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Le cycle de division cellulaire et sa régulation

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Academic year: 2022

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Résumé :Le cycle de division cel- lulaire est constitué de plusieurs étapes hautement régulées et syn- chronisées. Les protéine kinases (en particulier les kinases cyclines- dépendantes) et les protéases jouent un rôle prépondérant dans le déclenchement, le déroulement et le couplage de ces étapes. Parmi les régulateurs du cycle cellulaire décrits, certains constituent la cible de produits potentiellement anti- cancéreux. Cet article passe en revue les différentes étapes du cycle cellu- laire et leur régulation.

Mots clés: Cycle de division cel- lulaire – Prolifération cellulaire – Cancer – Agents anti-mitotiques – Kinases cycline-dépendantes

The cell division cycle and its regulation

Abstract:The cell division cycle is constituted of several highly regu- lated and synchronized phases.

Protein kinases (cyclin-dependent kinases in particular) and proteases play an essential role in the initia- tion of, progression through and coupling of these phases. Among the numerous cell cycle regulators that have been described, some constitute the target of potential anti-cancer drugs. This article re- views the different phases of the cell cycle and their regulation.

Keywords:Cell division cycle – Cell proliferation – Cancer – Anti-mitotic agents – Cyclin-dependent kinases

Introduction

La division cellulaire est le proces- sus fondamental par lequel une cel- lule-mère donne deux cellules-filles identiques entre elles et à la cellule dont elles dérivent. Le « cycle cellu- laire » est essentiellement constitué de deux temps, l’interphase, au cours de laquelle les chromosomes sont répliqués, et la mitose, au cours de laquelle les chromosomes se répartissent entre les deux cellules- filles (Fig. 1). En réalité, à côté de ce cycle de division chromosomique, existent un cycle cytoplasmique, un cycle centrosomique, un cycle nucléolaire, un cycle de l’appareil de Golgi. Tous ces événements sont interdépendants et parfaite- ment couplés [11, 13, 14].

La division cellulaire est un pro- cessus essentiel au développement embryonnaire, bien entendu, mais également vital pendant toute la vie de l’organisme adulte. Ainsi l’être humain adulte est constitué de 10 000 milliards de cellules, prove- nant toutes, par divisions cellulaires successives, de la cellule initiale, l’œuf fécondé. Une fois la taille adulte atteinte, les divisions conti- nuent. Tous les jours un milliard de cellules doivent être renouvelées, pour remplacer les cellules qui sont perdues de façon continue, en par- ticulier au niveau de la peau, du tube digestif et du système hémato- poïétique. Ce mécanisme de divi- sion cellulaire est extrêmement complexe et régulé par un grand

nombre de protéines intervenant très transitoirement et dans un ordre précis, permettant ainsi la succession précise des différentes étapes du cycle cellulaire. Il arrive occasionnellement qu’une ano- malie de régulation de la division apparaisse dans une cellule en cycle. Cette anomalie peut se trans- mettre dans les cellules-filles, elle libère alors la cellule des multiples régulations qui limitent ses capa- cités de division. L’apparition de ces anomalies est favorisée par les produits cancérigènes (produits de combustion du tabac, amiante, etc.). Une fois les anomalies éta- blies, la cellule devient « cancé- reuse ». Elle va se développer libre- ment conduisant à une tumeur (1 mm de diamètre : 1 million de cellules cancéreuses ; 1 cm de dia- mètre : 1 milliard de cellules can- céreuses...), qui, par « métastase », va quitter son tissu de départ et essaimer dans tout l’organisme, entraînant des conséquences dra- matiques pour tout l’organisme. On comprend alors l’intérêt d’étudier les régulateurs de la division cellu- laire, dont les anomalies sont sou- vent à l’origine des cancers.

La division cellulaire a été découverte il y a plus de 150 ans, et a fait l’objet de très nombreuses études en raison de son caractère fondamental pour toute vie. En revanche sa régulation intracel- lulaire n’est connue que depuis quelques décennies, grâce aux tra- vaux entrepris sur des modèles

ORIGINAL

311

Le cycle de division cellulaire et sa régulation

L. Meijer

Équipe Cycle Cellulaire, CNRS, Station Biologique, F-29680 Roscoff, France

© Springer-Verlag 2003

Abréviations : AhR, aryl hydrocarbon receptor ; APC, anaphase promoting complex ; ATM, ataxia telangiectasia mutated ; ATR, ATM- and Rad3-related ; CDK, cyclin-dependent kinases ; DDK, Dbf4-dependent kinase ; MAPs, microtubule-associated proteins ; MCAK, mammalian centromere-associated kinesin ; MCM, mini-chromosome maintenance ; MDM2, murine double minute 2 ; Mps1, monopolar spindle ; MRLC, myosin regulatory light chain ; NE, nuclear envelope ; NEBD, nuclear envelope breakdown ; ORC, origin recognition complex ; PlK1, Polo-like Kinase 1 ; PIKKs, phosphatidylinositol 3-kinase-like kinases ; pre-RC, complexe pré-réplicatif ; SCF, Skp1-cullin-F-box ; Tome-1, trigger of mitotic entry.

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biologiques aussi variés que les levures, les embryons d’oursin, les ovocytes d’étoile de mer et d’am- phibiens ou les cellules de mammi- fères en culture. En effet l’extrême conservation des gènes impliqués dans la régulation du cycle cellu- laire a permis des études croisées, des échanges d’outils moléculaires.

La complémentarité d’approche et la convergence des résultats ont finalement abouti à l’établissement d’un modèle général de contrôle intracellulaire de la division. Tous ces travaux ont été couronnés par l’attribution en Octobre 2001 du Prix Nobel de Physiologie et de Médecine à trois acteurs essentiels du décryptage des mécanismes régulant le cycle cellulaire, les Bri- tanniques Tim Hunt et Paul Nurse, et l’Américain Leyland Hartwell.

Le cycle cellulaire reste un grand sujet d’études en biologie cellulaire et moléculaire comme en témoigne la dizaine d’articles publiés chaque jour dans ce domaine, les multiples applications possibles de la compréhension de la division cellulaire et, en défini- tive, l’intérêt montré par l’industrie pharmaceutique.

Les phases du cycle de division cellulaire

Lorsqu’elles ne se divisent pas les cellules sont dites en quiescence ou aussi en phase G0. Sous l’effet de signaux mitogènes, elles entament un cycle de division (Fig. 2). Le cycle cellulaire est classiquement divisé en quatre phases, G1, S, G2, M. Au cours de la phase G1 (de « Gap », intervalle), les cellules passent par le point de restriction, une sorte de point de non-retour à partir duquel le cycle est irréversiblement engagé et l’entrée en division ne dépend plus de la présence des facteurs mitogènes. La phase G1 est prépa- ratrice à la phase S au cours de laquelle l’ADN est répliqué. La phase G2 précède la phase M, ou mitose, au cours de laquelle les chromosomes dédoublés sont ré- partis dans les deux cellules-filles, grâce au fuseau de division (plan- che I). Cette phase M est classique-

ment découpée en cinq périodes : la prophase (terminée par la rup- ture de l’enveloppe nucléaire ; NEBD, « nuclear envelope break- down »), la prométaphase, la méta- phase, l’anaphase et la télophase.

La cytokinèse achève la division de la cellule. Lorsque les cellules ces- sent toute prolifération, sous l’effet de signaux anti-mitogènes ou suite à la disparition des agents mito- gènes, elles quittent le cycle cellu- laire et retournent en phase de quiescence. Ces phases se retrou- vent dans la plupart des divisions cellulaires, à l’exception notoire des premières divisions embryonnaires chez la Drosophile ou le Xénope, caractérisées par une succession rapide de phases S et M. Les quatre phases s’enchaînent de façon coor- donnée, chaque phase ne pouvant commencer que lorsque la précé- dente s’est déroulée correctement.

