• Aucun résultat trouvé

La politique linguistique chinoise entre le 20ème et le 21ème siècle

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "La politique linguistique chinoise entre le 20ème et le 21ème siècle"

Copied!
22
0
0

Texte intégral

(1)

Article

Reference

La politique linguistique chinoise entre le 20ème et le 21ème siècle

CIVICO, Marco

Abstract

Cet article propose une revue et une lecture économique de la politique linguistique chinoise des 20ème et 21ème siècles. La littérature dans ce domaine est riche. Pourtant, elle offre très souvent soit des lectures essentiellement sociolinguistiques soit des analyses purement quantitatives, parfois très approfondies mais qui ne sont pas accompagnées par des réflexions du point de vue de la politique linguistique. Cet article vise à combiner une discussion de la politique linguistique chinoise avec un commentaire des principaux résultats ressortissant des études économiques relatifs à ces politiques. À l'aide des outils analytiques de l'économie des langues et de trois exemples de politiques linguistiques chinoises, à savoir la standardisation et diffusion de la langue nationale, l'ouverture vers l'anglophonie et la promotion du mandarin à l'étranger, je montre que la politique linguistique engendre toujours des effets extralinguistiques, notamment sur le plan socio-économique. En particulier, je discute l'idée que les questions de politique linguistique, ayant des causes et des conséquences qui [...]

CIVICO, Marco. La politique linguistique chinoise entre le 20ème et le 21ème siècle. European Journal of Language Policy, 2019, vol. 11, no. 1, p. 3-23

DOI : 10.3828/ejlp.2019.2

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:117613

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

1 / 1

(2)

European Journal of Language Policy 11.1 (2019) ISSN 1757-6822 (print) 1757-6830 (online)

© Liverpool University Press https://doi.org/10.3828/ejlp.2019.2

20ème et le 21ème siècle

Une interprétation économique

Marco Civico

Université de Genève marco.civico@unige.ch

Resumé

Cet article propose une revue et une lecture économique de la politique linguistique chinoise des 20ème et 21ème siècles. La littérature dans ce domaine est riche. Pourtant, elle offre très souvent soit des lectures essentiellement sociolinguistiques soit des analyses purement quantitatives, parfois très approfondies mais qui ne sont pas accompagnées par des réflexions du point de vue de la politique linguistique. Cet article vise à combiner une discussion de la politique linguistique chinoise avec un commentaire des principaux résultats ressortissant des études économiques relatifs à ces politiques. À l’aide des outils analytiques de l’économie des langues et de trois exemples de politiques linguistiques chinoises, à savoir la standardisation et diffusion de la langue nationale, l’ouverture vers l’anglophonie et la promotion du mandarin à l’étranger, je montre que la politique linguistique engendre toujours des effets extralinguistiques, notamment sur le plan socio-économique. En particulier, je discute l’idée que les questions de politique linguistique, ayant des causes et des conséquences qui dépassent largement la sphère strictement linguistique, doivent être traitées de manière complexe afin de mettre en place de mesures qui soient efficaces et bien ciblées.

Mots clés : politiques linguistiques, économie des langues, Chine, économie du multilinguisme, complexité, politiques publiques

1. Introduction

Cet article propose une revue des étapes les plus significatives de la politique linguistique chinoise des 20ème et 21ème siècles du point de vue économique.

L’importance d’une analyse sous cet angle s’explique par le fait que l’histoire de la Chine a toujours été profondément marquée par sa politique linguistique.

D’un côté, elle a toujours reflété la situation interne de la Chine en termes de

(3)

cohésion et fragmentation de la population. De l’autre, elle est un important indicateur de l’attitude de la Chine envers les autres pays. Il va de soi, donc, qu’une analyse des politiques linguistiques de la Chine représente un très bon point de départ pour une étude des dynamiques politiques et socio-économiques du pays. Je vais donner une interprétation économique de certaines politiques linguistiques chinoises afin de faire le lien entre les aspects purement politi- co-linguistiques et leurs retombées socio-économiques. L’objectif d’une telle réflexion est de montrer que les politiques linguistiques ont des répercussions qui dépassent considérablement la sphère linguistique et qu’il est indispensable de faire la lumière sur les liens entre les politiques linguistiques et l’économie avant de mettre en place des mesures qui soient efficaces et bien ciblées. Je précise que je parle ici de politique linguistique en tant que forme de politique publique et non pas de mesure visant à gérer la communication au sein des institutions privées. Cette dernière mérite un discours à part et n’est donc pas l’objet de cet article.

L’article est structuré en trois sections. Tout d’abord j’explique très brièvement ce qu’est l’économie des langues et son emplacement entre les domaines de la recherche économique et les disciplines purement langagières. Ensuite je me penche sur le rôle que les politiques linguistiques ont joué et jouent encore en Chine. La réflexion porte sur trois dynamiques spécifiques qui ont caractérisé la politique linguistique chinoise au fil du 20ème et 21ème siècle, à savoir (i) la standardisation de la langue chinoise, (ii) l’enseignement de l’anglais en Chine et (iii) la promotion de la langue chinoise à l’étranger.1 Je compare par la suite l’expérience chinoise avec celle d’autres pays. Dans la partie finale de l’article, j’esquisse brièvement les défis futurs auxquels la Chine devra faire face dans sa politique linguistique.

2. L’économie des langues : pourquoi une interprétation économique ? L’approche analytique utilisée ici se base sur la notion d’ « économie des langues ». Cette expression apparaît pour la première fois dans un article de Jacob Marschak (1965), qui propose des réflexions de nature économique discutant la relation entre « l’optimisation » de la langue et le processus économique sous-jacent. Le fait que certaines caractéristiques des langues aient survécu ou disparu au fil du temps peut être vu comme un indicateur de la capacité d’une

1. Même si c’est une des questions les plus fréquemment abordées quand on parle de politique linguistique en Chine, cet article ne porte pas sur les politiques linguistiques envers les minorités, sauf pour quelque considérations dans la section 4.

(4)

langue de transmettre le niveau maximal d’information avec un effort minimal (Zhang et Grenier 2012). La littérature dans le domaine de l’économie des langues, qui commence à voir le jour dans les années suivantes, s’écarte considé- rablement de l‘orientation de recherche lancée par Marschak. Entre autres, on voit apparaître un courant de recherche visant l’identification des facteurs qui déterminent des différences de rémunération sur le marché du travail en utilisant la langue principalement comme un attribut ethnique (Breton 1964;

1978). À partir des années soixante-dix, l’étude des relations entre langue et rémunération subit l’influence de la théorie du capital humain et de l’économie de l’éducation (Grin 1999). On commence alors à estimer économétriquement la rentabilité de la langue (souvent d’une deuxième langue) en tant que forme de capital humain plutôt que d’attribut ethnique (Grin and Vaillancourt 1997).

Finalement, à partir des années 1980, les deux visions sont combinées dans une approche de recherche, inaugurée par Vaillancourt (1978; 1980), qui traite la langue à la fois comme attribut ethnique et élément du capital humain.

Grin (2003) note que la raison principale pour étudier les questions langagières d’une perspective économique est la capacité des concepts et des méthodologies de cette dernière de supporter la formulation, l’évaluation et l’analyse comparative de différentes politiques et, par conséquent, de faciliter le processus de prise de décision. La perspective économique n’essaie donc pas de remplacer le débat politique à la base des décisions d’aménagement linguistique, mais plutôt de le soutenir.

