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Nouvelles perspectives dans la lutte contre les disparitions forcées

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Academic year: 2022

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Nouvelles perspectives dans la lutte contre les disparitions forcées

BOISSON DE CHAZOURNES, Laurence

BOISSON DE CHAZOURNES, Laurence. Nouvelles perspectives dans la lutte contre les disparitions forcées. S.O.S Torture , 1989, no. 19, p. 4-5

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:42315

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S.O.S. TORTUREe S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTUREe

NOUVELLES PERSPECTIVES DANS LA LUTTE CONTRE LES DISPARITIONS FORCEES

La décision rendue le 6 jufllet 1988 par la Cour du District Nord de Californie marque une étape très

importante pour la protection des droits de l'homme, et plus spécifiquement pour la lutte contre les disparitions forcées (1).

En effet, la Cour du District Nord de Californie a admis qu'une action pouvait être intentée devant une juridiction

américaine contre l'auteur d'une disparition forcée commise dans un autre Etat. La Cour a motivé sa décision en considérant qu'un tel comportement-

constitue une

violation d'une règle de droit international qui lie tous les Etats.

4 • MAl-JUIN 1989

Laurence Boisson de Chazournes

Les plaignants, deux citoyens ar- gentins résidant aux Etats-Unis, avaient intenté une action en réparation contre M. Suarez-Ma- son, un général argentin, pour des faits commis pendant la deuxième partie des années 70, à l'époque où les militaires étaient au pouvoir en Argentine. Les faits reprochés à M. Suarez-Masan étaient les sui- vants : en 1977, Mme Forti et ses cinq fils (l'un des plaignants était l'un des fils) furent arrêtés par des agents des forces de police et des forces militaires, placés sous le contrôle et la direction de M.

Suarez-Masan et incarcérés dans un centre de détention. La famille fut séparée six jours plus tard, les cinq fils furent relâchés dans une rue de Buenos Aires alors que Mme Forti n'était pas libérée ; elle a disparu depuis ce jour-là. Les fils sont restés sans aucune nouvelle de leur mère, bien qu'ils aient vainement tenté de la retrouver par toutes les voies qui leur étaient accessibles. La réponse du gou- vernement argentin a été invaria- blement la même : ce dernier refusait d'admettre ou de nier le fait que Mme Forti ait été enlevée ou qu'elle soit emprisonnée.

Devant la Cour du District Nord de Californie, les plaignants fondèrent leur action en réparation contre M.

Suarez-Masan sur une loi fédérale dénommée the« Alien Tort Sta- tute ». La Cour admit que des actes internationalement illicites (« international torts ))) pou- vaient être poursuivis sur la base de cette loi fédérale s'ils pouvaient être qualifiés de violations de règles de droit international coutu- mier. Elle précise qu'aux fins de cette loi fédérale pour qu'une règle puisse être considérée comme

appartenant au droit international coutumier, elle devait faire l'objet d'un consensus universel au sein de la communauté internationale tant en ce qui concerne sa force juridique que son contenu.

Dans un premier temps, la Cour rejeta la requête car elle considéra que les plaignants n'avaient pas suffisamment démontré que les normes internationales prohibant les disparitions forcées1 faisaient l'objet d'un consensus universel qui permettrait de considérer ces règles comme appartenant au droit international général. Elle re- jeta aussi la requète des plaignants pour « traitement cruel, inhumain et dégradant »/ à la fois pour le motif que le degré de consensus international de la norme prohi- bant un tel comportement n'avait pas suffisamment été démontré,et parce que le contenu de cette règle était trop vague et manquait de critères précis pouvant permet- tre d'apprécier si la r.ègle avait fait l'objet d'une violation.

Les plaignants firent appel et obtinrent satisfaction sur un point mais non sur l'autre (2). La Cour du District Nord de Californie précise à cette occasion qu'elle n' atten- dait pas des plaignants qu'ils démontrent l'unanimité des Etats en ce qui concerne l'interdiction d'un comportement spécifique. La démonstration de l'existence d'un consensus général à propos de telle ou telle règle fut considérée suffisante. L'invocation de nom- breuses résolutions et rapports des organes compétents des Na- tions Unies ainsi que de l' Organi- sation des Etats Américains, con- duisit la Cour à admettre l'exis- tence d'une norme de droit

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TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTU HE • S.O.S. TOIHURE • S.O.S. TORTURE • S.O.S. TORTUREe S.O.S. TORTURE •

international coutumier con- damnant les pratiques de dis- paritions forcées.

