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Cancers cutanés

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Texte intégral

(1)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016 | 373

Compte-rendu et analyse

CHICAGO 2016

Cancers cutanés

Skin cancers

N. Meyer*

* Service de dermatologie, Institut universitaire du cancer de Toulouse, Toulouse.

E n juin 2016, au congrès annuel de l’American Society of Clinical Oncology, à Chicago, le ton est donné : l’immunothérapie est décidé- ment un sujet qui révolutionne les concepts théra- peutiques du cancer. Malgré des résultats attendus sur les immunothérapies par les anti-PD-L1 dans le carcinome à cellules de Merkel et des données consolidées sur les associations d’inhibiteurs de checkpoints immunologiques, l’oncodermatologie a laissé cette année à d’autres le plaisir de la session plénière.

Notre spécialité s’engage dans l’analyse fine et les caractérisations de sous-groupes, en quête d’une meilleure compréhension des résultats incroyables observés depuis 5 ans.

Car il ne faut pas oublier que beaucoup des résultats que l’on connaît sont initiaux et immatures, tradui- sant une vision simple du résultat thérapeutique : celle de l’objectif principal de l’étude. L’onco- dermatologie découvre le difficile exercice du choix thérapeutique. Qui, pourquoi, quand, comment et avec quoi traiter nos patients lorsque la maladie récidive ou échappe ?

L’histoire n’a pas préparé notre spécialité à cet exer- cice, et le défi est immense. Cette quête est intense, signe des questions que toute l’oncodermatologie se pose au quotidien. Les données consolidées, les analyses ancillaires des études pivotales et les évaluations en “vie réelle” fleurissent, chacune détaillant avec un raffinement extrême et un luxe de détails les caractéristiques précises des sous- groupes ayant le meilleur résultat. Les études sur les sous-types “rares” des cancers cutanés apparaissent : mutations NRAS, mélanomes uvéal, muqueux, acral.

Et toujours cette question du choix de la stratégie thérapeutique qui revient en filigrane dans les études de critères prédictifs de la réponse ou des détermi- nants de la qualité de la réponse : comment peut-on personnaliser avec plus de rigueur le traitement de chacun de nos patients dans notre pratique quoti- dienne ? Autrement dit, comment obtenir pour un individu donné un résultat thérapeutique comparable aux valeurs moyennes et médianes mesurées dans une population de patients sélectionnés pour une étude clinique ?

Et il faut admettre que le décodeur n’étant pas encore installé sur notre boule de cristal, le rôle du PD-L1 comme biomarqueur est très débattu, jusque dans la manière de l’évaluer. Les évaluations rappor- tées cette année sont finalement très empreintes du sceau du bon sens : nos traitements restent plus efficaces lorsque la maladie ne montre pas de signes d’agressivité...

Faut-il y voir une forme de lapalissade scientifique ou la preuve que l’intuition du médecin est un outil comme un autre ? La question reste ouverte, à vous de juger.

Mélanomes

Thérapies ciblées inhibitrices de BRAF V600 et de MEK

L’efficacité de l’association inhibiteur de BRAF V600 et inhibiteur de MEK pour le traitement des formes avancées de mélanome chez des patients porteurs de la mutation BRAF V600 est reconnue depuis la communication des résultats des études CoBRIM (1) et COMBI-d (2, 3). Plusieurs présentations ont traité des résultats mis à jour ou des analyses ancillaires de ces 2 études.

Mise à jour des données d’efficacité

Une communication orale de K. Flaherty et al.

(abstr. 9502) a rapporté les résultats à 3 ans de

l’étude COMBI-d qui a comparé dabrafénib (D) +

tramétinib (T) à D + placebo (PCB). Cette étude

randomisée de phase III a inclus 423 patients. L’ana-

lyse finale a été conduite sur les données recueillies

avant janvier 2015, en intention de traiter. La survie

sans progression (SSP) et la survie globale (SG) à

3 ans étaient toujours significativement supérieures

dans le bras D + T (22 et 44 %, respectivement)

par rapport au bras D + PCB (12 et 32 %, respecti-

vement). Les traitements de deuxième ligne après

échappement à la combinaison étudiée étaient

majoritairement représentés par les inhibiteurs de

checkpoints immunologiques (27 % dans le bras

D + T et 35 % dans le bras D + PCB) et les essais

(2)

374 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016

Dabrafénib + tramétinib Dabrafénib + placebo

LDH élevées LDH basses

Censurés Événements

Sur vie globale Sur

vie globale (mois)

Sur

vie globale (mois) Sur vie globale Muta tions Muta tions (Nb)

40 40 40 40 40 100 80 60 40 20 0

Synonyme Faux-sens Site d’épissage Non-sens Décalage du cadre de lecture ge du cadre de lecture ge du Insertion ou délétion du cadre de lecture Autre non- synonyme Amplification Délétion BRAF V600K BRAF BRAF-CNV

TP53 PTEN PTEN-CNV CCDKN2A CDK2A-CNV CDKN2B-CNV CDK4 ARID2 CTNNB1 DDX3X MET MAP2K1 NF1 PPP6C MAP2K2 NRAS FBXW7 MITF MITF-CNV WT1 TERT 100 %

17 % 3 % 12 % 2 % 10 % 13 % 12 % 9 % 8 % 8 % 5 % 5 % 4 % 4 % 3 % 3 % 2 % 2 % 2 % 5 % 2 % 2 %

Figure 1. Étude COMBI-d : analyse pharmacogénomique des déterminants géniques de la résistance à la combinaison dabrafénib + tramétinib versus dabrafénib + placebo (d’après Flaherty K et al., abstr. 9502, actualisé).

Points forts

cliniques (48 % D + T ; 62 % D + PCB), expliquant probablement la différence moins marquée en termes de SG qu’en termes de SSP entre les 2 bras de cette étude.

Les auteurs ont, de plus, rapporté les résultats d’une analyse pharmacogénomique originale (fi gure 1) portant sur les déterminants géniques de la résis- tance à la combinaison.

Cette analyse suggère un rôle potentiel des muta- tions CDKN2A dans la résistance au traitement, puisque la SSP était signifi cativement réduite lorsque la mutation était retrouvée (fi gure 2) . Malheureuse- ment, les effectifs de cette analyse étaient restreints, limitant la possibilité de tirer des conclusions de ce résultat.