En effet de nombreux mécanismes

de contrôle (« checkpoints ») assu- rent une sorte de « contrôle qua- lité » à chaque étape et bloquent le déroulement du cycle lorsqu’une anomalie (endommagement de l’ADN, ADN non complètement répliqué, chromosomes non atta- chés au fuseau mitotique, par exemple) est détectée [21, 23].

Les kinases cycline- dépendantes

L’une des découvertes majeures dans le domaine du cycle cellulaire a été l’identification d’une famille de protéines kinases, les kinases cyclines-dépendantes (« cyclin- dependent kinases », CDKs). Ces protéines kinases jouent en effet un rôle essentiel dans le déclenchement, le contrôle et la succession harmo- nieuse des différentes phases du cycle. Les CDKs sont actives uni- quement sous forme d’un complexe

ONCOLOGIE

Division Cell

Cycle Mitosis Interphase

Fig. 1

Le cycle de division cellulaire. Interphase et mitose

Mitosis

replicationDNA

G2

M

G1 S

Prophase Prometaphase Metaphase Anaphase Telophase

Mitogenic signals G0

Quiescence

NEBD

Cytokinesis Restriction point

Interphase

Chromosome duplication

Fig. 2

Les phases et les événements majeurs du cycle de division cellulaire

(3)

ORIGINAL

Planche I

Les événements morphologiques de la mitose.Observation en microscopie à fluorescence de cellules PtK1 fixées au glutaraldéhyde à divers stades de la mitose puis perméabilisées et colorées. Les microtubules (rouge) ont été visualisés par des méthodes d’immunofluorescence indirecte, et les chromosomes (vert) mis en évidence par le colorant d’ADN Hoechst 33342. Échelle (I) : 10 µm.

A)Début de prophase :un centrosome proéminent accolé au noyau, dans un abondant réseau de microtubules cytoplasmiques en organisation interphasique.

B)Fin de prophase :les centrosomes sont répliqués et se sont répartis de part et d’autre du noyau. L’enveloppe nucléaire est encore intacte.

C)Rupture de l’enveloppe nucléaire et début de la pro-métaphase :les chromosomes commencent à interagir avec les centrosomes pour former un fuseau. Le cytoplasme est toujours rempli de microtubules interphasiques.

D)Pro-métaphasedans une cellule dont tous les chromosomes ne sont pas encore correctement orientés. Le fuseau est très allongé.

E)Fin de pro-métaphase :un dernier chromosome n’est pas encore aligné.

F)Métaphase :tous les chromosomes sont bien orientés et alignés à l’équateur du fuseau (plaque métaphasique).

G)Anaphase :les chromosomes se séparent vers les pôles du fuseau. Ils apparaissent jaunes car ils sont entourés d’un réseau microtubulaire dense.

H)Télophase :les chromosomes ont atteint les pôles du fuseau. Une structure microtubulaire (« mid-body ») se forme a mi-chemin entre les deux lots de chromosomes. Une constriction marque le site de la cytokinèse.

I)Fin de mitose :les deux cellules-filles produites par une division récente sont encore reliées par une structure microtubulaire (« stem body »).

(Tiré de CL Rieder & A Khodjakov, 1997. Mitosis and checkpoints that control progression through mitosis in vertebrate somatic cells. Progress in Cell Cycle Research, vol. 3, avec la permission de Plenum Press, New York).

(4)

entre une sous-unité catalytique (CDK) et une sous-unité régulatrice (cycline). D’après le séquençage du génome humain il existerait 13 CDKs et 25 cyclines, mais toutes les pos- sibilités de formation de complexes CDK/cycline ne sont pas encore connues. Par ailleurs certaines CDKs sont impliquées dans des fonctions autres que la régulation du cycle cellulaire. Par exemple, CDK5 et CDK11 ont des fonctions neuronales ; CDK7, CDK8, CDK9 jouent un rôle dans la transcription.

Schématiquement (Fig. 3), CDK4 et CDK6, associées à des cyclines de type D, régulent le déroulement de la phase G1. Puis CDK2/cycline E prend le relais pour assurer la transition G1/S, suivie par CDK2/

cycline A qui assure le contrôle de la phase S. CDK1/cycline A inter- vient en G2, CDK1/cycline B régule la transition G2/M et l’entrée en mitose.

Quatre niveaux de régulation contribuent à l’activité transitoire de ces CDKs :

– l’assemblage transitoire des complexes CDKs/cyclines, lié à une durée de vie des cyclines générale- ment courte (succession rapide de synthèse, d’interaction avec une CDK, de dégradation ubiquitine- dépendante) (Fig. 3) ;

– des modifications post-tra- ductionnelles – essentiellement des phosphorylations/déphosphoryla- tions (Fig. 4) – conduisant à l’acti- vation ou à l’inactivation des CDKs.

Ainsi les CDKs sont phosphorylées sur deux résidus adjacents (Thréo- nine-14 et Tyrosine-15 pour CDK1) situés au bord de la poche de fixa- tion de l’ATP. Cette phosphoryla- tion inhibitrice est levée par une famille de phosphatases très parti- culières, les phosphatases CDC25 A, B, C. En revanche la phosphory- lation d’un résidu situé sur la

« boucle T », Thr161 pour CDK1, est essentielle à l’activation des CDKs.

Cette phosphorylation est catalysée par CDK7 associé à la cycline H et un co-facteur, Mat1 ;

– des associations transitoires avec des inhibiteurs protéiques (Fig. 5). Il en existe deux types, la famille INK4, dont les membres

ONCOLOGIE

G2

M

G1 S

CDK4-6 Cyclin D

CDK1 Cyclin A CDK2

Cyclin A

CDK2 Cyclin E

CDK1 Cyclin B

Fig. 3

Les CDKs contrôlent le cycle cellulaire

D

G2

M

G1 S

CDK1 Cyclin A CDK2

Cyclin A

CDK2 Cyclin E CDC25B

CDC25A

CDK1 Cyclin B

CDC25C

CDC25B

CDC25B CDC25A CDK7

Cyclin HMAT1

CDK4-6 Cyclin D

CDK7 Cyclin HMAT1

Fig. 4

Phosphorylations et déphosphorylations régulent les CDKs

E

G2

M

G1 S

CDK1 Cyclin A CDK2

Cyclin A

CDK2 Cyclin E CDC25B

CDC25A

CDK1 Cyclin B

CDC25C

CDC25B p16 INK4A

p15 INK4B p19 INK4D p18 INK4C p21 CIP1 p57 KIP2

p27 KIP1

CDC25B CDC25A CDK7

Cyclin HMAT1

CDK7 Cyclin HMAT1 CDK4-6

Cyclin D

Fig. 5

Les CDKs sont régulées par des inhibiteurs protéiques

(5)

interfèrent avec la fixation des cyclines de type D sur la CDK, et la famille CIP/KIP, dont les membres se fixent sur les complexes CDK/

cyclines et les inactivent [6]. De façon surprenante, p21CIP1 et p27KIP1 se fixent sur CDK4 sans en inhiber l’activité kinase, ils sont en fait nécessaires pour l’assemblage du complexe CDK4/cycline D et sa translocation dans le noyau. Par contre ces deux protéines sont

d’excellents inhibiteurs de CDK2/

cycline E. L’apparition de p21CIP1et p27KIP1 permet donc la formation des complexes CDK4/cyclines D, tout en retardant l’activation des complexes CDK2/cycline E. Enfin, CDK2/cycline E, en phosphorylant p27KIP1, conduit à son ubiquitina- tion par Skp1/Skp2, et à sa destruc- tion par le protéasome [4]. Cette élimination de p27KIP1 contribue à l’entrée en phase S ;

– des changements très impor- tants de localisation intracellulaire, en général également régulée par phosphorylations et déphosphory- lations.

La transition G0/G1

Il existe une grande variété de fac- teurs mitogènes, dont la description dépasse le cadre de ce chapitre [10].

Ces facteurs agissent, en général, par l’intermédiaire de récepteurs trans-membranaires de type tyro- sine kinases ou encore couplés à des protéines G. Les protéines G de type Rho, Ras sont souvent modi- fiées de façon post-traductionnelle par prénylation du coté C-terminal.

