• Aucun résultat trouvé

Le diable convole : un sermon inédit d'Etienne de Tournai pour la Pentecôte

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Le diable convole : un sermon inédit d'Etienne de Tournai pour la Pentecôte"

Copied!
25
0
0

Texte intégral

(1)

Article

Reference

Le diable convole : un sermon inédit d'Etienne de Tournai pour la Pentecôte

DOLVECK, Franz

Abstract

A sermon by Etienne of Tournai for Pentecost, on a lemma from The Book of Wisdom 1:5, defines the seven gifts of the Holy Spirit by comparing them either to the exact opposite vice or to the vice of feigning one particular gift. This text, most representative of the style of Etienne of Tournai, is one of his few to have had a wide and lasting reception, and was even attributed to Petrarch. It is here edited from all known manuscripts.

DOLVECK, Franz. Le diable convole : un sermon inédit d'Etienne de Tournai pour la Pentecôte.

Archives d'histoire doctrinale et littéraire du Moyen Âge , 2013, vol. 80, no. 1, p. 123-146

DOI : 10.3917/ahdlm.080.0123

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:143208

(2)

LE DIABLE CONVOLE : UN SERMON INÉDIT D’ETIENNE DE TOURNAI POUR LA PENTECÔTE

par Franz DOLVECK École pratique des Hautes Études 46, rue de Lille 75007 Paris, France Résumé

Un sermon d’Étienne de Tournai pour la Pentecôte, sur un lemme de la Sagesse (1, 5), définit les sept dons du Saint-Esprit en les comparant soit au vice exactement opposé, soit au vice qui consiste à imiter hypocritement l’un ou l’autre de ces dons. Ce texte, très représentatif de la production d’Étienne de Tournai, est l’un de ses rares sermons à avoir connu un succès durable, au point d’être attribué à Pétrarque. Il est ici édité d’après l’ensemble des témoins manuscrits connus.

Abstract

A sermon by Etienne of Tournai for Pentecost, on a lemma from The Book of Wisdom 1 : 5, definites the seven gifts of the Holy Spirit by comparing them either to the exact opposite vice or to the vice of feigning one particular gift. This text, most representative of the style of Etienne of Tournai, is one of his few to have had a wide and lasting reception, and was even attributed to Petrarch. It is here edited from all known manuscripts.

Riassunto

Un sermone di Stefano di Tournai per la Pentecoste, il cui lemma viene estratto dal libro della Sapienza (1, 5), definisce i sette doni dello Spirito Santo comparandoli al vizio esattamente opposto oppure al vizio che consiste nell’imitare in maniera ipocrita uno di quei doni. Questo testo, del tutto rappresentativo della produzione letteraria di Stefano di Tournai, è uno dei suoi rari sermoni ad avere avuto un successo duraturo, al punto da essere persino attribuito al Petrarca. L’edizione si basa su tutti i manoscritti conosciuti.

[Mots-clés : Étienne de Tournai, homilétique médiévale, sept dons du Saint-Esprit]

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(3)

lire trop vite la Chronique d’Adrien de Budt, moine de l’abbaye des Dunes, un pétrarquisant peu attentif pourrait avoir la fausse joie de croire découvrir un inédit du Poète couronné 1; dans le chapitre consacré à l’année 1458, où il n’était alors qu’un jeune étudiant parisien parmi tant d’autres, Adrien de Budt insère en effet un passage autobiographique 2 :

Eodem anno, ego quidem frater Adrianus, partim devotionis, partim gradu propinquitatis et sanguinis causa, ab eodem meritissimo dompno [l’abbé Jean Crabbe, son parent, élu l’année précédente] præventus fui præsentatione habitus; sed cum Parisius starem, distuli gratiam et ingressum, tum propter magistrandi gradum quem plerumque licet inaniter appetii, tum propter Francisci Petrarchæ compositas invectivas quibus signanter Cistercienses videtur redarguere. Ait enim epistola sua De nuptiis Dyaboli, qui, dum matrimonium cum Iniquitate contraxisset, cum una suæ non sufficeret libidini, duas quæsivisse uxores :

« Ne relinquamus, inquit, semen Ysmael » 3. Hæc ille poeta laureatus Franciscus Petrarcha contra Cistercienses, quæ me sine dubio terruerunt super ingressu præsentato.

Suivent alors des considérations sur le fait que la vie de misère des ordres mendiants ne l’enchante guère plus. Or le long extrait qu’Adrien de Budt cite sous le nom de Pétrarque relève d’une attribution non seulement erronée mais encore complètement isolée, et il faudra revenir sur ses raisons. Il s’agit en réalité d’un sermon d’Étienne de Tournai sur un lemme tiré de la Sagesse, 1, 5, Spiritus disciplinæ effugiet fictum, nec habitabit in corpore subdito peccatis, en général rubriqué In Pentecoste ou De Spiritu Sancto, et dont l’attribution est pour le coup hors de doute, tant sur la foi des témoins manuscrits que d’après l’étude stylistique.

Étienne de Tournai 4, dans la seconde moitié du XII e siècle, a fait le plus beau des cursus honorum; né en 1128 à Orléans, après d’assez longues études au travers de l’Europe, il rentre chez lui et postule à Sainte-Euverte, d’obédience victorine; il en devient abbé avant d’être appelé plus haut, à la tête de Sainte-

(1) Sur Adrien de Budt (ou But; la première forme semble la plus en usage actuellement), outre les brèves notices du Lexicon des Mittelalters et du Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques, on pourra se reporter à V. FRIS, « Les chroniques d’Adrien de But », Bulletin de la commission royale d’Histoire (1901), p. 517-544. Voir aussi la préface de l’édition citée note suivante. Que trouve ici l’expression de mes sincères remerciements M. Mark Burde, lecteur à l’université du Michigan, qui est à l’origine de l’édition présentée ici.

(2) « Chronique de Jean Brandon avec les additions d’Adrien de But », in J. KERVYN DE LETTENHOVE, Chroniques relatives à l’histoire de la Belgique sous la domination des ducs de Bourgogne. Textes latins : chroniques des religieux des Dunes, Bruxelles 1870, p. 364-366.

(3) L’extrait cité par Adrien de But est un remaniement prenant en compte une bonne partie du texte édité à la suite de cet article, fondé sur une version très corrompue du texte; ce point sera discuté ci-après, en même temps que les raisons qui font citer cet extrait sous le nom de Pétrarque.

(4) Sur Étienne de Tournai, et en particulier sur ses sermons, on se reportera à R. SCHMAUCH, Édition de seize sermons d’Étienne de Tournai, thèse pour le dipl. d’archiviste paléographe, 2 t., 2006, dactyl.; résumé dans « École des chartes, positions des thèses », 2006, p. 193-200.

À

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(4)

Geneviève de Paris, qui posait les problèmes que l’on sait à la papauté et aux victorins. Puis il finit sa carrière évêque de Tournai, de 1192 à sa mort en 1203.

L’abbatiat de Sainte-Geneviève puis l’épiscopat firent de lui un personnage politique, mais sa renommée est surtout établie sur ses talents littéraires, de prédicateur et d’épistolier, et canoniques, puisqu’on lui doit aussi un commentaire du Décret de Gratien.