Le signal positif d’effi cacité de longue durée de l’as- sociation inhibiteur de BRAF V600 + inhibiteur de MEK a été conforté par la mise à jour des données de l’étude BRIM-7 avec un suivi médian de 25,8 mois (4, 5) .

BRIM-7 est une étude de phase Ib évaluant l’associa- tion vémurafénib (V) + cobimétinib (C) dans 2 popu- lations : patients naïfs de traitement inhibiteur de BRAF V600 (BRAFn) et patients ayant progressé sous monothérapie par inhibiteur de BRAF V600 (BRAFp).

Une SSP médiane de 13,8 mois était rapportée chez les patients BRAFn contre 2,8 mois pour les patients BRAFp. Les données de SG étaient respectivement de 37,2 et 11,2 %, avec constitution d’un plateau sur les courbes de survie (fi gure 3) . Cette étude souligne de nouveau l’importance de prescrire d’emblée l’associa- tion inhibiteur de BRAF V600 + inhibiteur de MEK sans attendre l’échappement après une monothérapie par inhibiteur de BRAF V600.

Déterminants de la réponse

et profi ls de toxicité des thérapies ciblées

Plusieurs résultats d’analyses ancillaires menées sur les données de coBRIM (1) ont été présentés.

» L’efficacité et la durée de réponse des inhibiteurs de checkpoints, seuls ou en combinaison, se confirment.

» Le gain d’efficacité des combinaisons d’inhibiteurs de BRAF V600 et d’inhibiteurs de MEK semble plus impor- tant pour les patients ayant une maladie agressive, mais ceux-ci gardent malgré tout un mauvais pronostic.

» Les inhibiteurs de MEK en monothérapie et, pourquoi pas, en association avec la digoxine pourraient constituer un traitement de deuxième ligne des mélanomes NRAS muté.

» Les signaux d’efficacité et de tolérance des inhibiteurs de SMO pour le carcinome basocellulaire sont confirmés.

» De nouveaux arguments en faveur de l’utilisation des inhibiteurs de checkpoints dans le carcinome à cellules de Merkel métastatique.

» Le carcinome épidermoïde cutané reste le grand absent du rendez-vous scientifique.

Mots-clés

Immunothérapie Thérapie ciblée Mélanome Carcinome basocellulaire Merkel

Highlights

» The effi cacy, and response duration of immune check- points inhibitors are being confi rmed.

» The effi cacy of BRAFV600 + MEK inhibition seems better in patients with aggres- sive disease. However the prognostic of these patients remains poor.

» Mek inhibitor, given as monotherapy or in asso- ciation with digoxin, may be a second line treatment for NRAS mutated melanoma.

» The tolerance and effi cacy of Smo inhibitor for basal cell carcinoma are confi rmed.

» Additional clues on the effi - cacy of immune checkpoints inhibitors for the treatment of metastatic Merkel cell carcinoma.

» Cutaneous epidermoid carcinoma remains a blind zone of clinical research.

Keywords

Immunotherapy Targeted therapy Melanoma Basal cell carcinoma Merkel

0374_LON 374 13/07/2016 14:25:10

(3)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016 | 375

(%) (%)

0 6 12 18 24 30 36 42 0 6 12 18 24 30 36 42 48

0 20 40 60 80 100

0 20 40 60 80 100

Mois

Survie sans progression Survie globale

24 % 55 % CDKN2A sauvage (n = 45)

CDKN2A muté (n = 18) 6 %

27 %

CDKN2A muté (n = 18) CDKN2A sauvage (n = 45)

Sauvage Muté

Patients à risque (n)

45 31 17 16 16 12 9

18 6 2 2 1 1 1 0 45 41 34 26 25 23 7 0

18 15 9 6 4 24 4

4 2 0

0

Figure 2. Étude COMBI-d : données de survie à 3 ans selon la présence ou l’absence de mutation CDKN2A (d’après Flaherty K et al., abstr. 9502, actualisé).

Vémurafénib-progression (n = 66) Censurés

BRAFI-naïf (n = 63) Censurés 100

80 60 40 20 0

66 44 28 21 13 7 5 4 4 3 2 1

1 9 17 25 33 41

Sur vie globale (%)

Mois Patients à risque (n)

100 80 60 40 20 0

63 60 55 48 44 39 33 25 17 11 1 1

1 9 17 25 33 41

Sur vie globale (%)

Mois Patients à risque (n)

Médiane,

Événements, n mois (IC

95

) 1 an

%, (IC

95

) 2 ans

%, (IC

95

) 3 ans

%, (IC

95

)

53 8,5

(6,7-11,1) 35,5

(23,7-47,4) 16,8

(6,9-26,8) 11,2 (2,0-20,4)

Médiane, Événements, n mois (IC

95

)

34 31,2

(24,5-40,1) 82,5

(73,2-91,9) 63,9

(51,8-76,1) 37,2 (22,8-51,6)

%, (IC 1 an

95

) 2 ans

%, (IC

95

) 3 ans

%, (IC

95

)

Figure 3. Étude BRIM-7 : survie actualisée à 41 mois (d’après Pavlick AC et al., abstr. 9020, actualisé).

CoBRIM est une étude de phase III randomisée comparant l’association V + C à V + PCB chez 495 patients atteints d’un mélanome avancé et/

ou métastatique BRAF V600 muté. Ces évalua- tions ont été menées pour déterminer avec plus de précision les sous-populations les plus à même de tirer un bénéfice de l’association V + C. Une première analyse (Larkin JMG et al., abstr. 9528) a étudié l’impact des critères pronostiques connus du mélanome métastatique à l’inclusion (âge > ou

< 65 ans ; genre ; stade AJCC M1c versus les autres ; Performance Status 0/1 ; LDH > ou < N ; type de mutation BRAF V600 : E ou K) sur la qualité de la réponse observée.

Un taux supérieur de réponses complètes (RC) a été observé chez les patients âgés de plus de 65 ans, de stade IIIc-M1b, avec LDH normales et/ou porteurs d’un mélanome muté V600K (tableau I, p. 376).

