avant l'importance du rôle joué par Sonia Pierre et des organisations telles que le MUDHA, le réseau Jacques Viau et le réseau frontalier Jano Siksè, dans la protection et la promotion des droits des migrants haïtiens et de leurs descendants.

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 Exprimez l'inquiétude que vous inspire la campagne visant manifestement à discréditer Sonia Pierre et le travail effectué par le MUDHA, et demandez aux autorités de mettre en application les mesures de protection accordées par la Cour interaméricaine des droits de l'homme, en respectant scrupuleusement les souhaits de l'intéressée.

 Dites-vous préoccupé(e) par les discriminations et violations dont les travailleurs migrants haïtiens et les Dominicains d'ascendance haïtienne font l'objet, et demandez que leurs droits fondamentaux soient respectés et protégés.

 Rappelez aux autorités l'obligation qui leur est faite, en vertu de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'homme, de reconnaître la légitimité des activités des défenseurs des droits humains, ainsi que leur droit à mener leurs activités sans restriction ni crainte de représailles.

ENVOYEZ VOS APPELS À : S.E. Leonel Fernández Presidente de la República Palacio Nacional

Santo Domingo

République dominicaine Fax : +1 809 682 0827

Formule d'appel : Señor Presidente, / Monsieur le Président, Franklin Almeyda Rancier

Secrétario de Estado del Interior y la Policía

Ave. México, Esq. Leopoldo Navarro, Edif. Oficinas Gubernamentales Santo Domingo

République dominicaine Fax : +1 809 685 1194

Formule d'appel : Señor Secretario, / Monsieur le Ministre,

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