D´ eveloppement d’un r´ eel en fractions continues
Introduction et commentaires
Ce document a ´et´e ´ecrit pour les ´etudiants pr´eparant l’agr´egation interne.
Ce qui suit est une pr´esentation de l’algorithme des fractions continues et deux applications : – la premi`ere, tr`es naturelle, porte sur le probl` eme de meilleure approximation des r´eels par des rationnels. Le lecteur pourra consulter le livre de Roger Descombes, pour un expos´e bien plus complet, mais plus difficile ;
– la seconde est une application ` a l’´equation de Pell-Fermat. Il s’agit de r´esoudre, en nombres entiers, les ´equations de la forme
x
2− dy
2= 1
o` u d est un entier naturel, qui n’est pas le carr´ e d’un entier. Ce qui revient ` a d´eterminer les inversibles de l’anneau Z[ √
d ], de norme 1. La difficult´e est de montrer que cette ´equation poss`ede une solution non triviale. C’est une cons´ equence d’un th´eor`eme plus g´en´eral que l’on peut trouver, par exemple, dans le livre de Pierre Samuel. De ce point de vue, la d´emonstration repose sur le lemme de Minkowski qui suppose connu un minimum de th´eorie de la mesure. La d´emonstration propos´ee dans la suite est plus ´el´ementaire, et de plus elle fournit un algorithme qui d´ etermine toutes les solutions. Je me suis tr`es fortement inspir´e d’un livre de Alan Baker. Voir la bibliographie.
Il s’agit d’un codage des nombres r´eels, donn´e par un algorithme. Ce codage ´etablit une bijection de l’ensemble des irrationnels sur l’ensemble des suites (a
0, a
1, a
2, . . . ) d’entiers o` u a
1, a
2, . . . sont strictement positifs. Les rationnels sont en bijection avec l’ensemble des suites finies d’entiers (a
0, a
1, . . . , a
n) o` u a
1, . . . , a
nsont strictement positifs et a
n2 lorsque n est non nul.
§ 1. Fractions continues formelles
Soient n un entier et X
0, X
1, , . . . , X
ndes variables.
— si n = 0 on consid`ere la fraction rationnelle F
0= X
0— si n = 1 on consid`ere la fraction rationnelle F
1= X
0+ 1
X
1— si n = 2 on consid`ere la fraction rationnelle F
2= X
0+ 1
X
1+ 1 X
2— D’une mani`ere g´en´erale, on consid`ere la fraction rationnelle
F
n= X
0+ 1
X
1+ 1
...
X
n−2+ 1 X
n−1+ 1
X
n(1)
Université de Rennes 1 Préparation à l’agrégation de mathématiques Auteur du document :
M. Couchouron
De mani`ere plus formelle, on peut d´efinir F
npar r´ecurrence par
F
n+1(X
0, . . . , X
n, X
n+1) = F
n(X
0, . . . , X
n−1, X
n+ 1 X
n+1)
Notations. De mani`ere ´evidente ces ´ecritures sont rapidement trop lourdes et inexploitables.
Dans la suite la fraction rationnelle F
nci-dessus sera not´ee F
n= [X
0, X
1, , . . . , X
n] (2)
Parfois, cette fraction rationnelle F
nest aussi not´ee F
n= X
0+ 1 X
1+ |
1
X
2+ | . . . 1
|X
nProposition 0.0.1 Il existe une suite (P
n) de polynˆ omes telle que pour tout entier n 0, le polynˆ ome P
nne d´ epende que des variables X
0, . . . , X
net telle que les conditions suivantes soient v´ erifi´ ees.
1. P
0= X
0P
1= X
0X
1+ 1
2. Pour tout entier n 2 : P
n= X
nP
n−1+ P
n−2— Il existe une suite (Q
n) de polynˆ omes telle que pour tout entier n 0, le polynˆ ome Q
nne d´ epende que des variables X
1, . . . , X
net telle que les conditions suivantes soient v´ erifi´ ees : 1. Q
0= 1 Q
1= X
12. Pour tout entier n 2 : Q
n= X
nQ
n−1+ Q
n−2— Les coefficients de P
net de Q
nsont des entiers naturels.
Pour tout entier n : P
nest un polynˆ ome de degr´ e n + 1, dont la partie homog` ene de degr´ e n + 1 est r´ eduite au monˆ ome X
0X
1. . . X
net Q
nest un polynˆ ome de degr´ e n, dont la partie homog` ene de degr´ e n est r´ eduite au monˆ ome X
1. . . X
n.
D´ emonstration: ✷ La v´erification se fait par r´ecurrence. ✷
Th´ eor` eme 0.0.2 Pour tout entier n 0 :
F
n= [X
0, X
1, , . . . , X
n] = P
nQ
nD´ emonstration: ✷ La d´emonstration se fait par r´ecurrence sur n.
Pour n = 0 c’est ´evident car F
0= X
0, P
0= X
0et Q
0= 1 Pour n = 1 : dans ce cas F
1= X
0+
X11
, P
1= X
0X
1+ 1 et Q
1= X
1. L’´egalit´e F
1=
QP11
est bien vraie.