Malgré ce que l’on pourrait attendre d’un tel auteur, à voir ainsi résumés les genres qu’il a pratiqués, Étienne de Tournai est tout sauf un prédicateur pénible, tant ses vastes fresques allégoriques, peuplées de foules conceptuelles, sont ponctuées de sentences, d’annominations, d’étymologismes; mais cela en fait un auteur aux buts longs à se dévoiler. Son sermon De Spiritu Sancto est l’un des plus révélateurs : une fois le lemme cité, le prédicateur l’abandonne sans transition pour entraîner l’assistance dans la demeure du diable, qui, se voyant menacé par les progrès de l’Église, et plus particulièrement du monachisme, cherche avec ses conseillers le moyen de rétablir un juste équilibre des forces infernales et célestes.

La solution est simple : il faut augmenter les effectifs; le moyen d’y parvenir est la célébration de deux mariages – deux parce que « libidini [Diaboli] non sufficit una », comme le soulignait Adrien de Budt! Le baratre se prépare donc et l’on célèbre en grande pompe les épousailles de Satan et de Malice, dont la consom- mation va permettre de repeupler le siècle à force de progéniture infernale. Puis, de nouveau, on orne les lieux d’en-bas, pour le second mariage; à la polygamie s’ajoute l’inceste : la nouvelle fiancée n’est autre que la propre sœur de Malice, Hypocrisie. Les rites renouvelés et l’union consommée, l’heureux père donne à ses fils leur héritage, les installant cette fois dans les demeures et les institutions ecclésiastiques : le clerc n’est-il pas maître ès hypocrisies?

Mais le remède tendrait à être pire que le mal : les enfants de Malice se multiplient tant qu’il n’y a plus de place dans le monde. Leur père se résout donc à les installer avec leurs frères – ou demi-frères, ou cousins, la généalogie infernale étant un art un peu subtil – parmi les membres du clergé, particulièrement à Cîteaux (mais Cluny est aussi égratignée au passage) : puisque les moines blancs résistent à Fornication, le diable va introduire parmi eux la sœur de cette dernière, Avarice, la Sangsue des Proverbes, avec ses filles jumelles, Rapacité et Ténacité.

Le succès, cela va sans dire, est complet. Ce n’est qu’après une exhortation éminemment rhétorique au cistercien que l’on comprend enfin quel était le rapport avec le Saint-Esprit et avec le lemme : les fils de Malice sont l’opposé des sept dons du Saint-Esprit, tandis que ceux d’Hypocrisie sont l’imitation dévoyée de ces derniers; or le Paraclet fuira les seconds, c’est-à-dire le feint, effugiet fictum, et se tiendra à l’écart des premiers, n’habitant pas en qui les accueille, nec habitabit in corpore subdito peccatis. Ce que voulait Étienne de Tournai, c’était donc définir par la négative les dons du Saint-Esprit; et seule une attention constante permettra à l’assemblée de suivre le raisonnement de l’orateur.

Ce n’est pour autant pas chose très difficile que d’écouter Étienne de Tournai de bout en bout : ses sermons sont plutôt courts. Mais surtout, les scènes repré- sentées sont toujours très vivantes, et la confusion que produit l’introduction de

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(5)

nombreux acteurs est soigneusement dosée, de manière à ce que l’essentiel du message moral ressorte. Dans ce sermon, on aura pu oublier qui est employé comme « écuyer tranchant », mais certes pas les épousées, et pourquoi elles le sont, ou qui est la sœur de Ténacité. Tout est prétexte à jeu chez ce maître de la rhétorique, et, pour un lecteur contemporain, c’est une surprise de voir à quelle conclusion hautement édifiante tout cela mène; mais on ne peut que convenir que, bien que par des moyens qui nous sont devenus peu usuels, le but de toute prédication est atteint, et la leçon bien inscrite dans les mémoires 5.

Le plan est simple dans ses grandes lignes, malgré des digressions assez nombreuses : introduction et résolution prise par le diable, premier mariage, établissement des enfants, second mariage, nouvel établissement, puis résolution de la crise engendrée par le trop grand nombre des enfants du premier lit. Ce dernier point permet une vive critique du monachisme en général, et tout particulièrement de Cîteaux. De l’ensemble se dégage une peinture sociologique des vices de premier intérêt pour la théologie morale : les rapports et les filiations établis par Étienne de Tournai valent définition complète du péché et de la vie sans la grâce. On peut regrouper toutes les allégories citées dans le tableau qui suit, où les mariages de Malice et d’Hypocrisie sont mis en parallèle :

Le diable, vu comme Leo Draco

et qualifié par audacia [violentus] astutia [virulentus]

épouse Malitia Hypocrisis

qui a pour paranymphes Contemptus Dei Odium Proximi

Amor Propriæ Laudis Spes Terrenæ Dignitatis et apporte en dot Transgressoria

Voluntas

Vacua Conscientia qui comprend Illicitus Motus

[voluntas]

Ill. Affectus [concupiscentia]

Ill. Appetitus [actio]

Inanis Exspectatio [inflatio conscientiæ]

Immanis Excæcatio [intenebratio]

Elle reçoit en douaire Transitoria Voluptas Vana Gloria

qui comprend Perpetratio

Delectatio Frequentatio

Levis Exaltatio Brevis Exultatio

(5) Sur ce point, Étienne de Tournai est l’un des auteurs à qui il est le plus facile d’appliquer les théories de Mary Carruthers sur la mémoire, qu’il illustre comme un cas d’école. Voir surtout M. J. CARRUTHERS, Machina memorialis : méditation, rhétorique et fabrication des images au Moyen Âge, trad. F. DURAND-BOGAERT, Paris 2002 [éd. orig. The Craft of Thought : Meditation, Rhetoric, and the Making of Images (400-1200), Cambridge 1998].

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(6)

Elle est préparée et parée par

Superbia Impudentia Elatio Indignatio Petulantia Ira Avaritia Ostentatio Furtum Dissolutio Amor Cædis

Promptissima Simulatio Pr. Dissimulatio

La table du festin est mise par

Gula Superstitia

Le pain est fourni par Malitia et Nequitia (qui sont sœurs)

Pharisæi

Le vin, par Ebrietas Falsa Compunctio

Le « boucher » est Crudelitas per homicidia

Le cuisinier Furor Maceratio Carnis

Le maître d’hôtel Luctus Jejunium

L’écuyer tranchant Detractio —

On sert le « salsamentum detractorum » fait de

Piper (calor iracundiæ) Allium (furor contumeliæ) Herbæ virentes (livor invidiæ) Acetum (rancorem tristitiæ) sal fatuitatis

préparé dans le mortier duritia mentis avec comme pilon strepitus inculcationis dont l’action est désignée

comme

circuitus impietatis Les convives se

reconnaissent au son :

lascivi (cithara, lyra, tibia)

vagi et varii

(fabulæ, rithmuli, turpia carmina)

iracundi (rixæ et jurgia)

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(7)

La chambre nuptiale est préparée par

— Fictæ Vigiliæ

Préside à l’union des époux

Luxuria Delectabilis Ambitio

Le parallélisme n’est pas toujours parfait, à la fois par difficulté à faire se correspondre exactement deux comportements dont l’un soit simplement mauvais et l’autre mauvais par simulation du bien, et parce que l’éloignement des deux scènes dans le sermon rendait inutile de trop parfaire leur symétrie. Il demeure en outre des points difficiles à dédoubler; et Étienne de Tournai a sans doute profité de l’une ou l’autre description pour introduire en passant telle allégorie n’ayant pas de rapport direct avec son sujet. Les dots et douaires sont largement expliqués par l’auteur lui-même; en revanche, les rôles pris dans la préparation des festins ne sont qu’indiqués. Ils sont souvent évidents pour le mariage de Malice : Gourmandise met la table, Ivresse (ou Ivrognerie) sert le vin… mais, pour le mariage d’Hypocrisie, les serviteurs sont, comme leur maîtresse, subtils, en particulier Superstition qui met la table (ou fournit la nourriture) et Fausse Componction qui sert le vin.

