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LE MÉDECIN DE LA JONQUE

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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LE MÉDECIN

DE LA JONQUE

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DU MÊME AUTEUR CHEZ LE MÊME ÉDITEUR

LE MÉDECIN DE STALINGRAD (LA NEIGE SUR LE GRAND FLEUVE) DANS UN MONDE INCONNU

SYMPHONIE RUSSE LE CANAL SILENCIEUX LE DÉFI DES HOMMES LASKA, UN NOM HONGROIS QUI SIGNIFIE L'AMOUR L'ANGE DES OUBLIÉS AUSWEIS POUR LA NUIT LA GRANDE PEUR VENUE DU CIEL LE MÉDECIN DE LA VALLÉE LA ROUTE INFERNALE LE FILS DU SOLEIL ALARME

UN HEUREUX MARIAGE LA CLINIQUE DES CŒURS PERDUS ILS ÉTAIENT DIX

LA FACE OBSCURE DE LA GLOIRE DIABOLIQUE RIVAL

ENTRE L'AMOUR ET LA HAINE AU FIL DE L'EAU

LES AMANTS DE SOTSCHI UNE AVENTURE AMOUREUSE SEULS DANS LA TOURMENTE UNE CROIX EN SIBÉRIE

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HEINZ G. KONSALIK

LE MÉDECIN DE LA JONQUE

Roman

PRESSES DE LA CITÉ

PARIS

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Le titre original de cet ouvrage est : DER DSCHUNKEN DOKTOR Traduit de l'allemand par : Louise H. WOLF

La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'Article 41, d'une part que les copies ou reproductions réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (alinéa 1 de l'Article 40).

Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les Articles 425 et suivants du Code Pénal.

© Presses de la Cité, 1985. pour la traduction française ISBN 2-258-01476-X

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CHAPITRE PREMIER

ELLE PENETRA DANS le vestibule du restaurant panoramique Juno et jeta un coup d'œil intrigué autour d'elle, mais on ne la remarqua pas parmi tous les autres clients sortis de l'ascenseur au vingt-sixième étage afin de venir faire un repas somptueux dans la fameuse cage de verre de Kowloon, de passer un moment dans cet endroit de grand luxe, d'y déguster des vins de premier ordre et de savourer en même temps l'incomparable vue sur Kowloon, Hongkong et les Nouveaux Territoires, sur les millions de chaînes lumineuses, sur les nappes d'eau étincelantes, sur des milliers de jonques et de sampans, de hautes tours et de masures, de larges avenues et d'étroites ruelles tortueuses, des parcs et des falaises abruptes, sur une mer bariolée de publici- tés lumineuses, et sur la vaste nappe d'ombre qui s'étendait jusqu'aux frontières de la Chine Rouge. Là-haut, depuis le restaurant de la tour située au 655 de Nathan Road, on jouissait d'un tableau à vous couper le souffle, d'un tableau inoubliable jusqu'à la fin de ses jours. Le palais de verre sis sur le toit de la tour faisait régulièrement, toutes les heures, une révolution complète sur son axe, et pendant que l'on dégustait du homard frais, flambé au whisky et garni de caviar, ou bien les faisans farcis, accompagnés d'une sauce raffinée au bor- deaux et aux raisins, on avait à ses pieds la ville la plus extraordinaire du monde, une ville d'aujourd'hui et d'après- demain, vieille de millions d'années par surcroît, mais qui restait éternellement mystérieuse, malgré son apparence si moderne : Hongkong !

Cette ville aux mille facettes qu'on ne peut ni saisir ni comprendre, cette ville reflète la prodigieuse existence

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humaine : on peut donc vivre de mille façons différentes et surprenantes.

Les hôtesses d'accueil saluèrent la jeune femme et la débar- rassèrent de son vêtement du soir où s'entrecroisaient des fils d'or ; elle jeta un coup d'œil rapide au miroir et d'un geste vif tapota sa chevelure sombre, d'un noir d 'ébène, qui couvrait presque ses épaules. Chinoise superbe, métissée d'européenne aux traits asiatiques dominants, elle était plus grande que la moyenne des Chinoises, élancée, mais son corps présentait les formes harmonieuses et parfaites qui attirent l'œil des hommes et les font rêver. Les yeux en amande de son visage étroit étaient aussi noirs que ses cheveux, ses lèvres bien dessinées, pleines et sensuelles. Dans sa robe du soir vert bouteille, très près du corps, brodée de figures fantastiques et de dragons d'or et d 'argent, une pochette de paillettes dorées sous son bras gauche, elle représentait exactement le genre de cliente qui convenait en ce lieu.

Un des directeurs de l'établissement vint vers elle, et après un regard discret alentour, il s'inclina légèrement devant elle et demanda : « Madame est-elle seule ? Une place ? Aviez-vous réservé, madame? Je crains que toutes les places près des fenêtres... »

La jeune femme sourit, d'un air rêveur, presque absent. On aurait pu croire que son sourire traversait l'homme. Puis elle passa à côté du directeur médusé, pénétra dans la salle de verre et parcourut le couloir circulaire avec lenteur, paraissant très consciente de l'effet qu'elle produisait.

— Madame, dit poliment le directeur qui la suivait, je peux encore disposer d'une table au second rang, si vous voulez bien m'accompagner.

Sans réagir à cette offre, elle continua à avancer et s'arrêta près d'une table pour quatre, placée juste à côté de la paroi vitrée, et où quatre personnes avaient pris place. Trois d'entre elles étaient ensemble, c'étaient trois touristes français : M. Jean-Claude Rivière, M Marie Rivière, et le frère de cette dernière, M. Louis Chamfort. Ils avaient atterri le matin même à Hongkong, et s'étaient installés dans l'hôtel le plus raffiné et le plus cher de Kowloon. Mais suivant le conseil d'un ami qui avait voyagé dans la région, ils avaient décidé de dîner ici au restaurant « tournant » de Juno, au lieu de choisir le Gaddi, temple des gourmets de l'hôtel Peninsula afin de s'offrir le panorama extraordinaire, unique au monde.

Le quatrième convive de cette table était un lourdaud

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grisonnant qui arrosait de vin blanc son filet de lièvre — de quoi écœurer un Français — et qui avait fumé entre le deuxième et le troisième plat du dîner un cigarillo mexicain, ce qui avait provoqué une grimace de protestation muette de la part de M Rivière.

L'homme portait un smoking fait sur mesure, mais aussi un gilet de brocart argenté à motifs de fleurs brillantes qui dépassait et jurait avec le reste. Il parlait un anglais nasillard et grasseyant ce qui le faisait prendre sans aucun doute pour un Américain. Les convives ne s'étaient pas présentés, c'eût été bien inutile de pousser l'intimité jusque-là pour passer à peine trois heures face à face.

