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Traitement de la lésion primitive chez les patients ayant un adénocarcinome de la prostate d'emblée métastatique

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Correspondances en Onco-Urologie - Vol. VII - n° 3 - juillet-août-septembre 2016 142

d o s s i e r

Prises en charge locales des tumeurs métastatiques

Traitement de la lésion

primitive chez les patients ayant un adénocarcinome

de la prostate d’emblée métastatique

Treatment of the initial tumor for patients having distant metastatic prostate cancer at diagnosis

A. Escande*, A. Bossi*

* Département de radiothérapie, institut Gustave-Roussy, Villejuif.

A

vec près de 9 000 décès par an, le cancer de la prostate représente la troisième cause de décès par cancer chez l’homme en France, selon l’Institut national du cancer. Représentant entre 10 et 20 % de la population prise en charge pour un cancer de la prostate, les patients d’emblée métastatiques au diagnostic sont au cœur de plusieurs essais, et l’inter- rogation concernant le traitement local de la tumeur initiale est une des pistes de recherche actuelle (1-3).

Plusieurs autres localisations tumorales ont montré des résultats prometteurs, et il semble légitime de se poser la question pour cette maladie lentement évolutive et souvent oligométastatique. Actuellement, les taux de survie publiés sont faibles, avec moins de 30 % de

survie à 5 ans sous hormonothérapie. Nous proposons ici une revue de la littérature portant sur le rationnel de cette stratégie et les résultats obtenus.

Rationnel scientifique

Dans le cancer du côlon, le traitement local de la lésion primitive associé à celui des métastases hépatiques synchrones est devenu un standard (plus de 30 % de rémissions). On retrouve également plusieurs études prometteuses dans d’autres localisations, notamment le cancer du sein, du rein et de l’ovaire. Selon les hypo- thèses de modélisation de l’histoire carcinologique,

Poin ts for ts highligh ts

»

Le cancer de la prostate métastatique représente un véritable enjeu de santé publique. Actuellement, sa prise en charge stan- dard se fait par un traitement médicamenteux (hormonothérapie ou taxanes).

»

Le traitement de la lésion primitive est l’une des voies de recherche actuelles.

»

Fort d’un rationnel scientifique puissant et séduisant, des résul- tats sont déjà retrouvés dans d’autres localisations comme le cancer du rein. À ce jour, les données proviennent principalement d’études rétrospectives analysant l’ensemble des traitements locaux, prostatectomie, résection transurétrale de la prostate ou radiothérapie. Elles retrouvent un bénéfice significatif sur la survie globale par le contrôle local de la maladie primitive.

»

Grâce à ces résultats prometteurs, plusieurs études prospectives sont en cours, ce qui pourrait amener à un changement de paradigme dans les années à venir.

Mots-clés : Prostate − Traitement local − Métastases.

Prostate cancer with metastasis at presentation is a very important public health research topic with a significant (high) number of cases per year, because of the ageing of the Western population (and the lack of population screening). As hormonotherapy and taxane chemotherapy regimen are the only 2 validated strategies, local treatment for prostate is under evaluation in this clinical scenario (case for many reasons).

Thanks to a strong scientific rationale, by reducing the proli- feration signal, circulating tumor cells and the rate of “second waves” of metastases dissemination, this strategy seems to show high benefits for other types of cancer such as kidney cancer.

Only few data from nearly exclusively retrospective studies are currently available showing an improvement in overall survival for patients with local treatment of the prostate, and many prospective studies are ongoing to evaluate this strategy. It could be the next shift paradigm is this cancer.

Keywords: Prostate − Local treatment − Metastases.