3. La politique linguistique en Chine entre le 20ème et le 21ème siècle

Au cours du 20ème siècle et jusqu’à présent, la Chine a mis en place de nombreuses mesures de politique linguistique. En particulier, on a pu observer des évolutions importantes qui reflètent les étapes du développement du pays : 1. la standardisation et la diffusion de la langue nationale (Rohsenow 2004) ; 2. des velléités d’ouverture vers l’anglophonie (Lam 2002 ; Hu, 2005) ; 3. la promotion du chinois mandarin sur le plan international (Churchman

2011 ; McDonald 2011).

Ces trois étapes sont le reflet de l’évolution économique du pays (Ray 2002).

Par conséquent, elles incarnent la même grande ambition des politiques macro-économiques chinoises qui, loin de se limiter aux aspects strictement économiques et financiers dans le sens traditionnel, n’ont pas sous-estimé le contact étroit entre l’économie et les politiques linguistiques.

(5)

3.1 La standardisation de la langue nationale

Quand on parle de « chinois » dans les environnements non-techniques il est souvent fait référence au mandarin. Il existe pourtant plusieurs variantes de chinois (Ramsey 1987), souvent pas mutuellement compréhensibles. Ramsey (1987: 17) observe que quand les sinophones doivent penser à une langue commune les réunissant en tant que peuple, ils pensent à la langue écrite. Il n’est donc pas étonnant que le gouvernement ait commencé sa politique de standardisation linguistique (ou, à ce moment-là, d’alphabétisation) par une planification concernant le corpus.

Le système logographique chinois est l’un des systèmes d’écritures modernes les plus complexes. Chen (1999) estime qu’entre 30% et 50% du cursus scolaire au niveau de l’école primaire et secondaire consiste en l’apprentissage du chinois, dont une grande partie est consacrée à la maîtrise des caractères. Pour faire face au bas niveau d’alphabétisation du peuple chinois après la fondation de la République populaire de Chine (RPC) en 1949, le gouvernement central décida de promouvoir la simplification des caractères traditionnels (Rohsenow 2004). Au même temps, le président Mao souligna que le chinois devait adopter un système d’écriture alphabétique (Zhou 2004), en reprenant les idées du 拉丁化新文字 Lādīnghuà Xīn Wénzì (« nouveau texte latinisé »). Le système pinyin, complété en 1958, était censé remplacer le système logographique. Cependant, plus d’un demi-siècle après, il reste une méthode pour transcrire la prononciation (en mandarin) des caractères, sans pourtant les remplacer (Rohsenow 2004).

Le gouvernement national a également mis en place des mesures visant à l’élévation du statut du mandarin et sa diffusion sur le territoire national.

Rappelons que le mot « mandarin » dans le contexte linguistique fait référence plus précisément à la famille des dialectes du nord de la Chine. Toutefois, par opposition aux « dialectes chinois » en général, les dialectes chinois du nord sont la plupart du temps mutuellement compréhensibles. Par conséquent, étant donné que 70% de la population parlait un dialecte du nord (Norman 1988), le mandarin, une fois standardisé, fut officiellement adopté par la RPC sous le nom de 普通话 pǔtōnghuà (« langue commune ») en 1955. Cependant, ce n’est qu’au début du 21ème siècle que la première loi sur l’usage du mandarin est mise en œuvre.2 Un aspect intéressant de cette loi est qu’elle se base sur des études concernant l’usage oral et écrit de la langue chinoise dans les plus grands centres métropolitains du pays ainsi que sur une comparaison avec

2. Le texte de la loi est disponible ici http://www.gov.cn/english/laws/2005-09/19/content_64906.

htm.

(6)

les lois linguistiques d’autres pays (Rohsenhow 2004). Cela a permis d’éviter que la loi ne soit qu’une tentative d’imposer aux citoyens un usage forcé et déraisonnablement artificiel. C’est pourquoi, même si l’usage du mandarin est constamment promu, les dialectes sont tolérés (voire préférés) dans certains contextes (surtout informels). Cependant, on notera quand même des divergences entre le gouvernement et les citoyens. C’est le cas, par exemple, des fortes protestations qui ont eu lieu à Guangzhou, capitale de la province du Guangdong, après qu’un politicien local, Ji Kekuang, ait proposé qu’un organisme de radiodiffusion télévisuelle cantonais diffuse ses programmes en mandarin (Wong 2010).

Pour ce qui concerne les politiques d’éducation, le mandarin est la langue d’enseignement obligatoire depuis la fin des années cinquante.3 On parle dans ce cas plus précisément de « politique d’acquisition », sur la base de la terminologie introduite par Cooper (1989). En outre, à partir des années 1990, ceux qui aspirent à une carrière dans l’enseignement, le journalisme, la traduction, le droit, l’édition ou le secteur public doivent faire preuve de leur maîtrise de la langue en passant un test de maîtrise professionnelle du chinois (Lam 2005).

Il est utile de replacer ce parcours dans son contexte historique. Faisant écho à la vision sceptique de Ricento (2006) à l’égard de la relation entre le dévelop- pement socio-économique et la prise de position d’une langue nationale, Wan (2014) soutient que toutes les mesures de planification linguistique de la Chine ont été influencées par un modèle idéologique euro-centrique se référant à l’État-nation et marqué par le colonialisme. L’émergence du nationalisme en Europe avait tendance à se projeter sur tout territoire occupé par la nation aux dépens des cultures locales (Dirlik 1996). Ainsi, les modèles européens ont été fidèlement reproduits dans les territoires colonisés. Une langue nationale, supposée dépourvue de toute impureté ou localisme, était vue comme un élément indispensable dans le processus de création d’un peuple docile et prêt à servir la nouvelle bourgeoisie européenne (Flores 2013). À ces idées il faut aussi ajouter l’influence que l’Union soviétique a jouée sur la Chine à cet égard. Depuis sa naissance, l’Union soviétique s’était en fait trouvée à faire face au défi de promouvoir l’unité nationale dans un pays caractérisé par un taux très élevé de diversité linguistique. Si d’un côté Lénine et Staline, à des moments différents, reconnaissaient l’importance de supporter l’éducation en langue minoritaire pour accélérer la diffusion de l’idéologie socialiste

3. Néanmoins, sur la base de sa propre expérience, l’auteur de cet article peut confirmer que, surtout à l’école primaire, le recours au dialecte par les enseignants et les élèves n’est pas rare, au moins dans la région du Guangdong.

(7)

soviétique et la croissance de la main-d’œuvre (Spolsky 2014), de l’autre côté ils étaient conscients que les sentiments de revendication nationale pouvaient compromettre le projet d’unification. En 1950, Staline publia son essai « Le Marxisme et les problèmes de linguistique » à propos de l’importance d’une langue commune pour la cohésion sociale. Les idées présentées dans cet essai influencèrent considérablement le processus d’homogénéisation linguistique en Chine (Tsung 2009).

Selon Harrison (1969), la société de la Chine impériale se caractérisait par une structure fondée sur l’héritage historique du pays et sur les valeurs partagées, mais pas sur le nationalisme, associé à l’idée moderne d’État-nation.