Soit n 2 un entier et supposons que pour tout entier k n l’´egalit´e F
k=
QPkk
soit vraie.
On a donc, en utilisant la d´ efinition des polynˆ omes P
net Q
n: F
n= [X
0, X
1, , . . . , X
n] = P
nQ
n= X
nP
n−1+ P
n−2X
nQ
n−1+ Q
n−2et donc :
[X
0, X
1, , . . . , X
n+1] =
X
0, X
1, , . . . , X
n−1, X
n+ 1 X
n+1= (X
n+
Xn+11) P
n−1+ P
n−2(X
n+
X1n+1
) Q
n−1+ Q
n−2D’o` u en multipliant le num´ erateur et le d´enominateur par X
n+1:
[X
0, X
1, , . . . , X
n+1] = X
n+1(X
nP
n−1+ P
n−2] + P
n−1X
n+1(X
nQ
n−1+ Q
n−2) + Q
n−1Compte tenu de la d´efinition des polynˆ omes P
net Q
n:
[X
0, X
1, , . . . , X
n+1] = X
n+1P
n+ P
n−1X
n+1Q
n+ Q
n−1= P
n+1Q
n+1Ce qui d´emontre le th´eor`eme. ✷
§ 2. Algorithme des fractions continues Soit θ un nombre r´eel.
On consid`ere sa partie enti`ere a
0= [θ].
— Si θ est un entier θ = a
0et l’algorithme s’arrˆete.
— Sinon θ n’est pas un entier θ − a
0est un r´eel tel que 0 < θ − a
0< 1. Il s’´ecrit donc sous la forme 1
θ
1, av ec θ
1> 1. Dans ce cas on a donc : θ = a
0+ 1
θ
1Dans ce cas le proc´ed´e se r´eit`ere en rempla¸cant θ par θ
1: soit a
1la partie enti`ere de θ
1.
— Si θ
1est un entier donc ´egal ` a a
1, l’algorithme s’arrˆete, et on a l’´egalit´e : θ = a
0+ 1
a
1— Sinon θ
1n’est pas un entier et θ
1− a
1est un r´eel qui s’´ecrit sous la forme 1 θ
2, av ec θ
2> 1.
Dans ce cas le mˆeme proc´ed´e s’applique ` a θ
2.
Ce processus s’arrˆete au cran n si et seulement si θ
nest un entier, ´egal ` a sa partie enti`ere a
n. Dans ce cas on a l’´egalit´e :
θ = a
0+ 1
a
1+ 1
...
a
n−2+ 1 a
n−1+ 1
a
n(3)
Lemme 0.0.3 R´ eciproquement si θ est un nombre rationnel, l’algorithme des fractions contin- ues s’arrˆ ete apr` es un nombre fini d’it´ erations, et que de plus si θ = p/q les calculs des nombres a
kpeuvent se faire par des divisions euclidiennes successives, comme dans l’algorithme d’Euclide.
D´ emonstration: ✷ La d´emonstration est laiss´ee en exercice. ✷ Si θ n’est pas rationnel, il existe donc une suite (a
n) d’entiers qui, sauf peut-ˆ etre le premier a
0, sont sup´erieurs ou ´egaux ` a 1 et une suite (θ
n)
n1de r´eels strictement plus grands que 1 v´erifiant les relations :
θ
n= a
n+ 1 θ
n+1(4)
De plus pour tout entier n on a :
θ = a
0+ 1
a
1+ 1
...
a
n−2+ 1 a
n+ 1
θ
n+1(5)
Dans la suite on suppose que, dans l’algorithme des fractions continues, n it´erations sont possibles, et produisent donc des entiers a
0, a
1, . . . , a
n, qui ` a l’exception de a
0sont strictement positifs, et des r´eels θ
1, . . . , θ
n, θ
n+1strictement plus grands que 1. Dans la fraction rationnelle F
n, d´efinie en (1), on peut donc substituer (a
0, . . . , a
n) ` a (X
0, . . . , X
n).
Notations. Dans la suite, si x
0, x
1, . . . , x
nsont des nombres tels que F
n(x
0, x
1, . . . , x
n) soit d´efinie, on notera
[x
0, x
1, . . . , x
n] = F
n(x
0, x
1, . . . , x
n).
Lorsque θ est un nombre rationnel, l’´ egalit´e (3) s’´ecrit donc : θ = [a
0, a
1, . . . , a
n] De mˆeme, l’´egalit´e (5) se notera aussi :
θ = [a
0, a
1, . . . , a
n, θ
n+1] (6)
D´ efinition 0.0.4 En conservant les notations pr´ ec´ edentes et en supposant a
0, a
1, . . . , a
nd´ efinis : 1. Pour tout entier k n, a
ks’appelle le quotient incomplet de θ d’indice k et θ
ks’appelle le quotient complet de θ d’indice k.
2. Le nombre rationnel [a
0, a
1, . . . , a
k] s’appelle la r´ eduite d’indice k.
En substituant (a
0, a
1. . . , a
n) ` a (X
0, X
1. . . , X
n) dans les polynˆ omes P
net Q
n, on obtient des nombres qui seront not´es p
net q
nrespectivement. Comme ces polynˆ omes sont ` a coefficients entiers, les nombres p
net q
nsont eux-mˆemes des entiers. De plus, pour tout entier k tel que 1 k n on a a
k1 et donc : q
kq
k−1+ q
k−2.
