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Mon emploi saisonnier à Airbus Defense and Space

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Academic year: 2022

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Texte intégral

(1)Mon emploi saisonnier à Airbus Defense and Space Dans cet article, je vais vous raconter mon séjour dans l’entreprise ​Airbus Defense and Space​. Anciennement dénommée ​Astrium​, cette branche fait partie du grand groupe ​Airbus.​ Le site dans lequel j’ai séjourné est situé le long de la rue des Cosmonautes à Toulouse, à côté du CNES et de Supaero. Le site regorge donc d’ingénieurs et d’étudiants en aéronautique, c’est un peu la Silicon Valley locale, du moins dans le champ de l’aéronautique. J’emploie le terme “séjour”, mais il s’agissait officiellement d’un emploi saisonnier, dans lequel j’ai été embauché afin de réaliser une multitude de tâches, au sein du Comité d’Entreprise (CE). J’ai été à ma grande fierté sélectionné parmi de nombreux de candidats, probablement grâce à mes deux années de prépa inscrites noir sur blanc sur mon CV. J’avais déjà postulé à Astrium deux ans auparavant, mais sans retour positif. Cette fois-ci, c’était la bonne! J’eus une joie certaine à l’idée de me lever tous les matins à 7h30 en pleine période de vacances scolaires, du 29 Juillet au 9 Août précisément. J’ai été, en l’espace de deux semaines entières, un adulte responsable, actif, qui part “au taff” tous les matins ; et ce tout de même dans l’entreprise la plus convoitée de la région. Prendre le bus 37 depuis chez moi, celui-ci me déposant exactement 30 minutes après devant l’entrée d’Airbus, pénétrer légalement le site, bien habillé et portant fièrement le polo de ma prépa, tout cela me procura une fierté notable durant ces deux semaines. Malgré la chaleur étouffante et la quantité colossale de travail qui me fut confié - je vous laisse découvrir cela dans les pages qui suivent - ce fut un bon moment. Il se trouve que j’ai pu prendre quelques notes durant mon road trip dans l’univers des ingénieurs. L’idée m’est donc naturellement venue de rédiger un petit compte rendu et de le partager au plus curieux. Bonne lecture !.

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(3) Chapitre 1 - Le contrat J’arrivai le premier jour un peu en avance, ce qui me permit de prendre un second petit déjeuner dans la cafétéria à côté de la médiathèque. C’était un peu cher, mais délicieux. Les ingénieurs pouvant se permettre un tel luxe tous les matins sont bien chanceux. En entrant dans le CE, on me fit immédiatement lire et signer le contrat de travail. Il y avait trop à lire, et j’eus rapidement la flemme de m’attarder à chaque détail. Je me dis tout de même qu’il faudra être plus vigilant dans le futur. Néanmoins, je faisais entièrement confiance à Airbus. C’était une boite plutôt clean, askip. On me guida vers le bureau dans lequel je devrai travailler les deux prochaines semaines. Évidemment, je n’avais pas un bureau attitré: mes tâches quotidiennes seraient réalisées sous l'œil vigilant de Céline, qui était en quelque sorte ma maîtresse de stage. Olivia, femme soignée d’origine probablement asiatique, travaillait aussi dans ce bureau. Chacune avait un long bureau - je parle du meuble ici - sur lesquels reposaient de beaux écrans HD 4K, reliés à leur poste de travail. En ce qui concerne la nature exacte de leur boulot, je crois qu’Olivia s’occupait des “packs voyages” proposés par le CE pour les employés d’Astrium, tandis que Céline... et bien je n’ai jamais vraiment compris. Quelque chose à voir avec l’événementiel. Celine m’expliqua grossièrement le détail des tâches à réaliser durant les deux semaines à venir. Pour être franc, je ne comprenais pas grand chose à ce qu’elle m'expliquait. Elle n’était pas succincte dans ses explications, donnant une tonne de détails en vrac. “Tu colleras les drames avec les nouvelles étiquettes, j’ai demandé à Brother et ils ont pu exceptionnellement nous envoyer des cassettes bleues” voulait en fait dire “Ta mission consistera en premier lieu à coller des étiquettes sur les DVD du rayon drames, de code couleur bleu, et ces étiquettes seront imprimées avec l'étiqueteuse de la marque Brother, puisque nous avons pu en commander de la bonne couleur”. C’était un peu perturbant de devoir faire systématiquement une analyse complexe pour déchiffrer le contenu précis de mes taches, mais peut-être cela fait-il partie du boulot d’ingénieur. J’admirais la capacité de Céline à parler très longuement tout en ne donnant absolument aucune nouvelle information. Ce que je finis par comprendre était que j’allais devoir coller beaucoup d'étiquettes.. Missions annoncées au recrutement.

(4) Chapitre 2 - Une ambiance conviviale Mon rôle était de coller des étiquettes sur les jaquettes de tous les DVD de la médiathèque. Les étiquettes correspondaient à la nouvelle cote attribuée à chaque DVD, selon le rayon où ils allaient appartenir, et selon leur titre, par ordre alphabétique. Je me mis immédiatement au travail, avec joie et bonne humeur. En plus d’être une grosse entreprise, ​Astrium ou du moins son CE témoignait d’une ambiance particulièrement conviviale : tout le monde se disait bonjour. Les employés faisaient l’effort de rentrer dans chaque bureau afin de saluer tous leurs collègues un par un. Quand je dis “saluer”, cela signifie discuter de toutes les nouvelles du jour, de raconter ce qu’ils ont fait le weekend dernier, ce qu’ils comptent faire le suivant, etc. J’étais éberlué face à l’intérêt qu’ils portaient tous à narrer avec autant précision les événements absoluments anodins de leur semaine. Autre fait amusant, je remarquai rapidement un employé en particulier, qui forçait visiblement avec Olivia. “Pause café ?” “Rho aller, pause café !” “Pause clope ?”. Tous les quarts d’heures. Ses intentions étaient, de mon point de vue, immédiatement grillées. Olivia semblait en avoir fichtrement peu à faire de lui, rejetant calmement chacunes de ses invitations. Il fallait tout de même admirer la persévérance du garçon. Bref, il se trouve que je me pris bien rapidement à cette tradition de saluer tous ses collègues. En arrivant le matin, je lâchais mon plus beau sourire et exprimais le plus sincère des “Bonjour !”. On me répondait toujours inconditionnellement par un chaleureux “Bonjour Gaspard”. Ce qui rendait la chose plutôt amusante était que je ne connaissais pas le moindre nom ou prénom des personnes à qui j’avais affaire. J’offrais gratuitement mes salutations à des personnes que je ne connaissais pas, alors qu’en revanche tout le monde semblait savoir qui j’étais. C’est un point sur lequel je devrais peut-être m’améliorer. Deux missions principales me furent confiées. La première, comme mentionnée déjà plus haut, était de coller les étiquettes sur les DVD. La raison pour cela était que les DVD étaient empilés horizontalement à la médiathèque. Une étude statistique poussée avait fait surgir un constat inquiétant vis-à-vis de la santé des ingénieurs : ceux-ci devaient se tordre le cou pour lire les titres des DVD, ce qui provoquait de graves maux cervicaux. Ainsi, la direction du CE avait prit la décision radicale de repenser la disposition ancestrale des DVD à la médiathèque, et de les entreposer dans des bacs / tiroirs, jaquette face au client. Le problème était que les cotes des DVD, qui servaient à les identifier rapidement, étaient disposées sur la bordure du DVD. On ne pourrait donc pas les lire rapidement puisque les DVD seraient à plat devant nous. La nouvelle orientation de ces DVD impliquait de recoller toutes les cotes sur la face avant. D’où ma mission..