Ces prénylations, catalysées par une farnésyltransférase et une géranylgéranyl transférase, sont essentielles pour le fonctionnement de la voie de signalisation. S’ensuit alors l’activation d’une cascade de protéine kinases, de type MAPKKK/

MAPKK/MAPK, telle Raf/MEK1/

Erk1/2 ou bien PI3K/PDK1/AKT, par exemple, comme illustré très sché- matiquement dans la Fig. 6. En général ces cascades conduisent à la stimulation de la transcription de gènes essentiels pour l’entrée en division (en particulier cyclines D, CDKs). Une autre voie importante également impliquée dans l’entrée en division est celle de l’oncogène Myc. Myc forme un dimère avec la protéine Max, dimère qui active la transcription des gènes de cycli- nes D et E, de CDC25A, de CDK4, d’E2F [24].

La progression en G1

Le début du cycle cellulaire néces- site la transcription d’un certain nombre de gènes, tels ceux des cyclines D et E, p21CIP1, p27KIP1 et des gènes sous le contrôle des fac- teurs de transcription de la famille E2F, comme la cycline E (Fig. 7). Les cellules sont maintenues en G1 grâce aux protéines de la famille du rétinoblastome, pRb, p107 et p130 (« pocket proteins »). Ces suppres- seurs de tumeurs bloquent le cycle cellulaire en s’associant avec E2F.

En effet, en complexe avec pRb, les facteurs E2F, associés au co-facteur

ORIGINAL

F

G1

G0

G0/G1 transition

Ras-Rho/GTP Raf-1

MEK1 Erk1/2

cdc42/Rac

Tyrosine kinase receptors

Growth factors – Mitogen stimuli

PAK1/ROCK transcription

Farnesyl transferase

G Protein coupled receptors MaxMyc

PI3K PDK1 AKT

PI3K

Fig. 6

Régulation de la transition G0/G1

G

G1

progression G1

transcription E2F

pRB DP P P CDK2 Cyclin E p21 CIP1

p27 KIP1 p16 INK4A

E2F P DP CDK4-6 Cyclin D

pRB E2F

DP p130 E2F p107 E2F pRB

transcription

AhR pRB

?

AKT Skp2Skp1

Fig. 7

Régulation de la progression en G1

(6)

de transcription DP, restent inac- tifs : pRb et p107, p130 maintien- nent donc la cellule en G1.

Au cours de G1, les CDKs phos- phorylent pRb, ce qui conduit à la dissociation du complexe Rb/E2F, et donc à la libération de facteurs E2F actifs. Il semblerait que CDK4-6, associée aux cyclines D, initie le processus et permette une activa- tion transcriptionnelle partielle. Une phosphorylation supplémentaire de pRb par CDK2/cycline E permet la libération complète des facteurs E2F, et donc leur action complète comme activateurs transcription- nels.

La famille E2F régule l’expres- sion de gènes impliqués dans la transition G1/S, mais aussi de gènes codant des protéines contrô- lant la réplication (MCM, cdc6), des enzymes nécessaires à la synthèse d’ADN. E2F1, E2F2 et E2F3 sont des activateurs transcriptionnels puis- sants contrôlés par pRb. E2F4 et E2F5 sont des activateurs plus faibles contrôlés par p107 et p130.

On comprend pourquoi les inhibi- teurs naturels de CDKs, des familles INK4 et CIP1/KIP, en maintenant pRb sous forme hypo-phosphorylée, donc liée à E2F, constituent des in- hibiteurs puissants du cycle cellu- laire. L’inactivation de ces inhibi- teurs permet la progression de la cellule à travers la phase G1 et la transition G1/S.

Un autre facteur, mal connu, pourrait jouer un rôle important dans la régulation de la transition G1/S. Il s’agit du récepteur orphelin AhR (« Aryl Hydrocarbon Recep- tor »), également connu sous le nom de « récepteur de la dioxine ».

En présence d’un ligand, AhR migre dans le noyau et devient un acti- vateur transcriptionnel (il induit notamment par exemple la p27KIP1).

AhR se lie à pRb, mais on ne connaît pas la fonction de cette interaction.

La fin de G1 – préparation à la transition G1/S

La préparation à la transition G1/S commence tout d’abord par l’as- semblage d’un complexe pré-

réplicatif (pre-RC) (Fig. 8). L’ORC (« Origin Recognition Complex »), un complexe de six sous-unités (Orc1-6), lie l’ATP, puis se fixe sur l’ADN au niveau des origines de réplication. L’ORC recrute ensuite deux facteurs essentiels, cdc6, une ATPase, et Cdt1, un facteur de transcription. Ces deux facteurs essentiels interviennent ultérieure- ment pour permettre l’accrochage des six protéines (MCM2-7) du complexe MCM (« mini-chromo- some maintenance »).

Inhibition de la re-réplication pendant les autres phases du cycle

Quatre mécanismes importants empêchent que plusieurs méca- nismes réplicatifs se succèdent en phase S, G2 et M (Fig. 9). Tout d’abord, les CDKs actives phospho- rylent trois substrats, MCM, cdc6 et

ORC, empêchant ainsi la forma- tion de nouveaux complexes pré- réplicatifs. La phosphorylation de cdc6 par CDK2 l’inactive en provo- quant sa dégradation ou son export hors du noyau. Par ailleurs cdt1 est la cible de la geminine, un inhibi- teur naturel de réplication qui appa- raît dès le début de la phase S et qui reste présent pendant S, G2 et M.

Enfin la présence de l’enveloppe nucléaire contribue à l’inhibition de la re-réplication.

La transition G1/S

Plusieurs protéines et complexes protéiques doivent s’associer aux complexes pré-réplicatifs afin que la synthèse d’ADN puisse commen- cer (Fig. 10). La protéine MCM10/

Dna43 se fixe tout d’abord au complexe pré-réplicatif. La kinase cdc7 commence par activer le complexe pré-réplicatif en fin de

ONCOLOGIE

M

G1 S

Late G1 progression

ORC cdt1

cdc6 MCM2-7

ORC ATP DNA pre-RC

ORC MCM2-7

Fig. 8

Mise en place des complexes pré-réplicatifs en fin de G1

pre-RC

geminin

Cyclins CDKs cdt1 cdc6 MCM

G2

M S Inhibition

re-replication of

ORC MCM2-7 ORC

DNA

Fig. 9

Mécanismes d’inhibition de la re-réplication pendant les phases S, G2 et M

(7)

phase G1 (Fig. 10). La kinase CDK2/cyclin E intervient ensuite et le complexe peut alors fixer cdc45, un facteur essentiel qui permettra l’accrochage de l’ADN polymé- raseα. L’activité CDK2 est indispen- sable pour l’association de cdc45 à la chromatine. Une ADN hélicase est alors activée au niveau des fourches de réplication, et les ADN polymérases peuvent commencer à agir. La topologie de l’ADN est maintenue par l’activité de plu- sieurs topoisomérases [2].

L’assemblage de la machinerie de synthèse de l’ADN et l’initiation de son activité sont donc contrôlés par deux kinases, cdc7 et CDK2.

L’activité de cdc7 dépend de la pré- sence transitoire de Dbf4, comme l’activité des CDKs dépend de la présence transitoire des cyclines.

Le niveau de Dbf4 est maximal en phase S et est la résultante des acti- vités de synthèses protéiques et de destructions protéolytiques. Cette régulation de cdc7/Dbf4 explique qu’on lui donne parfois le nom de DDK (Dbf4-dependent kinase) [12].

Cdc7/Dbf4 phosphoryle essentielle- ment les protéines MCM, en parti- culier MCM2. Le recrutement de CDK2 aux origines de réplications se fait grâce aux ORC et à cdc6.

L’activité CDK est indispensable à la réplication de l’ADN, mais la plupart des substrats qui doivent être phosphorylés restent encore inconnus. CDK2/cycline E phos- phoryle p27KIP1, ce qui stimule son ubiquitination par Skp1/Skp2, et conduit à sa destruction par le pro- téasome, contribuant à la transi- tion G1/S [4].