Le premier élément identitaire des Chinois était l’acceptation de la culture traditionnelle chinoise, le confucianisme (Chen 2005). Même si l’usage d’une langue standard, le 官话 guānhuà, qui correspond à peu près au mandarin, était obligatoire pour les officiels du gouvernement, le peuple n’avait rien à faire avec les processus d’alphabétisation. En plus, les messages de l’empereur aux masses étaient souvent modifiés pour les adapter au public, en passant du chinois classique au chinois vernaculaire à l’aide de traducteurs locaux (Fairbank et Goldman 2006). D’ailleurs, la classe dirigeante chinoise était plutôt opposée à l’alphabétisation des masses, puisqu’elle craignait que les travailleurs ne deviennent des citoyens politiquement actifs. La politique linguistique chinoise du 20ème siècle était donc alignée sur les principes du communisme et visait la création d’un sentiment nationaliste chinois. L’idéologie euro-centrique selon laquelle le monolinguisme et l’homogénéité culturelle étaient nécessaires pour le progrès social et économique, la modernisation et l’unité nationale (Ricento 2006) était devenue partie de la culture chinoise. Cette idée se reflète par ailleurs également dans la loi de 2000, qui statue que la langue chinoise standard parlée et écrite doit favoriser le maintien de la souveraineté de l’État et de la dignité nationale, l’unification du pays et l’unité des nationalités, ainsi que le progrès matériel socialiste et le progrès éthique. Par rapport à la latini- sation de la langue chinoise, Mao déclara en 1936 qu’il s’agissait du meilleur instrument pour supprimer les difficultés de l’écriture chinoise et, à terme, instaurer une nouvelle société où les citoyens seraient des participants actifs à la gestion du pays (De Francis 1984). Certains auteurs soutiennent qu’il s’agissait plutôt d’une tentative de couper définitivement les ponts avec le confucianisme et le taoïsme, solidement fixés dans la littérature en caractères chinois (Ramsey 1987).

L’effort de standardisation linguistique au sein d’une communauté trouve-t-il une justification aussi d’un point de vue économique ? Plusieurs pays, notamment des puissances globales telles que le Royaume Uni et la France,

(8)

ont vécu un processus d’homogénéisation linguistique dans leurs territoires coïncidant avec leur développement économique. Gellner (1983) observe que la main-d’œuvre à l’époque du développement industriel, contrairement à celle du contexte traditionnel de l’agriculture, ne pouvait pas recevoir une formation exclusivement à travers l’apprentissage, puisque les informations et les compétences n’étaient plus immuables. La main-d’œuvre devait être instruite afin de comprendre les principes de base et éventuellement les adapter à l’évolution du processus de production. Wright (2016) met cette idée en relation avec la nécessité, dans la France du 19ème siècle, de mettre en place un système éducatif national, ultérieurement motivé par l’esprit nationaliste fortement promu à l’époque et fondé sur l’idéal républicain d’une langue et d’un peuple. Il propose aussi l’exemple du travail de standardisation du gaélique d’Irlande au 20ème siècle, motivé, comme dans d’autres pays, par le désir de réduire les imprécisions et les efforts d’accommodation, tout en ne sous-estimant pas son rôle aussi dans la construction d’une identité nationale.

Fishman (1968) note que les entités politiques (« polities ») linguistiquement homogènes sont souvent économiquement plus avancées et politiquement plus stables. En plus, on considère généralement la diversité linguistique comme une forme particulière de barrière de marché ou coût de transaction (Melitz 2008) (souvent entre pays différents, mais la même logique s’applique aussi aux échanges ayant lieu à l’intérieur d’une communauté linguistiquement fragmentée). Nettle (2000) note finalement que les sociétés linguistiquement fragmentées sont souvent caractérisées par un niveau faible de développement économique, associé à la présence de divisions et conflits entre ethnies, une mobilité faible, des échanges limités, des marchés imparfaits et de difficultés de communication. Il faut remarquer que les différences entre langues peuvent être substantielles ou marginales et même permettre un bon niveau d’inter- compréhension. Par conséquent, dire qu’une communauté est linguistiquement fragmentée peut être trompeur. Très souvent, les études qui cherchent à identifier une relation entre diversité linguistique et croissance économique sous-estiment la portée de ce problème. Desmet et al. (2016) proposent une analyse qui adopte une classification phylogénétique des langues pour calculer des indicateurs de fragmentation linguistique prenant en considération le poids de la distance inter-linguistique. Ils trouvent que les degrés de séparation les plus importants sont fréquemment associés à des conflits sur le contrôles des ressources et à la difficulté à avoir des politiques communes, alors que les distances linguistiques moins profondes se limitent à poser de difficultés de communication, interaction et coordination qui fragmentent le marché et ralentissent les transactions économiques. Cela étant dit, il va de soi que

(9)

la politique chinoise de standardisation linguistique s’inscrit dans la même logique de progrès socio-économique adoptée par d’autres pays, d’autant plus que, comme on l’a vu, le paysage linguistique chinois est caractérisé à la fois par des dialectes mutuellement compréhensibles (au nord) et par des fractures significatives (entre nord et sud du pays).

Afin de tester la validité du point de vue économique d’une telle politique de diffusion de la langue standard, il convient aussi de se demander s’il y a aujourd’hui un véritable avantage, pour un Chinois, à maîtriser le mandarin standard et si on peut en faire une estimation quantitative. Pour répondre à cette question il faut mettre en relation compétences linguistiques et revenu de travail.

L’importance des compétences linguistiques a été prouvée par nombreuses études, ainsi que la valeur ajoutée en termes de rémunération de la maîtrise de la langue principale du pays de résidence (Chiswick et Miller 2003). Dans le cas du chinois, Gao et Smyth (2011) ont pu établir que la maîtrise du chinois pour les migrants internes (à savoir les Chinois qui se déplacent à l’intérieur du pays) était associée à des rémunérations en moyenne 42,1% plus élevées. Il est intéressant de noter qu’ils trouvent aussi une différence sur la base du sexe des individus, la maîtrise du mandarin standard chez les Chinois étant associée à des rémunérations 50,8% plus élevées pour les femmes. Une explication qu’ils proposent est que les femmes migrantes ont plus souvent des occupations qui impliquent un contact direct et fréquent avec le public. Il est intéressant de noter que la maîtrise du dialecte local semble aussi avoir un impact significativement positif sur le salaire dans l’industrie des services (Chen et al. 2014).

La politique de réduction des barrières linguistiques à l’intérieur du pays s’inscrit dans une macro-politique de long terme visant la libre circulation des travailleurs. À cet égard, la Chine fait face à l’un des plus grands défis de son histoire récente. S’il est vrai que, au niveau agrégé, la libre circulation des travailleurs est censée engendrer des effets bénéfiques en termes de convergence économique et de fonctionnement du marché, dans le contexte chinois cela risque d’accentuer les migrations massives de l’ouest vers la côte et de la campagne vers les grands centres urbains. Cette tendance aurait un impact négatif sur le secteur agricole et exercerait une forte pression sur les adminis- trations des grandes villes. Le gouvernement a toujours essayé d’endiguer ou régler l’exode rural à travers le system des 户口 hùkǒu, un passeport interne qui donne accès aux services publics tels que l’école seulement au lieu du domicile. Cependant, certains ont observé que ce système, qui décourage fortement la migration, exacerbe les clivages socio-économiques et culturels à l’intérieur du pays. Bien qu’il ait été rendu moins strict au fil du temps, ce système reste effectivement l’une des causes principales de la disparité entre

(10)

les villes et la campagne (Chan et Buckingham 2008). L’intention pour le futur est, au moins formellement, de reformer le système des hukou afin d’accélérer le processus d’urbanisation, tout en gardant un certain niveau de prudence, comme explicitement demandé en 2013 par Wen Jiabao, qui était alors Premier ministre (China Daily 2013). Un des grands défis de la Chine sera donc d’intégrer l’homogénéisation linguistique, qui unifie le peuple, avec de politiques éliminant les barrières à la libre circulation des individus.