(5) En rouge, l’emplacement des cotes sur les DVD Pour réaliser ces collages, deux horaires m’étaient accordés : de 9h à 11h30 puis de 14h à 16h. De 12h à 14h, j’étais occupé par ma deuxième mission principale : la permanence à la médiathèque. La médiathèque n’était ouverte que sur ce créneau de deux heures, durant lequel un grand nombre d’ingénieurs se dépêchaient pour rendre leurs documents empruntés. Ils en profitaient aussi pour en emprunter d’autres, ou bien faisaient la sieste sur les fauteuils prévus à cet effet. Ma mission était de veiller à ce que les retours soient bien effectués, et d’ensuite ramener ces documents retournés à leurs emplacements respectifs dans la médiathèque. C’était encore un travail un peu répétitif, mais bien moins que celui du matin. Je le trouvai donc par contraste incroyablement enrichissant. Pour ce qui est de la pause du midi, si vous avez bien fait attention aux horaires, vous aurez remarqué que je n’avais qu’une demi-heure pour déjeuner. C’était assez court, et j’avais en effet à peine le temps de manger et de checker mon téléphone 5 minutes. Mais je m’y habituai vite, car je connaissais déjà bien la sensation d’être constamment pressé, avec la prépa. J’assimilai donc vite la nouvelle routine qui constituerait mon quotidien pour les deux semaines à venir et me lançai gaillardement dans ma semaine de dure labeur. Qu’est ce qu’on ne ferait pas pour de l’argent..

(6) Chapitre 3 - Les statistiques Vu que je m’ennuyais vite, il me vint bientôt en tête un jeu fort amusant : compter le nombre de “bonjours” de mes collègues en une journée. Logiquement, plus la journée est bonne, plus les bonjours devraient être nombreux. En fin de compte, ce fut durant la journée la plus pluvieuse que le record du nombre de bonjours vit le jour : 63 ! Je dois admettre que si l’on ne comptait pas l’interlude de 11h30 à 12h et l’attente devant la cantinière, ce chiffre serait un peu plus bas. De fait, ce jeu me plut tellement qu’il me vint en tête une multitude d’autres jeux statistiques dans le même genre. Restreint comme j’étais dans mon petit bureau, l'imagination ne me manquait vraiment pas et je trouvai rapidement un moyen d’exercer ma soudaine créativité tout en effectuant mes tâches journalières. Pour ces jeux, je me débrouillais avec tout ce qui me passait sous la main - les seules choses qui y passaient de la journée d’ailleurs - les DVD et les étiquettes. Ainsi, puisque je pense que ça vous intéresse énormément, laissez-moi vous décrire le protocole d’étiquetage d’une pile de DVD, accompagné de ses statistiques propres récupérées au jour le jour. - Tout d’abord, Céline m’imprimait une feuille entière d’étiquettes. Elle avait parcouru la veille la pile de DVD à étiqueter ; chaque étiquette était associée à un DVD en particulier. Par exemple, “​DRA ​ABS​” était associé au DVD du rayon “​Dra​mes” et de titre “L’​abs​ence du Loup” (je viens d’inventer ce titre). Chaque feuille était constituée de plusieurs rangées de 5 étiquettes chacunes, pour un total de 65 étiquettes par série, réparties sur un total de deux feuilles. Si votre arithmétique est à son apogée, vous comprendrez que la feuille 1 était composée de 6 rangées et la seconde de 7. En effet : ​(6+7)*5 = 13*5 = 65 Vous vous ennuyez ? Moi aussi. - C’est seulement après cette première étape que j’entrais en jeu. Je devais coller par dessus chaque étiquette de la feuille une nouvelle étiquette quasi-transparente de couleur bleu. En effet, l’imprimante ne savait imprimer que des étiquettes blanches, or les “​Dra​mes” possédaient le code couleur bleu. Ainsi, unes par unes, les étiquettes passaient du blanc au bleu. Coller 65 étiquettes à la suite, c’était assez fastidieux. Surtout qu’il fallait décoller ces bouts de plastiques bleus d’un ruban insupportable ne tenant pas en place. En plus, pour décoller une étiquette, il fallait frénétiquement frotter un des coins avec les ongles jusqu’à miraculeusement créer une toute petite séparation entre les deux couches collantes, que l’on pouvait ensuite aggrandir par l’agilité de nos doigts. Je dois admettre qu’avec mon grand passé de collectionneur de ​magazines panini coupe du monde de foot​, j’étais assez expert en la matière. Quoi qu’il en soit, puisque vous êtes là pour ça, voici les statistiques : il me fallait exactement ​9 minutes 29 secondes pour remplir une seule feuille de ces étiquettes bleues. Assez long non ? En fait, les gens rigoureux verront tout de suite l’imprécision que je viens de faire. Ce temps dépend évidemment de la façon dont on colle ces étiquettes. Chaque rangée une par une ? En serpent ? Aléatoirement ? Ne vous inquiétez pas, voici les données exactes :.

(7) Méthode de collage. Temps moyen​ ​(moyenne sur 3 essais). Rangée par rangée. 9 min 34. Bandes en serpent. 9 min 29. Carré par carré. 9 min 42. Aléatoirement. 10 min ​(exactement). La méthode du serpent était donc la plus efficace. J’étais bien fier d’obtenir ce résultat, cela rentabilisait presque tout le temps que j’avais passé à coller ces foutues étiquettes. J’évitais de mon mieux de ruminer sur des pensées telles que : “Pourquoi ne pas chercher à imprimer des étiquettes bleues directement ?”, car elles auraient été improductives. - Ensuite venaient d’autres étapes toutes aussi ingrates que les autres. En fait, la taille des étiquettes bleues ne correspondait pas exactement à celles qui étaient blanches. Ainsi, une fois colorées, il était impossible de décoller les étiquettes de la feuille à la main. Je devais donc découper la feuille en 5 bandes (grâce à une sorte de gigantesque règle-guillotine à papier) ce qui me prenait environ ​2 minutes supplémentaires. Optimiser au maximum ce temps aurait requis que je cours dans les couloirs séparant mon bureau et la pièce où se trouvait la guillotine, ce qui n’aurait pas été accepté, je pense. Je n’ai pas osé essayer en tout cas. Surtout qu’il aurait fallu me justifier : “Je cherche à établir un temps record pour ma mission de collage d’étiquettes.” - Une fois les étiquettes découpées en fines lamelles bleutées, il me fallait les cisailler en petits morceaux carrés. Cette étape était délicate car il ne fallait pas disperser les étiquettes n’importe comment.. Schéma d’une feuille d’étiquettes.

(8) Ainsi, je découpais minutieusement chaque étiquette puis je les replaçais dans un ordre plus cohérent sur la table. Avec un peu d'entraînement et de technique de placement des bras, il me fut possible de réaliser un record de temps de découpage et plaçage d’étiquettes : 7min30 ​exactement ! - La dernière étape logique était le collage des étiquettes sur les DVD. Modulo les numéros oubliés par Céline, il me fallait un temps (record) de ​11min33 ​pour étiqueter une rangée entière de DVD. Ainsi, on peut aisément trouver avec toutes les informations que je vous ai donné le temps qu’il me fallait à me débarrasser d’une rangée de DVD : T(rangée). = T(collage bleu) + T(coupage bandes) + T(coupage carré) + T(collage rangée) = 9,29 + 2,00 + 7,30 + 11,33 = ​29,92 min. Vous vous demandez sûrement à ce stade là du récit : “Mais Gaspard, c’est quoi exactement une rangée de DVD ?!” Et bien, en fait, je vous ai zappé une étape importante du processus. En amont de toutes celles que je vous ai mentionné, Céline prenait la peine d’aller à la médiathèque et de vider tout un rayon de DVD dans un chariot. Ensuite, elle “bipait” tous ses DVD (elles les empruntaient sur le logiciel de la médiathèque) de sorte à ce qu’ils soient marqués indisponibles pour les intéressés de l’après-midi. Ensuite seulement, elle les amenait dans son bureau prêt à être listés pour les étiquettes. Pour la suite, je choisirai donc une unité de grandeur adéquate au problème : 1 chariot de DVD, correspondant à la quantité de DVD que transportait Céline lors d’un aller-retour à la médiathèque. “ Mais Gaspard, à combien de DVD cela correspond-t-il ?” Un chariot est composé de 6 rangées de DVD comportant chacune 50 DVD. En général, Céline rajoutait quelques DVD par dessus le chariot ; disons 10 DVD en moyenne. Ainsi, nous obtenons l’égalité suivante : 1 chariot. = 6*50 + 10 = ​310 DVD. D’autre part, avant que vous me posiez la question, il faut associer à cette quantité le nombre de séries d’étiquettes correspondant. 1 feuille d’étiquettes me permettait de déduire environ cinq huitièmes d’un rangée. On peut alors inverser le calcul par un classique produit en croix..