D’autre part, pour tout entier n 2, les suites d’entiers (p
n) et (q
n) v ´erifient les relations suivantes.
p
n= a
np
n−1+ p
n−2(7)
q
n= a
nq
n−1+ q
n−2(8)
Ceci r´esulte de la d´efinition mˆeme des polynˆ omes P
net Q
n. Il en r´esulte par une r´ecurrence imm´ediate que pour tout entier n : q
nn.
Lemme 0.0.5 Les suites d’entiers (p
n) et (q
n) v´ erifient les relations suivantes.
p
nq
n−1− p
n−1q
n= (−1)
n+1(9)
p
nq
n−2− p
n−2q
n= (−1)
na
n(10)
D´ emonstration: ✷ notons δ
n= p
nq
n−1− p
n−1q
n. Par combinaison lin´ eaire des deux ´equations pr´ec´edentes on obtient p
nq
n−1− p
n−1q
n= −(p
n−1q
n−2− p
n−2q
n−1), soit encore : δ
n= −δ
n−1et donc δ
n= ( − 1)
n−1δ
0= ( − 1)
n−1.
la seconde partie se d´emontre de la mˆeme mani`ere. ✷
Corollaire 0.0.6 Les entiers p
net q
nsont premiers entre eux, et l’´ ecriture de la r´ eduite [a
0, a
1, . . . , a
n] = p
n/q
nest l’´ ecriture de la fraction sous forme irr´ eductible.
Lemme 0.0.7 Pour tout entier n on a la relation θ = θ
n+1p
n+ p
n−1θ
n+1q
n+ q
n−1D´ emonstration: ✷ On a l’´egalit´e : θ = [a
0, a
1, . . . , a
n, θ
n+1] = F
n+1(a
0, a
1, . . . , a
n, θ
n+1), qui s’obtient ` a partir de l’´ egalit´e formelle
F
n+1(X
0, X
1, . . . , X
n, X
n+1) = P
n+1Q
n+1= X
n+1P
n+ P
n−1X
n+1Q
n+ Q
n−1en substituant (a
0, a
1, . . . , a
n, θ
n+1) ` a (X
0, X
1, . . . , X
n, X
n+1) dans F
n+1. ✷
§ 3Meilleure approximation
Dans la suite on consid` ere un nombre r´ eel θ irrationnel.
On notera (a
n) la suite des quotients incomplets et (θ
n) la suite des quotients complets. On conviendra parfois que θ
0= θ.
Les nombres p
net q
nd´ esigneront toujours les entiers d´ efinis pr´ ec´ edemment.
Lemme 0.0.8 Pour tout entier n 1, on a la relation : (θ − p
n/q
n) = (−1)
nq
n(θ
n+1q
n+ q
n−1) (11)
D´ emonstration: ✷ On a l’´egalit´e :
(θ − p
n/q
n) = θ
n+1p
n+ p
n−1θ
n+1q
n+ q
n−1− p
nθ
n+1q
n+ q
n−1= p
n−1q
n− p
nq
n−1q
n(θ
n+1q
n+ q
n−1)
= (−1)
nq
n(θ
n+1q
n+ q
n−1)
✷ Proposition 0.0.9 Les r´ eduites d’indices pairs f
2n= p
2n/q
2net les r´ eduites d’indices impairs f
2n+1forment deux suites adjacentes, telles que la sous-suite des termes d’indice pair est croissante et la sous-suite des termes d’indice impair est d´ ecroissante. La suite des r´ eduites converge vers θ.
Pour tout indice n 1 on a l’in´ egalit´ e :
| θ − p
n/q
n| < 1 q
nq
n+1D´ emonstration: ✷ En ce qui concerne la premi`ere partie, il suffit, dans les ´egalit´es du lemme (0.0.5) de diviser chaque membre par q
nq
n−1.
La derni`ere in´egalit´e r´esulte du lemme pr´ec´edent, en remarquant que θ
n+1q
n+ q
n−1> q
n+1,
car θ
n+1> 1. ✷
Corollaire 0.0.10 Si θ est un nombre irrationnel, il existe une infinit´ e de nombres rationnels de la forme p/q tels que
| θ − p/q | < 1/q
2Proposition 0.0.11 1. Pour tout entier n les nombres q
nθ − p
net q
n+1θ − p
n+1sont de signes contraires.
2. La suite de terme g´ en´ eral | q
nθ − p
n| est d´ ecroissante.
D´ emonstration: ✷ La premi`ere partie r´esulte du lemme (0.0.8) ci-dessus. Le mˆeme lemme montre qu’il suffit de d´emontrer que q
n+1(θ
n+2q
n+1+ q
n) > q
n(θ
n+1q
n+ q
n−1). Cette in´egalit´e r´esulte
des in´egalit´es : θ
n+2> 1 et θ
n+1< 1 + a
n+1. ✷
Th´ eor` eme 0.0.12 (Meilleure approximation.) Quel que soit l’entier n 1, pour tout entier p et tout entier q tel que 0 < q < q
n+1on a :
| qθ − p | | q
nθ − p
n| (12)
De plus l’in´ egalit´ e est une ´ egalit´ e si et seulement si p = p
net q = q
n. D´ emonstration: ✷ Il existe deux entiers u et v tels que
p = up
n+ vp
n+1q = uq
n+ vq
n+1Ceci r´esulte du fait que ce syst`eme d’inconnues (u, v) a comme d´eterminant (−1)
n, qui est inversible dans Z .