La phase S

Les mécanismes moléculaires de la réplication de l’ADN sont com- plexes et dépassent le cadre de ce chapitre. Nous ne les décrirons que très brièvement (Fig. 11) [1]. La réplication de l’ADN est catalysée par l’ADN polymérase, une enzyme qui utilise un brin d’ADN comme base de synthèse (« template ») de l’autre brin par additions succes- sives, sur l’extrémité 3’, de nucléo- tides complémentaires fournis par les précurseurs dATP, dTTP, dGTP et dCTP. L’élongation de la chaîne d’ADN se fait donc dans le sens 5’➞3’. Dans la cellule, la réplica- tion de la molécule d’ADN double- brin se fait dans une structure en forme de « Y », la fourche de répli- cation (« replication fork »). Celle-ci progresse graduellement le long de la double hélice parentale, générant deux doubles hélices filles derrière elle, formant les deux bras du « Y ».

Chacune avance dans une direction chimique différente, 3’➞5’ et 5’➞3’. L’ADN polymérase ne fonc- tionne que sur un des brins, dans le sens 5’➞3’ (« leading strand »). La synthèse de l’ADN sur l’autre brin (3’➞5’, « lagging strand ») fait donc appel à un autre mécanisme.

En effet, sur ce brin, l’ADN polymé- rase produit de longues séries de fragments, les « fragments d’Oka- zaki », qui sont ensuite reliés les uns aux autres par une ADN ligase.

Parmi les nombreuses protéines qui interviennent (au moins 27 au niveau de la fourche de réplication), mentionnons simplement l’ADN hélicase, qui déploie la double hélice et l’ADN primase qui produit les amorces pour les fragments d’Okazaki.

La phase M, généralités

La phase M comporte des phases décrites essentiellement sur la base de la morphologie des chromo- somes et de l’enveloppe nucléaire, phases décrites il y a plus de cent ans (Fig. 12, Planche I) :

– la prophase correspond à la fin de condensation des chromo- somes, rupture de l’enveloppe nucléaire ;

ORIGINAL

G1

P

S Cyclin E CDK2

Dbf4 cdc7

G1/S transition

MCM2-7 ORC

MCM2-7 MCM10 ORC MCM2-7 MCM10 cdc45 ORC

DNA topoisomerases

DNA polymerase DNA helicase

pre-RC

p27 KIP1

p27 KIP1

P

Proteasome Skp2 Skp1

replication forks

Fig. 10

Régulation de la transition G1/S

DNA replication

parental DNA DNA polymerase

DNA helicase DNA primase leading strand template

DNA topoisomerase newly

synthesized strands

clamp loader sliding clamp

ssDNA-binding protein RNA primerlagging strand template 5’3’

3’

3’5’

5’3’

leading strand lagging strand

Okazaki fragments replication fork

5’ 3’

Fig. 11

Phase S, réplication de l’ADN adapté de Alberts [1]

(8)

– la prométaphase est la période de formation du fuseau et du début d’alignement des chromosomes ;

– la métaphase est la phase d’alignement des chromosomes dans le fuseau, à équidistance des pôles ;

– l’anaphase voit la disjonction des chromosomes ;

– la télophase est une période caractérisée par le mouvement des chromosomes vers les pôles, la dis- parition du fuseau, la décondensa- tion des chromosomes et le début de la cytokinèse.

Une nouvelle nomenclature, s’appuyant également sur les évé- nements moléculaires qui contrô- lent et accompagnent ces évé- nements morphologiques, a été proposée récemment [20] (Fig. 12).

Elle comporte cinq transitions, cha- cune étant caractérisée par l’activité de protéines kinases bien parti- culières et par la succession de des- tructions protéolytiques de certains substrats :

– la transition 1 chevauche la fin de G2 et la plus grande partie de la prophase. Elle est caractérisée par l’activité des kinases CDK/

cycline A, Plk1, Aurora-A. Pendant cette période CDK1/cycline B est inactive et cytoplasmique ;

– la transition 2 est caractérisée par l’activation de CDK1/cycline B par CDC25 et sa translocation vers le noyau, suivie par la rupture de l’enveloppe nucléaire ;

– la transition 3 correspond bien à la prométaphase. Un certain nombre de critères comme l’atta- chement des kinétochores au fuseau, l’activation de l’« anaphase promoting complex » (APC/cdc20) (voir paragraphe sur le contrôle de l’attachement des chromatides aux microtubules) modulé par l’attache- ment des microtubules au kinéto- chore, doivent être satisfaits pour que la mitose se termine. La cycline A est détruite à ce stade, alors que la cycline B reste pré- sente ;

– la transition 4. Au cour de cette phase, les kinétochores étant tous reliés à des microtubules, cdc20 n’est plus inhibée par MAD2,

et peut donc activer complètement l’activité APC. APC peut donc s’atta- quer d’une part à la sécurine, conduisant à la disjonction des chromatides, et, d’autre part, à la cycline B, permettant l’entrée en télophase [9] ;

– la transition 5 est caractérisée par le fait que, la cycline B étant détruite, CDK1 est inactivée et une nouvelle enveloppe nucléaire peut se reformer. La cytokinèse a lieu, et la cellule se retrouve en interphase.

Cdc20 est dégradée et remplacée par cdh1 (ou hct1, « fizzy-related protein ») qui se lie à l’APC, permet- tant la dégradation de nouvelles protéines, telles Aurora-A et Tome-1.

APC/cdh1 reste présent dans la cel- lule jusqu’à l’entrée dans le pro- chain cycle de division.

Les transitions G2/M et prophase/métaphase

(Fig. 13) La phase G2 est souvent présentée comme une phase « de prépara- tion » à la mitose, mais ces mots masquent davantage notre mécon- naissance de cette partie du cycle cellulaire. Elle est marquée par le début de la condensation des chro- mosomes. La kinase CDK1/cycline A est active en G2, mais ses fonctions demeurent inconnues. Sa partici- pation à l’activation de CDK1/

cycline B est une hypothèse.

ONCOLOGIE

L

phase M

Telo Ana

Meta PrMet G2

Pro

transition 1

transition 2 transition 3

transition 4

transition 5

Cyclin B CDK1 Plk1 CDK1

Cyclin A Aurora-A

cdc20 APC

cdh1 APC

NEBD

spindle formation

spindle disassembly cytokinesis chromosomealignment

chromosome alignment onplate chromosome condensation

NE reformation

cdc20 MAD2

Cyclin A Cyclin B

cdc20 securin

Aurora-A Wee1

Tome-1

PROTEOLYSIS

Fig. 12

Phase M, généralités

G2

APC

M

G2/M transition

Cyclin B CDK1

CDC25A CDK7 Cyclin H MAT1

Cyclin A CDK1

Cyclin F

CDC25B CDC25C

Wee1

Myt1 PKB/AKT p90RSK

Erk1/2 Importin

>

Nuclear translocation Survivin

Lamins Nucleolin Condensin Peroxiredoxin

PKA

Tome-1 Plk1

Fig. 13

Régulation de la transition G2/M et de l’activité de CDK1/cycline B

(9)

La transition prophase/méta- phase, souvent abusivement nom- mée transition G2/M, est contrôlée par la kinase CDK1/cycline B. En G2- début de prophase, CDK1 est pré- sente sous forme monomérique inactive. Puis, au fur et à mesure de la synthèse de cycline B, le complexe CDK1/cycline B s’accu- mule pour atteindre un niveau maximal en prophase. À ce stade, le complexe est encore inactif car les deux résidus Thr-14 et Tyr-15 sont phosphorylés par les kinases Wee1 et Myt1. En revanche la Thr-161, dont la phosphorylation est indispensable à l’activité de la kinase, est phosphorylée par CDK7/

cycline H/Mat1.