(9) Ainsi, l’égalité précédente devient : 1 chariot. = 6 rangées = 6:(⅝) = 48/5 = ​9,6 feuilles (= 312 étiquettes). Vous remarquez que le compte est bon, à 2 étiquettes près. Au vu des moyennages effectués, on compatabilisera cette différence dans les incertitudes associées. On peut maintenant trouver le temps requis pour s’occuper d’un chariot entier Nous avions ​T(rangée) = 29,92 min​ (Vous remarquerez l’utilisation des chiffres significatifs) Je vous passe les calculs très complexes qui suivent, retenez cependant le résultat suivant : T(1 chariot) = ​3h Pour les plus curieux, voici les calculs d’incertitudes associés.. En fait, j'ai eu la flemme..

(10) Chapitre 4 - L’ascension Avec un total de 4h30 de travail quotidien dédié à la tâche de collage, selon mes calculs précédents, j’aurais dû avoir pleinement le temps de terminer un chariot en un jour. En 2 jours, 3 chariots exactement auraient dû être terminés ! Simplement, je parvins uniquement à terminer 2 chariots en 2 jours, malgré l’absence de pauses de ma part et une réelle volonté d’achever mon travail au plus vite. Que cela révèle-t-il? Cela illustre parfaitement un principe fondamental en physique ainsi qu’en économie : dans tout phénomène observable, la somme des petits éléments ne rend pas totalement compte du fonctionnement de l’ensemble. C’est bien pour cela qu’il y existe une micro-économie et une macro-économie ! Il faut savoir que toutes les tâches que je vous ai décrites, je n’y avais pas tout de suite accès. Au début, je ne faisais que découper les étiquettes de la feuille et les coller. Ce n’est qu’au deuxième ou troisième jour que Céline me fit coller moi même les bandes bleues et m’autorisa à les guillotiner une fois collées. Encore plus tard, j’eus le droit d’aller chercher les DVD et de les biper moi-même à la médiathèque. C’était assez similaire à l’ascension verticale dans une entreprise. L’entreprise rachète et contrôle progressivement toutes les étapes clés pour la réalisation procédurale de son produit. Moi même, je devenais progressivement chef de toute la chaîne du processus de collage des étiquettes sur les DVD. L’ascension horizontale, autre phénomène important dans l’industrie, ne se fit pas attendre non plus. J’eus rapidement de plus en plus de responsabilités à la médiathèque lors de mes permanences le midi et je pus rapidement faire le pont entre mes deux fonctions. Lorsque de midi à deux, peu d’ingénieurs passaient pour emprunter, j’en profitais pour biper les DVD que j’allais étiqueter l’heure suivante. De nouveau, je cherchai à optimiser le processus du mieux que je pouvais. Ainsi, je compris vite que biper les DVD et les ramener dans le bureau de Céline était une tâche fort inutile. Autant m’en occuper directement dans la médiathèque. A partir de là, aucun mouvement ne devait plus être laissé au hasard. Je travaillais les DVD à la chaîne comme au début du 20​ème​. Je développai au fur et à mesure les réflexes pour aller plus vite dans ma tâche et comme le contrôle de la totalité de la chaîne me permettait de m’éviter de grands détours futiles, je prenais tellement d’avance que Céline ne savait plus quelles tâches me confier. “Il faudrait que tu passes à nouveau en revue tous les DVD policiers, peut-être en as-tu oubliés ?” Je savais déjà qu’il n’y avait pas d’oublis. C’était moi qui m’occupait des retours à la médiathèque, et comme je mêlais parfaitement mes deux fonctions, ces DVD étaient immédiatement étiquetés. Aucune erreur ni imprécision. On aurait effectivement pu croire qu’avec cette obsession à aller le plus vite possible, mes tâches auraient effectivement pu ne pas être réalisées correctement. Détrompez-vous. Le perfectionnisme unilatéral veut que tout soit réalisé vite et ​bien​..

(11) En effet, il fallait faire attention à découper les étiquettes de sorte à avoir la cote bien visible au centre. Il fallait coller l’étiquette de sorte à cacher le minimum d’information sur la jaquette de DVD cachée, tout en s’assurant qu’elle soit suffisamment proche du coin haut-gauche, sans quoi l’ingénieur curieux ne la verrait pas en faisant défiler la pile. Je m’étais aussi imposé de vérifier à chaque fois que l’étiquette collée correspondait bien au titre du DVD, car je me rendis vite compte que Céline faisait de nombreuses erreurs. Vous voyez bien que malgré mes consignes minimes, cet exercice se devait d’être soigné.. Chapitre 5 - Questions existentielles Seulement, tout ce jeu idyllique d’optimisation d’un processus infiniment long fut mit à mal par Céline un beau matin. Celle-ci eut l'idée fabuleuse de me sortir sa machine à étiqueter, de nom plus commun ​d’étiqueteuse​. Soudainement, une rangée ne prenait plus que 8min23 ​à étiqueter (au lieu de ​30 minutes​). Cela m’aura pris environ 5 minutes à optimiser le processus en bidouillant les réglages de la machine. Un chariot ne me prenait alors seulement ​1h15 à terminer. Je fis ​3 chariots en un seul jour. Cette matinée-là, je remis en question tout le boulot que j’avais effectué les jours précédents. Heureusement que j'étais payé à l’heure et non au nombre de DVD collés. Par ailleurs, Céline et son souci du détail rendaient ma tâche bien plus éprouvante qu’elle ne devait l’être. Le problème était que les détails sur lesquels elle s’attardait n’avaient - à mes yeux - aucune stricte importance. Laissez-moi vous donner un exemple. Céline accepta un jour que j’utilise les étiquettes bleu sur blanc pour les “​Dra​mes” (c’est à dire du texte bleu sur un fond blanc), plutôt que du blanc sur bleu comme je l’avais fait jusqu’à maintenant. La raison principale à ce changement était qu’il y avait bien plus de cartouches de cette couleur pour l’étiqueteuse. Étiqueteuse qui je vous le rappelle ne m’avait été confiée qu’après un long moment à avoir déjà trimé à la main. Céline me pria alors de refaire tous les DVD que j’avais étiquetés les jours précédents, pour qu’ils correspondent exactement à la bonne couleur. C’est à dire remplacer du blanc sur bleu par du bleu sur blanc. Alors que seuls les “​Dra​mes” étaient bleus. Comprenez-vous mon énervement? Pire encore, Céline ne souhaitait pas que je colle les nouvelles étiquettes par-dessus les anciennes, mais que je décolle d’abord les précédentes. ça n’avait aucun intérêt, mais Céline me l’avait demandé. Alors j’effectuais..