Si u = 0 la seconde ´equation se r´eduit ` a q = vq
n+1qui est incompatible avec l’hypoth` ese 0 < q < q
n+1. Donc u est non nul.
Si v = 0 alors p/q = p
n/q
nqui correspond au cas d’´egalit´e.
On suppose donc dans la suite u et v non nuls. Montrons que dans ce cas ils sont de signes contraires. Ceci d´ecoule de l’hypoth`ese 0 < q < q
n+1. En effet, elle s’´ecrit uq
n+ vq
n+1< q
n+1, soit : uq
n< (1 − v)q
n+1.
— Donc si v 1 : uq
n< 0 et donc u est strictement n´egatif.
— Sinon v est n´egatif on nul et donc strictement n´egatif, et l’hypoth` ese q > 0, qui s’´ecrit uq
n+ vq
n+1> 0, ce qui implique u > 0.
Un calcul imm´ediat montre que
qθ − p = θ(uq
n+ vq
n+1) − (up
n+ vp
n+1) = u(q
nθ − p
n) + v(q
n+1θ − p
n+1)
Comme u et v sont de signes contraires, et que (q
nθ − p
n) et q
n+1θ − p
n+1) sont ´egalement de signes contraires, on a
| qθ − p | = | u(q
nθ − p
n) | + | v(q
n+1θ − p
n+1) |
> | (q
n+1θ − p
n+1) |
car v est non nul, et que u(q
nθ − p
n) est ´egalement non nul. ✷ Proposition 0.0.13 Pour tout entier l’une des r´ eduites f
n= p
n/q
nou f
n+1= p
n+1/q
n+1satisfait ` a :
| θ − p/q | < 1/2q
2D´ emonstration: ✷ La proposition (0.0.11) montre que q
nθ − p
net q
n+1θ − p
n+1sont de signes contraires. Donc, on a les ´egalit´es :
θ − p
nq
n+
θ − p
n+1q
n+1= p
nq
n− p
n+1q
n+1= 1
q
nq
n+1Or, si a et b sont deux r´eels distincts : 2ab < a
2+ b
2. Donc : 1 q
nq
n+1< 1
2q
n2+ 1
2q
2n+1. Ce qui,
compte tenu de l’in´egalit´e pr´ec´edente d´emontre le r´esultat voulu. ✷
Cette proposition admet une r´eciproque qui sera utilis´ee dans la r´esolution de l’´equation de
Pell-Fermat.
Proposition 0.0.14 Soient p et q > 0 deux entiers. La relation | θ − p/q | < 1/2q
2implique que p/q est une r´ eduite de θ.
D´ emonstration: ✷ Il existe un entier n tel que q
nq < q
n+1. Or, en utilisant l’in´ egalit´e triangulaire :
p q − p
nq
nθ − p
q +
θ − p
nq
n= 1
q | qθ − p | + 1
q
n| q
nθ − p
n| ( 1
q + 1
q
n)| qθ − p | D’apr`es (0.0.12).
D’o` u en chassant les d´enominateurs :
| pq
n− qp
n| (q + q
n)| qθ − p |
< 2q × 1 2q
2= 1
q 1
D’o` u finalement : | pq
n− qp
n| < 1. Comme pq
n− qp
nest un entier, ceci implique pq
n− qp
n= 0
et donc
pq=
pqnn. ✷
§ 4. Nombres alg´ ebriques quadratiques
Rappelons qu’un nombre complexe θ est dit alg´ebrique de degr´e 2 s’il existe un polynˆ ome de degr´e 2, ` a coefficients rationnels, irr´eductible sur Q, dont θ est une racine. Autrement dit : θ n’est pas rationnel et il existe des rationnels a = 0, b et c tels que aθ
2+ bθ + c = 0. Apr`es avoir r´eduit a, b, c au mˆeme d´enominateur, on peut supposer en fait que a, b, c sont des entiers.
Dans ce cas on dit aussi que θ est quadratique. Les exemples standards sont i, j = e
2iπ3, ainsi que tous les nombres r´eels de la forme √
d o` u d est un entier qui n’est pas le carr´e d’un entier.
Dans la suite ce sont ces nombres qui seront envisag´es.
Le but est de d´emontrer que θ ´etant un nombre r´ eel, le d´eveloppement de θ en fraction continue est p´eriodique ` a partir d’un certain rang si et seulement si θ est quadratique.
Notations et d´ efinitions. Soit θ un nombre r´eel, non rationnel, et (a
k) la suite de ses quotients partiels. Le d´eveloppement de θ en fraction continue est dit p´ eriodique ` a partir d’un certain rang, si il existe deux entiers r 0 et m 1 tels que a
m+k= a
kpour tout entier k r.