3.2 L’émergence de l’anglais

Ross (1993) observe que l’enseignement des langues étrangères en Chine peut être interprété comme un baromètre du niveau d’interaction avec les peuples étrangers que les leaders jugent approprié. Le soutien à l’enseignement des langues étrangères est plus fort quand l’activité à niveau internationale est considérée comme compatible avec les intérêts politiques et économiques de la Chine, et plus faible quand elle est perçue plutôt comme une menace pour la stabilité politique et l’intégrité culturelle chinoise. L’intérêt des Chinois pour la langue anglaise remonte à l’intensification de la présence britannique en Chine pendant les guerres de l’opium du 19ème siècle, quand la cour des Qing commença à juger qu’il serait imprudent de l’ignorer. Il s’agissait surtout d’apaiser les craintes que les étrangers ne puissent menacer la souveraineté de la Chine (Teng and Fairbank, cités par Ross 1993). Il n’y avait aucun intérêt à ce moment-là à absorber la culture étrangère, jugée inférieure par rapport aux qualités intellectuelles et spirituelles des Chinois (Adamson 2002). Pendant la révolution culturelle, l’anglais était perçu comme porteur d’influences occidentales corrosives (Ross 1993). En plus, la fondation de la RPC en 1949 favorisa l’alliance avec l’URSS. Par conséquent, pendant les années 1950, le russe était la langue étrangère la plus diffusée dans l’enseignement (Lam et Chow 2004).

Ce n’est qu’à la fin des années isolationnistes de la révolution culturelle et surtout avec les politiques réformistes de Deng Xiaoping des années 1980, que l’anglais apparaît dans les cursus scolaires. L’apprentissage de l’anglais fait depuis lors partie intégrante des plans d’études, bien qu’il ait subi plusieurs modifications au fil du temps (Ross 1993). Ainsi, plusieurs événements ont marqué l’importance croissante de l’anglais, à savoir le retour de Hong Kong sous la souveraineté chinoise en 1997, l’entrée de la Chine dans l’Organisation Mondiale du Commerce en 2001 et la participation en qualité de pays hôte aux jeux olympiques de 2008 (Pang et al. 2002).

En 2001 le Ministère de l’éducation chinois a publié un document intitulé

« Recommandations du Ministère de l’éducation sur la promotion active des

(11)

cours d’anglais dans les écoles primaires » instituant, entre autres, le début de l’enseignement de l’anglais en troisième année et non plus en septième (Ministère de l’éducation 2001). Selon Hu (2007), ce choix s’explique, entre autres, par le rôle joué par Li Lanqing, qui était alors Vice-premier ministre et qui a toujours donné du poids à la question de l’enseignement des langues étrangères. À ce propos, Hu (2007) observe que, pendant la période de son mandat, le Vice-premier ministre a souligné à plusieurs reprises l’importance de l’enseignement de l’anglais pour le progrès du pays. Il est intéressant de noter que lors d’une visite officielle dans la province du Zhejiang en 2000, Li Lanqing a encouragé un développement plus poussé de l’enseignement de l’anglais dans les écoles, étant donné que les conditions économiques le permettaient (le Zhejiang étant une des provinces chinoises les plus développées sur le plan économique). Si à première vue cette déclaration peut être interprétée naïvement comme un simple geste d’encouragement à investir plus dans l’enseignement de l’anglais, une réflexion plus approfondie révèle qu’une telle tendance pourrait, d’un côté, exacerber ultérieurement la disparité entre classes sociales ainsi qu’entre les centres urbains et les régions campagnardes et, de l’autre côté, renforcer l’exode migratoire vers les grandes villes. Si l’on observe les données relatives au niveau de maîtrise de l’anglais autoévalué dans différentes régions du pays (Wei et Su 2011; 2012), on remarque que les résultats dans les centres urbains sont significativement plus élevés, bien que la moyenne nationale en Chine continentale (c’est-à-dire, sans Hong Kong, Macao et, bien évidemment, Taïwan) soit plutôt modeste. À titre d’exemple, respectivement 27,16%, 26,39% et 38,76% des habitants de Beijing, Shanghai et Tianjin déclarent pouvoir converser couramment, voire très couramment, ou au moins soutenir une conversation sur la vie quotidienne en anglais, alors que la moyenne nationale est au-dessous de 21%.4 Hu (2005) souligne que la politique éducative du gouvernement chinois a, depuis les années 1980, adopté une approche utilitariste qui a donné la priorité à l’efficacité. Toutefois, cette approche a négligé l’importance de l’équité dans l’éducation. À cet égard, il est peut-être opportun de citer Fishman (1999) :

« Spreading languages often come to be hated because they can disadvantage many as they provide advantages for some. » (p. 37)

Les effets de redistribution représentent donc un autre grand défi auquel la China devra faire face dans le futur proche afin de garantir non seulement

4. Les différents niveaux de maîtrise pris en considération dans l’étude citée sont « able to act as interpreters on formal occasions », « able to converse quite fluently », « able to conduct daily conversations », « able to say some greetings » et « able to utter a few words ». Les chiffres donnés ici correspondent aux valeurs agrégées des trois niveaux les plus élevés.

(12)

une croissance économique importante, mais aussi une croissance qui affecte équitablement les citoyens. Cela est d’autant plus vrai que beaucoup d’études ont établi une corrélation positive entre les compétences dans une deuxième langue et le salaire. Il y a donc des avantages quantifiables à apprendre une langue étrangère en général, qu’il s’agisse de l’anglais, du français, ou d’une autre langue, tout en restant à l’intérieur de ses propres frontières.5

Pour ce qui concerne en particulier le cas de l’anglais en Chine, Guo et Sun (2014) trouvent que la maîtrise de l’anglais en Chine est positivement corrélée avec le niveau du salaire en début de carrière. Ils utilisent les résultats obtenus au « College English Test » (un test de certification de la maîtrise de l’anglais souvent demandé aux étudiants pour l’accès aux études universitaires) comme variable explicative du niveau de salaire et ils trouvent que 10 points de plus (60 étant le minimum pour réussir et 100 étant le maximum) sont associés à une hausse de salaire en début de carrière entre 0,6% et 2,4% (selon le nombre de contrôles inclus dans le modèle). En plus, ils observent que, chez les étudiants ayant un hukou rural, la maîtrise de l’anglais est aussi positivement corrélée avec la probabilité d’obtenir un hukou dans une ville après le diplôme. La maîtrise de l’anglais risque donc d’exacerber les inégalités sociales. Si elle est plus fréquente chez les individus qui, même venant d’une région rurale, ont pu se financer des cours d’anglais, une manque d’enseignement de l’anglais accessible équitablement à tout le monde risque de créer un cercle vicieux dans lequel ceux qui ont plus de disponibilité financière ont plus de chance d’améliorer ultérieurement leur condition.