(12) Chapitre 6 - La médiathèque Je vous ai beaucoup parlé de mon poste de colleur d’étiquettes, mais je ne vous ai pas donné beaucoup de détails au sujet de mon autre poste, celui du midi à la médiathèque. Mes tâches principales s’y résumaient assez rapidement : biper les DVD que rendaient les ingénieurs puis les ranger dans la médiathèque. Le plus difficile était de s’y retrouver parmi les multitudes de cotes existantes, rien que dans la section jeunesse : romans jeunesse, docs jeunesse , BD jeunesse, premières lectures, albums BB, livres animés, DVD jeunesse, livres CD, CD jeunesse... Si la plupart des documents empruntés appartenaient aux Big 3, c’est à dire les “films dramatiques”, “comédies” et “BD Ados”, il arrivait plus d’une fois par jour que je passe une vingtaine de minutes à chercher un rayon mystère pour une cote dont je n’avais pas soupçonné l’existence avant. Pour un seul document. Par ailleurs, dans un lieu aussi élaboré qu’une médiathèque, on faisait quotidiennement des découvertes intéressantes. Une des découvertes les plus heureuses que je fis, fut lorsque j’aperçus le petit bocal à bonbons à côté de la table des prêts. Il y en avait de toutes les couleurs, des jaunes, des rouges, des bleus, des verts. Je ne me privai pas de me servir tout au long de mon stage. Il y avait aussi au coin café un petit frigo avec des jus et parfois quelques gâteaux. Je découvris même un jour une petite fontaine d’eau fraîche avec des verres mis à disposition. C’était une découverte très intéressante pour moi qui avait passé la semaine précédente à me rendre continuellement aux WC pour boire.. Petite parenthèse : depuis le début, je vous donne les noms des personnes avec qui je travaillais, mais en réalité, je ne les connaissais pas sur le moment. Il s’agissait là d’une de mes grandes faiblesses : j’étais incapable de retenir naturellement des informations triviales telles que le prénom d’un nouveau collègue, la date d’anniversaire d’un proche, ou bien mon propre emploi du temps. Le personnel avait beau s’être entièrement présenté devant moi, avec leur nom et prénom, je n’avais retenu que celui de Céline. Tout au long de la journée, je faisais donc en sorte de ne jamais avoir à les appeler. Si j’avais besoin de l’aide d’une personne de la médiathèque, je faisais en sorte de la croiser de façon à dire : “ah tiens d’ailleurs j’ai un souci !”. Heureusement pour moi, je n’avais pas besoin de les appeler souvent. J’ai même eu l’idée de chercher un trombinoscope dans le PC de la médiathèque mais je n’en ai pas trouvé. Puis je me rendis compte qu’il y en avait un devant mes yeux depuis le début : les pancartes sur les portes des bureaux. Il me suffisait de faire le tour des bureaux et de regarder attentivement les noms sur chaque porte. Si je ne connaissais pas par cœur l’emplacement des bureaux de chacun, je pu deviner à l’intuition et avec un peu de mémoire la correspondance entre les prénoms et les têtes principales que je côtoyais. A la fin, je connaissais au moins 7 prénoms. C’était déjà pas mal..

(13) Chapitre 7 - Les découvertes Grâce à ce stage, je découvris l’utilité d’un tas de nouveaux outils. Le post-it, par exemple, était une invention formidable. Au moindre souci, j’en dégainais un et y inscrivais ma requête. J’éprouvais une grande satisfaction à l’idée que quelqu’un s’occuperait de mon problème sans que je n’ai à lui en parler. C’était une façon de donner des ordres anonymes, et c’était justement la seule façon pour un stagiaire comme moi de le faire. Le lecteur à code-barre, ou “bipeur”, était un outil encore plus sophistiqué. Multifonction, il pouvait vous réserver un DVD, le rendre, le rechercher dans la base de données, etc… J’avoue avoir été impressionné par la vitesse à laquelle il déchiffrait les codes-barres. Grâce à mon ingéniosité hors-pair, je développai une méthode de “bipage” au summum de l’efficacité. Il suffisait de bien empiler les DVD, tous légèrement décalés les uns par rapport aux autres, de sorte à laisser uniquement le code-barre visible. Alors, il ne restait qu’à rapidement faire défiler le lecteur verticalement, celui-ci cataloguait un par un les DVD en un temps record. Je découvris aussi en farfouillant un peu dans le logiciel de la médiathèque un onglet “statistiques”. Je pouvais y consulter toutes sortes de données qui n’avaient pour la plupart aucun intérêt. Par contre, je connaissais maintenant le pourcentage d’ingénieurs qui empruntaient du porno (il y avait des caisses automatiques pour emprunter tout seul ses DVD bien sûr). Mais parmi les outils sophistiqués qui m'impressionnèrent le plus au CE, deux furent particulièrement notables : l’étiqueteuse dont je vous ai déjà parlé, et le nettoyeur de DVD. Il s’agit de deux systèmes industriels complexes, des machines que j’ai dû apprendre à manier sur le terrain, sans aide quelconque (en fait, le personnel ne savait pas vraiment les utiliser). J’ai été donc dans l'obligation évidente de rédiger des protocoles d’utilisation.. Étiqueteuse. Rareté​ : A. Machine à laver des DVD. Rareté​ : S Etiqueteuse. Machine à laver DVD.

(14) Je supposais déjà son existence en Je ne soupçonnais pas l’existence d’un tel industrie mais pas dans ce format poche. dispositif. 1. Ouvrir le capot et insérer la cartouche 1. Enfiler des gants en latex car nous allons correspondant à la couleur désirée (très utiliser un produit corrosif. vintage). Vérifier que la bande ne se coince pas dans la machine. 2. Ouvrir le capot et tartiner le rouleau avec la mousse du produit magique (couleur 2. Effectuer les réglages nécessaires (taille douteuse). de l’étiquette, taille de la police d'écriture, réglages de coupe, etc.) 3. Insérer le DVD à l’emplacement requis et resserrer l’étui. 3. Rentrer la cote du DVD. 4. Fermer le capot, appuyer sur le bouton 4. Lancer l’impression. “20s” puis attendre. 5. Répéter les processus 3 et 4.. 5. Sortir le DVD et le nettoyer avec le chiffon microfibre.. Attention, la machine a un temps de retard. Elle imprime votre cote mais ne coupe que l’étiquette précédente. Il faut réfléchir à l'enchaînement de vos cotes si vous ne voulez pas gâcher une étiquette à chaque fois, comme les générations précédentes.. Faites attention aux résidus de produit corrosif sur le chiffon et aux alentours de la machine. Faites aussi attention aux gants déjà utilisés non jetés par le personnel.. Utiliser l’étiqueteuse était très satisfaisant. On entrait dans une sorte de transe en l’utilisant : taper la cote du DVD actuel, lancer la découpe de l’étiquette précédente, coller l’étiquette précédente, inscrire la côte suivante, … ainsi de suite. Des musiques d’ambiances telles que le Requiem de Mozart ou bien de la dubstep étaient conseillées. En effectuant ces tâches simples à la chaîne, je compris cependant vite l’utilité de développer la robotisation dans l’industrie. Une fois que j’avais suffisamment réfléchi à comment procéder le plus rapidement, je n’avais plus aucune valeur à ajouter. L’avantage d’un robot, c’était qu’il ne se fatiguait pas, ni ne s'ennuyait. Si la nouvelle étiqueteuse m’avait intrigué un moment, je m’étais rapidement lassé à nouveau de ma mission de collage. De toute manière, je voyais bien qu’à cette allure, ce ne serait pas un biais humain qui mettrait fin au processus, mais un manque de ressources. Les cartouches à étiquettes commençaient à manquer. Il ne me restait plus que les “​com​édies” à coller. Céline me promettait de me trouver des cartouches de couleur rose depuis 2 jours déjà. Je me remis donc à divaguer. Un petit jeu auquel je me pris fut de noter le nombre de mots à 3 lettres sur lesquels je tombais. Vous seriez surpris par le nombre de possibilités. Tout d’abord, on s’attarde sur les mots strictement français : BOL, COL, CRU, SAC, etc… Puis après une trentaines de mots du genre, on accepte des abréviations, pour continuer le jeu : DOC, MDR, NTM, etc… Si l’on est d’humeur magnanime, on accepte même les onomatopées ou les fautes d’orthographes: MRD, KOI, OUE, etc. Évidemment, accepter les mots anglophones rend le jeu tout de suite plus facile : MUM, HER, RUN, ….