Dans ce cas, on notera θ = [a
0, . . . , a
r−1, a
r. . . , a
r+m−1]. On dira que le d´ eveloppement de θ est purement p´eriodique si il existe un entier m 1 tel que pour tout entier k : a
m+k= a
k. Proposition 0.0.15 Soit θ un r´ eel non rationnel. Si le d´ eveloppement de θ en fraction continue est p´ eriodique ` a partir d’un certain rang, θ est quadratique.
D´ emonstration: ✷ Supposons dans un premier temps que le d´ eveloppement soit purement p´eriodique. Soit donc ϕ = [a
0. . . , a
m−1].
On a donc l’´egalit´e :
ϕ = [a
0. . . , a
m−1, ϕ]
Donc, en se souvenant des notations du premier paragraphe, en supposant m 2 : ϕ = F
m−1(a
0. . . , a
m−1, ϕ)
Cette derni`ere fraction ´etant ´egale ` a
F
m−1(a
0. . . , a
m−1, ϕ) = P
m−1(a
0. . . , a
m−1, ϕ)
Q
m−1(a
0. . . , a
m−1, ϕ) = ϕ p
m−1+ p
m−2ϕ q
m−1+ q
m−2Donc, dans le m 2, ϕ est bien racine d’un polynˆ ome de degr´e 2. Dans le cas o` u m < 2, n´ecessairement m = 1 et dans ce cas φ = [a
0] qui v´erifie donc ϕ = a
0+ 1/ϕ et est encore racine d’un polynˆ ome de degr´e 2.
Dans le cas g´en´eral o` u θ = [a
0, . . . , a
r−1, a
r. . . , a
r+m−1], notons ϕ = [a
r. . . , a
r+m−1] qui est donc racine d’un polynˆ ome de degr´e 2 ` a coefficients entiers. Or θ est une fonction homographique de ϕ, ` a coefficients entiers. Il est imm´ediat de v´erifier que θ est aussi racine d’un polynˆ ome de
degr´e 2 ` a coefficients entiers. ✷
Th´ eor` eme 0.0.16 Soit θ un nombre irrationnel, alg´ ebrique de degr´ e 2 sur Q . Alors son d´ eveloppement en fraction continue est p´ eriodique ` a partir d’un certain rang.
D´ emonstration: ✷ Soient a, b, c des entiers non tous nuls tels que aθ
2+ bθ + c = 0. On consid`ere la forme quadratique de deux variables d´ efinie par
f(x, y) = ax
2+ bxy + cy
2Par hypoth` ese, on a donc : f (θ, 1) = 0
Si n est un entier, on consid`ere la forme quadratique f
nd´efinie par f
n(x, y) = f(xp
n+ yp
n−1, xq
n+ yq
n−1) Cette forme quadratique s’´ecrit sous la forme
f
n(x, y) = a
nx
2+ b
nxy + c
ny
2En se souvenant des formules d´emontr´ees au d´ebut, il est clair que f
n(θ
n+1, 1) = f (θ, 1) = 0.
La d´emonstration du th´eor`eme consiste ` a montrer que les formes quadratiques f
nsont en nombres fini. Dans ce cas il y a un nombre fini de nombres ϕ tels que f
n(ϕ, 1) = 0 donc un nombre fini de quotients complets, ce qui implique le r´ esultat. Pour d´ emontrer ceci, on montre dans un premier temps que les entiers (a
n) forment une suite born´ ee.
On a la relation a
n= f
n(1, 0) = f (p
n, q
n) = q
n2f (p
n/q
n, 1). Or, comme f (θ, 1) = 0, on a aussi :
f (p
n/q
n, 1) = f(p
n/q
n, 1) − f (θ, 1) = (p
n/q
n− θ)
a(p
n/q
n+ θ) + b
D’autre part, pour tout entier n : | p
n/q
n− θ | 1. (Revoir ´eventuellement la proposition (0.0.9) page 5). Et donc a(p
n/q
n+ θ) + b | a | (2 | θ | + 1) + | b | . Notons K cette constante.
D’apr`es ce qui pr´ec`ede on a donc :
| a
n| q
2n| p
n/q
n− θ | × K
Or la mˆeme proposition montre que | p
n/q
n− θ | 1/q
n2. On a donc montr´e finalement que
| a
n| | a | (2 | θ | + 1) + | b | .
Il en r´esulte bien que la suite (a
n) ne prend qu’un nombre fini de valeurs.
La d´efinition de f
nmontre que c
n= f(p
n−1, q
n−1) = a
n−1. Donc la suite (c
n) ne prend
´egalement qu’un nombre fini de valeurs.
Pour d´emontrer que la suite (b
n) ne prend qu’un nombre fini de valeurs, le r´ esultat essentiel est que les deux formes quadratiques f et f
nont mˆeme discriminant, ` a savoir que l’on a l’´egalit´e :
b
2− 4ac = b
2n− 4a
nc
nCette ´egalit´e se d´emontre par un petit calcul. On peut ´ egalement remarquer que si A et A
nd´esignent les matrices respectives des formes quadratiques f et f
n, il suffit de montrer que
les matrices A et A
nont mˆeme d´eterminant. Or f
nse d´eduit de f par changement de base. La
matrice P de changement de base est de d´eterminant (−1)
n+1. La relation A
n= P
tAP montrent que A et A
nont mˆeme d´eterminant.