L’exercice de mémorisation que semble proposer Étienne de Tournai est renforcé par le fait qu’il tend assez volontiers à se citer soi-même, ou du moins à reprendre les mêmes motifs; c’est également, s’il en était besoin, un élément d’attribution. Pour s’en tenir au corpus des sermons édités par R. Schmauch, la citation de l’Épître de Jacques, 1, 14, se retrouve dans les sermons I (p. 277 et 284) et VII (p. 343); celle des Proverbes, 30, 15, dans les mêmes sermons également (p. 283 et 245). L’assimilation du diable au lion et au dragon est également présente dans le sermon I (p. 277), ainsi que les allégories de « Simulatio » et de

« Dissimulatio », filles d’Hypocrisie (p. 281), tandis que l’on trouve dans le sermon VII une formule définitoire très proche de celle de notre sermon :

« rapacitas in acquirendo et tenacitas in conservando » (p. 345). Dans le sermon III, le sermon « codicologique », où sainte Geneviève réalise puis copie le livre de sa vie, la recette de l’encre (p. 307) est très proche de celle du « salsamentum detractorum » 6. Il est intéressant de noter par ailleurs que, en dehors de ses propres œuvres et de l’Écriture, Étienne cite peu mais avec insistance. Ainsi, c’est étonnamment Claudien qui marque ce sermon, avec un écho discret du Contre Rufin suivi presque aussitôt d’une longue citation de l’Enlèvement de Proserpine.

Malheureusement, le passage en question ne pose aucun problème textuel, et il est

(6) Ce sermon mériterait à lui seul une étude complète : il s’agit de l’un des rares documents médiévaux traitant tant de la technique de réalisation du codex que de sa symbolique; il est regrettable qu’il soit passé inaperçu des codicologues.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(8)

difficile de déterminer de quelle famille Étienne peut connaître le De raptu Proserpinæ 7.

Par ailleurs, le sermon qui nous intéresse offre un certain nombre de rapprochements textuels curieux avec la lettre 186 d’Étienne 8, datée par l’abbé Desilve entre 1188 et 1191. Aucun de ces rapprochements n’a, seul, d’importance, mais la concentration de beaucoup dans un seul paragraphe demeure intrigante :

[…] Vir prædictus zelo Dei accensus, quantum potuit, oppressis clericis astitit, nec destitit juvare pusillanimes, afflictis consulere, vagos et profugos consolari.

Generatio illa prava atque perversa, prudentior filiis lucis in negotiis hujus, qui in Maligno positus est, mundi, per quosdam abbates ordinis Cisterciensis forte nimis credulos et, ut sibi credatur, quærentes et querulos, incrustare contendit sincerita- tem prædicti famæ viri, et sacrosanctum collegium abbatum vestrorum, ipsis etiam angelis reverendum, false corruptela calumpniæ contra virum justum accendere, ut iniquitas opprimat justitiam, mendacium absorbeat veritatem 9. Cela seul ne saurait bien sûr suffire à prétendre dater le sermon qui nous intéresse; mais la critique des cisterciens, collecteurs de dîmes, lévites extorquant la dîme à des lévites, permet peut-être d’assurer l’hypothèse. Il faut noter d’une part que cette critique des cisterciens, et même la critique de personnes, d’entités particulières, est rare, surtout en des termes aussi virulents, chez Étienne de Tournai : c’est le seul cas recensé dans les sermons édités, et on comprend bien, à le comparer par exemple avec la rapide mention de Cluny assortie d’une pique tellement éculée qu’elle relève du topos, qu’Étienne de Tournai touche avec cette querelle des dîmes un point sensible, et concret 10. La formule d’Étienne de Tournai « non legimus [in Vetere Testamento] levitas levitis decimas ademisse » est la déformation ironique d’une formule papale qui semble être parue pour la première fois sous la plume de Pascal II en 1110 11, et qu’Alexandre III semble avoir reprise particulièrement souvent, notamment à l’intention de Didier de Thérouanne, qui lui avait demandé l’autorisation de prélever la dîme des terres tenues à ferme par les moines, blancs ou noirs; nous citons ici d’après une réponse d’Alexandre III à une demande similaire de Roger de Pont-l’Évêque, archevêque

(7) Voir CLAUDIAN, De raptu Proserpinæ, ed. J. B. HALL, Cambridge 1969 (Cambridge Classical Texts and Commentaries, 11), surtout p. 68-69 sur Claudien au XII e siècle, avant son inscrip- tion dans les « programmes » scolaires du siècle suivant; la citation d’Étienne de Tournai ne fait que corroborer les témoignages déjà existants d’une ætas Claudiana au XII e siècle.

(8) ÉTIENNE DE TOURNAI, Lettres, ed. J. DESILVE, Valenciennes-Paris 1893, p. 227-229.

(9) Ibid., p. 228; je souligne.

(10) Il n’est pas le seul à penser ainsi à cette époque : Gautier Map, qui est son exact contemporain, parle en termes non moins durs de l’attrait qu’exerce l’argent sur les cisterciens; par ex., De nugis curialium, I, 24.

(11) Cité dans les Décrétales, livre III, titre XXX, chap. II.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(9)

d’York 12 : « Illud etiam nos a tuæ petitionis affectu retrahere videtur, quod in Veteri Testamento non recolimus nos umquam legisse ut levitæ levitis decimas solverent ». Ces éléments nous rapprochent donc de la fin du pontificat d’Alexandre III ou des années qui suivent, au moment où la polémique des exemptions cisterciennes bat son plein. Il est donc assez probable, bien qu’on ne puisse se risquer à aucune certitude, qu’il s’agit là d’un sermon de la période épiscopale, vers 1180-1190.

Les sermons d’Étienne de Tournai, au nombre de quatre-vingt-huit, sont transmis par le biais de deux corpus identifiés par R. Schmauch 13; le sermon Spiritus Sanctus disciplinæ fait partie du premier, qui est aussi le plus vaste. Il se situe vers la fin de cet ensemble, donc dans la partie la plus instable, ce qui explique qu’un nombre relativement restreint des manuscrits connus pour le corpus le transmette. Ils sont au nombre de neuf : Paris, Bibliothèque nationale de France, lat. 14935 (A, f. 22-35), 3733 (B, f. 56v-59), 14592 (C, f. 56-62) et 16463 (D, f. 111-113v), Bibliothèque Sainte-Geneviève, 239 et 616, Bibliothèque de l’Arsenal, lat. 400 (G, f. 20-22), Évreux, Bibliothèque municipale, lat. 20 (N, f. 21v-24) et Saint-Omer, Bibliothèque municipale, 374 (O, f. 129v-133) 14. Tous ces manuscrits ont été collationnés, sauf les deux témoins de la Bibliothèque Sainte-Geneviève, qui sont des codices descripti modernes (respectivement des

XVIII e et XVII e siècles) issus de C 15.