Une seconde analyse (McArthur GA et al.,

abstr. 9530), complémentaire de la précédente,

s’est attachée à corréler les critères pronostiques

de la maladie métastatique avec la durée de la

réponse (SSP et SG). Les auteurs ont rapporté un gain

thérapeutique lié à l’association V + C plus marqué

dans la population des patients ayant un taux de

LDH supérieur à 2 fois la normale, porteurs d’une

charge tumorale élevée (définis comme les patients

dont la somme des lésions cibles à l’inclusion était

supérieure à la valeur médiane observée dans la

population de l’étude) ou ayant des métastases

(4)

376 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016

Cancers cutanés

DOSSIER

Chicago 2016

100 80 60 40 20 0

100 80 60 40 20 0

0 6 12 18 24 30 Mois 24 30

0 6 12 18 24 30 Mois

C + V, < 0,8 × ULN Placebo + V, < 0,8 × ULN C + V, > 2 × ULN Placebo + V, > 2 × ULN Censurés

C + V, pas de métastases hépatiques Placebo + V, pas de métastases hépatiques C + V, métastases hépatiques Placebo + V, métastases hépatiques Censurés

C + V, SLD ≤ médiane Placebo + V, SLD ≤ médiane C + V, SLD > médiane Placebo + V, SLD > médiane Censurés

C + V, M1c + LDH ≤ ULN Placebo + V, M1c + LDH ≤ ULN C + V, M1c + LDH > ULN Placebo + V, M1c + LDH > ULN Censurés

Patients à risque (n)

Patients à risque (n)

100 80 60 40 20

0 0 6 12 18

76 66 60 52 36 18 8 1 84 74 53 43 28 16 8 31 28 17 9 6 3 2 36 26 6 2 2 1

164 145 121 98 73 36 15 1 170 146 95 72 46 25 9 63 70 53 44 31 10 4 78 59 26 15 8 5 4

100 80 60 40 20

0 0 6 12 18 24 30

58 49 43 39 29 13 4 1 68 60 33 21 14 9 3 86 73 51 36 25 9 6 82 62 27 19 9 4 2 121 106 90 80 60 27 12 1 127 102 75 60 40 21 11 125 107 84 62 44 19 7 119 102 45 27 14 9 2 (%)

Survie sans progression (%)

(%) (%)

C : cobimétinib ; V : vémurafénib.

Figure 4. Étude coBRIM : survie sans progression selon les critères pronostiques (d’après McArthur GA et al., abstr. 9530, actualisé) .

Tableau I. Étude co-BRIM : caractéristiques à l’inclusion influençant la réponse au traitement (d’après Larkin JMG et al., abstr. 9528, actualisé).

Cobimétinib + vémurafénib Placebo + vémurafénib RO, %

(IC

95

) RC, % RP, % RO, %

(IC

95

) RC, % RP, %

Population en ITT 70 (63-75) 16 54 50 (44–56) 10 40

Âge

< 65 ans

≥ 65 ans 72 (64-78)

64 (51-76) 13

28 61

43 53 (45-61)

42 (30-55) 11

11 43

33 Sexe

Femmes

Hommes 74 (65-82)

66 (58-74) 23

13 58

56 53 (43-62)

48 (39-56) 13

9 42

39 Stade

IIIc-M1b

M1c 70 (60-79)

69 (61-77) 26

11 50

61 64 (54-74)

41 (33-49) 22

4 45

38 ECOG PS

0

1 70 (63-77)

69 (55-80) 18

14 57

55 52 (45-60)

46 (35-58) 15

3 39

44 Taux de LDH

Normal

Élevé 75 (66-82)

63 (53-71) 23

9 56

57 62 (54-70)

35 (26-45) 16

4 48

32 Mutation de BRAF

V600E

V600K 70 (63-77)

71 (49-87) 14

23 58

55 52 (45-60)

38 (21-56) 11

7 43

34 Le total des pourcentages peut ne pas atteindre 100 en raison des erreurs liées à l’arrondissement.

RO : réponse objective ; RC : réponse complète ; RP : réponse partielle.

0376_LON 376 12/07/2016 17:10:40

(5)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016 | 377

Diarrhée

Patients à risque (n)

247 226 215 209 190 178 170 161 152 137 126 113 108 103 94 88 83 77 70 68 66 63 58 55 46 0

10 20 30 40

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 (%)

(%)

(%)

(%)

(%)

Événements indésirables par cycle de traitement

Grade 1-2 Grade 3-4 Pas d’événement indésirable

0 5 10 15 20

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 Événements indésirables par cycle de traitement

247 226 215 209 190 178 170 161 152 137 126 113 108 103 94 88 83 77 70 68 66 63 58 55 46

0 2 4 6 8 10 12

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 Événements indésirables par cycle de traitement Patients à risque (n)

Patients à risque (n)

247 226 215 209 190 178 170 161 152 137 126 113 108 103 94 88 83 77 70 68 66 63 58 55 46 0 2 4 6 8 10

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 Événements indésirables par cycle de traitement

247 226 215 209 190 178 170 161 152 137 126 113 108 103 94 88 83 77 70 68 66 63 58 55 46

0 1 2 3 4

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 Événements indésirables par cycle de traitement

247 226 215 209 190 178 170 161 152 137 126 113 108 103 94 88 83 77 70 68 66 63 58 55 46 Photosensibilité

> 24

> 24

> 24

> 24

> 24

Rétinopathie séreuse Anomalies hépatiques aux examens de laboratoire

Diminution de la fraction d’éjection ventriculaire gauche

Figure 5. Étude coBRIM : évolution de l’incidence des effets indésirables spécifiques aux traitements (d’après Dréno B et al., abstr. 9533, actualisé).

hépatiques (figure 4). Il est cependant nécessaire de pondérer ce résultat par sa relativité : le pronostic de ces patients reste malgré tout très réservé, et il est nécessaire de maintenir des efforts d’inclusion de cette sous-population dans les essais cliniques.