Quatre mécanismes sont res- ponsables de l’activation de CDK1/

cycline B lorsque la cellule est prête à entrer en phase M (Fig. 13) :

– tout d’abord les kinases inhi- bitrices Wee1 et Myt1 sont inacti- vées par phosphorylation par les kinases PKB/AKT et p90RSK. De plus, Tome-1 (« trigger of mitotic entry »), associé à Skp1, est respon- sable de la dégradation rapide de Wee1 par protéolyse en fin de G2 ;

– parallèlement, les deux rési- dus inhibiteurs, Thr-14 et Tyr-15, sont déphosphorylés par les phos- phatases CDC25. Les fonctions res- pectives de chacune des trois CDC25 n’ont pas encore été claire-

ment établies. Il semblerait que CDC25B amorce l’activation de CDK1/cycline B. CDC25C est ensuite activée par phosphorylation par, d’une part, CDK1/cycline B, géné- rant ainsi un système d’auto-ampli- fication, et d’autre part, PLK1.

CDC25A est stabilisée par phospho- rylation par CDK1/cycline B ;

– la cycline B est phosphorylée par diverses kinases, ce qui est indispensable à l’interaction entre CDC25 et CDK1, donc à l’activation de la kinase ;

– le complexe CDK1/cycline B migre dans le noyau, où il trouve la plupart de ses substrats (lamines, nucléoline, condensine, par exem- ple). Les interactions de la cycline B1 avec la cycline F et l’importine β régulent la localisation nucléaire du complexe CDK1/cycline B.

La condensation des chromosomes

La condensation des chromosomes est parmi les premiers évènements morphologiques de la division qui aient été décrits. Comment est-elle régulée (Fig. 14) ? La condensine, un complexe constitué de 5 sous- unités, est le principal responsable du phénomène de condensation chro- mosomique. Ses sous-unités sont, chez l’homme, hCAP-C, hCAP-E, hCAP-D2, hCAP-G et hCAP-H. Elles sont très bien conservées chez les

eucaryotes et ont une nomencla- ture complexe [13]. La condensine conduit une seule réaction : le super-enroulement, ATP-dépendant, de la molécule d’ADN dans des conditions topologiques définies.

L’activité CDK1/cycline B est indis- pensable pour le fonctionnement de la condensine et pour sa modi- fication post-traductionnelle par sumoylation. L’interaction topoiso- mérase II/CDK1 semble également être impliquée dans la condensation des chromosomes sans nécessiter pour autant l’activité catalytique de CDK1. Enfin la phosphorylation de l’histone H3 (et de CENP-A, son variant au niveau des centromères) par la kinase Aurora-B est égale- ment directement impliquée dans la condensation chromosomique.

La déphosphorylation de l’histone H3 commence dès la sortie de méta- phase et s’achève en télophase juste avant la décondensation visible de la chromatine.

Le fuseau mitotique

Les microtubules sont des assem- blages non covalents d’hétérodi- mères de tubuline αet β (Fig. 15).

En fin de prophase on assiste à une redistribution spectaculaire de la tu- buline intracellulaire (planche I, C-D) qui s’organise en un fuseau de microtubules orientés perpendi- culairement au futur plan de cli- vage (Fig. 15). Les sous-unités des microtubules sont en fait dans un état d’« instabilité dynamique », c’est-à-dire constamment en poly- mérisation (« plus end ») et dépo- lymérisation (« minus end »). Ces deux états dépendent d’un grand nombre de facteurs (GTP/GDP, magnésium, température) et de protéines régulatrices. On distingue les protéines qui stabilisent les microtubules (les « microtubule- associated proteins » (MAPs) MAP1, MAP2, MAP4) et les protéines qui déstabilisent les microtubules (stath- mine (Op18), katanine, « mamma- lian centromere-associated kinesin » (MCAK), etc.). Parmi les protéines motrices (soulignées dans la Fig. 15), Eg5, Klp2, Mklp1, CENP-E sont des « kinésines » actives du côté « plus » des microtubules,

ORIGINAL

N

Histone H3 319

CENP-A

Topo IICDK1

Chromosome condensation

Sumo PP P CAP-C CAP-E

CAP-D2

CAP-G CAP-H

Aurora-B CDK1 Cyclin B Condensin

Histone H1

????

Chromosome

decondensation

Histone H3dephosphorylation NEBD

phase M

Telo Ana

Meta Pro

PrMePrMet

Fig. 14

Régulation de la condensation de la chromatine

(10)

alors que HSET et la dynéine cyto- plasmique sont des protéines motrices situées du côté « moins ».

Les microtubules sont la cible d’un grand nombre de produits anti- mitotiques qui agissent soit en sta- bilisant soit en déstabilisant les microtubules [13].

Les microtubules se répartissent en un fuseau mitotique sous le contrôle des centrosomes dupli- qués (Fig. 15). Les chromosomes établissent une connexion avec les microtubules qui émanent des pôles du fuseau. Cette connexion se fait au cours de la rencontre entre les microtubules et une struc- ture associée au chromosome appelée kinétochore. Tous les chro- mosomes doivent être attachés et correctement alignés avant de pou- voir être répartis en deux lots iden- tiques. Les chromosomes s’organi- sent au centre du fuseau en une

« plaque métaphasique » caracté- ristique (Planche I, F). Puis, tirés par chacun des pôles du fuseau, les chromatides vont se diriger vers les pôles du fuseau et se répartir en deux lots identiques. Comment se fait cette séparation des chroma- tides ?

La séparation des

chromatides et la transition métaphase/anaphase

Après la réplication, les deux copies homologues du génome, les chro- matides, restent associées grâce à des complexes protéiques connus sous le nom de cohésines (Fig. 16).

En métaphase la cohésine est phos- phorylée par Plk1, elle devient alors sensible à la dégradation protéoly- tique. En début d’anaphase la cohé- sine est détruite par une caspase particulière, la séparase, elle-même phosphorylée, permettant ainsi la séparation des chromatides. Celles- ci sont tirées vers les pôles du fuseau par les microtubules, au niveau des kinétochores.

Comment se fait l’activation de la séparase (Fig. 17) ? La séparase est en fait maintenue sous forme inactive par association avec une autre protéine, la sécurine. L’APC (« Anaphase Promoting Complex »)

ou cyclosome, un complexe d’au moins 11 sous-unités, présente une activité ubiquitine ligase lorsqu’il s’associe avec cdc20 [18]. Le complexe APC/cdc20 induit l’ubi- quitination de la sécurine, condui- sant à sa destruction protéolytique par le protéasome. C’est la destruc- tion de la sécurine par le protéa- some qui conduit donc à l’activation de la séparase. Une séparase active est ainsi libérée. Ceci conduit à la dissociation du complexe cohésine et à la séparation des chromatides.

Plusieurs phosphorylations es- sentielles sont impliquées dans ce processus de séparation des chro- mosomes (Fig. 17). Ainsi la phos- phorylation de la cohésine (sous- unité Scc1) par la kinase Plk1 la rend particulièrement sensible à la séparase. La phosphorylation de l’APC par CDK1/cycline B contri- bue à son activation. Enfin, la séparase, quant à elle, doit éga- lement être phosphorylée par CDK1/cycline B pour devenir active.

ONCOLOGIE

320

O

+

-

=-tubulin

>-tubulin MAPsChTOG Eg5Klp2 Mklp1 CENP-E stathmin katanin MCAKHSET dynein microtubule

kinetochore polar microtubule centrosome (spindle pole)

chromatid

aster

Microtubule dynamics Mitotic spindle

cohesin

centrioles

Fig. 15

Dynamique des microtubules et fuseau mitotique

P

phase M

Telo Ana Meta Pro

cohesin

Chromatid disjunction

kinetochore microtubule

cohesin

Chromatid

junction

sister chromatids P

separase

separase P

securin

Fig. 16

Jonction et séparation des chromatides au cours de la phase M

(11)

Si APC/cdc20 conduit à la des- truction de la sécurine, celle-ci n’est pas son unique substrat. En effet, le complexe est également en partie responsable de la destruction de la cycline B, un événement qui a plusieurs conséquences physio- logiques importantes, dépendant toutes directement de la chute de l’activité CDK1 : la disparition du fuseau, le déclenchement de la cytokinèse, la transition vers la phase G1 [9]. La destruction de la cycline B en anaphase suffit aussi à restaurer la transcription d’ADNr (localisé au niveau nucléolaire), inactivée par la CDK1/cycline B en phase M.