Donc la suite (b
n) ne prend ´egalement qu’un nombre fini de valeurs.
Il en r´esulte que la suite de formes quadratiques (f
n) ne prend ´egalement qu’un nombre fini de valeurs et donc que la suite (θ)
nne prend qu’un nombre fini de valeurs. Il existe donc deux entiers distincts r et s tels que θ
r= θ
s, ce qui implique que la suite (a
n) est p´eriodique ` a partir
d’un certain rang. ✷
D´ efinition 0.0.17 Soit θ un nombre quadratique et f son polynˆ ome minimal qui est donc de degr´ e deux. On appelle conjugu´ e de θ l’autre racine de f. Cette autre racine sera not´ ee θ
.
Lemme 0.0.18 Soit θ un nombre quadratique strictement plus grand que 1 et f (x) = x
2+αx+β son polynˆ ome minimal. Soient a la partie enti` ere de θ et ϕ le nombre r´ eel tel que θ = a + 1/ϕ.
Alors ϕ est quadratique, strictement plus grand que 1 et son conjugu´ e est donn´ e par la formule suivante :
ϕ
= 1 θ
− a
D´ emonstration: ✷ On consid`ere le changement de variable : x = a + 1/y. Il est clair que g(y) = y
2f (a + 1/y) est un polynˆ ome en y de degr´e deux, ` a coefficients rationnels et que g(ϕ) = 0. Comme ϕ n’est pas rationnel, g est irr´eductible sur Q. ✷ Proposition 0.0.19 Soit θ un nombre quadratique. Les conditions suivantes sont ´ equivalentes.
1. Le d´ eveloppement de θ est purement p´ eriodique.
2. Le nombre θ v´ erifie les deux relations : θ > 1 et −1 < θ
< 0.
D´ emonstration: ✷ D´emontrons l’implication 1) = ⇒ 2). Supposons donc que θ = [a
0. . . , a
m−1], o` u m est sup´erieur ou ´egal 1. Comme a
0= a
mon a donc a
01 et donc θ > 1. Supposons dans un premier temps que m soit sup´erieur ou ´egal ` a 2. On a alors l’´egalit´e : θ = [a
0. . . , a
m−1, θ]
et donc
θ = θ p
m−1+ p
m−2θ q
m−1+ q
m−2et θ v´erifie donc l’´equation :
q
m−1θ
2+ (q
m−2− p
m−1)θ − p
m−2= 0
Notons f (x) = q
m−1x
2+ (q
m−2− p
m−1)x − p
m−2. L’une des racines de f est θ et l’autre θ
. Le produit des racines est −p
m−2/q
m−2qui est strictement n´egatif. Donc θ
< 0. De plus f (0) < 0 et il est imm´ediat de v´erifier que la suite de terme g´en´eral p
n+ q
nest strictement croissante et donc que f(−1) > 0. Il en r´esulte que −1 < θ
< 0. Dans le cas o` u la p´eriode est m = 1 on a θ = a
0+ 1
θ avec a
01, et donc θ
2− a
0θ − 1 = 0 ce qui implique −1 < θ
< 0.
La r´eciproque est plus d´elicate. Supposons donc que le nombre θ v´erifie les deux relations : θ > 1 et −1 < θ
< 0. Soit (θ
k) la suite des quotients complets de θ, et (a
k) la suite des quotients incomplets. Le lemme pr´ec´edent permet de montrer par r´ecurrence que pour tout entier k, le conjugu´e θ
kest dans ] − 1, 0[ et que de plus on a la relation
θ
k+1= 1 θ
k− a
kCette ´egalit´e implique
−1
θ
k+1= a
k− θ
kcomme −θ
k+1appartient ` a ]0, 1[ cette ´egalit´e montre que a
kest la partie enti`ere de −1 θ
k+1. Comme θ est quadratique, il existe deux entiers m et n distincts tels que θ
n= θ
m. On a donc
´egalement θ
n= θ
m, et donc −1 θ
n= −1
θ
m, ce qui implique a
n−1= a
m−1d’apr`es ce qui pr´ec`ede. Mais les deux ´egalit´es a
n−1= a
m−1et θ
n= θ
mimpliquent que θ
n−1= θ
m−1. Il en r´esulte, en supposant par exemple m > n que θ
m−n= θ
0et donc que le d´eveloppement de θ est purement p´eriodique.
✷
§ 5. L’´ equation de Pell-Fermat
Dans toute la suite d d´esigne un entier naturel qui n’est pas le carr´ e d’un entier, ce qui implique d 2.