Une troisième analyse (Dréno B et al., abstr. 9533) a porté sur les données d’incidence des effets indési- rables (EI) dans le temps. Cela correspondait à une exposition cumulative de 252,9 patients-années, avec une durée médiane de traitement de 179 jours dans le bras V + C et de 183 jours dans le bras V + PCB. Les auteurs ont rapporté une décrois- sance progressive dans le temps de la plupart des

EI observés initialement, notamment des EI plus

spécifiques des inhibiteurs de MEK (rétinopathie

séreuse, troubles de la fonction ventriculaire

gauche). Deux facteurs peuvent expliquer cette

décroissance progressive de l’incidence de ces EI :

une adaptation progressive individuelle des patients

traités, mais également une exclusion de l’étude

des patients présentant des toxicités sévères. La

photosensibilité induite par le V avait une incidence

stable dans le temps, ce qui s’explique par le fait

que cet EI est un effet pharmacodynamique partiel-

lement représentatif de l’imprégnation cutanée

par le V (figure 5).

(6)

378 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016

Cancers cutanés

DOSSIER

Chicago 2016

Pembrolizumab 10 mg/kg toutes les 2 sem.

• 279 randomisés

• 278 traités

• 70 en cours

• 7 pendant 2 ans

• 201 interruptions 147 progressions 29 effets indésirables 2 décès

2 réponses complètes 21 autres

834 patients randomisés dans 3 bras

Ipilimumab 3 mg/kg toutes les 3 sem. x 4

• 278 randomisés

• 256 traités Pembrolizumab

10 mg/kg toutes les 3 sem.

• 277 randomisés

• 277 traités

• 58 en cours

• 6 pendant 2 ans

• 213 interruptions 139 progressions 45 effets indésirables 1 décès

5 réponses complètes 23 autres

• 155 ont reçu le traitement complet

• 110 interruptions 46 progressions 35 effets indésirables 5 décès

24 autres

Figure 6. KEYNOTE-006 : schéma de l’étude et résumé des sous-groupes (d’après Schachter J et al., abstr. 9504, actualisé).

Face à l’obligation administrative française rédui- sant le choix thérapeutique de première ligne chez les patients porteurs d’une mutation BRAF V600 à l’association inhibiteur de BRAF V600 + inhibiteur de MEK, les résultats de ces 3 analyses ancillaires aident le clinicien à mieux anticiper le résultat théra- peutique de la prescription de cette association.

Inhibiteurs de checkpoints

immunologiques dans le mélanome

Mise à jour des données d’efficacité Monothérapie par les inhibiteurs de PD-1 Des mises à jour de 2 études portant sur le pembro- lizumab en monothérapie ont été présentées.

La première concerne KEYNOTE-001 (Robert C et al., abstr. 9503), étude de phase Ib incluant 655 patients,

évaluant le pembrolizumab à différentes posolo- gies (2 mg/kg toutes les 3 semaines ; 10 mg/kg toutes les 2 semaines ; 10 mg/kg toutes les 3 semaines) dans le mélanome avancé (stade IIIc-V) [6]. La médiane de suivi était de 32 mois, et à cette échéance 21 % des patients étaient encore traités. À l’inclusion, 38 % des patients avaient un taux de LDH élevé, 78 % étaient de stade M1c et 24 % étaient en première ligne de traitement. Parmi les patients prétraités, 52 % avaient reçu de l’ipilimumab.

L’incidence des EI était de 85 % (principalement fatigue, prurit et rash), dont 17 % de grade 3-4 condui- sant à 8 % d’arrêts de traitement sans aucun décès rapporté au traitement. Les dys thyroïdies étaient le principal EI immunologique. La survie médiane était de 24,4 mois (23,5, 25,9 et 22,9 mois, respective- ment dans les 3 bras) avec un taux de survie à 3 ans de 40 % (38, 43 et 39 %, respectivement dans les 3 bras). Le taux de survie à 3 ans était de 41 % chez les patients prétraités ou non par ipilimumab (tableau II).

La seconde mise à jour concerne KEYNOTE-006 (Schachter J et al., abstr. 9504), étude de phase III comparant 3 cohortes de patients (n = 834) rando- misés 1 :1 :1 ; pembrolizumab 10 mg/ kg toutes les 2 semaines pendant 24 mois, pembrolizumab 10 mg/kg toutes les 3 semaines pendant 24 mois et ipilimumab 4 perfusions de 3 mg/kg toutes les 3 semaines (figure 6) [7].

L’objectif principal était l’évaluation de la SSP et de la SG. Les objectifs secondaires étaient l’évalua- tion du taux de réponse objective, de la durée de la réponse et de la tolérance. La médiane de suivi était de 23 mois. Le pembrolizumab, quel que soit le bras, a été supérieur à l’ipilimumab en termes de SG, de SSP et de taux de réponse. Les taux de survie à 2 ans étaient, respectivement, de 55 %, 55 % et 43 %, le taux de SSP à 2 ans de 31 %, 28 % et 14 % et le taux de réponse objective de 37 %, 36 % et 13 %. La médiane de survie dans le bras ipilimumab Tableau II. Étude KEYNOTE-001 : survie globale par sous-groupes (d’après Robert C et al., abstr. 9503, actualisé).

Patients

(n) Événements

(n) Médiane, mois

(IC

95

) À 24 mois

(%) À 36 mois

(%)

Total 655 358 24,4 (20,2-29,0) 50 40

Pembrolizumab

2 mg/kg/3 sem. 162 92 23,5 (18,3-35,0) 49 38

Pembrolizumab

10 mg/kg/3 sem. 313 172 22,9 (28,5-31,1) 49 39

Pembrolizumab

10 mg/kg/2 sem. 180 94 25,9 (19,6-43,0) 52 43

Prétraités par

ipilimumab 342 191 20,0 (17,8-27,1) 46 41

Naïfs d’ipilimumab 313 167 28,8 (23,1-32,2) 54 41

0378_LON 378 12/07/2016 17:10:41

(7)

380 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016

Cancers cutanés

Chicago 2016

Réponse thérapeutique selon l’expression de PD-L1 (seuil = 5 %) Mois

(%) (%)

Nivolumab + ipilimumab (n = 210) Nivolumab (n = 208) Ipilimumab (n = 202)

RO, % (IC

95

) 72,1 (59,9-82,3) 57,5 (45,9-68,5) 21,3 (12,7-32,3)

Durée médiane de réponse (mois) NA 20,7 NA

RO, % (IC

95

) 54,8 (47,8-61,6) 41,3 (34,6-48,4) 17,8 (12,8-23,8)

Durée médiane de réponse (mois) NA : non atteinte.

