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Les corps travaillés par les institutions

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Séminaire - Les corps travaillés par les institutions

Obstacles à l’observation et à la description de l’incorporation du social

PROGRAMME​​2016-2017

Sabrina Nouiri-Mangold (EHESS, CMH/ETT, CENS) Mathias Thura (INED, IRSEM)

* * *

Séminaire mensuel hébergé par le Centre Maurice Halbwachs (équipe ETT) Campus Jourdan - 48, bd. Jourdan, 75014 Paris

* * *

Résumé :

Substrat et support des rapports sociaux, le corps est devenu un objet central des sciences sociales. Les manières dont le social s’incorpore, se reproduit, se transmet et s’actualise par le biais du corps font l’objet d’une vaste littérature, tant en anthropologie, qu’en sociologie et en histoire.

Or, il apparaît que les chercheurs et chercheuses en sciences sociales sont confronté(e)s à un double obstacle lorsqu’il s’agit d’observer et de décrire concrètement les processus d’incorporation. Le premier concerne les grilles de codages et d’analyse, les instruments à notre disposition pour décrire, mesurer et comparer les corps, les postures et les gestuelles, puis pour leur appliquer une qualification sociale raisonnée. Tout un langage est à inventer pour désigner précisément ce qui demeure souvent une imposition de catégories de l’entendement sociologique à des impressions fugaces, qui ne sont pas systématiquement collectées (« une gestuelle typiquement masculine » ou bien « des postures typiquement féminines », ou encore des « des manières de se tenir de classes populaires »). Le second obstacle a trait aux moyens à disposition pour observer et mesurer l’incorporation du social au quotidien, le travail diffus que cette incorporation opère sur les corps dans la trame des pratiques les plus ordinaires. Si certaines instances de socialisation rendent ce travail particulièrement saillant, donc relativement aisé à observer, des pans entiers des processus de socialisations demeurent dans l’ombre parce qu’inscrits dans des pratiques auxquelles le chercheur n’a généralement pas accès. Cette seconde dimension du problème nous amènera aussi à nous interroger sur le laboratoire à envisager pour réussir à saisir le travail continu de l’incorporation, dans sa partie la moins observable « à l’œil nu », et à regarder en direction d’autres disciplines afin de trouver de nouveaux moyens de penser l’incorporation comme processus continu (et qui demeure souvent à l’état de véritable “boîte noire”

sociologique).

Les séances seront articulées autour d’un axe résolument méthodologique et pluridisciplinaire.

Toujours à partir de la présentation d’enquêtes par leurs auteur-rice-s, il s’agira de mettre sur le plan de travail ce qui reste souvent du côté des cuisines ou des appendices méthodologiques, et ainsi de décortiquer les instruments provenant de différentes disciplines (savantes ou artistiques : anthropologie, sociologie, histoire, ergonomie, psychologie sociale de l’activité, chorégraphie) ou de différents sous-domaines de la sociologie (sociologie du sport, sociologie des vêtements, ethnographie du travail). Sous un autre aspect, il s’agira de s’interroger collectivement sur les conditions d’usage de ces instruments, leurs apports et leurs limites pour constituer de nouvelles connaissances sociologiques.

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Programme :

Séance 1, ​vendredi 25 novembre, de 15h à 17h​, salle 8.

Introduction et présentation générale : observer l’incorporation en train de se faire, obstacles et dispositifs expérimentaux

​ - Sabrina Nouiri Mangold (EHESS, CMH-ETT, CENS) et Mathias Thura

(INED, IRSEM)

Séance 2 - ​vendredi 2 décembre, de 14h à 17h​, salle F.

Travailler sur le geste : pourquoi la méthode est dictée par la question ​ - Blandine Bril (EHESS, GRAC) et Nicole Rodda (EHESS, CETOBaC)

Séance 3 - ​vendredi 20 janvier, de 14h à 17h​, salle 8

Ecrire le mouvement pour le mieux comprendre, application de la notation du mouvement aux études en sciences sociales

​ - ​Naoko Abé (​Fondation France-Japon de l'EHESS)

Observer la réception au musée d'art

​ - Samuel Coavoux (CMW)

Séance 4 - ​vendredi 10 mars, de 14h à 16h​, salle F.

Analyser l'activité humaine comme cognition incarnée, située et cultivée en psychologie. Le cas de l'entraînement sportif de haut niveau

​ - Jacques Saury (Univ. de Nantes, MIP)

Séance 5 - v​endredi 28 avril, de 14h à 16h​, salle F.

Pourquoi et comment appréhender les "voix expertes" ? L’exemple d’une recherche sur les consultant.e.s en entreprise

​ - Isabelle Boni-Le Goff (Univ. de Lausanne, CEG)

Séance 6 - ​vendredi 19 mai, de 14h à 16h​, salle F.

Autour de l’article

​ “Dans la course” ​(ARSS, 2015) [titre provisoire] ​ - Manuel Schotté (Univ.

Lille 2, CERAPS)

Séance 7 - ​vendredi 9 juin, de 14h à 17h​, salle F.