Le contrôle de l’attachement des chromatides

aux microtubules

Un système de contrôle (« spindle assembly checkpoint » ou « mitotic checkpoint ») permet la vérification de l’attachement des chromosomes au fuseau et empêche la cellule d’entrer en anaphase tant que tous les chromosomes ne sont pas cor- rectement orientés en une plaque métaphasique (Fig. 18) [15]. Le mécanisme fonctionne même lors- qu’un seul chromosome n’est pas à sa place (Planche 1, E). Ce système de contrôle couple les kinétochores non-attachés à l’APC, le complexe

responsable de l’achèvement de la mitose. En résumé, Mad2, un élé- ment sensible à l’attachement des microtubules au kinétochore, a pour propriété principale de séquestrer cdc20, la sous-unité adaptatrice de l’APC. L’interaction Mad2/cdc20 semble être régulée par les kinases des familles Bub, Plk1 et Aurora, sans que les détails de ces régula- tions soient bien connus. Dès que tous les kinétochores sont attachés aux microtubules, cdc20 est libéré de Mad2, et peut donc activer APC.

L’entrée en anaphase peut alors avoir lieu.

Le contrôle de l’orientation du fuseau et la transition anaphase/télophase

La poursuite du cycle cellulaire en télophase dépend du « mitotic exit network », un groupe de protéines qui permet le relargage de la phos- phatase Cdc14 (une protéine locali- sée en interphase dans le nucléole) et son activation. Cette phospha- tase déphosphoryle et active cdh1, contre-balançant la phosphory- lation et l’inactivation par CDK1/

cycline B. Cdh1 interagit alors avec APC. Le complexe APC/cdh1 actif permet la destruction sélective de certains substrats, permettant ainsi le passage en télophase et l’achève- ment de la mitose (Fig. 19).

Un système de contrôle (« spindle orientation checkpoint »), principa- lement connu chez la levure, per- met la vérification de l’orientation correcte du fuseau [9]. Lorsque le fuseau n’est pas correctement orienté, le « mitotic exit network » est inhibé, la phosphatase cdc14 reste inactive, et, en conséquence, cdh1 reste phosphorylée et inca- pable d’activer APC. La cellule reste bloquée en anaphase (Fig. 19).

La cytokinèse

La cytokinèse est l’étape finale de la division qui conduit à l’individuali- sation des deux cellules-filles [8].

Elle est caractérisée par la mise en place d’un anneau contractile conte- nant de l’actine, de la myosine et d’autres protéines (Fig. 20). L’an- neau se contracte au niveau équa-

ORIGINAL

Q

P

phase M

Telo Ana Meta Pro

separase

separase

P

Cyclin B CDK1 Plk1 cohesin

Chromatid

disjunction APC cdh1

cohesin

P

cdc20

APC

Proteasome securin

Fig. 17

Régulation de la séparation des chromatides au cours de l’anaphase

Spindle Assembly Checkpoint

Telo Ana Meta Pro

cohesin

improper spindle/chromatin

attachment cdc20Mad2

Plk1 Bub1,3 Aurora

?

separase

cdc20

APC

securin

Proteasome

Fig. 18

Le contrôle de l’attachement des chromatides aux microtubules (« spindle assembly checkpoint »)

(12)

torial du fuseau mitotique en une zone dense (« mid-body »), où se chevauchent les microtubules éma- nant des deux pôles du fuseau. Il se referme ensuite entre les deux cellules-filles. L’anneau d’actomyo- sine se met en place au niveau du cortex équatorial de la cellule. La myosine constitue le moteur de cet anneau. Parmi les protéines asso- ciées à l’anneau contractile on trouve les septines, des protéines à domaine FCH de type cdc15, les protéines de la famille IQGAP et des GTPases des familles Rho, Rac et cdc42, la kinase citron. Leurs fonc- tions, leur régulation, l’ordre de succession de leur intervention et leur interdépendance restent encore très mal connus. De toute évidence la cytokinèse doit être parfaitement synchronisée avec le cycle nucléaire.

Elle n’est possible que lorsque les deux lots de chromosomes sont répartis de façon symétrique entre les deux futures cellules-filles. Trois familles de kinases participent à ce contrôle, les CDKs, la kinase Plk1 et la kinase citron. L’inactivation de CDK1 est indispensable au déclen- chement de la cytokinèse, car CDK1 inhibe la myosine en phosphory- lant la chaîne légère de la myosine (« MRLC, Myosin Regulatory Light Chain »), mais probablement aussi d’autres substrats. Plk1 pourrait contribuer au déclenchement de la cytokinèse en participant à la des- truction de la cycline B et donc à l’inactivation de CDK1. Le méca- nisme d’action précis de la kinase citron n’est pas encore connu.

Certaines protéines migrent des centromères au centre du fuseau (« midzone ») en début d’anaphase.

Collectivement appelées « chromo- somal passenger proteins », elles comportent la protéine INCENP (« inner centromere protein »), les kinases Aurora-B et Plk1, la survi- vine et les kinésines, protéines motrices des microtubules. Ces protéines sont indispensables au déroulement de la cytokinèse.

Cependant le couplage entre ces protéines et celles de l’anneau contractile reste globalement inconnu. La cytokinèse implique également le trafic intracellulaire, la

sécrétion, et/ou le recyclage mem- branaire. Son achèvement est associé à une fusion de vésicules membranaires.

Le cycle des centrosomes

Le centrosome est un organite organisateur des microtubules qui assure la formation du fuseau mito- tique mais qui joue également un rôle dans la transition G1/S. Le centrosome est une structure com- plexe constituée de deux centrioles disposés perpendiculairement l’un à l’autre et entourés de « matériel péri-centriolaire ».

Parallèlement à la réplication de son génome la cellule doit, avant chaque division, assurer la dupli-

cation de son centrosome (Fig. 21).

Celle-ci a lieu en phase S, au moment de la réplication de l’ADN.

Comme le génome, les centro- somes sont répartis dans chaque cellule-fille à l’issue de la mitose. Ce cycle des centrosomes est bien décrit sur le plan morphologique, mais nous n’avons qu’une connais- sance très parcellaire des mécanis- mes moléculaires de sa régulation.

La réplication du centrosome passe par plusieurs phases (dupli- cation, élongation, maturation, sépa- ration, ségrégation), hautement régulées par des protéines spéci- fiques. Ce mécanisme est couplé au cycle de réplication des chromo- somes. Parmi les régulateurs essen-

ONCOLOGIE

Spindle Orientation Checkpoint

Telo Ana Meta Pro

improper spindle orientation

mitotic exit network

Cyclin BCDK1 cdh1 P

cdh1 Cdc14

cdh1

APC

cdc20 Aurora-A Proteasome

Tome-1 Cyclin B

Fig. 19

Le contrôle de l’orientation du fuseau (« spindle orientation checkpoint »)

Cytokinesis M

contractile ring

myosin / MRLC actin septins Cdc15 IQGAP

GTPases Rho, Rac, CDC42 citron kinase

INCENP aurora-B survivin kinesinsPlk1

spindle midzone CDK1 Cyclin B

Fig. 20

Régulation de la cytokinèse

(13)

tiels de la duplication on trouve CDK2/cycline E - A. Les CDKs phos- phorylent la nucléophosmine, ce qui déclenche sa dissociation des centrosomes, et la protéine CP110.

CDK2/cycline E phosphoryle et active, en la stabilisant, une autre kinase essentielle à la duplication du centrosome, la kinase Mps1 (TTK chez l’homme). Les substrats de Mps1 n’ont pas été identifiés. La dépendance du cycle de réplication des centrosomes vis-à-vis de l’acti- vité des CDKs contribue ainsi à coupler celui-ci au cycle de division nucléaire.