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Traitement de la lésion primitive chez les patients ayant un adénocarcinome de la prostate d’emblée métastatique

il y aurait plusieurs avantages à un traitement local de la tumeur primitive, même après dissémination. Selon le modèle de Paget du “seed and soil”, la dissémination tumorale métastatique est encadrée, entre autres, par différents facteurs sécrétés par la tumeur initiale. Dans le cas du cancer de la prostate, on retrouve une sécrétion pro tumorale de testostérone. Une ablation de la lésion primitive devrait logiquement se traduire par une baisse de la testostéronémie et donc par une amélioration du contrôle à distance (4). Le traitement local permettrait également de diminuer les cellules tumorales circu- lantes et donc de limiter la vitesse de prolifération de la dissémination (5). Enfin, il existe une interrogation sur la possibilité de créer un effet abscopal initié par une irradiation sur la lésion initiale grâce à l’activation du système immunitaire par le relargage d’antigènes tumoraux (6). Le cancer de la prostate localement avancé avec envahissement ganglionnaire peut représenter un stade précoce de la maladie disséminée au stade micrométastatique. Pourtant, le traitement local par radiothérapie associée à l’hormonothérapie permet une amélioration de la survie par rapport à un traitement par hormonothérapie seule (7). De même, la chirurgie semble augmenter la survie chez les patients présentant un cancer localement avancé, probablement en dimi- nuant le risque de persistance locale, associée de manière significative à un risque de progression métastatique (8).

Modèle animal

Dans le cancer de la prostate, une étude de F.F. Cifuentes et al., publiée en 2015 (9), a montré un bénéfice pour la survie sans progression métastatique : des souris présen- tant un cancer de la prostate métastatique étaient traitées par tumorectomie de la lésion primitive, avec un avantage sur la vitesse de croissance des lésions à distance.

Résultats cliniques

dans le cancer de la prostate

Plusieurs études ont porté sur ce sujet.

L’étude de X.J. Qin et al., publiée dans Urologic Oncology en 2012 (10), portait sur 146 patients atteints d’un cancer de la prostate d’emblée métastatique et traités par résection transuréthrale.

L’étude sur la cohorte du SEER entre 2004 et 2010, publiée dans European Urology en 2013 (11), analysait le devenir de 8 185 patients souffrant d’un cancer de la prostate métastatique, dont 245 avaient eu une pros- tatectomie radicale et 129 une curiethérapie.

La deuxième étude sur la cohorte du SEER, publiée dans Journal of Urology en 2015 (12), étudiait

4 069 patients avec un cancer de la prostate méta- statique et traités par prostatectomie radicale (n = 47), par radiothérapie avec modulation d’intensité (n = 88) et, enfin, par radiothérapie 3D conformationnelle (n = 107).

L’étude de P. Sooriakumaran et al., multicentrique rétrospective, européenne et américaine, publiée dans European Urology en 2015 (13), analysait 106 patients entre 2007 et 2014, traités par prostatectomie radicale et curage ; elle portait principalement sur la tolérance.

L’étude de Y. Cho et al., publiée dans PLOS ONE en 2016 (14), a étudié un groupe de 140 patients présen- tant un cancer de la prostate métastatique au diag- nostic, dont 38 avaient reçu une radiothérapie localisée sur la prostate pouvant être purement palliative (30 Gy) ou curative (76 Gy).

Population

Avec une population âgée de moins de 70 ans dans la plupart des études, on retrouve souvent des patients sélectionnés drastiquement présentant un bon état général (10-14). Seule l’étude de Y. Cho et al. (14) s’attachait à une population comprenant un pourcen- tage élevé (55 %) de patients âgés de plus de 70 ans.

Tumeurs

La plupart des patients présentaient des métastases osseuses, mais non exclusivement, dans le cadre d’une maladie oligométastatique (10-14). Ainsi, dans l’étude de Y. Cho et al. (14), plus de 40 % des sujets avaient au moins 5 métastases osseuses. L’étude de S.H. Culp et al. (11), pour sa part, évaluait la stratégie dans une cohorte avec environ 30 % de patients présentant une métastase viscérale.

Survie

L’étude de P. Sooriakumaran et al. (13) montre une tolérance similaire au traitement local de la lésion pri- mitive quel que soit le statut métastatique. On observe d’excellents résultats, avec une augmentation statis- tiquement significative de la survie globale (SG) et de la survie sans progression mais également de la durée de l’hormono-sensibilité (10-14). En effet, on retrouve respectivement une SG de 80 % à 2 ans, 60 % à 3 ans, et plus de 50 % à 5 ans. Ces résultats sont largement supérieurs à ceux constatés chez les patients méta- statiques sans traitement local de la lésion primitive.