C'est à cette table que s'arrêta la jeune femme à la beauté si remarquable. Elle regarda l'homme en smoking et lui adressa un sourire, sans que pour autant bougent les traits de son visage : ses yeux restèrent fixés sur l'homme, mais sa peau bien tendue n'eut pas le moindre tressaillement, seules ses lèvres bien dessinées s'entrouvrirent en un léger sourire.

L'homme au smoking, médusé, ne la quitta pas des yeux, le regard aussi enthousiaste que surpris d'être distingué par une telle beauté. Il releva la tête, son visage ridé s'anima et encore surpris et gêné il lui rendit son sourire, tandis que la famille Rivière paraissait intriguée au possible.

D'un geste gracieux la créature de rêve ouvrit sa pochette aux paillettes dorées et sans cesser de sourire, elle en retira un petit pistolet chromé, un de ces maudits jouets mortels que l'on peut acheter dans toutes les ruelles de Hongkong. Elle leva son arme, visa le front de l'homme, et appuya par deux fois.

La tête se renversa un peu comme frappée par deux coups de marteau, et de deux petits trous juste au-dessus du nez perlèrent quelques gouttes de sang ; les bras tombants, les yeux encore ébahis et un sourire aux lèvres, l'homme était toujours assis sur sa chaise, appuyé au dossier, mais il ne comprenait plus rien. Il était mort sur le coup. D'un geste toujours gracieux la jeune femme rangea le pistolet dans son sac, et se tourna en souriant. Le directeur du restaurant la dévisagea, bouche bée pendant un long moment, paralysé par l'épouvante et l'hor reur. C'est le cri aigu de M Rivière qui le tira de cet état de choc, et tel un tigre il s'élança d'un bond sur l'élégante jeune femme. Mais celle-ci ne chercha pas à se défendre, et se laissa emmener sans réagir; toute intervention énergique s'avéra parfaitement inutile. Sans dire un mot, et toujours souriante,

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elle se laissa traîner jusqu'à l'office où on l'assit sans façon sur un tabouret.

Au restaurant même, le maître d'hôtel fit preuve de beau- coup de présence d'esprit ; il recouvrit le mort d'une grande nappe et s'inclina devant la famille Rivière en disant : « Puis-je proposer une autre table à madame et à ces messieurs ? »

Et il ajouta ce propos, inconsciemment insolent :

— La direction de l'établissement se permet de vous offrir une bouteille de champagne pour compenser cette frayeur.

— Je veux m'en aller, cria M Rivière, hors d'elle, je veux sortir d'ici, allons-nous-en, allons-nous-en !

— Nous vous prions de patienter un peu, rétorqua le maître d'hôtel visiblement énervé, on aura sans doute besoin de vous comme témoins.

A l'office, le grand directeur se tenait toujours devant la jeune femme, et demandait sans relâche :

— Mais, madame, pourquoi avez-vous fait ça ? Et qui êtes- vous ? Donnez-nous donc enfin votre nom ! Expliquez-nous... la police va arriver d'un instant à l'autre, alors, à quoi bon vous taire, madame, vous aviez un motif, voyons !

La belle créature garda le silence, sourit d'un air rêveur, appuya sa tête au mur derrière elle et ferma ses superbes yeux en amande. Son visage de ce fait se transforma, se contracta ; et parut soudain bien plus vieux.

Ses yeux, elle ne les avait pas rouverts, lorsque vingt minutes plus tard la police arriva, lui prit son sac, examina le mort et interrogea les Français de manière brève et polie comme savent le faire les Chinois. M Rivière explosa, disant qu'elle savait bien que Hongkong était remplie de gangsters et on écouta ces propos plus poliment encore.

Le commissaire Ting Tse-tung du premier commissariat de police de Kowloon considéra les deux petits trous du front de la victime comme s'il s'était trouvé en contemplation devant une nouvelle trouvaille archéologique, exposée au musée.

— Monsieur le commissaire, voyez-vous une explication?

lui demanda d'une voix voilée le directeur, debout à ses côtés.

Ça arrive comme une princesse, ça sourit et ça tue ! Et tout ça chez moi !

— Fallait bien que ça se produise quelque part, répondit Ting Tse-tung d'un air sarcastique. C'est tombé sur vous par hasard. D'ici un quart d'heure on aura emporté la victime, et il n'y aura plus rien d'anormal ici.

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— Mais, monsieur le commissaire, la presse... demain ce sera dans tous les journaux...

— Eh bien, rétorqua sèchement Ting Tse-tung, vous vous rendez compte de la publicité gratuite que ça va vous faire ! Il repassa à la cuisine et la belle était toujours assise sur son tabouret. Elle avait ouvert les yeux et considéra le commissaire d'un regard fixe et bizarre.

— Suivez-moi, ordonna Ting Tse-tung. Pouvez-vous mar- cher ? Sans répondre elle se leva, et sortit dignement de l'office.

Dans le hall ils croisèrent les porteurs venus pour transporter le mort. Elle s'arrêta, jeta un coup d'œil sur le cercueil, secoua la tête, puis poursuivit son chemin.

— Comment vous sentez-vous? demanda Ting Tse-tung à ses côtés.

— Bien, fit-elle. Ce fut le premier mot qu'elle prononça.

— Vous venez d'assassiner un homme, il y a une demi- heure !

— Vraiment ?

Ils étaient devant l'ascenseur. Ting Tse-tung la fit passer devant lui, fit signe à ses assistants de rester dehors, et descendit seul avec elle.

— Pourquoi l'avez-vous tué?

Elle sourit en silence ; ses yeux allongés brillaient comme des diamants. Ting Tse-tung poussa un profond sourire, renonça à poser d'autres questions, et l'emmena dans la voiture de service qui attendait en bas dans l'avenue Nathan.

— Occupez-vous de tout, dit-il au lieutenant posté près de la voiture. Affaire de routine.

— C'est elle, l'assassin? demanda le lieutenant en fixant la jeune femme.

— Incontestable. C'est elle qui a tiré.

Ting Tse-tung s'assit à côté d'elle en claquant bruyamment la portière de la voiture, et, de ce fait, le lieutenant ne put entendre la fin de la phrase :

— Ce n'est pas forcément celui qui tire qui est vraiment l'assassin ! Il valait mieux que cette réflexion restât inaudible.

D'ailleurs qui donc l'eût comprise?

En une heure de temps les membres les plus importants de l'administration de Hongkong se trouvèrent réunis au quartier général de la police. Le chef de la police présidait la séance.

Autour de lui et assez décontenancés étaient assis le directeur

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administratif de Kowloon, le commissaire de police de Canton Road, le chef de la police politique, un représentant du gouverneur de Hongkong, deux délégués du conseil législatif et deux autres du conseil exécutif. Quarante fonctionnaires d'une

« commission spéciale X » étaient installés derrière eux sur des sièges pliants dans cette salle bien trop exiguë pour une assemblée aussi nombreuse.