A, B, D, G et N sont des sermonnaires, sans marque vraiment distinctive; ils datent de la première moitié du XIII e siècle, sans qu’une chronologie relative puisse être établie. A provient de Saint-Victor dont il porte la reliure armoriée, mais rien n’assure qu’il y ait été copié : la cote la plus ancienne remonte au XVI e

siècle, et le manuscrit dans son état actuel est le remaniement de plusieurs unités codicologiques issues de la bibliothèque de l’abbaye. B fut une acquisition de Colbert, d’où sa présence à la Bibliothèque royale, mais son histoire antérieure est inconnue. D provient de Sainte-Geneviève dont il porte (f. 2) un ex-libris du milieu du XIII e siècle; il y a vraisemblablement été copié, au même moment ou très peu de temps auparavant. Il fut racheté par le cardinal de Richelieu, dont il porte

(12) Cartularium abbathiæ de Rievalle, ordinis Cisterciensis, fundatæ anno 1132, ed.

J. C. ATKINSON, Durham 1889, p. 95-96. La bulle à Didier de Thérouanne est mentionnée par J.-B. MAHN, L’ordre cistercien et son gouvernement des origines au milieu du XIII e siècle (1098- 1265), Paris 1951 [1 re éd. 1945], p. 109; il indique l’édition qu’en a faite Johannes RAMACKERS, Papsturkunden in Frankreich, t. IV, Picardie, Göttingen 1937 (n.v.). Je n’ai pas trouvé d’autre emploi de cette formule, et à plus forte raison détournée de son sens d’origine, en dehors du domaine de la diplomatique – où elle est cependant assez courante à cette époque.

(13) R. SCHMAUCH, Édition de seize sermons, t. I, p. 83 sq. particulièrement.

(14) Tous les sigles sont repris de l’édition de R. Schmauch, sauf pour le manuscrit de Saint-Omer qui ne concernait pas son corpus.

(15) Ibid., t. I, p. 137-138. Tous les témoins sont décrits en détail aux p. 157-269; nous ne reprenons donc, ici, que les éléments les plus importants, et de manière succincte : la codicologie n’éclaire malheureusement pas la transmission de ces sermons.

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(10)

une reliure armoriée, et passa ensuite à la Bibliothèque royale. G porte un ex-libris moderne des minimes parisiens (f. 2); son origine est inconnue. N, enfin, en porte un du XVIII e siècle (f. 3) de l’abbaye de Lyre, en Normandie, sans qu’on connaisse non plus sa provenance et son origine.

C est uniquement consacré aux sermons d’Étienne de Tournai. C’est une copie sur papier du XVII e siècle, typique du « manuscrit d’érudit », réalisée puis conservée à Saint-Victor, et se fondant sans doute sur des manuscrits que possédait alors l’abbaye. Le témoin O, enfin, est un vaste florilège, sur papier, de textes très variés, touchant surtout à divers points de police ecclésiastique et de droit canon; il a appartenu à Robert Pépin, abbé de Clairmarais de 1545 à 1549, qui y a apposé son ex-libris f. 231v et Av. D’après les filigranes, il faut dater la première partie (f. 1-141) des années 1468-1470 environs 16.

À l’exception de B et de C, tous les manuscrits donnent un texte très mauvais : les erreurs abondent; A en particulier se trompe presque systématiquement de temps et de mode (ou confond les conjugaisons), et D intervertit les voyelles, n’hésitant pas à écrire, par exemple, « intrinseco re »; mais il s’agit bien, l’am- pleur des lieux relevés le démontre, d’un lapsus calami et non d’un solécisme.

C offre, du point de vue de la langue, un texte bon, conforme à ce que l’on est en droit d’attendre d’un érudit du XVII e siècle; B est également sûr, mais son texte, comme nous allons le voir, a été très retouché, de sorte que, si la langue est bonne, la tradition ne l’est pas. En raison de ces trop nombreuses fautes, presque toujours isolées, l’apparat conservé dans l’édition ci-après est sélectif; tout ce qui relevait du barbarisme, de la faute susceptible d’être corrigée par un lecteur attentif, a été omis, sauf à pouvoir servir à l’établissement du stemma. De même, les omissions d’un mot ou deux n’ont pas été signalées si elles sont isolées : des omissions plus importantes permettent largement d’établir les rapports des manuscrits entre eux, et le nombre de ces petits oublis nuirait considérablement à la lisibilité de l’apparat.

L’établissement de la tradition de ce seul sermon d’Étienne de Tournai pose des problèmes et ne peut que demeurer partiellement hypothétique; en effet, l’édition d’un seul sermon ne peut pas venir remettre en cause le stemma établi par R. Schmauch, mais ce sermon en particulier ne semble pas le confirmer. Au demeurant, il faut bien reconnaître que, pour le texte en lui-même, cela n’a pas une grande importance : le stemma que nous proposons permet d’éclaircir un ou deux lieux mal transmis, mais dans tous les cas le texte resterait très largement compréhensible, et les variantes ne sont, finalement, que d’une importance très relative.

Deux familles se distinguent. La première comprend A, G et C; la seconde, O, B, N et D. Pour ce qui est de la première, A et G sont distincts, comme la simple

(16) É. PELLEGRIN, Manuscrits de Pétrarque dans les bibliothèques de France, Padoue 1966, p. 296 [118].

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(11)

comparaison des omissions signalées le rend clair (parmi d’autres exemples, G omet seul une part importante de la phrase « Unusquisque enim… », p. 137; p. 138, A a perdu « in vitro »). La place de C pose problème : il est assez probable qu’il ait été copié sur G, mais un lieu semble indiquer le contraire : p. 137, C a

« secunda » pour « secundo », alors que G a corrigé la première leçon pour la deuxième (qui est la bonne : « prius enim movetur…, secundo afficitur »); cela dit, l’autorité de cette seule variante est très faible. On pourrait considérer, par prudence, que C et G remontent à un même archétype sans que le premier soit descriptus sur le second : sachant que G ne provient pas des collections de Saint- Victor, alors que c’est là que C a été copié, c’est une hypothèse probable. En outre, C est très certainement contaminé par un manuscrit de la deuxième famille du niveau de B et d’N : voir par exemple, p. 140, « exsecratos (hypocritas) » pour

« excæcatos » : bien sûr, ce qui intéresse ici Étienne, c’est l’aveuglement des hypocrites, non le fait qu’ils soient haïssables. La seconde famille est moins simple. Un premier embranchement sépare O des trois autres témoins; le nombre de sauts du même au même et de leçons faussées par une copie trop rapide rend ce manuscrit particulièrement peu sûr, mais, outre de grandes variantes communes à toute la famille (voir notamment p. 138, n. s ; 141, n. i ; 142, n. t), il se rapproche à l’occasion de leçons de la première famille qui sont les bonnes : particulièrement

« Ismael » p. 135 (le diable dit : « Non relinquimus semen in Ismael »; il joue sur la formule biblique qui comporte « Israel » : il me semble presque impossible de retrouver la bonne leçon à partir d’« Israel », à cause du poids de l’Ecriture), « albo vellere » p. 135 (même si B a la bonne leçon quoique en glose marginale : « alba veste » est à mon avis une lectio facilior, vraisemblablement issue d’une glose), l’omission de l’addition « grande super terram » p. 136, « formas illicitas » p. 138 (où B, N et D ont « objectam formam », dont le sens ne me paraît pas évident), etc.