NA 22,3 18,2

PD-L1 (< 5 %)

PD-L1 ≤ 5 % PD-L1 > 5 %

Patients à risque (n)

210 142 113 101 86 81 69 31 5 0 208 108 89 75 69 62 55 29 7 0 202 82 45 34 26 22 12 7 0 0

NIVO + IPI (n = 210) NIVO

(n = 208) IPI (n = 202) Médiane ,

mois (IC

95

) 11,1

(8,0-22,2) 5,3

(2,8-7,1) 2,8 (2,8-3,1) HR (IC

95

)

NIVO 0,74

(0,58-0,96) – –

NIVO + IPI (n = 212) NIVO

(n = 218) IPI (n = 215) Médiane ,

mois (IC

95

) NA

(9,7-NA) 22,0 (8,9-NA) 3,9

(2,8-4,2) HR (IC

95

)

NIVO 0,87

(0,54-1,41) – –

0 20 40 60 80 100

0 3 6 9 12 15 18 21 24 27

Nivolumab + ipilimumab Nivolumab Ipilimumab

68 53 44 39 33 31 22 13 3 0 80 57 51 45 39 37 36 16 1 0 75 40 21 17 14 12 8 6 2 0 0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 0

20 40 60 80 100

PD-L1 (≥ 5 %)

Survie sans progression

Figure 7. Étude CheckMate 067 : survie sans progression, mise à jour à 24 mois, selon le niveau d’expression de PD-L1 (seuil = 5%) [d’après Wolchok JD et al., abstr. 9505, actualisé].

était de 16 mois et elle n’a été atteinte dans aucun des 2 bras pembrolizumab. La médiane de durée de réponse n’a été atteinte dans aucun groupe. Les EI n’ont pas été modifiés par cette mise à jour et un seul décès a été rapporté au traitement (sepsis dans le bras pembrolizumab 10 mg/kg toutes les 2 semaines).

Association inhibiteur de PD-1 + inhibiteur de CTLA-4

Deux études de combinaison d’immunothérapies associant anticorps anti-PD-1 et anticorps anti- CTLA-4 ont été présentées au congrès cette année.

L’étude CheckMate 067 (Wolchok JD et al., abstr. 9505), de phase III, randomisée en double aveugle 1:1:1 incluant 945 patients a comparé l’association nivolumab + ipilimumab (N + I) ou le nivolumab (N) seul avec l’ipilimumab (I) seul.

Elle a fait l’objet d’une publication en 2015 (8). Il est important de garder à l’esprit que l’ensemble de l’étude a été développé sur la base d’un bras de référence “ipilimumab en monothérapie”, les comparaisons I + N au bras N monothérapie n’étant prévues qu’à titre exploratoire et n’ayant pas influé sur le calcul de l’effectif de l’étude, notamment.

Au moment de l’analyse des données, le suivi médian était de 20,7 mois. La SSP était significativement supérieure dans le groupe N + I : 11,5 contre 6,9 mois dans le groupe N et 2,9 mois dans le groupe I. Le taux de réponse était de 57,6 % dans le groupe N + I avec 12,1 % de RC, de 43,7 % (dont 9,8 % de RC) dans le groupe N, contre 19 % (dont 2,2 % de RC) dans le groupe I. La durée médiane de la réponse était de 22,3 mois dans le groupe N, de 14,4 mois dans le groupe I et n’était pas atteinte dans le groupe N + I.

L’information apportée par l’expression de PD-L1 dans la tumeur (biomarqueur imparfait s’il en est) aidait à mieux identifier le sous-groupe dans lequel l’apport de cette combinaison était le plus important. En cas d’expression de PD-L1 par la tumeur (avec un seuil ≥ 5 %), la SSP était non atteinte dans le groupe N + I, elle était de 22 mois dans le groupe N et de 3,9 mois dans le groupe I ; en cas d’expression de PD-L1 inférieure à 5 %, la SSP était de 11,1, 5,3 et 2,8 mois, respectivement (figure 7).

Le taux d’EI de grade 3-4 était de 56,5 % dans le groupe N + I (principalement : cytolyse hépatique, diarrhée, colite ; aucun décès n’a été rapporté) contre 19,8 % dans le groupe N et 27 % dans le groupe I.

Les résultats de l’étude KEYNOTE-029 (Long GV et al.,

abstr. 9506) ont rapporté ceux d’une extension de

(8)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016 | 381

DOSSIER

cohorte de 153 patients traités par pembrolizumab 2 mg/kg + ipilimumab 1 mg/kg toutes les 3 semaines pour 4 cycles, puis par pembrolizumab seul 2 mg/kg toutes les 3 semaines pendant 24 mois au maximum, selon un schéma proche de celui rapporté dans l’étude CheckMate 067, mais avec une dose réduite d’ipili- mumab.

Le taux d’EI de grade 3-4 était de 42 % et celui des EI d’ordre immunologique de grade 3-4 de 25 % ; aucun décès n’a été rapporté au traitement. Le taux de réponse objective était de 57 %, avec 10 % de RC.

Les SSP et SG médianes n’étaient pas atteintes au moment de l’analyse.

Ces 2 études confirment l’importance de pouvoir rapidement accéder à ces combinaisons d’immuno- thérapies pour nos patients, sans toutefois résoudre l’épineux problème de leur positionnement stra- tégique au regard de la difficulté à interpréter les résultats liés à l’expression de PD-L1.

Formes rares de mélanome, associations thérapeutiques innovantes

Formes rares de mélanome

L’activité des anti-PD-1 est mal connue dans les sous- types de mélanome acral (MA) et muqueux (MM), qui représentent environ 15 % de l’ensemble des mélanomes.

Une évaluation rétrospective (Munhoz RR et al., abstr. 9516) a analysé les données de patients atteints de MA (n = 25) et de MM (n = 35) pour mesurer le taux de réponse objective, la meilleure réponse observée, la SSP et la SG. La moitié des patients présentaient un mélanome de stade IV M1c, dont 15 % avec des métastases cérébrales, 85 % des patients étaient prétraités, dont 77 % par ipilimumab. Le traitement anti-PD-1 était le pembrolizumab dans 67 % des cas et le nivolumab dans 23% des cas.