Le chef de la police jeta un regard vers Ting Tse-tung, fit un signe de tête, et sans autre préambule il déclara :

— Messieurs, je vous ai convoqués ce soir au quartier général à une heure inhabituelle parce que je considère que vous devez être confrontés encore aujourd'hui avec un fait qui vraisemblablement provoquera dès demain une tempête d'in- dignation et une agitation sans égale : ce sera une tornade infiniment plus dangereuse, plus dure et plus destructrice pour notre ville qu'un cyclone qui anéantit des milliers de bateaux dans le port même et balaye des quartiers entiers. Veuillez, je vous prie, écouter le rapport du commissaire Ting. Ici, à Hongkong, comme nous le savons tous, nous sommes écrasés de soucis, mais cette affaire risque de dépasser tout le reste Ting Tse-tung s'avança, s'appuya contre le bord d'une table, et donna un bref signal ; un projecteur s'alluma aussitôt et sur le mur blanc du fond de la salle apparut une photo de l'homme assassiné en smoking. Les deux points d'impact juste au-dessus du nez étaient parfaitement discernables. Ting Tse-tung expliqua :

— Il y a à peine trois heures que cet homme a été tué par balles à la table 26 du restaurant panoramique Juno. Vous voyez deux entrées de balles, tirées par un petit pistolet de femme, un 4 mm. C'est un jouet, mais mortel à bout portant. La victime, un certain Reginald Marcus Rogers, est originaire de San Francisco, veuf et il était installé ici à l'hôtel Hyatt Regency où il occupait la suite n° 2. Sur sa fiche il avait déclaré être importateur, et pendant les cinq jours qu'il a passés ici on a pu remarquer son enviable puissance. Il a eu recours à presque tous les services « d'escortes », depuis la Société de la Vénus de l'Est jusqu'à la Société l'Eve d'Adam. Il se faisait toujours envoyer leurs « stars » dans sa chambre. Si je me mets à citer des noms, nos collègues des « Moeurs » vont se régaler.

— Un peu plus de retenue! je vous en prie, commissaire Ting, recommanda le chef de la police.

Un léger sourire parut sur le visage de ce dernier, et il ajouta :

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— Voilà, c'est tout ce qu'on a pu apprendre au sujet de M. Rogers. Un télégramme a été lancé à l'adresse de la préfecture de police de San Francisco, nous pensons avoir une réponse sans retard. M. Rogers a été tué par une femme, reprit- il après une brève interruption.

— Alors un vulgaire assassinat, commis par une prostituée, s'écria, piqué, un des parlementaires. Je ne le répéterai jamais assez, la police est bien trop molle, Hongkong et surtout Kowloon sont de vrais bas-fonds...

Ting Tse-tung rétorqua sèchement :

— La meurtrière n'est pas une prostituée, ou comme on le dit si joliment, une partenaire pour tous les plaisirs ! Elle n'est rien.

— Pardon, fit le représentant du gouverneur, en se penchant en avant, qu'est-ce que ça veut dire ?

— Elle est inconnue et restera inconnue. Elle n'a pas de nom.

— Ça n'existe pas !

— Elle n'a ni domicile, ni chambre, ni famille. Elle ne manque à personne, elle est le néant personnifié.

— Impossible.

— Vous allez la voir dans un instant, messieurs, elle attend dans une salle voisine. Elle est encore capable de se tenir debout, de marcher droit, elle vous sourit et vous entend encore. Je dis encore, et nous ne savons pas exactement quand tout cela changera. Cela a duré une fois six heures, une autre fois trois jours, puis un jour, puis une fois encore trois heures, il n'y a là rien de systématique.

— Mais... que voulez-vous dire par là, Ting, s'écria le chef de la police politique, très agité.

— Cet assassinat-là est le cinquième de ce genre et il s'est déroulé absolument comme les quatre précédents. Chaque fois l'auteur en était une femme, inconnue, belle, un superbe néant.

Et elles sont toutes mortes après un temps donné, comme je viens de le dire, d'une maladie effroyable et inconnue : leur foie s'est décomposé, est devenu une masse infecte. Je vous ai apporté les rapports d'autopsie et vous en lirez plus tard les extraits. Cela commence par une paralysie du cerveau, puis les malades tombent dans un coma dont seule la mort les délivre.

Celle qui a résisté le plus longtemps est la troisième meur- trière : elle est restée dans le coma pendant près de quatre semaines jusqu'à ce que son foie se soit décomposé. Les médecins de l'hôpital Kwong Wah, sous la direction du docteur

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Wang An-tse, ont essayé tout ce qui était possible grâce aux découvertes les plus récentes. En vain. Comme on ne connaît pas la maladie, on n'en connaît pas non plus les remèdes.

Le commissaire Ting fit une profonde inspiration. Un silence absolu régnait dans cette salle où l'on suffoquait. Dans tous les esprits circulaient des pensées terrifiantes qui se transformè- rent vite en visions apocalyptiques d'épidémies destructrices.

— Nous trouvons chez cette meurtrière les mêmes symptô- mes que chez les précédentes, déclara Ting. Elle agit comme un ordinateur à qui on a donné les consignes suivantes : il te faut tuer M. Reginald M. Rogers, vas-y; il dîne au restaurant panoramique Juno, 655 Nathan Road.

— Un assassinat, commis sous hypnose, j'ai déjà lu cela quelque part, dit le représentant du gouverneur d'une voix sourde.

— Non, monsieur, il ne s'agit pas d'hypnose dans ce cas, répondit le commissaire Ting en élevant la voix. Moi je soupçonne, et c'est épouvantable, qu'à la suite de certaines manipulations, on crée une nouvelle maladie qui d'abord annihile la volonté du malade, qui par ailleurs est lui-même détruit dans cent pour cent des cas. Il n'y a aucune chance de guérison. Imaginez que cette maladie soit répandue dans un large public... je vous laisse y penser à votre guise... La réalité peut devenir pire encore...

— Non, tout cela ressemble trop à des vues de l'esprit, dit le chef de la police politique d'une voix éraillée. C'est impensable.

— Il y a soixante-dix ans il était tout aussi ridicule et impensable que l'on puisse diviser l'atome et détruire ainsi la terre entière. Et d'un seul coup ! Il y a bien des choses impensables, mais parmi elles, et nous, les générations actuel- les, nous l'avons appris, il en est de réalisables. Je peux, moi, présenter cinq cas absolument incroyables et impensables...

— Alors, commissaire Ting, dit un des parlementaires tout en toussotant nerveusement, vous admettez que certains sont capables de créer de toutes pièces une maladie qui porte à commettre des actes criminels ? Et que le malade agit incons- ciemment ? Et qu'en même temps il va vers une mort inélucta- ble. C'est bien ça ?

— Tout porte à croire qu'il en est exactement ainsi, répondit prudemment Ting.

Il avança vers la porte qui donnait sur la salle contiguë, l'ouvrit et s'effaça.