Les trois manuscrits restants, B, N et D, sont très vraisemblablement sur le même plan. Tous trois sont des fins de transmission, et la copie de l’un d’eux sur un autre est impossible. L’isolement de B se repère sans difficulté, celui de D également, mais N a des variantes communes tantôt avec l’un, tantôt avec l’autre : l’addition

« Spiritus Sancti » p. 135 (dans une citation biblique où le Saint-Esprit n’a rien à faire) indique qu’il a un archétype en commun avec D (mais B a parfaitement pu corriger ex ingenio), de même que « cædit » pour « cædis » (« Amor Cædis »;

« cædit » empêche de construire la phrase) p. 138, ou les variantes dans la citation biblique p. 145; mais, en sens inverse, p. 136, il n’y a aucune raison pour que D ait pris seul la glose (qui est aussi ce que je crois la bonne leçon, « virulentum ») là où B et N ont copié « fraudulentum »; p. 137 (« suas proprietates deserviunt »),

« diversas » ou « diversitas » pour « suas » réunit B et N mais pas D, qui n’a pas pu à partir de cela retrouver la leçon « suas ». L’hypothèse la plus vraisemblable est donc que, selon des modalités qui nous échappent, B, D et N ont été copiés chacun à partir d’un même archétype, mais sans intermédiaire que deux d’entre eux se partageraient; au demeurant, l’hypothèse d’une contamination n’est pas impossible, mais très improbable : un scribe qui cherche à corriger son modèle veille à sa copie plus que ne le font les responsables de D et d’N…

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(12)

Le texte édité ci-après repose donc sur la reconstitution proposée, toute hypothétique qu’elle soit. Pour ce sermon en particulier, la branche regroupant B, N et D évacue assez souvent les lectiones difficiliores, ce qui a conduit à rejeter cette famille; B offre sans doute un texte très correct d’un point de vue linguistique, mais le manuscrit le plus « correct » grammaticalement n’est pas forcément celui qui est le plus proche de la version issue de l’auteur. C’est donc la famille d’A et de G qui est suivie de préférence, en particulier lorsqu’elle s’accorde avec les leçons d’O sur les points délicats. Les leçons de B (et, dans une moindre mesure, de D et N) ne sont prises contre le texte des autres manuscrits que lorsqu’elles semblent nettement supérieures, et en particulier pour l’alternance des annominationes : Étienne de Tournai y apporte un soin particulier, et il est donc légitime de chercher à corriger les faiblesses en faveur d’un sens meilleur et d’un rapprochement phonétique plus important toutes les fois que c’est possible.

Le seul choix « risqué » est la substitution, d’après B seul, d’« immanis » à

« inanis », deux fois, p. 140; l’auteur joue sur les termes « exspectatio » et

« excæcatio », en les qualifiant toutes les deux (alors que partout ailleurs il fait varier, en cas similaires, l’adjectif) d’« inanis »; une « excæcatio » ayant bien plus de sens si elle est « immanis » qu’« inanis », il faut ici suivre B; il ne peut s’agit que d’une correction ex ingenio du copiste de B, mais elle a semblé parfaitement légitime 17. Par ailleurs, il aurait été vain de vouloir suivre l’orthographe de manuscrits qui ne sont pas fiables en la matière; pour la commodité de la lecture, les graphies ont été normalisées, quitte à signaler à l’occasion en apparat telle curiosité, telle graphie pouvant aider à classer les manuscrits, et en respectant toutefois les « standards » de l’orthographe médiévale, par exemple l’introduction de la lettre h dans « Jhesus » ou « michi ».

Revenant pour finir à Adrien de Budt avant de donner le texte édité, on peut deviner grâce à lui la postérité de ce texte, le seul d’Étienne de Tournai qui soit sorti du domaine de l’homilétique. En effet, tout porte à croire que la fausse attribution du chroniqueur est à rapprocher du témoin O; ce dernier s’abstient d’attribuer l’œuvre, mais la fait précéder du prologue du livre II du De remediis utriusque fortunæ de Pétrarque, attribué, lui, en toutes lettres (f. 124-129). Il est donc très probable que c’est à cause de cette incidence – on ne prête qu’aux riches – qu’Adrien de Budt a attribué notre sermon à Pétrarque; à partir de là, le manuscrit de Clairmarais doit être en fait le reflet d’une collection ayant circulé dans les cercles lettrés et estudiantins des années 1450-1470, enrichie au fur et à mesure. Cette circulation a même dû être particulièrement large, car, si le texte transmis par O est déjà éloigné de celui qui nous semble le meilleur, celui que

(17) On ne peut évacuer totalement la possibilité qu’il s’agisse d’une bonne leçon préservée qui ressortirait aussi loin dans la tradition; mais c’est peu probable, vu le consensus de tous les autres manuscrits. Il me semble qu’un copiste soigneux et connaissant bien le texte et le corpus, comme l’est manifestement le scribe de B, peut très bien reconstituer de soi-même l’annominatioen question. Et si ce n’est pas le texte de l’auteur, è ben trovato…

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(13)

transmet Adrien de Budt l’est considérablement plus, au point qu’on pourrait le tenir pour différent : Adrien de Budt a eu accès à un manuscrit situé très en aval, dans la tradition, de celui de Clairmarais; cependant, je n’ai pas retrouvé dans le recensement des manuscrits de Pétrarque de témoin similaire. Signalons enfin la seule autre postérité connue de ce sermon : Vital Du Four, dans son Speculum morale totius sacræ Scripturæ, au début du XIV e siècle, reprend un large extrait à des fins de théologie morale : preuve si besoin que l’œuvre d’Étienne de Tournai a pu passer pour définitoire 18.

(18) s. v. « De lingua », ed. Venise 1594, f. 72v. Le passage cité, dans une version très corrompue, est tiré du festin de Malice, de « Gula ponit mensam » à « quia sal sapientiæ evanuit inter illos convivas ».

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(14)

SERMO MAGISTRI STEPHANI TORNACENSIS DE SPIRITU SANCTO a

SPIRITUS SANCTUS DISCIPLINÆ EFFUGIET FICTUM, NEC HABITABIT IN CORPORE SUBDITO PECCATIS 1.

Legitur in Evangelio quod, cum paterfamilias seminasset b bonum semen in agro suo c, inimicus homo superseminavit zizania d 2. Bonum semen patris- familias e filii f gratiæ, filii Ecclesiæ, filii vitæ; superseminata zizania ggeneratio mala et adultera 3, generatio prava atque perversa 4. Vidit omnis h inimicus Diabolus crescere et multiplicari i semen Abrahæ, in quo benedicentur omnes gentes 5; vidit et invidit, conceptoque spiritu indignationis et furoris ait ad suos :

Ergone in opprobrium et contemptum j dati steriles ac sine fructu annos agemus? ergone maledictioni subjecti k non relinquimus semen in Ismael l 6? Crescunt et multiplicantur æmuli nostri sicut stellæ cæli et sicut harena quæ est in litore maris 7; veniunt ab Oriente et Occidente 8, ædificant ecclesias, monasteria construunt, et in eis ‘omnis ætas, sexus, conditio’ 9 laudes personat m Creatoris.

Regenerantur per baptismum, reconciliantur per pænitentiam et n per gratiam fiunt o filii et p heredes, heredes quidem q Dei, coheredes autem Christi 10. Jam non sufficiunt eis urbes et oppida; vicos et agros implet populus christianus, et inter eos quidam albo vellere contecti r silvas penetrant et deserta. Hii sunt qui vehementius nos impugnant, et, si soli fuerimus, vereor ne expugnent; dicamus et nos cum Pharaone : Ecce populus filiorum Israel multus et s fortior nobis est;

(a) s. m. s. (tornacensis add. C) d. s. s. AGC, de nuptiis diaboli O, tit. om. BN, tit. stylo scriptus non legi potest D (b) seminasset] post agro suo transp. C, post semen O (c) suo] et add. AG (d) zizania]

zizaniam ND (e) patrisfamilias] sunt add. BN (f) filii] sunt add. O (g) zizania] sunt filii nequam add.