La position du français en Chine mériterait un discours à part (comme, d’ailleurs, le mériteraient beaucoup d’autres langues). Ici nous nous limiterons à dire que l’enseignement du français a été depuis longtemps fortement promu en Chine par les institutions et françaises et chinoises. Ce n’est pas par hasard que le président français Emmanuel Macron, lors de sa visite institutionnelle en Chine en janvier 2018, a mentionné à plusieurs reprises l’importance du français. Entre autres choses, il a souligné son niveau de diffusion à niveau global, surtout en Afrique, faisant implicitement référence à l’énorme intérêt économique de la Chine pour ce continent (France Info 2018).

3.3 La promotion du chinois à l’étranger comme moyen d’influence

Au fur et à mesure que l’influence (en termes politico-économiques mais également culturels) de la Chine augmente, la communauté académique et les politiciens sont de plus en plus intéressés à comprendre les possibilités de

5. À ce propos, voir aussi Grin (2002) pour le cas de l’anglais en Suisse.

(13)

Beijing d’influencer les autres pays. Mazarr (1996) soutient que les ressources culturelles influencent les processus de prise de décision, le développement économique et la structure sociale. En plus, elles ont un impact sur les conflits globaux et locaux. En même temps, certains auteurs estiment qu’un processus d’hybridation et d’homogénéisation culturelle est désormais inévitable, surtout chez les jeunes, en raison de l’ouverture des canaux d’informations (Pieterse 2003). La langue est l’un des outils de diffusion culturelle les plus efficaces, ainsi qu’un élément central dans les processus de mondialisation culturelle. En plus, selon la théorie structuraliste du langage, la langue parlée par un individu influe sur l’organisation des perceptions de la réalité qui l’entoure (Ding et Saunders 2006). Selon Buttjes (1990), l’acquisition du langage ne suit pas un parcours universel, mais il y a des différences de nature culturelle. Les locuteurs natifs acquièrent non seulement les compétences strictement linguistiques, mais également les modèles paralinguistiques et kinésiques de leur culture.

L’histoire de l’influence culturelle de la Chine est longue et complexe, émaillée d’exemples de pays voisins ayant absorbé certains traits de la culture chinoise. Pendant une grande partie de son histoire, la Chine a été une grande puissance culturelle, économique et politique, capable de faire valoir son poids pacifiquement. Même la dynastie mongole Yuan, qui occupa la Chine entre 1271 et 1368, reconnaissant la supériorité de la culture chinoise, décida d’en adopter les théories politiques et le système bureaucratique, en outre du nom sinisant (Ding et Saunders 2006). C’est à partir de la deuxième moitié du 19ème siècle et pour les 100 années suivantes que la Chine a vécu une période de déclin. Pendant ces cent ans d’humiliation (百年国耻 bǎinián guóchǐ), la culture chinoise a été mise à rude épreuve et ses piliers spirituels et intellectuels ont fortement vacillé. Pourtant, le coup de grâce a été porté par la période maoïste, quand les « quatre vieilleries » (四旧 sì jiù) firent l’objet d’attaques continues (Schwarcz 1991). Elle comprenait les « vielles idées » (思想 sī xiǎng), la « vieille culture » (文化 wén huà), les « vieilles coutumes » (风俗 fēng sú), et les « vieilles habitudes » (习惯 xí guàn). Pendant cette période d’auto-iso- lement, le pouvoir culturel de la Chine, en termes de perception, respect et imitations dans les autres pays a fortement décliné (Lampton 2001). Ce n’est qu’avec la politique dite « de la porte ouverte » (门户开放政策 ménhù kāifàng zhèngcè) de Deng Xiaoping que la culture chinoise (tant traditionnelle que moderne) recommence à attirer l’intérêt international.

L’un des moyens principaux pour favoriser la diffusion de la culture chinoise à l’étranger est sans doute le réseau des Instituts Confucius, gérés par le Hanban (汉办), le bureau national pour l’enseignement du chinois langue étrangère.

(14)

Il  existe actuellement dans le monde plus de 500 Instituts Confucius,6 dont le but est de promouvoir la connaissance globale de la culture et de la langue chinoises à travers un réseau qui s’inspire des modèles du British Council, de l’Alliance Française et du Goethe Institut (Xu 2011). Les Instituts Confucius offrent un soutien éducatif aux étudiants étrangers, ainsi que d’importantes informations sur l’accès aux marchés locaux aux entrepreneurs en Chine et à l’étranger, tout en réduisant les coûts de transaction et en promouvant le commerce et l’IDE. En revanche, certains auteurs soutiennent que les Instituts Confucius ont pour objectif final d’augmenter le « soft power » de la Chine (Ding et Saunders 2006 ; Hsiao 2008), défini comme la capacité d’un pays d’obtenir des avantages divers à travers sa force d’attraction et non par la coercition ou l’argent (Nye 2004).

Pour négocier des accords commerciaux bilatéraux entre nations où des langues différentes sont parlées, il faut arriver à communiquer dans au moins une des deux langues, ou dans une lingua franca. Les coûts de transaction se réduisent si l’on parle la même langue (Hutchinson 2002), et une augmentation des rapports commerciaux et de l’IDE (investissement direct à l’étranger) se vérifie même si seulement une partie de la population de l’un ou l’autre pays, ou bien des deux, parle une langue commune (Melitz 2008). Lien et al.

(2012) utilisent le modèle gravitationnel pour étudier l’effet de la présence des Instituts Confucius sur la valeur des exportations de la Chine vers différents pays. Ils développent le modèle classique, qui contient des variables telles que, par exemple, le PIB, la population, le niveau de libéralisation commerciale et la stabilité politique, en ajoutant une variable sur le nombre d’Instituts Confucius présents dans un pays. Ils trouvent que la présence des Instituts Confucius a un impact positif et statistiquement significatif sur les exportations chinoises et sur les IDE vers les pays en voie de développement. Par contre, l’effet dans les pays développés est moins fort, voire négligeable. Dans le modèle de Lien et al. (2012), les facteurs qui déterminent les coûts et les bénéfices d’apprendre le chinois pour les étrangers comprennent, entre autres, la vaste population chinoise, la croissance de la richesse et les différences en termes de rémuné- ration par rapport aux pays partenaires.

6. Pour plus d’informations, voir http://english.hanban.org/node_10971.htm.

(15)

4. Futurs défis : vers des politiques linguistiques complexes ?

Les politiques linguistiques qu’on vient d’analyser n’étaient jamais que linguistiques. Il vaut mieux parler ici d’objectifs socio-économiques atteints à travers l’implémentation des mesures de politiques linguistiques. S’il est vrai que la connaissance des langues étrangères apporte des bénéfices individuels (comme par exemple la possibilité de jouir d’œuvres littéraires en version originale), les gouvernements s’intéressent aux questions linguistiques surtout pour leurs retombés extralinguistiques. La politique linguistique a toujours joué un rôle important dans l’histoire de la Chine. Elle a représenté (et représente encore) un moyen d’unification, de séparation, de développement et de gestion des relations diplomatiques. Aujourd’hui plus que jamais il est nécessaire que le gouvernement chinois accorde leur juste poids aux politiques linguistiques puisque, comme on l’a vu, elles peuvent être en même temps la cause et la solution de problèmes tels que les inégalités sociales. En raison de leur nature complexe, elles ont des retombées dans plusieurs domaines. Par exemple, enseigner l’anglais ne veut pas simplement dire fournir aux citoyens des compétences en langue anglaise, mais aussi déclencher des dynamiques qui risquent de créer des classes sociales fortement séparées. En outre, il ne faut pas sous-estimer le rôle des partenaires privés. Les compétences linguis- tiques sont de plus en plus un élément crucial dans le processus de sélection du personnel dans les entreprises privées. Il va de soi qu’une telle dynamique exerce une pression non négligeable sur les demandes de « biens linguis- tiques », tels que les cours de langues. Ou encore, même si les opinions sont très partagées à propos de la relation entre démocratie et IDE, la promotion du chinois à l’étranger risque de ne pas être efficace en termes d’attraction de capitaux étrangers si elle n’est pas soutenue par des politiques qui puissent aligner le pays sur les normes démocratiques de la communauté interna- tionale.7 Si l’on néglige le réseau complexe dans lequel opèrent les politiques linguistiques de l’état, il y a le risque qu’elles soient inefficaces ou, pire, qu’elles causent de problèmes d’une autre nature.