Lentement, comme un fantôme ambulant, la belle inconnue

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pénétra dans la salle où régnait un silence sépulcral. Les yeux de tous ces hommes, qui pourtant étaient très habitués à la beauté asiatique, s'élargirent à la vue de cette merveille ensorcelante. La jeune femme, aux côtés de Ting, traversa la salle de part en part, un sourire muet sur les lèvres, la démarche hautaine, donnant cependant l'impression de se mouvoir comme un automate. C'est seulement après qu'elle eut quitté la salle et que la porte en claquant, eut fait sursauter tous les assistants comme s'il y avait eu une explosion, qu'on entendit le profond soupir du représentant du gouverneur. Il paraissait suspendu à son fauteuil, essuyait la sueur qui avait recouvert son front, et luttait contre un frémissement au coin des lèvres. Le chef de la police, habitué quant à lui, à des scènes dramatiques, se ressaisit le premier.

— Incroyable, messieurs, s'écria-t-il, je pense que vous êtes de mon avis, c'est incroyable !

— Et vous dites que cette femme est gravement malade ? dit en bégayant le chef de la police politique.

— Autant que je sache, déclara calmement Ting, elle est pratiquement morte. Le moment précis de sa mort physique a été programmé, depuis longtemps. Nous, nous savons seule- ment que cette femme a tué M. Rogers de San Francisco, mais nous n'apprendrons jamais d'où elle le connaissait, ni si seulement elle le connaissait, ni pourquoi elle l'a tué. Nous n'apprendrons absolument rien. Je vous répète que ce cas-ci est le cinquième.

— En combien de temps ? demanda le représentant du conseil exécutif de la colonie britannique de Hongkong.

— En l'espace de six mois, monsieur.

— Et vous vous attendez à d'autres assassinats aussi mysté- rieux ?

— Oui, répondit Ting en inclinant la tête à plusieurs repri- ses. Et même plus que cela.

— Quoi donc ?

— En exportant cette « maladie » on pourrait remplir le monde entier de ces assassins « innocents ». Personne ne pourrait vivre à l'abri de ces exécuteurs souriants et muets.

— Quel chaos incroyable, soupira le chef de la police politique. On ne pourrait plus protéger aucun homme politique si ces « malades » étaient à même d'apparaître n'importe où.

— Oui, mais ce ne sont là que des suppositions, s'écria le délégué du conseil exécutif qui joignit les mains qui trem- blaient un peu. Pour couper court à toutes les discussions, je

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me permets la question qui après tout s'impose : que peut-on faire si c'est là l'horrible vérité?

— Trouver l'origine de la maladie, répondit le chef de la police.

— Mais, comment ?

— Voilà une question qui ressemble à la suivante : y a-t-il des habitants sur la planète Mars? Et si oui, qui va nous en chercher un ?

— Questionner la meurtrière inconnue ne rime à rien, dit le commissaire Ting avec une lenteur voulue. Même pas en utilisant les méthodes du temps jadis, sinon je n'aurais pas manqué d'en faire usage.

— Voyons, commissaire Ting! fit le chef de la police, l'air désapprobateur.

— Comme j'en parle aussi ouvertement, vous pouvez croire qu'il n'en sera rien. Et puis, à quoi bon ? Un tel interrogatoire serait insensé. La belle meurtrière est une personne soignée, nous pourrons savoir d'où viennent sa robe du soir, ses dessous, son parfum, ses bijoux (qui sont d'ailleurs du toc), ses chaussu- res, son sac à main, et avec un peu de chance même d'où sort son petit pistolet, mais je peux vous prédire ce que donnera le témoignage ; on dira : un jeune Chinois est entré dans le magasin, il a choisi l'article, payé en numéraire, et est reparti.

Son signalement ? Le même que celui de cent mille Chinois de Hongkong. Nous apprendrons également qui était M. Rogers et nous constaterons qu'il n'y avait aucune raison de le suppri- mer. Je peux vous énumérer les victimes précédentes : le premier était un Italien, Sergio Rafello, propriétaire de qua- torze salons de dégustation de glaces; le second, le Brésilien Jorge Cavelho, qui possédait des mines d'améthystes. Le numéro trois était le Syrien Hamid Ibn Mohammed Rassul, propriétaire de trois hôtels à Damas, et le quatrième un Hollandais, Jan van Fleeten, décorateur de navires. Et voici donc le cinquième, l'Américain Reginald M. Rogers de San Francisco, importateur selon sa fiche d'identité. Ce qu'il importait, nous allons le savoir sous peu. Mais tous ces gens étaient parfaitement inoffensifs, ils étaient venus à Hongkong en touristes, et on les a tués apparemment sans motif.

Ting Tse-tung se tut et, saisissant un verre de jus de fruits, il en but une grande gorgée.

Le chef de la police du secteur de Canton Road se gratta le nez, il pensait bien qu'il aurait un travail considérable sur les bras.

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— Cinq assassinats insensés, mais tous exécutés avec méthode, dit-il. Et toujours le même style, ce n'est pas par hasard !

— Ça nous le savons aussi, répondit brusquement le chef de la police de Kowloon. Il faut reconnaître, messieurs, que nous nous trouvons dans une situation infernale. Nous croyons savoir que nous devons nous attendre à d'autres crimes, et nous n'avons aucun moyen de les empêcher. C'est bien ce que le commissaire Ting a nettement exprimé, n'est-ce pas ?

— Le docteur Wang An-tse attend dehors. Avec son équipe il a examiné les quatre cas précédents et a assisté à la mort des criminels. Il s'occupera également de notre inconnue, sans être à même de l'aider. Voulez-vous entendre le docteur Wang, messieurs ?

— Bien sûr, s'écria le délégué du conseil législatif.

— Je vous en prie. Ting se dirigea vers la porte et l'ouvrit.

Le docteur Wang An-tse, un homme de 41 ans, était svelte, et très grand pour un Chinois, il mesurait 1,78 m. Elégant comme tous les Chinois aisés de Hongkong, il portait un complet de soie gris clair, une chemise d'un blanc éblouissant et une cravate de soie gris clair, ornée de petites étoiles argentées.

Derrière ses lunettes à monture dorée, son regard calme observait l'assemblée. Il avait la démarche d'un homme réflé- chi et sûr de lui, peut-être un peu maniéré. Il alla vers la table où Ting s'était appuyé en parlant, et glissa ses mains dans les poches de son veston de soie.

— Je suppose, docteur Wang, que vous avez préparé un rapport médical détaillé, dit le chef de la police, avant même que le docteur Wang eût pu dire un mot. Vous seriez aimable de nous l'envoyer par écrit, car nous ne sommes pas compé- tents en médecine et nous ne comprendrions que la moitié de ce qui se dirait. Mais, en revanche, pouvons-nous vous poser des questions ?

— A votre disposition, répondit le docteur Wang en s'incli- nant poliment, et en gardant le visage impassible.

— Vous avez suivi quatre criminels mystérieux jusqu'à leur mort ?