Il faut noter que les sujets pouvaient bénéficier d’un traitement par hormonothérapie, qu’ils soient ou non pris en charge localement. Le tableau (p. 144) résume le traitement local de la prostate et les résultats. La figure (p. 144) montre la SG dans l’étude de R. Satkunasivam et al. (12), selon le traitement local.

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Prises en charge locales des tumeurs métastatiques

Facteurs pronostiques

Une dissémination viscérale, un stade et un grade tumo- raux élevés, un taux de PSA supérieur à 20 ng/ ml, un âge de plus de 70 ans et un mauvais état général sont corrélés à une moins bonne survie (10, 14). L’étude de N. Fossati et al. (15), analysant la cohorte du SEER, montre que l’ensemble des caractéristiques de la maladie locale est prédictif de la survie même dans le cas d’un traitement local d’une maladie métastatique.

Il faut noter que, dans l’étude de R. Satkunasivam et al. (12), les patients traités par la technique de radio- thérapie conformationnelle 3D avaient une moins

bonne survie que ceux traités par prostatectomie ou radiothérapie avec modulation d’intensité, mais avec un probable biais sur le type de stratégie (curative ou palliative) utilisée selon la technique.

Limites

En dehors des limites habituelles, consécutives à la méthodologie des cohortes rétrospectives, il existe de multiples biais. Les études rapportées ici présentent de nombreux biais de population. Ainsi, la plupart des patients souffraient d’une maladie oligométastatique, peu agressive, avec un âge jeune et un état général conservé. Les traitements réalisés sont souvent peu détaillés, ainsi que les combinaisons avec les hormono- thérapies, mais également les traitements par taxanes ou les hormonothérapies de deuxième génération, qui modifient la prise en charge de la maladie métastatique.

Conclusion

Le traitement des adénocarcinomes métastatiques de la prostate est en plein bouleversement avec le développement des nouvelles hormonothérapies et chimiothérapies. Avec plusieurs études rétrospectives présentant des résultats prometteurs et un rationnel intellectuel puissant, le traitement local de la maladie initiale est une des voies de recherche actuelles pour l’amélioration de la SG. Néanmoins, seuls des résultats rétrospectifs et présentant des patients très sélectionnés sont publiés. Actuellement, 3 importantes études sont en cours de recrutement pour évaluer cette stratégie :

l’étude HORRAD évalue le bénéfice d’une radio- thérapie locale associée à une hormonothérapie chez des patients avec métastases osseuses uniquement ;

l’étude STAMPEDE teste cette stratégie pour l’ensemble des patients M1 ;

l’étude PEACE1 évalue l’association hormonothérapie- radiothérapie combinée ou non avec l’abiratérone.

Nous avons peut-être la chance d’être à l’aube d’un changement de paradigme dans la prise en charge des cancers de la prostate métastatiques au diagnostic. ■ Tableau. Modalités du traitement local et survie.

Étude Patients

(n) RT PR SG

X.J. Qin et al. (10) 146 146+ > 80 % vs > 60 % à 2 ans

S.H. Culp et al. (11) 349 129 245 52-67 % à 5 ans vs 22 %*

R. Satkunasivam et al. (12) 242 195 47 72-73 % à 3 ans*

P. Sooriakumaran et al. (13) 106 106 88,7 % à 2 ans*

Y. Cho et al. (14) 140 38 69 % à 3 ans vs 43 %*

RT : nombre de patients traités par radiothérapie externe ou curiethérapie ; PR : nombre de patients traités par prostatectomie radicale ;

+ Résection transuréthrale de prostate ; * Si SG statistiquement significative entre les groupes avec et sans traitement locaux.

Figure. Survie globale (courbe de Kaplan-Meier) selon le traitement local (12).

100 75 50 25

0

Temps depuis le diagnostic (ans) 0

(%)

Prostatectomie radicale

1 2 3 4 5

Radiothérapie par modulation d’intensité Radiothérapie 3D

Absence de traitement local

A. Escande déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.

A. Bossi n’a pas précisé ses éventuels liens d’intérêts.

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Prises en charge locales des tumeurs métastatiques

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