(15) ainsi que WAT, HUH, WTF, ... Il devient ensuite amusant de jouer aux dominos, le but étant de former un maximum de mots composés : PAC-MAN, TIC-TAC, HOM-RUN, etc… Le gagnant est celui qui trouve le plus de DVD commençant par les initiales de rappeurs : SCH, PNL, JUL, … Pour la route, voici une dernière catégorie : trouvez un maximum de mots de 3 lettres, avec une allusion sexuelle. J’en ai personnellement trouvé huit.. Chapitre 8 - Le loquet Le personnel du CE était sympathique, mais je ne les intéressais pas vraiment : à table on ne me parlait pas vraiment, pendant la journée encore moins, si ce n’est “Bonjour Gaspard”. Seule une femme fut un peu plus intime avec moi ; elle s’appelait Pauline. Elle avait une façon très délicate de parler, mais peut-être était-ce une façade prise par habitude de se montrer courtois avec les visiteurs. Néanmoins, elle me demandait souvent comment j’allais, elle m'apporta même un coca une fois. Je me dis même à un moment qu’elle devait me draguer car aucune fille n’avait été aussi gentille avec moi depuis un bon moment. Un jour, une tâche particulière me fut justement confiée par Pauline. Elle souhaitait remplacer la batterie de la fermeture électronique de son bureau, mais elle n’arrivait pas à dévisser le loquet magnétique de sa porte. Étant l’un des seuls mâles alpha de l’entourage, c’était naturellement à moi qu’elle demanda assistance pour cette tâche. Elle m'emmena donc dans son bureau, me laissa tout le matériel nécessaire ainsi qu’une feuille avec les instructions, puis elle partit en réunion. Je m’étais juré de terminer la tâche avant qu’elle ne revienne. Pour dévisser le loquet, il fallait le bloquer dans un sens avec une clé puis tourner dans l’autre grâce à un outil qui servait de bras de levier. Le bras de levier était un vieux morceau de plastique en forme de pince, qu’on entourait autour du loquet et qui permettait de faire pivoter celui-ci grâce à de petites encoches, par friction. Cependant, les encoches en plastique étaient toutes usées, la friction ne se faisait pas. J’avais beau positionner la clé et le bras de levier dans toutes sortes de positions différentes, aussi ingénieuses soient-elles, rien ne bougeait. Le bout de plastique glissait simplement autour du loquet.. En bleu ciel : le loquet. En noir : le bras de levier. En vert : serrage à la main En violet : points de frictions censés entraîner le loquet.

(16) J’essayai en boucle pendant une dizaine de minutes d’ouvrir ce foutu loquet avant de me rendre à l’évidence : le matos était inadéquat. Mais qu’allait croire Pauline ? Il ne fallait pas que le mauvais matériel soit vu comme un prétexte de ma part pour justifier mon échec. Je me ruai alors dans le bureau de Céline pour voir si elle ne possédait pas un bras de levier similaire, en meilleur état. Rien du tout. Non plus dans les placards du couloir. Je revins déçu dans le bureau de Pauline. Elle n’était toujours pas revenue. Je m’asseyai et contemplai l’outil dans mes mains. Depuis le début, je serrais de mon mieux le manche du bras de levier, mais cela ne pouvait fonctionner qu’à condition que les points de friction soient en bon état. C’est alors qu’une idée me vient. Au lieu de serrer la poignée de levier, j’enroulai ma main autour de l’embout rond qui enveloppait le loquet. Je bloquai ensuite la clé - que je tenais normalement d’une main, sans quoi le loquet tourne sur lui même - avec la poignée de la porte, il me restait alors une main libre pour faire pivoter le tout. Tada ! Le loquet se dévissa immédiatement.. En jaune : clé de serrage bloquée par poignée violette En vert : le serrage à la main. J’eus le temps de remplacer la batterie à l’intérieur du loquet magnétique puis de remettre le tout en place. Je laissai un post-it sur la porte : “Job done :)”, avant de repartir m’occuper de mes étiquettes..

(17) Chapitre 9 - L’autonomie Alors que je triais depuis un moment les innombrables DVD dans le bureau de Céline, je décidai de prendre une petite pause. Céline et Olivia étaient toutes les deux en réunion et j’étais donc seul dans le bureau. Il y avait des affaires partout ; c’était vraiment mal rangé. Le pire était le bureau de Céline, où jonchait des piles de documents et post-its en vrac. Je n’étais pas vraiment choqué puisque le bureau de ma mère avait toujours été dans un bien pire état. C’était tout de même plus étonnant pour quelqu’un qui travaillait spécifiquement dans un métier de type administratif. Mais peut-être qu’ils s’y retrouvaient dans ce bazar, après tout. Je décidai de feuilleter le classeur qui était posé le plus à droite de son bureau. C’est de ce classeur que Céline me sortait ses rangées d’étiquettes, celles que je devais découper à la main car il n’y avait maintenant plus de cartouches pour l’étiqueteuse. À l’intérieur, il y avait d’innombrables feuilles d'étiquettes, pour chaque cote. Toutes étaient entamées. Beaucoup étaient en double, certaines n’avaient servi que pour les premiers numéros de leur série. C’était un beau gâchis. Je tentai de comprendre l’ordre des cotes car il n’y avait clairement pas d’ordre alphabétique. Je compris vite qu’il n’y avait aucun ordre particulier, tout était mélangé. Une feuille au milieu du classeur semblait expliquer le fonctionnement de tout le système d’indexation. Il y avait des feuilles sans étiquettes, c'est-à-dire où le tableau de cotes était imprimé sur une feuille A4 usuelle. Elles servaient d'empreinte pour réimprimer, si besoin, les tableaux d’étiquettes en question à nouveau. Par ailleurs, garder les feuilles à moitié vidées servaient à savoir à quel numéro d’une série l’on s’était arrêté. Par exemple, si la feuille des drames commençait en plein milieu par “​DRA 56​”, c’est qu’il y avait actuellement 55 drames en médiathèque, et que le prochain drame à être acheté serait le 56​ème​. Je ne comprenais en revanche toujours pas pourquoi il y avait des sauts de numéros au sein des séries, ni pourquoi les feuilles étaient imprimées et entamées plusieurs fois. Le pire était que ce protocole datait de 2013. J’étais certain que Céline ne l’avait ni rangé ni actualisé depuis 6 ans. Plus tard dans la journée, je remarquai des incohérences dans les côtes de certains DVD. Alors que les “​bio​graphies” devaient commencer par “​BIO​” puis un numéro indiquant leur position dans la rangée, certaines avaient conservé le “​BIO​” mais indiquaient ensuite trois initiales, celles du titre. Je vérifiai leur côte dans la base de donnée - je savais y accéder après avoir observé Céline le faire à plusieurs reprises. Je découvris que les côtes de ces biographies n’avaient pas été actualisées depuis 2007. D’ailleurs, beaucoup de données étaient erronées ou manquantes. C’est à ce moment que je compris à quel point le traitement des données ici n’était pas performant. Peut-être le staff n’avait-il pas le temps ou bien l’idée de s’occuper de tous ces détails ; ceux-ci étaient pourtant plus importants que de savoir si les “​dra​mes” étaient en bleu sur blanc, ou blanc sur bleu. Ils étaient en bleu, point. Par contre, si la biographie de Shakespeare était affichée sur le site en “​BIO 13​” alors qu’elle se trouvait en “​BIO SHA​”, c’était plus grave. Surtout si le titre du document était affiché comme étant “Shkaespeare”. Comme les demandes d’emprunts ne coulaient pas non plus à flot et que la précision n’était pas un critère crucial pour ce genre de mission, ces problèmes n’avaient pas engendré de graves conséquences, sinon ils auraient été réglés. En revanche, ils amenaient de mon côté.