— Oui.

— Ils sont tous tombés dans le coma sans avoir auparavant dit la moindre parole ?

— Exactement, monsieur.

— De quoi sont-ils morts, en termes courants, s'il vous plaît.

— D'une décomposition totale du foie. L'autopsie donne

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chaque fois le même tableau : une infection, ou un virus quelconque, ou n'importe quoi d'autre, nous n'en savons rien, détruit le tissu du foie. Les cellules du foie se décomposent, il se produit un empoisonnement total du corps et par suite un coma hépatique, et la mort. Le foie est l'élément chimique le plus important de notre corps, la centrale chimique. Sans foie il n 'y a plus rien. Sa fonction détermine le tableau général de notre santé, depuis le métabolisme de l'albumine jusqu'à la désintoxication du corps tout entier. C'est pourquoi les dom- mages présentés par le foie constituent toujours des problèmes et sont souvent irréparables. Mais jamais encore nous n'avions pu constater, et dans toute la littérature médicale il n'en existe aucune mention, qu'un foie soit transformé en si peu de temps en une bouillie infecte. C'est vraiment un mystère.

— Et cette maladie épouvantable, vous ne l'avez constatée que chez ces quatre assassins ? — Oui.

— C'est affreusement inquiétant, bégaya le délégué du conseil législatif, c'est sacrément macabre! Mon Dieu, si tout cela était révélé au public ! Je vous suggère, messieurs, de faire passer cela pour un vulgaire crime de prostituée, et je vous demande une totale discrétion à ce sujet.

— Voilà qui va de soi, répondit le chef de la police de Kowloon en pianotant sur la table d'acajou. Docteur Wang, avez-vous une idée au sujet de cette maladie ?

— Je n'ai aucun indice, monsieur. Le docteur Wang An-tse retira ses lunettes cerclées d'or, prit son mouchoir blanc pour en essuyer les verres, et puis les remit sur son nez. Même le microscope électronique de l'hôpital de la Reine Elisabeth ne fournit aucun renseignement.

— Pourrait-il s'agir d'un poison ?

— Possible, dit le docteur Wang en haussant les épaules, toutes les hypothèses sont permises.

— Dans ce cas, je connais quelqu'un qui pourra vous être utile, commissaire Ting.

Le représentant du gouvernement essuya une nouvelle fois son front couvert de sueur froide.

— Depuis trois mois environ un médecin et toxicologue allemand, le docteur Fritz Merker, se trouve à Hongkong au titre du système d'échanges entre les instituts tropicaux. Il travaille à l'hôpital de la Reine Elisabeth, au service de la recherche et on le dit exceptionnellement capable.

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— Je le connais, dit le docteur Wang en agitant ses doigts dans ses poches. Il s'occupe des venins de serpents.

— Voilà qui pourrait être une bonne orientation. Un venin de serpent peut-il avoir de tels effets ? — Certainement.

— Je vais dégager le docteur Merker pour qu'il puisse se consacrer à la police.

Le représentant du gouvernement poussa un soupir de soulagement. Voilà qui contribuerait à résoudre cette énigme effroyable. Même s'il existait déjà à Hongkong quelques bons experts dans ce domaine, deux yeux de plus serviraient à voir davantage de données.

On frappa à la porte, et Ting alla ouvrir. La tête d'un policier se glissa par l'entrebâillement, et il déclara : — La femme vient de s'effondrer. Elle est sans connaissance.

— Oh, mais c'est allé vite, s'écria le docteur Wang en s'écartant de la table. Ces messieurs ont-ils encore des ques- tions à me poser, ou puis-je disposer ? Je vais faire conduire la malade à l'hôpital Kwong Wah.

— Plutôt à l'hôpital militaire, pour cette fois, répondit sèchement Ting.

Le docteur Wang s'immobilisa comme s'il avait été frappé de plein fouet, et s'écria : — Pourquoi ?

— Parce que cela facilitera ma surveillance.

— L'hôpital militaire n'est pas équipé pour un tel traite- ment, commissaire Ting.

— On peut mourir dans n'importe quel lit, dit Ting en souriant poliment. Moi je voudrais que, dans la mesure du possible, ce soit le docteul Melkel qui s'occupe exclusivement de la moribonde.

Bien que Ting Tse-tung possédât fort bien l'anglais, il était absolument incapable de prononcer les deux « r » du nom de Merker. Il les transformait en « I » à la chinoise, ce qui donnait docteur Melkel. Wang An-tse inclina la tête et haussa les épaules. Ce que Ting ordonnait là était une offense qu'il ne pouvait pas accepter sans perdre la face. Voilà près de vingt ans qu'il faisait son devoir de médecin, d'abord là-bas à Aberdeen comme médecin des pauvres, plus tard dans le labyrinthe des jonques et des sampans du port de Yau Ma Tei, exposé aux typhons, et depuis quatre ans en tant que chef de service des maladies internes et infectieuses de l'hôpital de Kwong Wah. Dans son cabinet de consultations se trouvaient les diplômes les plus flatteurs, provenant des instances les plus

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élevées. C 'était pour lui une véritable gifle que de se voir enlever ce cinquième cas de la maladie mystérieuse.

Je demanderai des explications au commissaire Ting, dit Wang avec raideur.

— Je vous en prie, messieurs, pas de démêlés privés, s'écria le représentant du gouverneur, nous avons bien assez de soucis.

Nous vous faisons pleine confiance, docteur Wang, mais si le commissaire Ting estime qu'il est indiqué de placer la meur- trière sous protection militaire, pourquoi nous y opposer?

Il se leva, et comme il occupait le rang le plus élevé dans cette assemblée, ce fut la fin de cette réunion.

— Que peut faire la police? demanda quelqu'un.

— Attendre, répliqua Ting d'un ton sec. Et croire à un miracle.

En vertu d'un service d'échanges médicaux entre Hongkong et l'institut de maladies tropicales de Hambourg, le docteur Fritz Merker était arrivé à Kowloon depuis quatre mois. Il avait pris d'abord quatre semaines de vacances, considéré son nouveau champ d'activités sous tous les angles, visité aussi la ville chinoise géante de Canton, et il fut sans cesse ébloui et subjugué par les aspects multiples de Hongkong, par l'immen- sité de cette ville fascinante, qu'en Europe on ne se représente que par un point sur la carte, comme un genre de presqu'île. Ce que l'on ignore en général en Europe, c'est l'existence dans l' arrière-pays de la ville industrielle de Tsuan Wan avec ses millions d'habitants, son industrie, des tours dont chacune peut abriter jusqu'à 1 000 personnes, en majorité des Chinois qui ont fui leur pays et qui, telles des fourmis, transportent les pierres retirées des collines et des montagnes de la région, jetant terre et rochers dans la mer pour gagner de nouveaux terrains habitables; ce que l'on ignore, c'est que Hongkong se compose d'un labyrinthe d'îles plus ou moins grandes, de vastes plaines où l'on cultive le riz et où se trouvent d'énormes élevages de poulets et de canards d'où vient le fameux « canard de Pékin » que l'on trouve surgelé dans nos magasins d'alimen- tation fine ; on ignore aussi qu'il y a là un monde à part, pas très grand certes, mais où survivent depuis des siècles une culture asiatique bien enracinée et une animation qui lui est propre.