Le taux de réponse objective était de 32 % dans le MA et de 23 % dans le MM. La médiane de SSP était de 4,1 et 3,9 mois dans le MA et le MM, respec- tivement. La SG médiane était de 31,7 mois dans le MA et de 12,4 mois dans le MM. Avec un suivi médian de 10,7 mois, la SG pour la cohorte entière était de 16,8 mois. Ces données documentent l’acti vité thérapeutique des anti-PD-1 dans le MA et le MM. Les réponses rapportées ici semblent comparables à celles constatées dans le mélanome cutané, en gardant à l’esprit les biais liés au faible effectif et au schéma rétrospectif de cette analyse, qui justifieraient une évaluation de meilleure qualité méthodologique.

Les résultats rapportés dans les mélanomes uvéaux sont décevants. Une étude (Tsai KK et al., abstr. 9507) a évalué l’efficacité des inhibiteurs de PD-1 sur les formes avancées de mélanome uvéal. Cette forme rare de mélanome se distingue du mélanome cutané par des mutations différentes, une charge mutation- nelle plus faible (alors que ce critère semble associé à la réponse aux inhibiteurs de checkpoints) et, peut- être, un environnement immunologique spécifique.

Une analyse rétrospective multicentrique a inclus 58 patients traités soit par nivolumab, soit par pembrolizumab, soit par atézolizumab (un inhibiteur de PD-L1). Les patients étaient en bon état général (ECOG 0-1 : 83,9 %) à l’inclusion, avec un taux de LDH élevé (> N : 71,4 %) et avaient reçu au moins 1 ligne de traitement avant l’inhibiteur de PD-1 ou de PD-L1 (85,8 %). Sur les 56 patients évaluables, 48 présentaient une progression tumorale, 5 une stabilisation de la maladie et 2 une réponse partielle.

Aucune RC n’a été observée. La SSP médiane était de 2,6 mois et la SG médiane, de 7,7 mois.

Ces résultats, pour le moins décevants, ne plaident pas pour une prescription large des inhibiteurs de checkpoints dans cette indication et doivent avant tout inciter l’ensemble des cliniciens à prioriser les inclusions dans les essais cliniques pour ces patients.

Approches thérapeutiques innovantes

Les mutations de NRAS sont présentes dans environ 20 % des mélanomes. Il n’existe pas de traitement spécifique pour ces mélanomes mutés NRAS.

NEMO (Dummer R et al., abstr. 9500) est un essai randomisé en 2 bras, incluant des patients ayant un mélanome NRAS Q61 muté, avec des métastases cérébrales stables. Les patients recevaient soit du binimétinib (B), un inhibiteur de MEK, à la dose de 45 mg 2 x/j (n = 269), soit de la dacarbazine (DTIC) 1 000 mg/m

2

(n = 133). L’objectif principal était la mesure de la SSP, les objectifs secondaires évaluaient la SG, le taux de réponse globale et le taux de meil- leure réponse. Les patients avaient un taux de LDH supérieur ou égal à la normale dans 26 et 24 % des cas, un mélanome de stade IV M1c dans 70 et 64 % des cas, et avaient reçu une immunothérapie (ipili- mumab, pembrolizumab ou nivolumab) dans 21 % des 2 groupes B et DTIC, respectivement.

La SSP médiane était de 2,8 mois dans le groupe B et de 1,5 mois dans le groupe DTIC (HR = 0,62 ; IC

95

: 0,47-0,80 ; p < 0,001). L’analyse en sous-groupes préspécifiés était en faveur du groupe B dans les stades M1c avec au moins 3 sites métastatiques. De manière inattendue, les patients prétraités par une immuno- thérapie avaient une meilleure réponse que ceux non

0381_LON 381 12/07/2016 17:10:42

(9)

382 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016

Cancers cutanés

Chicago 2016

prétraités, avec une SSP dans cette sous- population de 5,5 mois dans le groupe B contre 1,6 mois dans le groupe DTIC. La différence de médiane était moindre (2,5 mois, contre 1,5 mois) chez les patients non prétraités. Le taux de réponse globale était de 15 et 7 % dans les groupes B et DTIC, respectivement.

La durée moyenne de réponse était de 6,9 mois.

Les analyses de SG n’étaient pas encore matures au moment de la présentation (11 contre 10,1 mois dans les groupes B et DTIC, respectivement).

Cette étude rapporte des résultats encore immatures, avec une efficacité en demi-teinte pour cet inhibiteur de MEK dans le mélanome NRAS muté. L’augmen- tation de la réponse chez les patients prétraités par immunothérapie était inattendue et suggère une modification de l’écologie tumorale induite par les inhibiteurs de checkpoints qui pourrait favoriser la réponse thérapeutique aux thérapies ciblées.

Les ressources thérapeutiques potentiellement effi- caces pour les mélanomes non mutés BRAF V600 se limitent actuellement aux inhibiteurs de checkpoints immunologiques. Une étude de phase I (Frankel AE et al., abstr. 9527) s’est intéressée à une combinaison théra- peutique inédite associant le tramétinib (inhibiteur de MEK, 2 mg/j) à la digoxine (0,25 mg/j) !

Le modèle a été établi en criblant une librairie de 200 000 molécules sur des modèles de lignées cellu- laires et de PTX murins. Au total, 20 patients ont été inclus dans cette étude qui ne montrait pas de signal de toxicité limitante (principaux EI attribuables au tramétinib : rashs acnéiformes, diarrhées, nausées).

Les signaux d’efficacité observés plaidaient pour une extension du programme d’évaluation (taux de contrôle de la maladie : 11/18 patients évaluables, dont 4 réponses partielles et 7 maladies stables).

L’efficacité semblait assez logiquement meilleure dans le sous-groupe des patients porteurs d’un mélanome NRAS muté (taux de contrôle à 4/5 contre 7/13 pour les patients NRAS non muté).

L’association de l’interféron (IFN) aux inhibiteurs de PD-1 est une approche suggérée par les connaissances sur le PD-L1, dont l’expression est inductible sur les cellules cibles sous la dépendance de la sécrétion paracrine d’IFN par les lymphocytes après leur activa- tion. Une étude de phase I/II de tolérance et sécurité a évalué cette association chez 24 patients atteints d’un mélanome avancé (Davar D et al., abstr. 9539).