(18) beaucoup de gâchis de papier et d’étiquettes. Mon esprit perfectionniste et écologiste s’irrita un peu. Je n’avais probablement ni le droit ni le temps de modifier toute la structure de la base de données du CE. C’était bien dommage. Je me permis seulement de trier intégralement le classeur d’étiquettes de Céline afin de m’assurer qu’aucune feuille ne serait imprimée à nouveau inutilement. Je sentais que je contribuais ainsi dans l’ombre à la durabilité de la structure en place. Sustainability. C’était la première fois que je réalisais une tâche qui ne m’avait pas été confiée. Mais j’avais déjà terminé mes objectifs du jour après-tout.. Chapitre 10 - L’insouciance Travailler ainsi toute la journée du matin au soir fatiguait bien le corps et l’esprit. Même si la tâche n’était pas éprouvante physiquement, ni mentalement d’ailleurs, je me sentais souvent vidé en revenant à la maison. J’avais beau avoir pas mal de projets personnels en tête, des rangements à faire, etc… je ne faisais pas grand chose chez moi le soir, si ce n’est faire la sieste, regarder des films et écrire un peu. Je commençais à comprendre la difficulté qu’éprouvaient certains adultes à s’épanouir dans des activités extérieures au travail. Le weekend, le repos prend le dessus sur tout, je suppose. Je me surpris à attendre avec grande impatience la sortie du lundi soir que m’étais promise avec mes amis un peu plus tôt. Pendant toute ma journée de travail, je n’avais pensé qu’à cette virée dans les bars. La promesse d’une simple sortie entre potes devenait l’échappatoire ultime à la vague d’ennui qui me submergeait au quotidien. Le travail redonnait en quelque sorte une valeur à mes sorties. L’engouement qu’avaient les étudiants en PACES pour leurs soirées arrosées s’expliquait aussi un peu mieux.. Chapitre 11 - Les sottises Une des dernières tâches originales qui me fut proposée fut de mesurer la taille des meubles de la médiathèque. Je crois qu’ils allaient prochainement créer une nouvelle pièce en abattant un mur au fond de la salle BD. Cela aurait expliqué du moins tous les aller-retours des ouvriers que j’observais. Cet ajout semblait impliquer de devoir repenser toute l’organisation de la médiathèque. Tous les plans de la médiathèque n’étaient malheureusement pas munis de mesures chiffrées, d’où ma nouvelle mission. Je devais tenir l'extrémité d’un mètre-ruban d’un côté des grandes étagères tandis que Zoé lisait la longueur mesurée à l’autre bout de l’étagère. Évidemment, sur de telles longueurs, le ruban ne restait pas droit. Malgré toute ma volonté de le garder le plus rectiligne possible, les obstacles faisait qu’il dépassait toujours d’un côté ou l’autre, se pliait et tournait sur lui-même. Bref, les mesures étaient très approximatives. Au vu du manque de réaction de Zoé vis à vis de ce problème, je me dis qu’ils n’avaient pas besoin de mesures très précises..

(19) Le seul élément dérangeant fut que Zoé me demanda de noter au centimètre près la valeur qu’elle m’annonçait. “En effet, on doit être le plus précis possible, au centimètre près, sinon les futurs meubles ne rentreront pas.” J’ai préféré me taire sur le manque total de précision des mesures, plutôt que de devoir toutes les refaire. Après avoir tout mesuré, il restait une dernière étape. Il fallait retirer une section du rayon BD ADO, afin que les ouvriers puissent démolir le mur adjacent. Les étagères étaient faites de sorte à ce qu’il soit impossible de les démonter sans enlever celles immédiatement à leur droite. Le tout formait un bloc indémontable. On pouvait imaginer l’intérêt structurel qu’il y avait derrière cette propriété, mais il se trouvait que celle-ci ne m’était guère utile à ce moment-là. Un des ouvriers me proposa gentiment de scier la partie en question, ce que je dû lui interdir poliment. Je dû donc vider tout le rayon et démonter les étagères unes par unes en partant de celle tout à droite pour progressivement arriver à celle qui m’intéressait. Évidemment, si je ne faisais pas attention à empiler les documents que j’enlevais dans un ordre cohérent, ce serait un labeur de plus pour moi plus tard. En voyant les piles être déplacées n’importe comment par les ouvriers qui cherchaient à se mouvoir dans la médiathèque, je me rassurai en me disant qu’ils n’auraient pas fini leur travail avant la fin de mon séjour. Vers la fin de mon séjour d’ailleurs, je commençai à connaître un peu mieux les habitudes du CE. Si au début de mon stage, j’avais surtout mangé tout seul dans la cantine - ce qui ne m’avait pas plus déplu plus que cela - je savais maintenant où les groupes se réunissaient pour manger. J’allais donc souvent rejoindre ceux que je trouvais les plus sympathiques. Mais parmi toutes les discussions d’une banalité hors-norme que j’entendais, une en particulier m’intriguai. Deux employées insistaient sur le fait que la cantine s’y prenait n’importe comment : il était aberrant d’être servi une entrée qui avait été proposée la veille, etc. Apparemment, la plupart des employés ici n'appréciaient pas la nourriture proposée à Airbus. Je jetai un coup d'œil à mon plateau : un steak tartare bien garni, des frites, une assiette de fromage, un bon dessert. Le tout pour 4 euros. Je me régalais depuis une quinzaine de jours, et je n’avais même pas encore fait le tour de tous les menus proposés. Décidément, ce groupe de bonnes-femmes et petits beaufs avaient oublié ce que c’était que de manger dans un lycée. Mais je constatais alors que moi aussi, je m’étais lassé de la cantine de mon lycée, alors que je l’avais adorée le premier jour, elle était d’ailleurs réputée pour être l’une des meilleures de Toulouse. Allais-je aussi me lasser de celle d’Airbus ? Sommes-nous voués à désirer toujours mieux ? Je rangeai mon plateau et retournai travailler. Ce n’était pas le moment de philosopher..

(20) Chapitre 12 - La course Lors d’une de mes dernières permanences médiathèque, Zoé me confia toutes les missions de la permanence en même temps. Les bénévoles - qui viennent aider en général deux à trois jours par semaine - n’étaient pas présents ce jour-là et elle devait s’occuper de missions plus importantes dans son bureau. J’étais ainsi chargé des prêts, des retours, du tri et rangement des documents ainsi que de répondre à toutes les questions que pouvaient se poser les ingénieurs. Même après tout ce temps passé dans la médiathèque, je fus surpris par des questions auxquelles je ne savais toujours pas répondre. Heureusement pour moi, je connaissais l’emplacement du bureau de Zoé, je pus donc aller la voir quand problème il y avait. Je fus d’autant plus surpris de devoir courir par moments, pour ne pas trop faire attendre les emprunteurs. J’avais tellement de tâches en même temps que n’eus pas le temps de m’ennuyer ce jour-là. En fin de journée, Céline me demanda de repasser en revue tous les DVD Policiers, c'est-à-dire ceux que j’avais déjà triés en début de semaine. Je me questionnai intérieurement encore une fois sur l’utilité de la tâche qui m’était confiée, mais me résignai à l’effectuer avec le sourire. Dire que cela faisait une semaine qu’elle m’avait promis de m’apporter chaque jour ses putain de cartouches roses. Je me permis d’entamer une vérification du rangement par ordre alphabétique de tous les DVD de la médiathèque, car il se pouvait effectivement que parmi les 5000 DVD, il y en ai une dizaine de mal rangés. Je mis mes écouteurs dans les oreilles et laissai le temps passer, l’esprit libre, effectuant machinalement la dernière besogne répétitive du séjour..