O (h) omnis] communis OBND (i) et multiplicari] om. G (j) in opprobrium et contemptum] in proprium et contemptum (contentum G) AG, in contemptum et improperium C (k) subjecti] subditi AC (l) ismael] israel BND (m) personat] resonant O, personant BN, personent D (n) per pænitentiam et] om. N (o) fiunt] om. ND, post heredes 1 transp. O (p) et] spiritus sancti add. ND (q) quidem] quæ forte N, qui exsistunt add. D (r) albo vellere contecti] albo vellere tecti O, alba veste contenti B cum glossa marg. vel albo vellere contecti, alba veste vel (et add. N) albo vellere contecti (contempti N) ND (s) multus et] om. C

(1) Sap. 1, 5 (2) Cf. Matth. 13, 25 (3) Matth. 12, 39 et 16, 4 (4) Deut. 32, 5 (5) Gen. 22, 18

(6) Locus iste in Scripturis inveniri non potest; originem, ut videtur, trahit ab AMBROSIASTRI (Ps. AUGUSTINI), Quæstionibus Veteris et Novi Testamenti, num. XVII (ed. Alexander Souter, 1908 [C.S.E.L., 50], p. 43-44) : Quid est ut maledictos dicat qui non reliquerint semen in Israel, per Isaiam autem nihil obesse dicat spadonibus, quia generare non possunt? Ubi editor ad Ex. 23, 26 et Deut. 7, 14 refert.

(7) Gen. 22, 17 (8) Luc. 13, 29

(9) QUINT., Inst. or., IV, I, 13 (10) Rom. 8, 17

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(15)

venite, sapienter t opprimamus eum, ne forte multiplicetur u, et, si ingruerit v contra nos bellum, addatur inimicis nostris w 11. Insultant nobis et dicunt : « Plures sunt nobiscum quam cum illis ». Faciam et ego michi nomen x 12, et y gignam filios et filias, et erunt z qualis pater tales a filii. Quid vobis videtur?

— Opus est, inquiunt sui, consilio b et opera c in opere hoc d. Conjugalem e copulam f aut, si magis delectat, fornicariam desiderat g procreatio h filiorum i.

— Quærite michi, inquit j, conjugem, immo, quia libidini meæ non sufficit k una, duas quærite, et adducite michi dignas moribus meis : quærite l quæ et reginæ possint esse ubi rex ego sum m. Alioquin ‘indicam bellum superis’ 13; movebo cælum et terram 14, ponam solium meum in 15 excelsis; et ero similis Altissimo 16.

Completum est quod n scriptum est per poetam :

‘Rex Herebi quondam tumidas exarsit in iras Prœlia moturus superis quod solus egeret Connubiis, sterilesque diu consumeret annos, Impatiens nescire thorum nullasque mariti Illecebras nec dulce patris cognoscere nomen’ 17.

Leonem, inquiunt, et draconem 18 te appellant, in altero per audaciam violentum, in altero per astutiam virulentum o. Scimus quia specialiter in duas p, Malitiam scilicet q et r Hypocrisim, jugales s oculos conjecisti : leoni Malitia, draconi desponsetur Hypocrisis et conjungatur.

— Mecum, ait, sentitis t, hæc enim sunt vota mea, quæ distinxerunt u labia mea 19.

(t) sapienter] sapientes AG (u) multiplicetur] multiplicentur AGCO (v) ingruerit] viguerit GC, inguierit A (w) inimicis nostris] inimici nostri D (x) nomen] grande super terram add. BND (y) et]

om. OND (z) erunt] ecce O (a) tales] et add. B (b) sui consilio] suo consilio AGC, tuo consilio O, consilio tuo B, frui consilio N (c) et opera] et operam D, om. O (d) opere hoc] hoc opere C, opere isto BN, opere nostro D (e) conjugalem] ut aut c. B, Hic c. ND (f) copulam] habeas add. BN, expatit sic add. D (g) fornicariam desiderat] fornicari unde exeat BN, fornicari aut desiderat D (h) procreatio]

procreationem D (i) filiorum] fiat tibi sicut vis add. BN (j) inquit michi BD (k) sufficit] sufficiet ND (l) quærite] om. OBN (m) rex ego sum] rex sum ego A, ego sum rex B, ego sum N, sum ego D (n) quod] hoc ut B, hoc ubi ND (o) virulentum] lutulentum GC, fraudulentum BN (B cum gloss.

super lin. vel virulentum) (p) duas] conjuges add. C (q) scilicet] om. C, ante malitiam transp. B (r) et] om. G (s) jugales] regales AOBND (t) sentitis] consentitis C, sedem stabilis O (u) distinxerunt]

distixerunt AG

(11) Ex. 1, 9-10 (12) I Mach. 3, 14

(13) CLAUD., In Ruf., I, 68-69 (14) Agg. 2, 22

(15) Jer. 49, 38 (cf. et not. seq.) (16) Is. 14, 14

(17) CLAUD., Pros., I, 32-36 (18) Ps. 90, 13

(19) Ps. 65, 13-14

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(16)

Ad hæc verba currunt satellites mortis, angeli Sathanæ, proxenetæ nefandi matrimonii v, et Malitiam se eis ultro w offerentem ad copulam regis tenebrarum invitant; præbet consensum Malitia, nichil libentius auditura. Procedunt para- nymphi duo, scilicet Contemptus Dei et Odium Proximi, eamque læva dextraque x deducentes in desideratos amplexus sui principis iniciunt y. Firmantur nuptialia fœdera consensu pariter et contactu z; constituunt hinc a dotem, inde propter nuptias donationem : ex parte Malitiæ nubentis b dotem, ex parte Satanæ ducentis donationem propter nuptias; affert illa pro dote Transgressoriam Voluntatem, confert c ille donationem d Transitoriam Voluptatem e. Et, quoniam dos et donatio propter nuptias ‘æquis passibus’ 20 ambulare solent, quasi tres agri portiones seu tres fundos infructuosos f et steriles invenies g in utraque : in Transgressoria Voluntate h occurrunt Illicitus i Motus, Affectus, Appetitus. Prius enim movetur animus ad j volendum, secundo k afficitur ad concupiscendum, tertio appetit ad agendum : his tribus, malevolentis, concupiscentis l et appetentis Transgressio completur. In Transitoria Voluptate distingue tres agri pulverei m et aridi partes, quæ sunt Perpetratio, Delectatio, Frequentatio. Perpetratio Delectationem n incitat, Delectatio Frequentationem invitat. Hii sunt duo funes, Transgressoria o scilicet Voluntas et Transitoria p Voluptas, quibus Concupiscentia abstrahit et illicit q miserum peccatorem. Unusquisque enim temptatur a propria concupiscentia, abstractus et illectus 21, abstractus per Transgressoriam Volunta- tem r, illectus per Transitoriam s Voluptatem t; et utrumque, ut dictum est, funiculus est triplex, qui difficile rumpitur 22.