Comment compter, décrire et objectiver les vêtements ? Les débuts d’une enquête collective​ - Collectif “Phringues” (Pascal Barbier, Lucie Bargel, Amélie Beaumont, Muriel Darmon, Lucile Dumont - EHESS/Université Paris 1/CNRS, CESSP)

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Argument :

Substrat et support des rapports sociaux, le corps est devenu un objet central des sciences sociales. Les manières dont le social s’incorpore, se reproduit, se transmet et s’actualise par le biais du corps font l’objet d’une vaste littérature, tant en anthropologie, qu’en sociologie et en histoire. On pense particulièrement ici aux travaux de Marcel Mauss, mais aussi de Norbert Elias, Erving Goffman, Alie Hochschild, Michel Foucault, Pierre Bourdieu, Luc Boltanski, Loïc Wacquant, Dominique Memmi, Georges Vigarello, Didier Fassin (sans prétention à l’exhaustivité des approches). Par ailleurs, tout un pan de la sociologie du sport a construit ses objets dans cette direction et a décrit l’investissement socialement différencié des corps lors d’activités physiques et sportives à des fins de performances professionnelles ou de loisirs (Jean-Michel Faure, Sylvia Faure, Joël Laillier, Gildas Loirand, Christine Mennesson Bruno Papin, Pierre-Emmanuel Sorigné, Charles Suaud, Manuel Schotté, Baptiste Viaud, Loïc Wacquant). À travers les pratiques touchant à l’usage, à l’entretien et à la transformation des corps dans des contextes différenciés, ces auteurs éclairent les modalités historiques concrètes par lesquelles les corps sont forgés, disciplinés, rectifiés, mis en scène, éduqués, dressés, domestiqués, moralisés, rendus tout à la fois capables de ressentir et de produire des impressions, des émotions et des gestes spécifiques.

Or, il apparaît clairement dans cette littérature que les chercheurs et chercheuses en sciences sociales sont confronté(e)s à un double obstacle. Le premier concerne les grilles de codages et d’analyse, les instruments à notre disposition pour décrire, mesurer et comparer les corps, les postures et les gestuelles, puis pour leur appliquer une qualification sociale raisonnée. Lorsqu’il s’agit d’identifier et de qualifier les manières dont nos enquêtés utilisent et se servent très concrètement de leurs corps, nous nous embarrassons rarement de descriptions denses et précises, parfois parce que les mots nous manquent, mais aussi parce qu’il s’agit d’indices qu’on ne sait guère observer avec la finesse nécessaire. Il est fréquent d’user d’expressions telles que : « une gestuelle typiquement masculine » ou bien « des postures typiquement féminines », ou encore des « des manières de se tenir de classes populaires », sans être parfaitement capable de décrire ce que de tels qualificatifs recouvrent concrètement. Tout un langage est à inventer pour désigner précisément ce qui demeure souvent une imposition des catégories de l’entendement sociologique à des impressions fugaces, qui ne sont pas systématiquement collectées. Dans d’autres sphères d’activités directement confrontées au codage des corps, comme la danse ou l’ergonomie, de tels langages ont été élaborés. Toutefois, on ne leur a pas encore trouvé d’usage complètement adapté à la sociologie.

Le second obstacle a trait aux moyens à disposition pour observer et mesurer l’incorporation du social au quotidien, le travail diffus que cette incorporation opère sur les corps dans la trame des pratiques les plus ordinaires. Si certaines instances de socialisation rendent ce travail particulièrement saillant, donc relativement aisé à observer, des pans entiers des processus de socialisations demeurent dans l’ombre parce qu’inscrits dans des pratiques auxquelles le chercheur n’a généralement pas accès. Par ailleurs, cette seconde dimension du problème nous amènera aussi à nous interroger sur le laboratoire à envisager pour réussir à saisir le travail continu de l’incorporation, dans sa partie la moins observable « à l’œil nu », et à regarder en direction d’autres disciplines afin de trouver de nouveaux moyens de penser l’incorporation comme processus continu. Les processus d’incorporation demeurent encore une sorte de “boîte noire” à investiguer de l’intérieur. À la croisée de ces deux dimensions, il s’agira de s’interroger sur les manières d’observer et d’objectiver l’incorporation progressive d’un

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tour de main, voire d’apprendre à observer les détails ténus qui permettent de percevoir des différences dans les postures ou les gestes.

Dans la prolongation des questions soulevées l’ ​année dernière​, c’est de ce double problème que traitera le programme de cette année. Les séances seront articulées autour d’un axe résolument méthodologique et pluridisciplinaire. Toujours à partir de la présentation d’enquêtes par leurs auteur-rice-s, il s’agira de mettre sur le plan de travail ce qui reste souvent du côté des cuisines ou des appendices méthodologiques, et ainsi de décortiquer les instruments provenant de différentes disciplines (savantes ou artistiques : anthropologie, sociologie, histoire, ergonomie, psychologie sociale de l’activité, chorégraphie) ou de différents sous-domaines de la sociologie (sociologie du sport, sociologie des vêtements, ethnographie du travail). Sous un autre aspect, il s’agira de s’interroger collectivement sur les conditions d’usage de ces instruments, leurs apports et leurs limites pour constituer de nouvelles connaissances sociologiques. On se demandera donc jusqu’où il est pertinent de chercher à atteindre la “mesure” précise des gestes et postures, et le cas échéant, de réfléchir à l’ajustement de la focale de tels instruments pour en trouver l’utilité sociologique, voire d’envisager des dispositifs empiriques pertinents pour la construction et l’exploration sociologique de nos objets.

Références

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