(21) Chapitre 13 - Le quinzième jour Cela fait maintenant deux semaines que je travaille à Astrium. Le quinzième jour se lève.. Il est 8h du matin. Le soleil tape déjà fort. Le logo ​Airbus s​ cintille magistralement alors que je pénètre pour la n​ième fois dans le complexe. Évidemment, je ne peux toujours pas rentrer dans les bâtiments principaux. Comme tous les matins, je les contourne et me dirige vers la médiathèque. Avant d’y rentrer cependant, je bifurque vers la cafétéria. Il n’y a personne ; elle est fermée depuis le début du mois d’août. Je m’accroupis dans un coin et vérifie le contenu de mon sac. Il y a bien tout. Je me relève et me dirige pour de bon vers la médiathèque. En pénétrant dans le sas principal, je respire un grand coup. Christine me salue, je la salue en retour. Seul un sourire malicieux au coin de mes lèvres saurait trahir mes intentions du jour, mais la confiance du personnel du CE m’est à ce jour entièrement acquise. Tout va se dérouler comme prévu. Céline sait que je préfère me mettre au travail immédiatement dans la médiathèque, car cela m’évite des aller-retours fastidieux avec les chariots de DVD. Ainsi, elle a pris l’habitude de m’ouvrir la salle avant que je n’arrive le matin. Il n’y a donc rien de choquant à ce que je pose aujourd’hui mes affaires directement là bas. Je dépose mon sac à côté du porte manteau et m’installe sur le bureau des retours. Je regarde autour de moi. Évidemment, il n’y a encore personne dans la médiathèque, puisque le matin, elle n’est pas ouverte au public, et le personnel n’y passe que très rarement. J’allume le PC. On me demande successivement 3 mots de passe. Les deux premiers sont donnés dans le protocole d’utilisation du logiciel sur le bureau. Je ne suis techniquement pas censé ouvrir le logiciel moi même, mais son utilisation fait partie de mes fonctions ; on ne m’en tiendra pas rigueur. En revanche, le troisième mot de passe n’est a priori pas évident. Mais j’ai eu l’occasion de voir Céline le taper à plusieurs reprises sur son PC quand elle modifiait elle-même la cote des DVD défectueux par exemple. C’est de ce mot de passe dont j’ai besoin à l’instant. Heureusement pour moi, ma mémoire visuelle ne me fait pas défaillance. Sans trop forcer, je soutire de ma mémoire les deux-tiers du mot de passe. Je souris en tapant les caractères un-à-un. Le code forme un mot que je n’ai pas de difficulté à compléter. Me voici maintenant dans le serveur du CE. Je met peu de temps à trouver l’information qui m’intéresse: le numéro de compte médiathèque de Pauline. Il m’a suffit d’utiliser son nom et prénom pour le trouver..

(22) En fait, pour un salarié de la boîte, le numéro de compte correspond à l’identifiant Airbus du salarié en question. Ça, je l’ai compris en surprenant une conversation l’autre jour entre Christine et un ingénieur visiblement nouveau à la médiathèque. Il se trouve par ailleurs qu’en discutant un peu avec Pauline à table les midis, j’ai compris que celle-ci cumulait deux postes au sein Airbus : un pour la permanence de la médiathèque, et l’autre à l'accueil du site principal d’Airbus. Ainsi Pauline, contrairement aux employés basiques du CE, possède un vrai identifiant Airbus. Son numéro de compte médiathèque. Cet identifiant devrait me permettre de rentrer dans le campus principal, à condition d’avoir le badge associé. Je sors de la salle média. Il n’y a toujours personne aux alentours. Ils doivent tous être à leur pause café de 8h. Ou peut-être est-ce la pause clope ? Je me dirige vers le bureau de Pauline. Comme d’habitude, elle n’y est pas. J’avais tout de même vérifié la veille qu’elle n’y serait assurément pas ce jour-là. Céline est actuellement en réunion marketing avec Olivia et Félix, selon son planning. Ça tombe bien, ces deux derniers étaient eux-aussi parmi mes plus gros obstacles à éviter. Tous absents de la scène. Sur le bureau de Pauline, un petit post-it jaune : “Je te laisse ce badge pour verrouiller la médiathèque une fois que tu auras fini ta permanence. On se rejoint à la pause de midi”. Je souris. Céline possède en effet deux badges, un qu’elle garde avec elle pour aller en réunion par exemple, et l’autre qu’elle laisse habituellement suspendu à un mini porte manteau, lui-même accroché au dos de sa porte. Celui-ci permet d’ouvrir son bureau ainsi que la médiathèque, privilège accordé qu’à seulement certains employés. Je n’ai jamais compris pourquoi elle avait besoin de deux badges différents, mais cela allait me faciliter grandement la tâche. “Quelle mauvaise décision que de laisser son badge à l’air libre sur son bureau Céline ! Et si quelqu’un de malicieux le voyait ?” J’empoignais victorieusement le badge.. Deux jours auparavant Pauline m’a laissé tout seul dans son bureau. Ils me font décidément grandement confiance. Enfin bon, il faut avouer qu’ils ne cachent pas grand-chose d’important ici. Si ce n’est ce badge. Le verrouillage magnétique de sa porte, j’ai compris comment le réparer en deux minutes. Mais une idée saugrenue m’est justement venue en apercevant le badge de Pauline, posé tranquillement devant mes yeux. Elle me l’avait laissé pour que je vérifie le bon fonctionnement de la porte après réparation. Je démonte le loquet que je viens de réparer, puis me dirige tranquillement vers les bureaux de Céline. À l’aide du bras de levier, je démonte le loquet de sa porte, et y insère les composants du loquet magnétique de Pauline, puis je remonte gentiment le tout. Le badge de Pauline sert maintenant à ouvrir le bureau de Céline. Je viens de m’en assurer en vérifiant avec le badge qu’on m’a confié. Je suis content de mon petit tour, mais il est peu probable que les deux ne s’en aperçoivent pas avant la fin de la journée. Je m’apprête à laisser tomber mon petit tour de passe passe, lorsque j'aperçois un petit objet scintillant accroché au porte manteau. Serait-ce le second badge de Céline? Le déclic se fait immédiatement dans ma tête. Je remplace le badge suspendu par celui de Pauline. Puis, je me dirige à nouveau vers le bureau dans lequel je suis censé effectuer mon job de réparateur. Je répare soigneusement le verrouillage de la porte à Pauline - vous l’aurez compris, avec les composants de chez Céline bien sûr. Je dépose le nouveau badge sur le bureau, précisément à l’emplacement où j’ai récupéré.