Partant du principe que les phénomènes complexes doivent être traités par des politiques également complexes, il importe que le gouvernement ne sous-estime pas cette complexité et qu’il prenne acte de rapports de causalité pas toujours évidents. En ce qui concerne la standardisation du chinois et la promotion de la langue standard chez les sinophones, un élément

7. À ce propos, la littérature en économie est partagée entre ceux qui soutiennent que le manque de démocratie représentent un frein aux investissements étrangers et ceux qui soutiennent l’envers.

(16)

de complexité est donné par le fait que le paysage linguistique chinois est extrêmement diversifié. Selon Ethnologue,8 la Chine compte aujourd’hui 302 langues vivantes. La politique de promotion du mandarin standard est sans doute efficace puisqu’elle semble atteindre son objectif primaire, mais elle risque également d’avoir des retombées négatives sur les minorités et sur leurs langues. En fait, les pratiques de soutien aux langues minori- taires ont souvent été jugées insuffisantes et pas du tout en ligne avec ce qui la loi prévoit (Wang et Phillion 2009). En plus, les grandes migrations vers les centres urbains peuvent accélérer involontairement la disparition de certaines langues locales telles que le shanghaïen (Spolsky 2014). Si l’on considère les aspects extralinguistiques, une politique d’homogénéisation des locuteurs risque, dans les faits, de placer les membres de certaines ethnies minoritaires dans une position socio-économique désavantagée par rapport à ceux qui ont plus de familiarité avec les dialectes du nord (sur lesquels, comme mentionné, se base le mandarin standard). Par conséquent, une politique visant à homogénéiser la population, à promouvoir la mobilité et à donner des possibilités de développement égales à tous les citoyens risque d’avoir des effets contre-productifs qui, dans les faits, exacerbent la fragmentation sociale. D’ailleurs, ce cercle vicieux risque d’être ultérieu- rement aggravé par la politique d’enseignement de l’anglais et, en général, des langues non-locales. En fait, les groupes minoritaires les plus importants sont concentrés dans trois des provinces chinoises les plus pauvres (Yunnan, Guangxi et Guizhou) (Gradín 2015), où la maîtrise de l’anglais est plus faible. Cette dernière étant associée à des salaires plus élevés, une politique éducative qui néglige la question de l’équité risque d’aggraver la situation des minorités, surtout si l’on tient compte du fait que, pour les locuteurs d’une langue minoritaire, l’anglais est une deuxième langue étrangère après le putonghua. En outre, le gouvernement national ne devrait pas sous-estimer le poids des mouvements locaux en défense des langues minoritaires, tout particulièrement de celles qui jouissent d’un certain prestige lié à leur longue tradition culturelle, comme par exemple le cantonais. En fait, une politique visant l’homogénéité linguistique par le biais d’un processus d’assimilation forcée risque facilement de susciter le mécontentement des locuteurs des langues minoritaires et de soulever des problèmes dont la nature dépasse largement la sphère strictement linguistique.

Pour ce qui concerne la politique de promotion du chinois à l’étranger, elle apporte des bénéfices tangibles en termes de relations économiques

8. https://www.ethnologue.com/country/CN.

(17)

et d’influence politico-culturelle. Toutefois, l’exercice du pouvoir culturel comporte aussi des coûts qui, puisqu’on parle d’une dynamique complexe, ne se situent pas nécessairement dans la sphère économique. Les processus d’intégration dans les dynamiques de mondialisation posent des défis en termes de poids culturel au niveau global. Une forte crédibilité politique, dont témoignent une gouvernance transparente, un comportement responsable et le respect de la démocratie et des droits humains, est un élément essentiel pour conserver un haut niveau d’attractivité à l’échelle globale (Nye 2003). Il paraît alors raisonnable de se demander si la politique de promotion culturelle chinoise a un véritable potentiel à l’avenir. La présence des Instituts Confucius est plus forte dans les pays qui ont une tradition démocratique libérale (tels que les États-Unis, le Royaume Uni, le Canada, l’Australie, la Nouvelle Zélande, la France, l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne et la Belgique) ou dans les pays qui assurent (ou assuraient jusqu’à un passé récent) un niveau réputé

« acceptable » de liberté individuelle et de respect pour les droits humains (tels que la Russie, le Brésil, les Philippines et l’Inde) (Ding et Saunders 2006).

En d’autres termes, il s’agit de pays où les atteintes aux libertés personnelles, dont la Chine est souvent accusée, ne sont généralement pas tolérées. Par conséquent, la réticence de la Chine à se lancer dans de grandes réformes politiques favorisant les libertés personnelles pourrait nuire aux efforts de promotion culturelle à long terme. En même temps, l’ouverture culturelle menace d’affecter et de compromettre l’unicité de la culture chinoise, et d’influencer le développement futur de la langue chinoise. En plus, l’histoire de la Chine et ses relations diplomatiques délicates avec les pays voisins pourraient constituer un obstacle pour ses objectifs culturels. C’est le cas, par exemple, de la perception de la Chine en Corée du Sud suite au débat sur l’attribution historique du territoire de l’empire Koguryo, traditionnellement considéré comme coréen par les deux Corées (Scofield 2004 ; Snyder 2005).

Par conséquent, les jeunes Coréens ont commencé à développer un sentiment de méfiance à l’égard de la Chine. De même, au Japon, beaucoup trouvent que la Chine a perdu sa position morale en exigeant constamment des excuses, souvent humiliantes, de la part du Japon par rapport aux événements de la Seconde Guerre Mondiale (Sutter 2002).

5. Conclusion

Sur la base de cette interprétation économique, on a montré que les politiques linguistiques, en Chine comme ailleurs, ne sont jamais que linguistiques. En

(18)

raison de la nature complexe des questions linguistiques, les politiques dans ce domaine ont toujours des retombées extralinguistiques dont on peut être conscient ou pas. Une politique efficace doit forcément prendre acte des réseaux complexes qui lient les questions linguistiques aux causes et aux conséquences non-linguistiques. Pour résumer, nous nous trouvons, essentiellement, devant deux scénarios :

1. des politiques qui risquent d’être contre-productives, voire de soulever d’autres problèmes en raison de leurs retombées dans des domaines apparemment distincts (comme dans le cas de la promotion du mandarin standard et de l’anglais comme langue étrangère) ;

2. des politiques qui risquent d’être inefficaces en raison d’autres facteurs agissant en direction opposée (comme dans le cas de la promotion du chinois à l’étranger comme instrument d’influence).