C'est ainsi que le docteur Merker, lui aussi, après ses quatre semaines de vacances, passées à voyager dans tous les coins,

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était pratiquement ensorcelé comme tous ceux qui font connaissance avec Hongkong. Il était devenu amoureux de cette ville géante et de son environnement de rêve. Lorsque trois mois auparavant, il avait pris son service à l'hôpital de la Reine Elisabeth, il avait déclaré, après une première poignée de main, à son chef de clinique :

— En principe je dois rester ici pendant un an, mais je crains que le calcul n'ait été mal fait. Il est bien possible que je m'habitue à ce coin de terre.

Voici ce qu'il écrivit à son ami de Hambourg, le docteur Hans Zeisig, médecin-chef de la 2e clinique chirurgicale d'Eppen- dorf : « Hongkong est indescriptible. Il faut voir cette ville, y vivre, l'écouter, la sentir, la ressentir. C'est un monde où se confondent les contes de fées et les cauchemars. Promener son regard la nuit depuis le pic Victoria sur Hongkong, Kowloon et les Nouveaux Territoires, vous coupe le souffle, rien au monde ne peut se comparer à une telle vue. Lorsqu'on en a joui une seule fois, on sait qu'on y est accroché pour de bon. Je ne crois pas revenir jamais à Hambourg. »

— Ça va se tasser, déclara le docteur Zeisig lorsqu'on lut cette lettre à haute voix au sein d'un cercle d'amis, et ce au plus tard le jour où Fritz aura eu un bon coup sur le crâne et se sera réveillé, dépouillé de tout. Ce qu'il n'écrit pas, c'est que ces femmes aux yeux noirs l'ont ensorcelé. Mes enfants, je connais Singapour, moi, et c'est tout pareil ; il y a là des filles qui font battre la chamade à tous les cœurs. Ce qui se balade là, dans la nature, aucun peintre n'est capable de le rendre sur sa toile et voilà ce qui a privé notre Fritz du sens des réalités.

Trois mois de service dans un hôpital de Kowloon représen- tent, malgré des installations modernes, un autre monde que celui de Hambourg. C'est pourquoi le docteur Merker fut à peine surpris lorsqu'un policier en civil vint le voir à l'hôpital, lui présenta une lettre du gouverneur et l'avisa qu'il devait se placer à l'instant même à la disposition de la police. On l'attendait au quartier général pour lui transmettre les infor- mations nécessaires.

Le docteur Merker se changea et monta dans la voiture du policier pour l'accompagner à la présidence, où le chef de la police le reçut séance tenante, lui serra la main et lui présenta le commissaire Ting Tse-tung. Ting inspecta rapidement ce grand Allemand blond, un peu dégingandé, qui lui inspira aussitôt confiance. Merker était de la taille de Ting, mais plus large d'épaules, plus lourd de charpente et plus musclé, et il

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avait quatre ans de moins que lui. Il doit être bon nageur, pensa Ting, à tout hasard, et un solide boxeur. Il doit y avoir un sacré punch dans de tels muscles. Mais ses yeux bleu clair sont dangereux pour nos femmes; qui donc résisterait à un tel regard? Avec des yeux pareils il fera ce qu'il voudra de nos fill es ! Et soudain Ting eut une inspiration : peut-être cela va- t-il lui être utile ici, car jusqu'à présent tous ces assassins mystérieux étaient des femmes ! Etait-ce systématique égale- ment ?

— Nous allons devoir travailler ensemble, docteul Melkel, dit Ting en s'inclinant avec grande politesse.

Le docteur Merker qui avait l'habitude d'être appelé Melkel, car à l'hôpital on disait ainsi, haussa les épaules, et répondit :

— Puisque vous le dites, commissaire. J'ai eu un avis du gouverneur où il me charge d'occuper un nouveau poste de recherches. Certains de vos collègues ont-ils été mordus par un serpent inconnu?

Cela avait l'air d'une petite blague, mais cela ne fit rire personne.

— Dès que je vous aurai expliqué mon problème, je vais vous emmener à l'hôpital militaire où se trouve une femme mystérieuse en train de mourir d'une mort lente.

— A la suite d'une morsure de serpent ?

— Non, mais d'une rapide et totale décomposition du foie.

— Ça, ça n'existe pas.

— Vous avez raison, mais malgré tout c'est là le cinquième cas; ce sont toujours des femmes qui en sont atteintes, et la maladie survient toujours après un assassinat commis par ces dames elles-mêmes.

Le sourire de Ting parut forcé.

— Des meurtrières ? Le docteur Merker comprit qu'il n'était pas question d'humour, et il sentit comme un souffle glacé passer sur lui.

— Oui, elles ont tué et ont succombé peu après à cette décomposition absolument inconnue du foie. Pendant que nous roulerons vers l'hôpital militaire, vous pourrez lire les rapports d'autopsie concernant les évolutions de la maladie et ceux du docteur Wang. Nous espérons vivement que vous découvrirez l'origine de cette maladie. Tout nous porte à croire qu'elle a été créée de toutes pièces. Un poison, une radiation, autre chose ? Mais la maladie existe.

— A votre santé ! s'écria le docteur Merker en poussant un gros soupir. Je me rends compte de l'honneur qu'on me fait en

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me chargeant d'une telle mission, mais je vous le dis très honnêtement : c'est un sacré emmerdement que je préférerais éviter à tout prix !

— Moi aussi, dit Ting Tse-tung avec un large sourire. Vous me plaisez beaucoup, docteul Melkel, nous allons pouvoir faire ensemble un bon travail.

Quelques explications données par Ting et la lecture des rapports d'autopsie occupèrent le docteur Merker pendant le trajet en voiture vers l'hôpital militaire, et le mirent en présence d'un univers que jusqu'à présent seuls des films de télévision et des romans policiers lui avaient fait connaître.

Cinq morts, quatre meurtrières qui toutes avaient succombé à la décomposition de leur foie, jamais de motif, tout cela justifiait l'inquiétude du gouvernement et l'échafaudage des combinaisons les plus fantaisistes. Merker considéra cepen- dant qu'il y avait dans tout cela une exagération démesurée qui devenait une vision d'horreur : l'idée de Ting qui pensait que cette maladie pouvait être exportée dans l'univers entier et servir d'arme meurtrière.

A l'hôpital militaire ils furent reçus par le médecin-chef, un lieutenant-colonel, qui leur présenta un visage plutôt désa- gréable.