Festinat in obsequium nubentis Malitiæ u tota criminalium turba, et tamquam devota mancipia, scilicet v suas w proprietates, deserviunt. Superbia cervicem procedentis sustinet et ut erecto x collo incedat docet y; Impudentia frontem denudat et quodam candore adulterino colorare extendit z; Elatio supercilia

(v) proxenetæ nefandi matrimonii] prosequentes nefandum matrimonium O (w) ultro] om. O, ante se transp. BN (x) læva dextraque] dextra lævaque OBND, dextra læva et sinistra A (y) iniciunt]

vinciunt C, mittunt O, intuitum ND (z) contactu] contractu B, contacta D (a) hinc] hic AG, illi C, hunc D (b) nubentis malitiæ BND (c) confert… donationem] om. N (d) donationem] pro donatione AOB (e) confert – voluptatem] om. D (f) infructuosos] infructiferos ND (g) invenies] juvenes AG (h) voluntate] voluptate GN (i) illicitus] illiciti OBND (j) ad] aliquid add. BND (k) secundo] secunda A, a.c. G, C (l) concupiscentis] concupiscentes G, p.c. A (m) agri pulverei] agri pulverosi C, agris pulveres O, agri pluverulentuli BND (n) frequentatio perpetratio delectationem] frequentatione N (o) transgressoria] transitoria AGC (p) transitoria] transgressoria ND (q) illicit] allicit OND (r) voluntatem] voluptatem GCD (s) transitoriam] transgressoriam ND (t) illectus – voluptatem]

om. G (u) malitiæ nubentis BN (v) scilicet] secundum OD (w) suas] diversas B, diversitas N (x) erecto] recto AC (y) docet] edocet ON (z) candore adulterino colorare extendit] candore adulte- rino colore extendit A, candore et adulterino colore furatam extendit C, colore adulterino colorare intendit O, adulterinocandorefaciemcoloratBcumgloss.marg.adv.colore:vel colorarevultum contendit, adulterinocandore colorare vultum contendit N, adulterino colore colorare vultum intendit D

(20) Cf. VIRG., Æn., II, 724 (21) Jac. 1, 14

(22) Eccle. 4, 12

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(17)

componit, Indignatio deprimit; Petulantia vagos reddit oculos ut ad formas illicitas a illicite jaciantur et incaute; Ira genas b accendit c et rubore d flammeo reddit insignes; loco monilis Avaritia sinum stringit; Ostentatio e digitis annulos imponit; Furtum manibus chirothecas f involvit; Dissolutio, ut fluxis vestibus incedat, cingulum adimit; sed, ne prorsus distincta appareat, Amor Cædis g eam citra h morem muliebrem ferro i accingit. Itur ad convivium, auditur ‘vox j præ- conis invitantis’ 23 ad epulas : « Venite, inquit, inebriemus nos vino, coronemus nos rosis antequam marcescant » 24. Gula ponit mensam, ipsa Malitia, quæ nubit, panes suos et sororis k suæ Nequitiæ jubet l apponi m : infertur n fermentum Malitiæ et Nequitiæ, exclusis azymis sinceritatis et veritatis 25. Vinum propinat Ebrietas et ad bidendum invitat : « Videte, inquit, quam blande ingreditur vinum quod flavescit o in vitro » p. Tacet autem quod sequitur, Sed q in novissimis mordebit ut coluber 26. Crudelitas per homicidia carnes in frusta concidit; Furor igne perse- cutionis decoquit; Luctus r, tenebræ s spectaculum præbens, mensæ apponit; et, ut t hii qui comederunt u Jacob 27 et v devorant plebem Dei sicut escam panis 28 carni- bus fratrum reficiantur, Detractio incidit aliquando circa fauces, aliquando circa renes w; sæpe linguam, sæpe oculos, sæpe ipsa x vitalia, cor, pulmonem, et cætera comedentibus minutatim y dividit. « Gulosus est, inquit, frater ille z et a libidinosus, ille garrulus, ille vagus, nutrit b ille nequitiam in corde, superbiam in pulmone » : ecce quomodo detractores, Deo odibiles 29, carnes fratrum comedentibus incidunt.

Ut autem avidius c sumantur et citius consumantur, salsamentum apponitur d; conficitur autem e ex pipere f, allio g, virentibus herbis et aceto. In pipere intelligas h calorem iracundiæ, in allio furorem i contumeliæ, in herbis virentibus livorem j

(a) formas illicitas] formas illices A, objectam formam BND (b) ira genas] genas tantum N, ingenas D (c) accendit] ascendit AND (d) rubore] rubeo C (e) ostentatio] et ostendit ND (f) manibus chirothecas (yro- O)] manus chirothecis C (g) cædis] cædit ND (h) citra] contra AN, et contra B, circa D (i) ferro] freno C (j) auditur vox] vox auditur (audit N) BND (k) et sororis] et sorori AN, p.c. G, sorori BD (l) jubet – nequitiæ] om. O, (m) apponi jubet BND (n) infertur – nequitiæ] om.

N (o) flavescit] et splendet color ejus add. O (p) in vitro] om. A, et ultro ND (q) sed] scilicet quod N, scilicet D (r) luctus] lacus ND (s) tenebræ] funebres O, funebris B, funebre ND (t) ut] om. BN (u) comederunt] devorant ND (v) comederunt jacob et] om. B (w) aliquando circa renes] om. ND (x) ipsa] om. BND (y) minutatim] minutanti AN (z) frater ille] ille frater G, filius ille O, ille D (a) et] ille BND (b) vagus nutrit] niger et terribilis BND, et gerit add. post in pulmone (c) avidius]

audivi A (d) apponitur] apponatur A, apponit GC (e) conficitur autem] quod conficitur C (f) pipere]

et add. OBND (g) allio] et add. OBN, et aliis add. D (h) intelligas] intellige B, intelligi D (i) furorem]

fervorem OBN (j) livorem] humorem iracundiæ et D

(23) SUET., Claud., XXI, 2 (24) Sap. 2, 8

(25) I Cor. 5, 8 (26) Prov., 23, 31-32 (27) Ps. 78, 7 et Jer. 10, 25 (28) Ps. 13, 4 (cf. et 52, 5) (29) Rom. 1, 30

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(18)

invidiæ, in aceto rancorem tristitiæ. Additur et sal fatuitatis k, quoniam sal l sapientiæ inter convivas illos evanuerat, et non m erat in quo saliretur n 30; teritur autem et distemperatur o salsamentum p istud detractorum q in mortario r lapideo, quod est duritia mentis s; pistillum est strepitus t inculcationis, revolutio tenentis, circuitus impietatis.

Sonant in convivio voces diversæ, per lascivos cithara et lyra et tibia 31, per vagos et varios fabulæ, rythmuli u, turpia v carmina, per iracundos rixæ et jurgia.

Expleto convivio tamquam Gulæ officio consumato, soror ejus Luxuria thala- mum intrat, lectum sternit, infaustos w conjuges Diabolum et Malitiam jubet, mortalis x pronuba y, promisceri. Procreantur ex immundo coitu sobolis infandæ multa milia, quoniam stultorum infinitus est numerus 32; nascuntur hinc forni- catores, adulteri, homicidæ et perjuri. Et, quoniam multitudinem non capit angustia z, dividit pater hereditatem filiis, dans singulis portionem substantiæ quæ eos contingebat. Ponit fornicatores in prostibulis, ebriosos in tabernis, adulteros in alienis thoris, fæneratores in nundinis, simoniacos in ecclesiis, perjuros in judiciis, latrones in silvis, fures in angulis, litigantes in foro, lusores in theatro, tortores in prætorio a, perditores in consilio b, homicidas in jurgio c, veneficos in cibo, piratas in pelago, raptores in agro. Implet Diabolus urbes et oppida, vicos et villas talibus d filiis suis, mundum in Maligno positum totum sibi vendicans, et

‘totum’fere ‘subdens e suis orbem legibus’ 33.