Les patients recevaient du pembrolizumab à la dose de 2 mg/kg toutes les 3 semaines et de l’IFN pégylé (PEG-IFN) à la dose de 1 à 3 µg/ kg/sem. Cette asso- ciation ne s’est pas révélée comporter de toxicité limitante, mais cumulait les EI de chacune des molé- cules (fatigue, cytopénies hématologiques, nausées,

dysthyroïdies). Le schéma de dose final retenu pour la cohorte d’extension associait pembrolizumab 2 mg/ kg toutes les 3 semaines au PEG IFN 3 µg/kg/sem. Les taux de réponse objective rapportés semblaient comparables à ceux observés avec les inhibiteurs de PD-1 administrés seuls (38 %). Une cohorte d’exten- sion est en cours, et ces données devront faire l’objet d’une confrontation avec les monothérapies anti-PD-1 et, surtout, avec les associations d’inhibiteurs de PD-1 et de CTLA-4, en tenant compte de l’expression de PD-L1, qui pourrait, dans cette situation, se révéler un outil pertinent, ce biomarqueur étant théoriquement inductible par l’IFN.

Carcinomes basocellulaires

Mise à jour des données d’efficacité des études STEVIE, BOLT et résultats initiaux de l’étude MIKIE

L’étude STEVIE est une très vaste étude ouverte de tolérance et d’efficacité du vismodégib pour le trai- tement du carcinome basocellulaire (CBC) avancé ou métastatique (Hansson J et al., abstr. 9532), qui a fait l’objet d’une première publication en 2015 (9). Au total, 1 215 patients ont été inclus et ont fait l’objet d’une analyse finale dans cette présentation. L’objectif principal était la tolérance, les objectifs secondaires, le taux de réponse (évaluation par l’investigateur et revue centralisée), le délai de réponse et sa durée, la SSP, la SG et la qualité de vie. Cette analyse finale n’a pas mis en évidence de modification du profil de tolérance de la molécule, les principaux EI restant les crampes musculaires (66,4 %), les troubles gustatifs (dysgueusie et agueusie : 72,1 %) et l’alopécie (61,5 %).

La SSP médiane était de 22,1 mois (plus courte dans le sous-groupe des CBC métastatiques : 13,1 mois).

Parmi les patients atteints d’un CBC avancé, 33,4 % ont présenté une RC contre seulement 4,8 % de ceux atteints d’une forme métastatique ; pour un taux global de contrôle de la maladie de 92,9 % (évaluation par l’investigateur). Cette analyse finale confirme l’efficacité du vismodégib pour le traitement des CBC avancés et/ou métastatiques, sans modifier les données de tolérance antérieurement rapportées.

BOLT a étudié un autre inhibiteur de SMO, le sonidégib.

Il s’agit d’une étude de phase II comparant l’efficacité et

la tolérance de 2 dosages de la molécule (200 mg/j et

800 mg/j), dont les résultats initiaux ont déjà fait l’objet

d’une publication (10). Une mise à jour des résultats

avec un recul de 30 mois a été présentée lors de ce

congrès (Dummer R et al., abstr. 9538). Au moment

(10)

La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016 | 383

DOSSIER

Bras A

Bras B 12 sem.

vismodégib 8 sem.

placebo 12 sem.

vismodégib 8 sem.

placebo 12 sem.

vismodégib 8 sem.

placebo 12 sem.

vismodégib

24 sem.

vismodégib 8 sem.

placebo 8 sem.

placebo 8 sem.

vismodégib 8 sem.

placebo 8 sem.

vismodégib 8 sem.

vismodégib R

1:1 CBC multiples (n = 229)

CBC : carcinomes basocellulaires.

stratifiés par :

• syndrome de Gorlin (O/N)

• région (Europe/Amérique)

• immunosuppression (O/N)

S1 S73

Suivi de 52 sem.

72 sem.

Figure 8. Étude MIKIE : schéma (d’après Rogers G et al., abstr. 9509, actualisé).

de l’analyse, la durée médiane d’exposition au traite- ment était de 11 mois dans le groupe 200 mg et de 6,6 mois dans le groupe 800 mg. Le taux de réponse globale des CBC avancés était de 56 % (200 mg) et de 45 % (800 mg). La durée médiane de la réponse était de 23 mois, et la SSP médiane, de 22 mois. Le profil des EI n’était pas modifié, qualitativement comparable à celui du vismodégib, leurs incidences ne pouvant pas être formellement comparées en l’absence de confron- tation directe des molécules.

MIKIE (Rogers G et al., abstr. 9509) est une étude visant à analyser l’efficacité et la tolérance du vismo- dégib administré selon 2 schémas intermittents diffé- rents (figure 8) dans une population de 229 patients atteints de CBC multiples (syndrome de Gorlin inclus).

L’évaluation n’a pas montré de différence signifi- cative en termes de tolérance entre les 2 schémas thérapeutiques, les profils d’EI étant similaires et tout à fait comparables à ceux observés dans l’étude STEVIE rapportée ci-avant. Le schéma A semblait plus efficace que le schéma B. En l’absence d’amé- lioration significative du profil de tolérance, la pres- cription du vismodégib selon ces schémas alternés ne semble pas à privilégier, mais ces résultats sont rassurants pour le clinicien amené à prendre en charge des patients atteints de CBC multiples chez qui la mauvaise tolérance de la molécule impose des interruptions thérapeutiques itératives.

Résistances aux inhibiteurs de SMO La résistance aux inhibiteurs de SMO chez les patients atteints de CBC avancé et/ou métastatique

constitue un défi thérapeutique, et la caractérisation de ces patients est nécessaire. Une publication de 2015 suggérait le rôle des mutations SMO dans ces tumeurs (11). Une présentation au congrès améri- cain en oncologie clinique cette année s’est atta- chée également à la caractérisation de ces tumeurs (Basset-Seguin N et al., abstr. 9562), en faisant la distinction entre résistances primaires et résistances secondaires. Au total, 47 patients ont été extraits d’une série de 207 patients, dont 10 cas de résistance primaire, 19 cas de stabilité de la maladie sous trai- tement et 18 cas de résistance secondaire (définie par la reprogression ou l’apparition d’un CBC sous traitement par vismodégib). Les résistances primaires restaient porteuses de mutations Hedgehog, mais avaient un comportement plus agressif, alors que les maladies stables et les résistances secondaires présentaient préférentiellement un comportement plus indolent avant l’instauration du traitement.