— Je ne sais pas pourquoi on fait appel à l'armée chaque fois qu'une mouche pique un idiot officiel, dit-il assez grossière- ment. Que dois-je faire de cette femme ? J'ai fait bloquer l'extrémité de l'aile II. La voilà qui immobilise quatre cham- bres à elle seule, et pourquoi tout ça ? Au bureau du gouverneur on déclare : situation super-confidentielle. Puis-je demander ce qui se passe ?

— Il s'agit d'une nouvelle maladie, monsieur.

— Et c'est chez moi que l'on vient installer ça ? Je proteste au nom de l'armée. A l'hôpital de la Reine Elisabeth il y a un énorme service pour les contagieux.

— C'est de là que je viens, rétorqua le docteur Merker.

— Ah bon ! Vous venez vous débarrasser de la bonne femme !

— Non, je vais m'installer à côté de son lit.

— Dans mon hôpital ?

— C'est ce dont je suis chargé, monsieur, dit-il en donnant une petite tape sur le dos de son collègue. Je suis intrigué de voir les changements survenus dans l'état de notre belle inconnue.

Le docteur Wang An-tse vint à leur rencontre dans le long couloir, lorsque de loin il entendit le bruit de leurs pas.

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L'extrémité de cette aile de l'hôpital avait été barrée par des parois mobiles, et sur une affiche on pouvait lire l'avertisse- ment suivant : « Défense d'entrer — Danger de mort. »

Le docteur Wang, la mine défaite, avait les yeux qui papillo- taient derrière les verres de ses lunettes, alors qu'il regardait le docteur Merker. Il portait encore un élégant complet de soie gris clair, mais il avait retiré sa cravate et ouvert le col de sa chemise.

— Enfin vous voilà, dit le docteur Wang d'un air las, je suis bien content que vous soyez arrivé et je vais aller dormir sans tarder.

— Comment va-t-elle ? demanda Ting.

— Toujours pareil, inconsciente.

— Coma hépatique ? demanda le docteur Merker.

— Non, et c'est exactement ce qu'on a pu constater chez les autres. La perte de conscience a une autre origine. Laquelle?

Mystère! C'est seulement lorsque intervient cet état d'incons- cience que se produit la phase comateuse, et que se décompose le foie.

— C'est dingue ! Le docteur Merker entra dans la chambre de la malade et s'immobilisa, stupéfait, près de la porte. Il était indéniable qu'il n'avait encore jamais vu une aussi belle créature. Elle était étendue, découverte, sur le lit, d'une nudité fascinante, ses longs cheveux noirs recouvrant comme d'une draperie ses épaules et sa poitrine, on aurait cru qu'elle posait pour des photos, destinées à un magazine pour hommes. Une teinte à peine olivâtre marquait sa peau blanche, et ses lèvres rouges s'arrondissaient comme pour provoquer un baiser.

Dans la veine de son bras gauche on voyait une aiguille, reliée par un tube de plastique à l'appareil de perfusion.

— C'est là tout ce que je peux faire, dit le docteur Wang découragé, une transfusion sanguine avec du sang très enrichi.

Mais cela n'empêche pas les progrès rapides de la nécrose.

— Vous avez pu constater, mon cher confrère, que le foie se nécrose ? demanda le docteur Merker.

— J'ai vu quatre cas absolument semblables.

— Il faut que je voie ça, s'écria le docteur Merker en s'asseyant sur le bord du lit, tout en observant la jeune femme.

Il se rappela les paroles de Ting : elle a tiré sans motif sur l'Américain Reginald M. Rogers au restaurant panoramique Juno, et a souri en silence jusqu'au moment où elle s'est évanouie. Un être humain transformé en « néant » comme l'a décrit Ting, mais un « néant » superbe.

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Le docteur Merker examina son abdomen, releva ses paupiè- res, écouta son cœur, prit son pouls. Le docteur Wang fit une grimace méprisante, c'était là la façon d'examiner d'un simple infirmier.

Puis le docteur Merker s'écria : — Je suppose que l'hôpital militaire est équipé à fond.

— Je n'ai rien à vous répondre, grogna le médecin-chef.

— Bien. Il me faut tout ce qui est nécessaire pour établir une image contrastée des artères hépatiques et pour une ponction bioptique du foie. (Il se leva et regarda bien en face les visages blêmes du docteur Wang et du médecin-chef. Tout paraissait déformé sous l'éclairage insuffisant de la chambre.) Je vais faire cela en salle d'opération. Mon cher confrère Wang, désirez-vous y assister ? Je veux établir avec l'image des artères et des artérioles les modifications survenues dans le paren- chyme du foie, au cas où il y en aurait ! Vous disposez d'un laparascope ici ? ajouta-t-il en se tournant vers le médecin- chef.

— Oui, grogna le lieutenant-colonel de Sa Majesté.

— Et du nécessaire pour cathétériser le foie ?

— Quelle question !

— Allons-y, s'écria le docteur Merker en s'écartant du lit.

Nous allons savoir sans délai ce qui se passe au juste dans le foie de cette femme.

Le docteur Wang retira sa veste et l'accrocha sur le dossier d'une chaise. Dans l'antichambre de la salle d'opération il recevrait une blouse verte spéciale. « J'ai sous-estimé cet Allemand », pensa-t-il en tapotant soigneusement sa veste pour la défriper.

Moins d'une heure s'était écoulée, lorsque le docteur Merker se trouva devant une masse cylindrique de tissu hépatique qu'il avait retiré du foie malade à l'aide d'un trocard. Dès le premier coup d'œil jeté au microscope, il avait pu constater qu'il se trouvait en présence d'une décomposition massive des cellules hépatiques, telles que l'on en observe parfois dans des cas d'intoxication grave due à des champignons, en particulier lorsqu'il s'agit d'amanites phalloïdes ou oronges vineuses vertes. Mais tous les symptômes étaient atypiques pour une intoxication due aux champignons... par ailleurs, ceci repré- sentait malgré tout une lueur d'espérance au milieu des

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ténèbres mystérieuses de cette maladie inconnue. Le foie avait l'aspect d'un foie empoisonné.

Y avait-il dans cette affaire un individu qui restait dans l'ombre, qui donnait l'ordre de tuer et qui paralysait ces femmes porteuses de mort à l'aide d'un poison inconnu? Il y avait là une idée capable de vous électriser!

Le docteur Wang, qui avait perdu tout ressort, fit un petit geste de la tête lorsque le docteur Merker lui fit part de ses observations.

— On a déjà pris tout cela en considération, déclara-t-il, éreinté, en remettant son veston. Nous ne disposons d'aucun poison que l'on puisse analyser. Et le poison agit toujours de la même façon. Nous avons eu quatre victimes qui au point de vue de la durée ont réagi chacune différemment. Ce n'est pas ce qui se serait produit avec un poison qui serait toujours le même. Les effets d'un poison sont limités.

— Mais nous partons en général d'un élément connu, mon cher confrère. Ici nous nous trouvons devant quelque chose d'inconnu !