La kinase Plk1 est localisée au niveau du centrosome en interphase, puis elle s’associe aux pôles du fuseau en mitose. Son rôle dans le cycle du centrosome reste cepen- dant inconnu, mais elle semble plu- tôt impliquée dans la maturation.

Elle pourrait agir indirectement en participant à l’activation de CDK1/

cycline B, qui phosphoryle et active la kinésine Eg5, impliquée dans la séparation des centrosomes.

La séparation des centrosomes dupliqués, en fin de G2, paraît dépendre de la phosphorylation de la protéine C-Nap1 par la kinase NEK-2 (NimA). La protéine centrine est fortement phosphorylée en fin de G2. La kinase Aurora-A jouerait

également un rôle important dans les fonctions des centrosomes en phase M, mais ses substrats ne sont pas connus.

En plus des diverses kinases mentionnées ci-dessus, la protéo- lyse ubiquitine-dépendante est indispensable au cycle de duplica- tion des centrosomes. Deux revues bien documentées sur le cycle des centrosomes peuvent être consul- tées [3, 17].

Le cycle cellulaire, un cycle de destructions protéolytiques ?

À plusieurs reprises, nous avons vu l’importance des destructions spécifiques de certains régulateurs du cycle dans la succession des phases de la division cellulaire. On peut en effet voir le cycle cellulaire comme un cycle coordonné de syn- thèses, d’activations transitoires et de destructions protéolytiques [16].

La dégradation spécifique se fait par le protéasome, un complexe macromoléculaire d’au moins 44 sous-unités protéiques [13].

Pour être pris en charge par les protéases du protéasome, la cible protéique à dégrader doit être ubi- quitinée. Cette modification post- traductionnelle consiste en une fixation covalente, sur la chaîne

latérale de certaines lysines de la protéine cible, de plusieurs molé- cules d’ubiquitine, un peptide signal de 8 kDa. Le processus d’ubiquitination fait intervenir une succession d’enzymes (E1, « ubi- quitin-activating enzyme », E2,

« ubiquitin-conjugating enzyme », E3, « ubiquitin ligase ») (Fig. 22).

Deux types d’ubiquitine ligase E3 interviennent dans le cycle cellu- laire, le complexe SCF (« Skp1-cul- lin-F-box »), (activé par la « F-box protein » Skp2) [16], et le complexe APC/cyclosome (activé par cdc20 ou par cdh1) [18]. Ces deux complexes sont constitués de mul- tiples sous-unités (Fig. 22). L’APC/

cyclosome est actif de la fin de la phase G2 au milieu de la phase G1.

Le complexe SCF est actif du milieu de la phase G1 jusqu’au début de la phase G2. Les principaux substrats qu’ils ubiquitinent, et donc condui- sent à la destruction, sont indiqués dans la figure 22. La destruction de ces substrats est indispensable pour la progression du cycle. Ainsi par exemple la p27KIP1est détruite en fin de G1, permettant l’activation de CDK2 (Fig. 10). Plus tard dans le cycle, la destruction de la kinase Wee1, par l’intermédiaire de Tome-1, contribue à l’activation de CDK1/

cyclin B (Fig. 13). Plus tard encore, la destruction de Tome-1, en fin de phase M, permet la réapparition de Wee1, et donc l’accumulation en G1 de CDK2 inactive. Nous avons vu l’importance, dans la transition métaphase/anaphase, de la des- truction de la sécurine, qui permet la libération de la séparase et la destruction du complexe cohésine (Fig. 17). Nous avons vu également l’importance de la destruction de la cycline B, qui permet l’inactivation de CDK1 et la poursuite du cycle cellulaire au-delà de la métaphase.

La cytokinèse semble également régulée par la destruction protéoly- tique, APC-dépendante, mais aussi sans doute SCF-dépendante, de substrats encore non identifiés.

Le contrôle de l’état de l’ADN

Lorsque l’ADN est endommagé, des mécanismes complexes sont

ORIGINAL

U

centrosome

maturation

centrosome

duplication centrosome

separation

G2

M

G1 S

centrosome cycle

centriole centriole elongation

centrosome segregation mitotic spindle

Nek-2 C-Nap1

centrin nucleophosmin

CP110 CDK2

Cyclin E

nucleophosmin CP110

Mps1

Aurora-A

centrosome CDK2

Cyclin A

????

Plk1 Asp

CDK1 Cyclin B kinesin (Eg5)

interconnecting fibers

Fig. 21

Le cycle de réplication du centrosome

(14)

activés. Ils conduisent à un arrêt du cycle cellulaire et permettent à la cellule soit de réparer cet ADN endommagé, soit, si les dommages sont trop importants, d’enclencher un programme de mort cellulaire [7].

Plusieurs niveaux d’arrêts sont possibles. On parle ainsi des « G1/S checkpoint » lorsque l’entrée en phase S est bloquée jusqu’à répara- tion de l’ADN endommagé (blocage de CDK2) et de « G2 DNA damage checkpoint », lorsque l’arrêt a lieu avant l’entrée en phase M (blocage de CDK1). Ces mécanismes régula- teurs sont schématisés dans les Fig. 23 et 24. Ils impliquent deux kinases appartenant à la famille des

« phosphatidylinositol 3-kinase-like kinases » (PIKKs) : ATM (« Ataxia Telangiectasia Mutated ») et ATR (« ATM- and Rad3-related »). La kinase ATM [22] est activée en réponse aux radiations ionisantes et aux coupures double-brin, alors que les UV et les erreurs de réplica- tions activent plutôt la kinase ATR.

Schématiquement, les kinases ATM et ATR ont au moins deux types d’effets. Tout d’abord (Fig. 23) elles phosphorylent et activent les kinases Chk2 et Chk1 qui, elles, phosphorylent et inactivent les phosphatases CDC25A et CDC25C.

En conséquence, CDK2 et CDK1 res- tent inactives, et le cycle cellulaire est arrêté, respectivement, en G1/S et en G2/M.

Par ailleurs, ATM agit égale- ment par la voie p53-dépendante (Fig. 24). Le suppresseur de tumeur p53 est un facteur de transcription activé sous l’effet de multiples fac- teurs (endommagement de l’ADN, hypoxie, choc thermique, par exemple). Il est responsable de l’induction d’un grand nombre de gènes conduisant à des réponses multiples et en particulier à un arrêt du cycle cellulaire ou au déclenche- ment de l’apoptose. Dans les condi- tions normales, p53 se fixe au facteur MDM2 (« murine double minute 2 », Hdm2 chez l’homme), ce qui conduit à sa dégradation et explique la faible abondance de p53 dans les cellules en bon état.

En revanche, lorsque l’ADN est endommagé, trois mécanismes

contribuent à une stabilisation très marquée de p53 et, en consé- quence, à une forte augmentation de son activité transcriptionnelle.

Tout d’abord, la kinase ATM est activée et phosphoryle MDM2, inhi- bant l’interaction MDM2/p53, ce qui libère et stabilise ainsi p53. Par ailleurs, ATM phosphoryle p53 (directement ou indirectement, par Chk2), renforçant sa stabilité. Enfin, p53 induit la transcription du locus

ARF du locus INK4A. La protéine p14ARFse fixe sur MDM2 et induit sa dégradation rapide, renforçant encore davantage la stabilisation et l’accumulation de p53. On com- prend tout l’intérêt de rechercher des inhibiteurs de l’interaction MDM2/p53, qui devraient conduire à une stabilisation de p53, avec pour conséquence l’arrêt de la prolifé- ration cellulaire ou l’apoptose des cellules soumises à un stress [5].

ONCOLOGIE

V

SCF complex APC/cyclosome

SCF

APC

Wee1 cdc20

Aurora-A Cyclin E

p27 KIP1

Cyclin B securin Cyclin A

Cyclin D cdc6

Tome-1 Wee1

G2 M G1

S

Tome-1

Skp2 (F-box) E2

Ub

Rbx1 Cul1

Skp1

Target UbUbUb

cdc20 or cdh1 E2

Ub

Apc11

Apc2 ?