Afin de pouvoir qualifier de tels comportements, elle retint deux éléments:

1) un enlèvement imputable à des agents officiels de l'Etat ou à des personnes agissant sur or- dre de ces derniers ;

2) le refus de ces agents officiels de reconnaître qu'il y a eu enlèvement ou de révéler le sort réservé à la personne disparue.

Elle reconnut alors que la requête qui avait été déposée démontrait l'existence de ces deux éléments et donc qu'une action judiciaire pouvait être engagée contre M.

Suarez-Masan.

En revanche, la Cour du District Nord de Californie considéra qu'une action sur la base de l' « Alien Tort Statute » pour traitements cruels, inhumains ou dégradants, n'était pas recevable.

Le motif invoqué fut qu'il ne pouvait être démontré qu'il y avait un consensus de la communauté internationale quant au contenu de cette norme.

Elle conclut qu'une plainte invo- quant seulement une violation de la norme prohibant la torture serait recevable sur la base de l' « Alien Tort Statute », ce qui ne serait être le cas pour une plainte invo- quant une violation de la norme prohibant « des actes de torture ou des traitements cruels, inhu- mains ou dégradants ». Sur ce second point, le raisonnement de la Cour du District Nord de Califor- nie de même que ses conclusions sont très critiquables. En effet, ainsi que les plaignants l'ont dé- montré, les traitements cruels, inhumains ou dégradânts sont interdits par le droit international coutumier.

La pratique amencaine est à cet égard révélatrice : les rapports annuels sur le droit de l'homme du Département d'Etat des Etats- Unis condamnent également la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants. Des

décisions rendues par des juridic- tions fédérales américaines ont aussi reconnu que l'interdiction de commettre des traitements cruels, inhumains ou dégradants relevait du droit international coutumier et · donc qu'une action pouvait être engagée sur cette base (3).

Sur le plan de la lutte contre les disparitions forcées, la décision Forti and Benchoam v. Suarez- Masan est une décision d'une grande importance car elle a cons- taté que la pratique des dispari- tions forcées, déjà condamnable sur le plan du droit conventionnel, est prohibée par le droit internatio- nal coutumier et donc que cette interdiction est opposable à tous les Etats. Un Etat qui n'aurait pas ratifié le Pacte international sur les droits civils et politiques (tel est le cas des Etats-Unis) est tout de même lié par cette obligation en droit international général.

qu'une ONG selon les cas) a la possibilité d'invoquer devant une juridiction interne la violation d'une norme de droit international des droits de l'hommme. Une générali- sation de cette pratique de recours aux procédures de droit interne contribuerait sans aucun doute à renforcer la lutte contre les viola- tions des droits de l'homme.

(1) Forti and Benchoam v. Suarez- Masan, United States District Courf, Northern District of California, Memo- randum opinion and arder regarding motion ·for reconsideration, C-87 -2058-DLJ.

(2) Leur requète fut notamment appuyée par huit affidavits dont les auteurs étaient des professeurs de droit inter- national renommés.

Cette décision a aussi permis de montrer qu'un individu (de même

(3) De Sanchez v. Banco Central de Nicaragua, 770 F. 2d 1385, 1397 (5th Cir. 1985): Guinto v. Marcos, 654 F.

Su pp.

SUIVI DU CAS TUR 130489 du 13 avril 1989

Selon des informations reçues d'Amnesty International, M.

Huseyin Gencer UCAR a été libéré. Nous vous avions demandé d'intervenir en sa faveur à la demande de I'ACAT-Suisse (voir cas TUA 130489, du 13 avril 1989).

M. Gencer UCAR. qui s'était réfugié en Suisse pendant 5 ans avait décidé de retourner dans son pays d'origine à la suite des déclarations du gouvernement turc qui l'autori- saient à y aller librement.

A son arrivée à l'aéroport d'lstamboulle 9 avril dernier, il a cependant été arrêté par la police de sécurité. Malgré une déclaration du bureau du Procureur Général affirmant qu'aucune charge établie n'était retenue contre lui, M.

UCAR n'a pas été libéré.

M. UCAR a ensuite été tenu au secret jusqu'au 14 avril. Par la suite, il a affirmé avoir été empêché de dormir durant plus de cinq jours.

Le 15 avril 1989, il a été officiellement arrêté et accusé d'être membre du parti Communiste non reconnu en Turquie.

Le 10 mai 1989, il a cependant été acquitté et relâché par la Cour Criminelle de Giresun.

Nous tenons à remercier tous les membres de notre réseau et toutes les personnes qui, par leur action, ont contribué à la libération de M. UCAR.

Genève, le 18 mai 1989

MAl-JUIN 1989 • 5

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