(23) l’ancien. Tout a été échangé, sans laisser une seule trace. Dès que Pauline reviendra à son bureau, je trouverai un moyen d’échanger le badge qu’elle possède sur elle - qui ne fonctionne plus sur sa porte - et celui que je viens de truquer. Elle n’y verra que du feu. Je sors du bureau satisfait.. Retour au quinzième jour Je dévisage le porte manteau de Céline. Le badge n’y est plus. Je me dis un instant que tout le subterfuge a pu être démasqué puis j'aperçois le post-it sur le bureau, et le badge à côté. Victoire. Le badge que je détiens ne me permettra évidemment pas de fermer à clef son bureau, mais ce n’est pas grave, je dirai que j’ai oublié. En revanche, il ouvre la médiathèque, et chez Pauline. Je vérifie que personne ne vient depuis le couloir puis je retourne à la salle média. Je m’installe au poste de travail. Les vraies affaires commencent. Je prends en photo l’entièreté du badge. Chaque chiffre inscrit sur ce petit bout de carton magnétique doit être stocké dans la mémoire de mon téléphone. Il ne faut négliger aucun détail. Ensuite, à l’aide du mètre-ruban que j’ai utilisé l’autre jour pour les meubles de la médiathèque, je mesure précisément les dimensions qui m’intéressent. Celles du code-barre en particulier sont essentielles. Je jette un coup d'œil au travers de la baie vitrée. Personne en vue. J’enchaine par la découpe du badge. A l’intérieur de la carte se trouve une petite puce électronique que je déclipse aisément. Je la range précieusement dans mon sac. Il ne me reste qu'à compenser le trou béant que je viens de créer dans la carte par du papier mâché. Celui-ci se trouve à côté de la machine à laver des DVD. Voilà, tout est niquel. Évidemment, ce badge ne marche plus, mais Céline n’en aura plus besoin de toute manière. Je me dépêche de retourner dans son bureau. Il reste cinq minutes avant la fin de sa réunion. Céline avait abandonné sa tasse de café ce matin sur son bureau. Elle est maintenant froide. Je dépose tranquillement le badge usé à côté de la tasse et je dévisage le tout quelques secondes. Tout a été si facile. Rien qu’avec un petit bout de carton. Je renverse d’un coup sec la tasse de café. Le liquide noir se déverse sur la table, et trempe intégralement le badge de Céline. Plus tard, je m’excuserai de façon insistante pour cette étourderie, et Céline jetterai tout simplement le badge cassé à la poubelle. Je serai excusé et Céline en recommandera un autre, qui fonctionnera parfaitement sur le loquet actuel de sa porte. Rien ne sera découvert. À​ 18h, je quitte le local du CE, accompagné de Céline. - “Encore désolé pour la tasse de café ce matin…” - “Pas de soucis Gaspard, ne t’inquiète pas ce n’est pas grave.” - “Ok tant mieux. - “...” - “Mince je crois que j’ai oublié mon pull sur le banc de la cafétéria.” - “Et bien va le chercher. Je suis pressé donc je te laisse. À plus tard !” - “Oui, au revoir Céline.”.

(24) Céline possède depuis 2 jours le badge jaune. Celui-ci ne lui permet que d’ouvrir son bureau et la médiathèque (Pauline y travaille aussi). Pendant deux jours, j’ouvre discrètement avant elle les salles de réu, grâce au badge rouge clair qui me permet de rentrer chez Pauline (il est accroché au mur de Céline), et ensuite avec le badge rouge foncé (maintenant à Pauline). Céline me confie officiellement le badge clair ce matin, mais je le détruis. Une fois qu’elle l’a remplacé, je me débrouille dans la journée pour échanger les deux badges à nouveau. Cette fois-ci, Pauline possède un badge tout neuf qui ouvre son bureau et la médiathèque, elle se démerdera pour ses réunions. En attendant, grâce à la puce que j’ai extraite, je peux entrer chez Pauline comme bon me semble. Et j’ai aussi son badge jaune.. Je m’insère dans le bureau de Pauline. J’ai son badge mais il me manque encore un élément. Je me connecte à son PC grâce au badge, pas besoin de mots de passe. Ce qu’il me manque est un code qui me servira plus tard. Mais je n’ai aucun moyen de le trouver. Il n’y a qu’une solution. Je navigue dans son compte Airbus jusqu’à trouver la requête : “réinitialiser mon code.” Le site veut s’assurer qu’il s’agit bien de Pauline. Il me demande un identifiant et une adresse mail. Je le connais cet identifiant, je l’avais récupéré à la médiathèque. Le lien pour créer un nouveau code a été envoyé à sa boîte perso. Tiens, il se trouve que ses mails sont accessibles depuis ce PC. Un peu plus tard - environ 1h plus tard pour être exact, le temps d’imprimer deux-trois éléments - dans un coin peu fréquenté du complexe, un portail magnétique s'ouvre puis se referme. Dans les données du serveur Airbus, Pauline aurait pénétré le campus principal à 18h10, puis serait ressortie immédiatement après, probablement pour accompagner un.

(25) collègue ingénieur. Ce que le serveur ne sait pas, c'est que c’est moi qui suis rentré à l’intérieur. Avec une carte fraîchement fabriquée à partir de la puce volée. Dans les bonnes dimensions par ailleurs, sait-on jamais. Une fois pénétré dans le campus principal, j’ai patienté quelques minutes, puis repassé le badge sur le capteur du sas magnétique, sans ressortir. Tout au long de mon séjour au voisinage du campus, j'ai observé attentivement chaque bâtiment, de loin. J’ai une bonne idée de la structure du complexe. Durant les repas au self, j'ai pu épier secrètement des ingénieurs discutant entre eux. En plus de cela, j’ai étudié minutieusement le trajet effectué par les camions de livraison chaque matin, qui rentrent toujours par la même entrée pour livrer leur matériel. En rassemblant tous ces éléments, j'ai pu ainsi réduire le champ des possibilités à exactement deux bâtiments dans lequel ma cible pourrait être potentiellement entreposée. Je me faufile discrètement entre les blocs en tâchant d'être le moins suspect possible. J'ai sorti le costard et l’eau de Cologne, histoire d'être bien camouflé parmi les ingénieurs. Mon jeune âge pourrait certes en surprendre plus d'un, mais le fait que je sois rentré dans bâtiment sans problème devrait suffire comme preuve immédiate et irréfutable de mon appartenance à la boîte. J’aperçois le premier des deux bâtiments d’intérêt. Je m’y insère toujours grâce au même badge. A l’intérieur de ce type de bâtiment se trouvent notamment les salles blanches. Je sais depuis mon stage de troisième que c’est précisément dans ces salles que sont assemblés les projets les plus confidentiels. Mon maître de stage m’en avait montré un particulièrement, commandé par un pays dont je ne citerais le nom. Il m’avait fait jurer de ne pas le répéter à ses supérieurs. 5 ans plus tard, m’y voici de nouveau. J’observe la structure qui me fait face. Bingo. Je ne me suis pas trompé de bâtiment. Me voici devant Wanderer-N2, le nouveau satellite d’observation commandé par ce même pays dont je tairais le nom. Ce que je peux vour dire, c’est que ce satellite n’est pas conçu pour l’observation à proprement parler. Ce n’est qu’une dénomination artificielle. Je rentre dans la salle de contrôle. C’est d’ici que sont commandées toutes les machines servant à assembler et à maintenir en état l’engin. Je désactive les sécurités du sas principal. Un bruit sourd résonne dans toute la salle alors que les portes d’entrées du satellite s’ouvrent. Je reste un moment perché du haut de la tour de contrôle, sans bouger d’un pouce. Aucune alarme, personne en vue. J’attends encore quelques secondes avant d’être assuré que je n’ai pas été repéré, puis je descends de la tour. Me voilà maintenant à l’intérieur du satellite. L’intérieur est très étroit, des câbles pendent de partout, tout n’est pas parfaitement assemblé. En revanche, l’ordinateur de bord est fonctionnel. Je branche ma clé USB au système. En quelques secondes, tout le système est hacké. La protection des données du système interne au satellite n’a pas encore été programmée. Après-tout, personne ne devrait être capable de venir ici sans badge officiel. Une demi-heure plus tard, je suis en dehors du campus d’Astrium. Je suis passé par une autre entrée du campus, avec la même méthode que tout à l’heure, dans un secteur où un.

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