Carcinome à cellules de Merkel

Inhibiteurs de checkpoints immunologiques

Les options thérapeutiques sont limitées dans le carcinome à cellules de Merkel (MCC). Les chimio- thérapies cytotoxiques donnent des taux de réponse élevés, mais de courte durée (< 6 mois). Il a récem- ment été rapporté que l’inhibition de PD-1 permet- tait une réponse thérapeutique dans le MCC (12).

Ce cancer se situe à l’intersection de plusieurs critères réputés associés à la réponse aux anti-PD-1/

0383_LON 383 12/07/2016 17:10:42

(11)

384 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 7 - juillet 2016

Cancers cutanés

Chicago 2016

PD-L1 : l’induction par un virus (le MCPyV), la forte charge mutationnelle et l’expression tumorale de PD-L1. Le virus MCPyV (Merkel Cell Polyoma Virus) serait responsable d’une défaillance immunitaire spécifique avec un infiltrat lymphocytaire CD8+

non efficient.

Le travail de H. Kaufman et al. (abstr. 9508) est une étude prospective, ouverte, de phase Ib, menée chez des patients atteints d’un MCC de stade IV métastatique, immunocompétents, ECOG 0 ou 1.

Les patients recevaient l’avélumab 10 mg/kg toutes les 2 semaines, jusqu’à progression ou toxicité inacceptable. Le critère principal était la meilleure réponse globale, et les critères secondaires, la durée de réponse, la SSP et la SG. Quatre-vingt- huit patients ont été inclus : 75 % avaient plus de 65 ans, 75 % étaient des hommes et 53 % avaient des métastases viscérales. Parmi les patients, 60 %, 30 % et 10 % avaient été prétraités avec 1, 2 ou 3 lignes antérieures de traitement. PD-L1 était exprimé dans 66 % des cas et le MCPyV était identifié dans 52 % des cas.

Le taux de réponse globale était de 31,8 %, dont 9 % de RC et 23 % de réponse partielle. La maladie

était stable dans 10 % des cas et progressait dans 36 %. Vingt pour cent des patients étaient non évaluables (pour cause de progression clinique non confirmée). La durée avant constatation de la réponse était de 6 semaines, avec une médiane de réponse non atteinte. La SSP était de 2,7 mois et la SG de 11,3 mois. Le taux de réponse n’était influencé ni par le statut ECOG, ni par l’expression du virus ou de PD-1/PD-L1, ni par le nombre de lignes anté- rieures. L’avélumab a été globalement bien toléré dans une population âgée, en deuxième ligne de traitement.

L’efficacité des anti-PD-1 dans le MCC est en train de changer le traitement de cette tumeur. Dans cette population, le principal défi réside dans la capacité du traitement à induire une réponse durable, là où les réponses aux chimiothérapies sont de courte durée.

Les résultats de cette étude et ceux de celle de P.T. Nghiem et al. (12) alimentent la réflexion sur le mode d’action des inhibiteurs de checkpoints immunologiques, cette tumeur pouvant être consi- dérée comme un modèle théorique de tumeur

sensible à l’immunothérapie. ■

1. Larkin J, Ascierto PA, Dréno B et al. Combined vemurafenib and cobimetinib in BRAF-mutated melanoma. N Engl J Med 2014;371(20):1867-76.

2. Long GV, Stroyakovskiy D, Gogas H et al. Combined BRAF and MEK inhibition versus BRAF inhibition alone in melanoma. N Engl J Med 2014;371(20):1877-88.

3. Long GV, Stroyakovskiy D, Gogas H et al. Dabrafenib and trametinib versus dabrafenib and placebo for Val600 BRAF-mutant melanoma: a multicentre, double-blind, phase 3 randomised controlled trial. Lancet 2015;386(9992):444-51.

4. Ascierto PA, Kirkwood JM, Grob JJ et al. The role of BRAF V600 mutation in melanoma. J Transl Med 2012;10:85.

5. Pavlick AC, Ribas A, Gonzalez R et al. Extended follow-up results of phase Ib study (BRIM7) of vemurafenib (VEM) with cobimetinib (COBI) in BRAF-mutant melanoma.

ASCO

®

2015 : abstr. 9020.

6. Robert C, Ribas A, Wolchok JD et al. Anti-program- med-death-receptor-1 treatment with pembrolizumab in ipilimumab-refractory advanced melanoma: a rando- mised dose-comparison cohort of a phase 1 trial. Lancet 2014;384(9948):1109-17.

7. Robert C, Schachter J, Long GV et al. Pembrolizumab versus ipilimumab in advanced melanoma. N Engl J Med 2015;372(26):2521-32.

8. Larkin J, Chiarion-Sileni V, Gonzalez R et al. Combined nivolumab and ipilimumab or monotherapy in untreated melanoma. N Engl J Med 2015;373(1):23-34.

9. Basset-Seguin N, Hauschild A, Grob JJet al. Vismodegib in patients with advanced basal cell carcinoma (STEVIE): a pre-planned interim analysis of an international, open-label trial. Lancet Oncol 2015;16(6):729-36.

10. Migden MR, Guminski A, Gutzmer R et al. Treatment with two different doses of sonidegib in patients with locally advanced or metastatic basal cell carcinoma (BOLT): a multicentre, randomised, double-blind phase 2 trial. Lancet Oncol 2015;16(6):716-28.

11. Brinkhuizen T, Reinders MG, van Geel M et al. Acquired resistance to the Hedgehog pathway inhibitor vismodegib due to smoothened mutations in treatment of locally advanced basal cell carcinoma. J Am Acad Dermatol 2014;71(5):1005-8.

12. Nghiem PT, Bhatia S, Lipson EJ, Kudchadkar RR, Miller NJ, Annamalai L et al. PD-1 blockade with pembrolizumab in advanced Merkel-cell carcinoma. N Engl J Med 2016. [Epub ahead of print]

Références bibliographiques

N. Meyer déclare avoir des liens

d’intérêts avec Amgen, BMS, GSK,

MSD, Novartis, Pierre Fabre et

Roche (investigateur et/ou orateur

et/ou consultant).

Références

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