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| La Lettre du Neurologue • Vol. XXI - n° 9 - novembre 2017REVUE DE PRESSE
dirigée par le Pr T. Moreau
Commentaire
Cette étude, bien que rétrospective, porte sur une cohorte très large et bien définie. Elle fait suite à d’autres publications qui avaient souligné l’importance prédictive de la synucléinopathie corticale dans l’apparition d’une démence chez des patients atteints d’une maladie de Parkinson (MP), ainsi qu’un intervalle de temps plus court entre l’apparition des signes moteurs et cognitifs chez des patients atteints de MP présentant une copathologie de type MA, par rapport à ceux n’en présentant pas. Le message principal est que les dégénérescences neurofibrillaires semblent être le facteur prédictif le plus puissant d’une dimi- nution de l’intervalle entre les signes moteurs et cognitifs, et plus généralement de la survie, dans les synucléinopathies. Ces résultats soulignent l’im- portance des copathologies au sein des maladies neurodégénératives et de leur rôle dans la déter- mination de profils cliniques et évolutifs distincts, par le biais de possibles inter actions restant à élucider entre les différentes protéinopathies. Cela pourrait conduire à identifier des sous-groupes pathologiques distincts, pouvant répondre à des stratégies thérapeutiques variées, ce qui est parti- culièrement important pour la mise au point des essais thérapeutiques, d’autant que l’avènement de l’imagerie tau en TEP pourra permettre de repérer in vivo les dégénérescences neurofibril- laires.
Référence bibliographique
Irwin DJ, Grossman M, Weintraub D et al. Neuropathological and genetic correlates of survival and dementia onset in synucleinopathies: a retrospective analysis. Lancet Neurol 2017;16(1):55-65.
Corrélats neuropathologiques et génétiques de la survie et de l’apparition de la démence dans les synucléinopathies
Dans cette étude rétrospective, 213 patients répondant aux critères cliniques de consensus de démence parkinsonienne (DMP) ou de démence à corps de Lewy (DCL) ont été inclus.
Les données neuropathologiques portant sur les lésions de synucléinopathie et de maladie d’Alzheimer (MA), ainsi que les données génétiques (gènes ApoE, MAPT, SNCA et GBA) ont été étudiées. Les résultats montrent que 49 patients n’ont pas de lésions de type MA, 56 en ont à un faible degré, 45, à un degré intermédiaire et 63, à un degré élevé. Les 2 premiers sous-groupes décrits ci-dessus constituent les patients “MA négatifs” et les 2 autres, les patients “MA positifs”. La présence de lésions de type MA est plus notable chez les patients présentant un diagnostic clinique de DCL que chez ceux présentant une DMP. Dix-huit sujets atteints d’une DCL n’ont jamais montré de signe moteur extra- pyramidal. Parmi ceux-ci, 16 sont “MA positifs” sur le plan neuropathologique et 15 ont une synucléinopathie néocorticale. Néanmoins, l’analyse en courbe ROC de la valeur diagnostique de l’intervalle de 1 an entre l’apparition des signes moteurs et cognitifs, utilisée pour différencier cliniquement la DCL de la DMP, a montré une faible capacité à prédire la présence d’une synucléinopathie néocorticale (ASC [Area Under Curve]) : 0,67) et de la pathologie de type MA (ASC : 0,72). Les mutations du gène GBA sont plus fréquentes chez les patients “MA négatifs”, et l’allèle ApoE4 chez les patients “MA positifs”. La présence de lésions de type MA est associée à un âge plus tardif de début des symptômes moteurs et cognitifs, ainsi que de décès. La sévérité des lésions de type MA est associée à une diminution de l’intervalle entre l’apparition des signes moteurs et de la démence, ainsi que de la survie. Cette association est notamment retrouvée de façon indépendante pour les dégénérescences neurofibrillaires, en incluant les autres variables neuropathologiques, les données génétiques et l’âge de décès comme covariables.
J. Lagarde, Paris
Risques et caractéristiques des hyponatrémies induites par la carbamazépine et l’oxcarbazépine
Les auteurs ont étudié la natrémie (Na) chez des patients épileptiques traités par carbama- zépine ou oxcarbazépine, dans un centre hospitalier aux Pays-Bas, de 2010 à 2017. Parmi les 1 732 patients traités par ces molécules, ils ont identifié une hyponatrémie (Na ≤ 134 mmol/l) chez 26 % des patients sous carbamazépine et chez 46 % des patients sous oxcarbazépine, et une hyponatrémie sévère (Na ≤ 128 mmol/l) chez 7 % des patients sous carbamazépine et chez 22 % des patients sous oxcarbazépine. L’hyponatrémie est symptomatique dans 48 % des cas, et les symptômes sont plus fréquentes lorsque l’hyponatrémie est sévère. Ceux-ci se manifestent par des vertiges, des troubles de l’équilibre, une diplopie, une asthénie, un ralentissement psychomoteur, des céphalées et des nausées. Vingt-deux pour cent des patients atteints d’une hyponatrémie sévère présentent également une augmentation de la fréquence des crises. La dose du traitement est un facteur de risque indépendant de développer une hyponatrémie, mais le facteur est assez faible, OR : 1,20. Les autres facteurs de risque d’hyponatrémie identifiés sont le sexe féminin, un âge supérieur à 40 ans et une polythérapie (notamment l’association avec le clobazam, la phénytoïne ou des diurétiques dans les 2 groupes, et l’association avec le valproate ou le phénobarbital dans le groupe carbamazépine).
B. Herlin, Paris
Commentaire
L’hyponatrémie est un effet indésirable fréquent de la carbamazépine et de ses dérivés (oxcarba- zépine, et plus récemment eslicarbazépine, non étudiée ici), qui touche dans cette étude entre un quart et la moitié des patients. Les symptômes induits par l’hyponatrémie sont peu spécifiques, et le trouble ionique peut même induire une recrudescence de crises : il est donc important de vérifier la natrémie chez tout patient traité par une de ces molécules et présentant une aggravation neurologique non expliquée.
Référence bibliographique
Berghuis B, Van der Palen J, de Haan GJ et al. Carbamaze- pine- and oxcarbazepine-induced hyponatremia in people with epilepsy. Epilepsia 2017;58(7):1227-33.