Il faut donc développer des politiques aussi complexes que les questions qu’elles traitent. Il est nécessaire d’identifier toutes les variables qui pourraient avoir une influence plus ou moins importante avant de passer à la définition d’une politique efficace et bien calibrée. Les travaux de recherche futurs devraient se concentrer sur une étude approfondie des interrelations entre les questions linguistiques et les autres domaines, tant en général que dans le cas particulier du chinois.

Remerciements

Les recherches menant aux présents résultats ont bénéficié du soutien financier du 7ème Programme-cadre de la Commission européenne en vertu de la convention de subvention No. 613344 (Projet MIME). Je tiens aussi à remercier les réviseurs anonymes qui ont contribué à améliorer cette publication avec leurs commentaires précieux.

Références

Adamson, B. (2002) ‘Barbarian as a Foreign Language: English in China’s Schools’, World Englishes 21(2) : 231–43.

Breton, A. (1964) ‘The Economics of Nationalism’, Journal of Political Economy 72(4) : 376–86.

Breton, A. (1978) ‘Nationalism and Language Policies Canadian’, Journal of Economics 11(4) : 656–68.

(19)

Buttjes, D. (1990) ‘Teaching Foreign Language and Culture: Social Impact and Political Significance’, Language Learning 40(2) : 53–7.

Chan, K.W. et Buckingham, W. (2008) ‘Is China Abolishing the Hukou System?’, China Quarterly 195 : 582–606.

Chen, P. (1999) Modern Chinese: History and Sociolinguistics. Cambridge: Cambridge University Press.

Chen, Z. (2005) ‘Nationalism, Internationalism and Chinese Foreign Policy’, Journal of Contemporary China 14(42) : 35–53.

Chen, Z., Lu, M. et Xu, L. (2014) ‘Returns to Dialect Identity Exposure through Language in the Chinese Labor Market’, China Economic Review 30 : 27–43.

China Daily (2013) ‘Premier Calls for Hukou Reform to Be Expedited’, China Daily, 6 mars 2013, http://www.chinadaily.com.cn/china/2013npc/2013-03/06/content_

16280934.htm (consulté le 4 septembre 2018).

Chiswick, B.R. et Miller, P.W. (2003) ‘The Complementarity of Language and Other Human Capital: Immigrant Earnings in Canada’, Economics of Education Review 22(5) : 469–80.

Churchman, M. (2011) ‘Confucius Institutes and Controlling Chinese Language’, China Heritage Quarterly, no. 26. www.chinaheritagequarterly.org/articles.php?

searchterm=026_confucius.inc&issue=026 (consulté le 4 septembre 2018).

Cooper, R.L. (1989) Language Planning and Social Change. Cambridge : Cambridge University Press.

De Francis, J. (1984) The Chinese Language: Fact and Fantasy. Honolulu : University of Hawaii Press.

Desmet, K., Ortuño-Ortín, I. et Wacziarg, R. (2016) ‘Linguistic Cleavages and Economic Development’, in V. Ginsburgh et S. Weber (dir.), The Palgrave Handbook of Economics and Language. Basingstoke : Palgrave-MacMillan, 425–46.

Ding, S. et Saunders, R.A. (2006) ‘Talking up China: An Analysis of China’s Rising Cultural Power and Global Promotion of the Chinese Language’, East Asia 23(2) : 3–33.

Dirlik, A. (1996) ‘Chinese History and the Question of Orientalism’, History and Theory 35(4) : 96–118.

Fairbank, J.K. et Goldman, M. (2006) China: A New History. Boston, MA : Harvard University Press.

Fishman, J. (1968) ‘Some Contrasts between Linguistically Homogeneous and Linguis- tically Heterogeneous Polities’, in J. Fishman, C. Ferguson et J. Dasgupta (dir.), Language Problems of Developing Nation. New York : Wiley, 146–58.

Fishman, J. (1999) ‘The New Linguistic Order’, Foreign Policy 113 : 26–40.

Flores, N. (2013) ‘Silencing the Subaltern: Nation-State/Colonial Governmentality and Bilingual Education in the United States’, Critical Inquiry in Language Studies 10(4) : 263–87.

Gao, W. et Smyth, R. (2011) ‘Economic Returns to Speaking “Standard Mandarin” among Migrants in China’s Urban Labour Market’, Economic Education Review 30(2) : 342–52.

Gellner, E. (1983) Nations and Nationalism. Oxford : Blackwell.

Gradín, C. (2015) ‘Rural Poverty and Ethnicity in China’, in T.I. Garner et K.S. Short (dir.), Measurement of Poverty, Deprivation, and Economic Mobility. Bingley : Emerald, 221–47.

(20)

Grin, F. (1999) Compétences et récompenses. La valeur des langues en Suisse. Fribourg : Presses Universitaires de Fribourg.

Grin, F. (2002) Using Language Economics and Education Economics in Language Education Policy. Report to Language Policy Division, Council of Europe, Strasbourg.

Grin, F. (2003) ‘Language Planning and Economics’, Current Issues in Language Planning 4(1) : 1–66.

Grin, F. et Vaillancourt, F. (1997) ‘The Economics of Multilingualism: Overview of the Literature and Analytical Framework’, in W. Grabe (dir.), Multilingualism and Multilingual Communities (ARAL XVII). Cambridge : Cambridge University Press, 43–65.

Guo, Q. et Sun, W. (2014) ‘Economic Returns to English Proficiency for College Graduates in Mainland China’, China Economic Review 30 : 290–300.

Harrison, J. (1969) Modern Chinese Nationalism. Hunter College of the City of New York : Research Institute on Modern Asia.

Hsiao, M. (2008) ‘Transformations in China’s Soft Power toward ASEAN’, China Brief 8(22) : 11–15.

Hu, G. (2005) ‘English Language Education in China: Policies, Progress, and Problems’, Language Policy 4(1) : 5–24.

Hu, Y. (2007) ‘China’s Foreign Language Policy on Primary English Education: What’s Behind It?’, Language Policy 6(3) : 359–76.

Hutchinson, W.K. (2002) ‘Does Ease of Communication Increase Trade? Commonality of Language and Bilateral Trade’, Scottish Journal of Political Economy 49(5) : 544–56.

Lam, A. (2002) ‘English in Education in China: Policy Changes and Learners’ Experiences’, World Englishes 21(2) : 245–56.

Lam, A. (2005) Language Education in China: Policy and Experience from 1949. Hong Kong: Hong Kong University Press.

Lam, A. et Chow, K. (2004) ‘English Language Education in China: An Update’, in K. Tam et T. Weiss (dir.), English and Globalization: Perspectives from Hong Kong and Mainland China. Hong Kong : Chinese University Press, 233–51.

Lampton, D.M. (2001) Same Bed, Different Dreams: Managing U.S.-China Relations, 1989–2000. Stanford : Stanford University Press.

Lien, D., Oh, C.H. and Selmier, T. (2012) ‘Confucius Institute Effects on China’s Trade and FDI: Isn’t It Delightful When Folks Afar Study Hanyu?’, International Review of Economics and Finance 21(1) : 147–55.

Marschak, J. (1965) ‘Economics of Language’, Behavioral Science 10(2) : 135–40.

Mazarr, M.J. (1996) ‘Review Essay: Culture in International Relations’, Washington Quarterly 19(2) : 177–85.

McDonald, E. (2011) ‘The ‘中国通’ or the ‘Sinophone’? Towards a political economy of Chinese language teaching’, China Heritage Quarterly 26. http://www.chinaheritage- quarterly.org/tien-hsia.php?searchterm=025_sinophone.inc&issue=025 (consulté le 4 septembre 2018).