Il s’agit de trouver les solutions, en nombres entiers, de l’´equation x
2− dy
2= 1
(Pell-Fermat)
Lemme 0.0.20 Soit d 2 un entier naturel qui n’est pas le carr´ e d’un entier naturel. Le d´ eveloppement en fractions continues de √
d est p´ eriodique ` a partir du rang 1, c’est ` a dire de la
forme √
d = [a
0, a
1, . . . , a
m] D´ emonstration: ✷ Notons a
0la partie enti`ere de √
d, et ϕ le premier quotient complet de √ d. On a donc √
d = a
0+1/ϕ = [a
0, ϕ]. Il suffit donc de montrer que ϕ, qui est quadratique, est purement p´eriodique. Il est clair que ϕ > 1. Un calcul imm´ediat montre que ϕ est racine du polynˆ ome P (X) = (a
20−d)X
2+2a
0X +1. D’autre part on a P (0) = 1 et P (−1) = (a
0− 1)
2−d < 0. Donc P a une racine dans l’intervalle ] − 1, 0[ et il, suffit d’appliquer la proposition pr´ ec´edente (0.0.19)).
✷ Lemme 0.0.21 Soit (x, y) un couple d’entiers naturels solution de l’´ equation de Pell-Fermat.
Alors si y est non nul, x/y est une r´ eduite de √ d.
Autrement dit, en conservant les notations habituelles, il existe un entier n tel que x = p
net y = q
n.
D´ emonstration: ✷ L’´egalit´e x
2−dy
2= 1 montre que x > y √
d > y. De plus cette ´egalit´e implique les relations suivantes :
x − y √
d = x − y √
d = 1
x + y √ d < 1
2y
et donc :
x y − √
d < 1
2y
2La proposition (0.0.14) montre que x/y est une r´eduite de √
d. Comme de plus x et y sont
premiers entre eux ceci implique le r´esultat. ✷
Dans la suite, pour retrouver les notations des paragraphes pr´ ec´edents, on note θ = √ d et
√ d = [a
0, a
1. . . , a
m] le d´eveloppement en fraction continues de √
d. On a donc a
m+k= a
ket θ
m+k= θ
kpour tout entier k 1. On supposera ´egalement que m est la plus petite p´eriode.
Th´ eor` eme 0.0.22 Soient d un entier naturel qui n’est pas un carr´ e et m la plus petite p´ eriode du d´ eveloppement de √
d en fraction continue. Soient n un entier naturel non nul et f
n= p
n/q
nune r´ eduite de √
d. Pour que (p
n, q
n) soit solution de l’´ equation de Pell-Fermat il faut et il suffit
que les deux conditions suivantes soient r´ ealis´ ees :
1. L’entier n est impair.
2. L’entier n + 1 est un multiple de m.
D´ emonstration: ✷ Soit donc f
n= p
n/q
nune r´eduite de √ d.
Si (p
n, q
n) est solution de l’´equation de Pell-Fermat, on a p
n> q
n√ d. La r´eduite f
nest donc strictement plus grande que √
d. Donc n doit ˆetre impair. Voir ´eventuellement la proposition (0.0.9).
On a d´ej` a utilis´e souvent la relation
√ d = p
nθ
n+1+ p
n−1q
n(θ
n+1q
n+ q
n−1) et donc :
θ
n+1(p
n− q
n√ d) = q
n−1√ d − p
n−1En multipliant cette ´egalit´e par (p
n+ q
n√ d) et en tenant compte du fait que (p
n, q
n) est solution on obtient
θ
n+1= √
d(p
nq
n−1− p
n−1q
n) + b
o` u b est un entier. Compte tenu de l’´egalit´e p
nq
n−1− p
n−1q
n= (−1)
n+1et du fait que n est impair on a donc :
θ
n+1= √ d + b o` u b est un entier. Or on a ´egalement les relations
θ
n+1= a
n+1+ 1 θ
n+2et √
d = a
0+ 1 θ
1L’´egalit´e pr´ec´edente s’´ecrit donc :
a
n+1+ 1 θ
n+2= a
0+ b + 1 θ
1Ce qui implique a
n+1= a
0+ b et θ
n+2= θ
1. L’entier m ´etant la plus petite p´eriode la derni`ere
´egalit´e implique que n + 2 est de la forme km + 1, autrement dit que n est de la forme km − 1.
R´eciproquement, si ces deux conditions sont v´erifi´ees, les calculs ci-dessus se remontent : si n est de la forme km − 1, ceci signifie que θ
n+2= θ
1et donc :
1 θ
n+2= 1 θ
1= √ d − a
0On a donc les ´egalit´es :
√ d = p
n+1θ
n+2+ p
nq
n+1(θ
n+2q
n+1+ q
n) =
p
n+1+ p
nθ
n+2q
n+1+ q
nθ
n+2=
p
n+1+ p
nθ
1q
n+1+ q
nθ
1= p
n+1+ p
n( √ d − a
0) q
n+1+ q
n( √
d − a
0) Ce qui montre que
(q
n+1− a
0q
n) √
d + dq
n= p
n√ d + (p
n+1− a
0p
n) ce qui implique les relations :
q
n+1− a
0q
n= p
np
n+1− a
0p
n= dq
nPar combinaison lin´ eaire de ces deux ´equations on obtient donc :
p
2n− dq
n2= −(p
n+1q
n− p
nq
n+1) = −(−1)
n+2= (−1)
n+1et comme n est impair, on a donc
p
2n− dq
2n= 1.
✷ L’´ equation x
2− dy
2= − 1.
Contrairement ` a la pr´ec´edente cette ´equation ne poss`ede pas toujours de solution enti` eres.