Le docteur Wang fit un geste de renoncement :

— Moi, je vais me coucher, dit-il, occupez-vous donc entière- ment de cette affaire, docteur Merker. Je ne veux pas me rendre malade, même pour un cas aussi extraordinaire. J'appartiens à des centaines de patients de cet hôpital. Lisez mes rapports et vous verrez que cette femme va mourir exactement comme les autres. Bonsoir !

Le docteur Merker passa quatre jours et quatre nuits au chevet de l'inconnue. Celle-ci restait absolument inconsciente, et il ne se produisit rien ; il ne constata, ne vit, n'entendit rien.

Le pouls avait un peu faibli, les battements du cœur avaient un rythme plus lent, mais la peau ne changea pas, ne présenta pas de coloration jaune qui eût indiqué que la décomposition du foie progressait.

Le cinquième jour le docteur Merker reçut un petit paquet, qui avait pour expéditeur un magasin d'horlogerie de Victoria, en face de l'île de Hongkong. Comme Merker n'y avait pas acheté une montre, ni rien donné à réparer là-bas, il ouvrit le petit paquet avec mille précautions; mais il n'y eut ni explo- sion, ni projection de gaz, ni sifflement, pourtant les Chinois ne manquent pas d'imagination dans ce domaine.

L'intérieur du paquet était soigneusement garni d'ouate rose, sur laquelle, comme un bijou précieux, reposait une dent recourbée. Merker la porta à hauteur de ses yeux à l'aide d'une

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pincette, et c'est ensuite seulement qu'il prit le billet qui s'y trouvait et où il put lire en anglais : « Laissez mourir ce qui n'a plus rien à espérer sur terre, mais sauvez une vie qui possède encore un avenir ici-bas, la vôtre. »

Il téléphona immédiatement à Ting pour lui lire le contenu du billet et il ajouta :

— Le cadeau est le crochet à venin d'un serpent. C'est là une forme de menace assez originale !

— Cela révèle en tout cas que le fantôme mystérieux s'in- quiète et a reconnu que vous étiez dangereux.

— Voilà qui est rassurant, monsieur Ting!

Le docteur Merker reposa la dent sur l'ouate rose et ajouta :

— Savez-vous combien il est facile de tuer quelqu'un ?

— Bien sûr, c'est notre métier de découvrir ce genre de choses.

— Et comment puis-je me protéger, seul, parmi trois mil- lions de Chinois, tous pareils?

— Comme si vous étiez parmi trois millions d'Européens!

Avez-vous peur, docteur Merker ?

— Je ne vous dirai pas que je suis enchanté de me sentir la cible d'un inconnu.

— Alors, vous renoncez ?

— Nous ne nous connaissons pas encore bien, monsieur Ting, répondit fermement Merker. Je suis médecin, et je me trouve ici devant un problème d'ordre médical. Voilà qui m'engage à perpétuité. Cette réponse vous satisfait-elle ?

— Parfaitement. Que Dieu vous garde! Un large sourire éclaira le visage de Ting Tse-tung, mais cela, Merker ne pouvait pas le voir, bien sûr.

— Le mieux pour moi, ce serait d'avoir un pistolet, et un gilet pare-balles. Voulez-vous, je vous prie, me faire parvenir l'un et l'autre ici même, monsieur Ting ?

C'est ce soir-là que la meurtrière inconnue ouvrit les yeux et dévisagea d'un œil clair le docteur Merker. Elle ne bougea pas, étendue immobile, seules les ailes de son nez se gonflèrent légèrement, et son regard se promena du plafond vers le docteur, puis se déplaça vers tous les côtés.

— Bonsoir, belle entre les belles, dit le docteur Merker en se penchant vers elle. Vous ne devinerez jamais où vous êtes, alors voilà, vous êtes dans un lit de l'hôpital militaire de Kowloon.

Moi, je suis votre médecin, le docteur Fritz Merker, et vous, qui êtes-vous ?

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L'inconnue se mit à sourire, tourna la tête vers sa gauche et, d'une belle voix claire, demanda :

— Où est Yo ?

Le docteur Merker aurait aimé l'embrasser à cet instant-là, car une porte venait de s'ouvrir sur l'inconnue.

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CHAPITRE II

LORSQUE LES MEMBRES de l'organisation secrète devaient se réunir — et ces temps-ci cela se produisait plus souvent que d'habitude — aucun des participants ne savait où ce serait. Tout changeait chaque fois, le lieu, le local, les circonstances, et chaque fois ils étaient prévenus à peine quelques heures avant le rendez-vous, soit par téléphone, soit par un billet qu'un pauvre gamin des rues, tout déguenillé, leur remettait en échange de quelques sous. Lors- qu'on avait lu le billet, il fallait immédiatement le brûler, en écraser les cendres entre ses mains, et les jeter dans le vent qui les faisait disparaître sans laisser de traces. Le gamin restait là à observer l'opération pendant toute sa durée. Il était arrivé une seule fois que le destinataire ne brûlât pas le billet, mais le glissât dans sa poche. Là-dessus, les autres participants eurent droit au spectacle de l'exécution de l'imprudent. Dès l'entrée dans la salle prévue pour la réunion, on lui coupa la tête d'un seul coup d'épée. Le bourreau portait une ancienne et somp- tueuse tenue chinoise, pourvue de plaques de protection de cuir sur les bras, les jambes et la poitrine ; son visage était maquillé de blanc et son attitude celle d'un mandarin. Un silence absolu régna au cours de l'exécution, que restait-il à dire lorsqu'il y avait eu refus d'obéissance ?

Les autres membres s'inclinèrent devant le mort, le bourreau quitta la salle sans mot dire, puis la réunion commença par l'habituelle salutation courtoise de M. Tschao, nom qui signi- fiait : fils du dragon.

Remarquons, néanmoins, que ce M. Tschao, on ne le voyait jamais. On entendait sa voix, c'est tout. Celle-ci était claire, presque belle, ni grave ni aiguë, d'une tessiture moyenne assez

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Lorsque le docteur Merker, spécialiste reconnu des mala- dies tropicales, débarque à Hong Kong, ce n'est pas pour y faire du tourisme mais dans un but bien précis : collaborer avec un confrère chinois pour découvrir l'origine d'une mala- die aussi terrifiante que mystérieuse; elle atteint des indi- vidus absolument normaux qu'elle plonge brutalement dans une sorte d'hypnose au cours de laquelle ils commettent, sans en être conscients, les crimes les plus atroces. En l'espace de quelques jours, Merker, pour aboutir, doit oublier tout ce qu'il a appris en Europe, tout ce qu'il est, ou croit être : un homme doué de raison, un Occidental refusant de se laisser dominer par ses pulsions.

Dans le décor fascinant de Hong Kong, la ville des jonques, porte de l'Extrême-Orient, un drame se noue, tissé de passions, de sang et de mort...

Un Konsalik d'une grande cuvée.

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