Videns Hypocrisis sororem suam Malitiam multiplici prole fecundam, ut f et ipsa g similiter nubat et pariat expetit et exspectat h. Affectans i et Diabolus hujus copulam majori desiderio quam priorem j, mittuntur cum magna sollempnitate ministri qui eam adducant; imponunt eam k super equum pallidum cui nomen mors, et infernus sequebatur l 34 eam. Sunt autem duo paranymphi specialiter eam usque in m amplexus regios ducentes : hii sunt Amor Propriæ Laudis et Spes

(k) fatuitatis] in quo salliatur add. B (l) quoniam sal] sal enim B, quoniam scilicet fatuitatem sal ND (m) et non] non O, tamen ND (n) et non – salliretur] om. B (o) et distemperatur] om. B (p) salsamentum istud detractorum] om. O (q) detractorum] om. N (r) mortario] mortariolo BND (s) mentis] vel cordis gloss. in mg. B (t) est strepitus] et cetera pitus N (u) rythmuli] rimuli G, rithmi C, rigmuli O (v) turpia] et turpia OBN (w) infaustos] om. G, infusos ND (x) mortalis] lac. fere 5 litt. post hoc v. B (y) mortalis pronuba] mortalia pronubia O (z) angustia] angusta domus C (a) prætorio] prœlio N (b) perditores in consilio] prædicatores (prævaricatores N) in concilio ND, susurrones in claustro add. O (c) homicidas in jurgio] om. N (d) talibus] stabulis A, tabulis G (e) subdens] sibi et add. BND (f) ut] transp. BND post similiter (g) ipsa] ipsam ND (h) exspectat]

exoptat O (i) affectans] affectat AOND (j) priorem] prioris B (k) eam] om. AG (l) sequebatur]

sequebantur ND (m) usque in] usque A, ad BN, usque ad D

(30) Matth. 5, 13 et Luc. 14, 34 (31) Is. 5, 12

(32) Eccle. 1, 15

(33) STEPH. LEOD., Officium s. Trinitatis, Resp. « Summæ Trinitati, simplici Deo » ; R. JONSSON, Historia : études sur la genèse des offices versifiés, Stockholm 1968 (Studia latina Stockholmiensia, 15), p. 223.

(34) Apoc. 6, 8

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

(19)

Terrenæ Dignitatis; horum sedulitate et officio Diabolus et Hypocrisis consentiunt n sine difficultate, conveniunt sine dilatione. Sed et dotis et dationis o propter nuptias fit mentio : dat illa in dotem Vacuam Conscientiam, ille in donationem propter nuptias Vanam Gloriam. In Vacua Conscientia sunt quasi duæ portiones agrorum sterilium; in Vana Gloria similiter duæ. Vacuæ Conscientiæ partes sunt Inanis Exspectatio et Immanis p Excæcatio; Vanæ Gloriæ partes, Levis Exaltatio, Brevis Exultatio. Inanis q Exspectatio reddit conscientiam inflatam, Immanis Excæcatio tenebrosam : inflatam r sine intrinseca re, tenebrosam s sine extrinseca t luce; quæ duo vacuitatis u certa sunt signa. Exspectant hypocritæ ut laudentur, ut honorentur, ut aliis præferantur, sed eorum exspectatio sæpius est inanis, et similis v aut exspectationi Britonum aut w exspectationi plebis Judæorum x; exspectant Britones Arturum non venturum, exspectant Judæi y Messiam non nasciturum : exspectant hypocritæ honorem non perventurum. Excæcatos z hypocritas testatur a Dominus : Sinite, inquit, illos : cæci sunt b duces cæcorum c 35. Levis Exaltatio quæ est in d altera parte donationis propter nuptias ex modica laude procedit; quam Exaltationem e nesciebat qui dixit : Domine, non est exaltatum cor meum, neque elati sunt oculi mei 36; hæc est arundo vento agitata 37 cui similis non erat Johannes. Brevis est Exultatio hypo- critarum quando f receperunt mercedem suam 38, et gaudium hypocritæ ad g instar puncti 39. Hujus donationis propter nuptias quasi quatuor arpennos Dominus designat h, scilicet primos recubitus in cenis, primas cathedras in synagogis, salutationes in foro, vocari ab hominibus Rabbi 40; tangunt hæc abbates, Vanæ Gloriæ cupidos, amantes primos recubitus et prima fercula in cenaculo i, primas cathedras in capitulo, salutationes in sæculo j, vocari ab hominibus Rabbi, quando k dicitur Dominus abbas.

Accedunt duo mancipia quæstuaria l ad ornandam m nuptam, Promptissima Simulatio et Dissimulatio n; altera fingit quod non est, altera celat o quod est. Et

(n) consentiunt] matrimonium constituunt ND (o) dationis] donationis COBND (p) immanis]

inanis AGCOD (q) immanis] inanis AGCD (r) reddit – tenebrosam inflatam] est inflatio O (s) tenebrosam] inanis exaltatio tenebrositas O (t) extrinseca] intrinseca AOBND (u) vacuitatis]

vanitatis ND (v) sæpius – similis] similis est O (w) aut exspectationi britonum aut] om. C (x) exspectant hypocritæ – plebis judæorum] om. N (y) exspectant britones – exspectant judæi] qui exspectant C (z) excæcatos] exsecratos CBN (a) testatur] detestatur BND (b) sunt] et add. CND (c) cæcorum] eorum ND (d) in] ex BN (e) exaltationem] non add. B super lineam (f) quando]

quoniam CB, qui O, quia ND (g) ad] om. AGO (h) designat] assignat GC (i) in cenaculo et prima fercula ND (j) sæculo] foro D (k) quando] quod B (l) quæstuaria] quæstionaria BND (m) ornandam]

ornandum GOD, ornandi N (n) et dissimulatio] om. AG (o) celat] dissimulat BND

(35) Matth. 15, 14 (36) Ps. 130, 1 (37) Matth. 11, 7 (38) Matth. 6, 2, 5 et 16 (39) Job 20, 5 (40) Matth. 23, 6-7

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris 1 - Sorbonne - - 194.214.29.29 - 11/02/2016 01h09. © Vrin

Références

Documents relatifs

Colloque international organisé par la DGO4 / Département du patrimoine / Direction de la protection du patrimoine, avec la collaboration scientifique de l’IRPA Les portails romans

Notre père qui es aux cieux, que Ton nom soit Sanctifié, que Ton règne vienne, que Ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.. Donne-nous aujourd’hui notre pain de

Grâce au sermon religieux, un genre du discours second à l’origine, transmué en genre premier, l’idéologie accède à une plus grande proportion de la population qui ne possède

«A la découverte de la HEH et du campus pédagogique : Décret Paysage, règlement des études, charte Qualité, SAR … n’auront plus de secrets pour vous. KINIF,

[r]

Il a aussi repris son chemin à lui, avec d’autres rencontres, d’autres compagnonnages, son chemin de croyant musulman, ayant découvert et vécu quelque chose de Jésus Christ

[r]

Elles vous doivent de ne faire entrer chez vous aucune personne que vous détestez.. Si elles venaient à le faire, vous pouvez les corriger sans