Target

UbUb Ub

Proteasome

Ubiquitin-dependent proteolysis

Fig. 22

Activités protéolytiques ubiquitine-dépendantes au cours du cycle cellulaire

W

G2

M S

DNA damage

CDC25A Chk1 ATR

(Ionizing radiations, ds DNA breaks)

CDK2 Cyclin E/A

Chk2 ATM

(UV, HU, replication errors)

CDC25C

CDK1 Cyclin B

DNA damage checkpoints

Fig. 23

Le contrôle de l’état de l’ADN et blocage en G1 ou en G2

(15)

L’arrêt de prolifération cellulaire en G1 ou en G2 provient essentiel- lement d’une induction de p21CIP1, et donc de l’inhibition de CDK2 ou de CDK1, respectivement.

Signalons l’existence de deux autres protéines, p63 et p73, qui partagent une grande similarité de structure et de fonction avec p53.

Les inhibiteurs pharmacologiques du cycle cellulaire

La découverte des mécanismes régu- lant la division cellulaire a été suivie par la recherche de molécules aux propriétés anti-prolifératives. De nom- breux composés anti-mitotiques se

sont révélés utiles en chimiothé- rapie du cancer. Ainsi, on peut classer les produits anti-cancéreux classiques en quatre grandes caté- gories :

– les agents alkylants, qui altè- rent l’ADN et bloquent ainsi la répli- cation (tels les nitrosourées, les moutardes à l’azote) ;

– les anti-métabolites, qui se substituent aux précurseurs de la synthèse d’acides nucléiques et bloquent la réplication de l’ADN (hydroxyurée, 5-fluoro-uracile) ;

– les agents qui bloquent les to- poisomérases I (camptothecine) et II (doxorubicine, mitoxanthrone) ;

– les « poisons » du fuseau mito- tique, qui agissent en inhibant la dépolymérisation (ex : taxol, taxo- tère, et autres molécules soulignées dans la Fig. 25) ou la polymérisation de la tubuline (ex : vinblastine, et autres molécules marquées d’un astérisque) [19].

L’efficacité thérapeutique des premiers produits anti-mitotiques a fortement suscité la recherche de composés capables d’inhiber la pro- lifération de cellules en culture [13].

La plupart des produits utilisés en chimiothérapie du cancer provien- nent de cette approche. Plus récem- ment, la recherche de produits anti-mitotiques à des fins thérapeu- tiques s’est appuyée davantage sur l’utilisation directe de régulateurs du cycle comme cibles de criblage moléculaire [13, 21, 23].

Quelques exemples de cibles (dont certaines sont encore poten- tielles) et d’inhibiteurs identifiés sont présentés dans la Fig. 25. Les inhibiteurs sont à des stades très divers de développement, depuis le stade préclinique jusqu’à la commercialisation. Certains pro- duits agissent à un stade très spéci- fique du cycle, d’autres à plusieurs étapes.

Conclusion

Ces dernières décennies ont vu des progrès spectaculaires dans notre compréhension des mécanismes moléculaires qui régulent le cycle de division cellulaire. Ces méca-

ORIGINAL

X

G2

M

G1 S

p21 CIP1

apoptosis CDK2

Cyclin E

CDK1 Cyclin B

p53 P MDM2p53

p14 ARF

p73 p63

P MDM2

DNA damage, hypoxia, heat shock,… etc.

Chk2 ATM MDM2

p14 ARF

Fig. 24

Fonctions de p53 dans la réponse à l’endommagement de l’ADN

Y

G2

M

G1 S

G0 tyrosine kinases DNA synthesis

topoisomerase I CDK2

tubulin polymerisation/

depolymerisation

Vinca alkaloids*

taxol/taxotere halichondrin*

spongistatin*

rhizoxin*

cryptophycin sarcodictyin eleutherobin epothilones discodermolide D-24851 ? dolastatin*

combretastatin*

camptothecin

CDK4 flavopiridol

(R)-roscovitine (CYC202) paullones, indirubins

gleevec iressa OSI774 hydroxyurea

cytarabine antifolates 5-fluorouracil 6-mercaptopurine

nitrogen mustards nitrosoureas mitomycin C

CDK1 Chk1Chk2

UCN-01, SB-218078 debromohymenialdisine isogranulatimide

AhR

actin kinesin Eg5

monastrol ecteinascidin 743

podophyllotoxin,doxorubicin

etoposide, mitoxantrone topoisomerase II ATM/ATR

R115777 SCH66336

ROCK

Y-27632

CDC25

DF203

FK317 HMGA

Plk1

Aurora wortmannin

caffeine

ODC/SAMDC

Pin1

GSK-3 Cdc7

nucleotide excision repair

Raf cytochalasins

latrunculin A scytophycins dolastatin 11 jasplakinolide paullones, indirubins

(R)-roscovitine (CYC202) paullones, indirubins

BAY-43-9006

fumagillin,TNP-470 PRIMA-1, pifithrin =

rapamycin mTOR/FRAP PS-341 proteasome bryostatin, PKC412 PKC

histone deacetylase trichostatin, FK228

HSP90 geldanamycin, 17-AAG

ATK, MAFP cytosolic phospholipase A2 hexadecylphosphocholine phospholipase D CT-2584 choline kinase

MEK1/Erk-1/2 PD98059, U0126

menadione (K3)

farnesyl transferase

phosphatases okadaic acid, fostreicin, calyculin A

Wee1 PD0166285

polyamine analogues Pin1

p53/MDM2

Fig. 25

Les régulateurs du cycle cellulaire, cibles de nouvelles molécules thérapeutiques ? Les cibles qui interviennent à plusieurs phases du cycle cellulaire ou à des moments encore mal définis sont indiquées en bas à gauche

(16)

nismes ont été extrêmement bien conservés au cours de l’évolution, signe d’une importance primordiale dans la vie cellulaire. Les recher- ches fondamentales sur la régula- tion du cycle cellulaire ont certes permis d’identifier les grands régu- lateurs de ce processus vital, mais ont aussi fourni des outils pour aborder de grandes maladies sous un aspect moléculaire. Nous nous rendons compte à l’heure actuelle que la plupart des cancers provien- nent d’anomalies de régulation de la division cellulaire et/ou de l’apop- tose. Nombreux sont les exemples, dans les tumeurs humaines, de sur- expressions de cyclines, de muta- tions de CDKs, de mutations ou même de délétions des inhibiteurs naturels [13]. Ces observations conduisent maintenant à consi- dérer les régulateurs du cycle cellu- laire comme des cibles privilégiées d’inhibiteurs sélectifs et puissants.

Ces inhibiteurs pourraient compen- ser pharmacologiquement les ano- malies associées aux cancers, et apporter ainsi de nouveaux trai- tements anti-cancéreux.

Remerciements

Je remercie tous les membres pas- sés et présents de l’équipe « Cycle Cellulaire » de la Station Biologique de Roscoff pour des années de complicité et de recherche pas- sionnée. Merci aux relecteurs cri- tiques et vigilants de cette revue (Stéphane Bach, Marc Blondel, Véronique Catros-Quemener, Marie Knockaert, Marcel Koken, Martine Ffrench, Jan Mester, Sylvie Rumin) !

Merci aussi à Conly Rieder pour la planche photographique et à Michel Bornens pour la photogra- phie de la Fig. 1. Nos travaux sur la division cellulaire ont été essen- tiellement soutenus par le CNRS, l’Association pour la Recherche sur le Cancer et le Conseil Régional de Bretagne. Ce chapitre a été rédigé au cours d’un séjour sabbatique à l’Université Rockefeller de New York dans le Laboratoire du DrPaul Greengard que je remercie vive- ment pour son accueil. Ce séjour a été financé par le CNRS, l’Univer- sité Rockefeller et l’OTAN.

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ONCOLOGIE

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