Melitz, J. (2008) ‘Language and Foreign Trade’, European Economic Review 52(4) : 667–99.

Ministère de l’éducation (2001) 教育部关于积极推进小学开设英语课程的指导意

[Recommandations du Ministère de l’éducation sur la promotion active des cours d’anglais dans les écoles primaires]. http://www.moe.gov.cn/srcsite/A26/

s7054/200101/t20010120_166075.html (en chinois) (consulté le 4 septembre 2018).

(21)

Nettle, D. (2000) ‘Linguistic Fragmentation and the Wealth of Nations: The Fishman- Pool Hypothesis Reexamined’, Economic Development and Cultural Change 48(2) : 335–48.

Norman, J. (1988) Chinese. Cambridge : Cambridge University Press.

Nye, J.S. (2003) The Paradox of American Power: Why the World’s Only Superpower Can’t Go It Alone. New York : Oxford University Press.

Nye, J.S. (2004) Soft Power: The Means to Success in World Politics. New York : Public Affairs.

Pang, J., Zhou, X. et Fu, Z. (2002) ‘English for International Trade: China Enters the WTO’, World Englishes 21(2) : 201–16.

Pieterse, J.N. (2003) Globalization and Culture: A Global Mélange. Lanham : Rowman &

Littlefield.

Ramsey, S.R. (1987) The Languages of China. Princeton, NJ : Princeton University Press.

Ray, A. (2002) ‘The Chinese Economic Miracle: Lessons to be Learnt’, Economic and Political Weekly 37(37) : 3835–48.

Ricento, T. (2006) ‘Language Policy: Theory and Practice: An Introduction’, in T. Ricento (dir.), An Introduction to Language Policy: Theory and Method. Malden : Wiley, 10–23.

Rohsenow, J.S. (2004) ‘Fifty Years of Script and Written Language Reform in the PRC: The Genesis of the Language Law of 2001’, in M. Zhou et H. Sun (dir.), Language Policy in the People’s Republic of China: Theory and Practice since 1949. Norwell : Kluwer Academic, 21–43.

Ross, H.A. (1993) China Learns English: Language Teaching and Social Change in the People’s Republic. London : Yale University Press.

Schwarcz, V. (1991) ‘No Solace from Lethe: History, Memory and Cultural Identity in Twentieth-Century China’, in W.M. Tu (dir.), The Living Tree: The Changing Meaning of Being Chinese Today. Stanford : Stanford University Press, 85–112.

Scofield, D. (2004) ‘China Ups Ante in Ancient-Kingdom Feud with Korea’, Asia Times  Online. http://www.atimes.com/atimes/China/FH11Ad03.html (consulté le 4 septembre 2018).

Snyder, S. (2005) ‘A Turning Point for China-Korea Relations?’, Comparative Connections 6(3) : 109–16.

Spolsky, B. (2014) ‘Language Management in the People’s Republic of China’, Language 90(4) : e165-e179.

Sutter, R. (2002) ‘China and Japan: Trouble Ahead?’, The Washington Quarterly 25(4) : 37–49.

Tsung, L. (2009) Minority Languages, Education and Communities in China. New York : Palgrave-MacMillan.

Vaillancourt, F. (1978) ‘La Charte de la langue française au Québec: un essai d’analyse’, Analyse de Politiques 4(3) : 284–308.

Vaillancourt, F. (1980) Difference in Earnings by Language Groups in Quebec. 1970. An economic analysis. Québec : Centre international de recherche sur le bilinguisme (B-90).

Wan, D. (2014) ‘The History of Language Planning and Reform in China: A Critical Perspective’, Working Papers in Educational Linguistics 29(2) : 65–79.

(22)

Wang, Y. et Phillion, J. (2009) ‘Minority Language Policy and Practice in China: The Need for Multicultural Education’, International Journal of Multicultural Education 11(1) : 1–14.

Wei, R. et Su, J. (2011) ‘Foreign Language Use in Chinese Metropolises: An Analysis of Evidence from a National Survey with Special References to Beijing, Shanghai, Tianjin, Guangzhou, Shenzhen, Chongqing and Dalian’, Journal of Foreign Language Teaching and Research 43(6) : 924–33.

Wei, R. et Su, J. (2012) ‘The Statistics of English in China’, English Today 28(3) : 10–14.

Wong, E. (2010) ‘Move to Limit Cantonese on Chinese TV Is Assailed’, NYTimes.com, 26 July 2010. http://www.nytimes.com/2010/07/27/world/asia/27cantonese.html?_r=0 (consulté le 4 septembre 2018).

Wright, S. (2016) ‘Language Choices: Political and Economic Factors in Three European States’, in V. Ginsburgh et S. Weber (dir.), The Palgrave Handbook of Economics and Language. London : Palgrave-MacMillan.

Xu, L. (2011) ‘Report of the 2010 Work and 2011 Plan of the Confucius Institute Headquarters’, Confucius Institute 12 : 18–21.

Zhang, W. et Grenier, G. (2012) ‘How can Language be linked to Economics? A Survey of Two Strands of Research’, Working Papers 1206E. Ottawa : University of Ottawa.

Zhou, Q. (2004) ‘Writing Creation and Nation Establishment’, in M. Zhou et H. Sun (dir.), Language Policy in the People’s Republic of China: Theory and Practice since 1949.

Norwell : Kluwer Academic.

Abstract

This article proposes a review and an economic reading of the Chinese language policy of the twentieth and twenty-first centuries. The literature in this area is rich. However, it very often offers either essentially sociolinguistic readings or purely quantitative analyses, sometimes very thorough but which are not accompanied by reflections from the point of view of language policy. This article aims to combine a discussion of Chinese language policy with a commentary on the main findings of the economic studies related to these policies. Using the analytical tools of the language economy and three examples of Chinese language policies, namely the standardisation and dissemination of the national language, openness to English-speaking world and the promotion of Mandarin abroad, I show that linguistic policy always produces extralinguistic effects, particularly on the socio-economic level. In particular, I discuss the idea that language policy issues, with causes and

consequences that go well beyond the strictly linguistic sphere, need to be addressed in a complex way in order to put in place measures that are effective and well targeted.

Keywords: language policy, language economics, China, economics of multilingualism, complexity, public policies

Références

Documents relatifs

A la suite de nos expériences dans les différents établissements scolaires que nous avons vus, nous pouvons émettre l’hypothèse que malgré un déficit flagrant de

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des

Elle propose ensuite une volonté de rationalisation des choix budgétaires, avec le PPBS (Planning, Programming, Budgeting System), le MBO (Management by

MAVs are capable of determining the minimum number of network hops needed for a message to go from the base station (BSHopCount) and the user station (USHopCount) to themselves

Les communications de la Commission destinées au siège d’une entreprise établie à l’extérieur du Québec peuvent être accompagnées d’une traduction ou être rédigées dans

Cette intervention, consacrée à la revivification de la langue arabe par une approche plurilingue, sera étayée par le biais de deux cas d’étude, l’un se rapportant

Les philosophes des Lumières souhaitent construire une société nouvelle, éclairée par le savoir, dans laquelle les hommes peuvent accéder à la liberté.. Ils mettent l’accent

Ils sont alimentés par les idées des Lumières qui souhaitent plus de justice et remettent en cause la division de la société.. Dans tout le pays, des représentants de chaque ordre