Une condition n´ecessaire ´evidente : si cette ´equation poss`ede une solution dans Z
2, −1 est un carr´e modulo d. Cette condition n’est pas suffisante. Il est imm´ediat de montrer que l’´equation x
2− 5
2y
2= −1 ne poss`ede pas de solutions enti`eres, bien que 7
2= −1 modulo 5
2. ´ Evidemment 5
2est un carr´e. Apr`es avoir vu le th´eor`eme suivant, il est facile de montrer que l’´equation x
2− 34y
2= −1 ne poss`ede pas de solutions enti`eres, bien que 13
2= −1 modulo 34.
Th´ eor` eme 0.0.23 Soient d un entier naturel qui n’est pas un carr´ e et m la plus petite p´ eriode du d´ eveloppement de √
d en fraction continue.
1. Si m est un entier pair l’´ equation x
2− dy
2= −1 ne poss` ede pas de solution dans Z
2. 2. Si m est un entier impair l’´ equation x
2− dy
2= −1 poss` ede une infinit´ e de solutions dans Z
2. Plus pr´ ecis´ ement, si n est un entier naturel non nul et f
n= p
n/q
nune r´ eduite de √
d, pour que (p
n, q
n) soit solution de l’´ equation x
2− dy
2= −1 il faut et il suffit que les deux conditions suivantes soient r´ ealis´ ees :
i) L’entier n est pair.
ii) L’entier n + 1 est un multiple de m.
D´ emonstration: ✷ Soit (x, y) une solution de l’´ equation x
2− dy
2= −1. Quitte ` a changer x en
−x et y en −y on peut supposer que x et y sont des entiers naturels. Il est clair que y est non nul et donc sup´erieur ou ´egal ` a 1. Dans ce cas, d’apr`es la proposition 0.0.14, le nombre
xyest une r´eduite du d´eveloppement de √
d.
Ces remarques ´etant faites, la d´emonstration est tout ` a fait analogue ` a celle du th´eor`eme pr´ec´edent.
Soit n un entier naturel. Si (p
n, q
n) est solution de l’´equation de x
2− dy
2= −1, on a p
n< q
n√ d. La r´eduite f
nest donc strictement plus petite que √
d. Donc n doit ˆetre pair. Voir
´eventuellement la proposition (0.0.9). D’autre part, on a θ
n+1(p
n− q
n√ d) = q
n−1√ d − p
n−1En multipliant cette ´egalit´e par (p
n+ q
n√ d) et en tenant compte du fait que (p
n, q
n) est solution on obtient
−θ
n+1= √
d(p
nq
n−1− p
n−1q
n) + c = (−1)
n+1√ d + c o` u c est un entier. Comme n est pair, cette relation se r´eduit ` a
θ
n+1= √ d − c
Comme dans la d´emonstration pr´ec´edente, on en d´eduit la relation a
n+1+ 1
θ
n+2= a
0− c + 1 θ
1Ce qui implique a
n+1= a
0− c et θ
n+2= θ
1. L’entier m ´etant la plus petite p´eriode la derni`ere
´egalit´e implique que n + 2 est de la forme km + 1. L’entier n ´etant pair, cette ´egalit´e n’est jamais
r´ealis´ee si la p´eriode m est paire.
Donc, si m est pair, il n’existe pas de r´eduite
pqnntelle que (p
n, q
n) soit solution de l’´equation x
2−dy
2= −1. Les remarques pr´eliminaires montrent que si m est pair, cette ´equation ne poss`ede pas de solution dans Z
2.
Supposons donc que la p´ eriode m est impaire. Pour que (p
n, q
n) soit solution de l’´equation x
2− dy
2= −1 il faut donc que l’entier n soit de la forme km − 1.
R´eciproquement, en supposant m pair, si n est un entier pair et si n + 1 est un multiple de m, comme dans la d´emonstration du th´ eor`eme pr´ec´edent, les calculs ci-dessus se remontent et donc dans ce cas (p
n, q
n) est une solution de l’´equation x
2− dy
2= − 1. (Le d´etail des calculs est
laiss´e au lecteur). ✷
§ 6. Quelques exemples num´ eriques
Les calculs effectifs concernant les d´eveloppements en fraction continue sont rapidement p´enibles bien qu’´el´ementaires. Le logiciel Maple poss`ede un module qui fait tous ces calculs.
1. On consid`ere l’´equation x
2− 34y
2= 1. Le d´eveloppement en fraction continue de √ 34 est
√ 34 = [5, 1, 4, 1, 10]
La plus petite p´eriode est donc m = 4. Le th´eor`eme pr´ec´edent montre que l’´equation x
2− 34y
2= −1 ne poss`ede pas de solution dans Z
2, bien que −1 soit un carr´e modulo 34 car 13
2+ 1 = 170 = 34 × 5.
2. On consid`ere l’´equation x
2− 31y
2= 1. Maple donne le d´ eveloppement de √
31 en fraction continue :
[5, 1, 1, 3, 5, 3, 1, 1, 10]
Donc la plus petite p´eriode est m = 8. Le th´eor`eme 0.0.22 montre que les solutions dans N
2, autres que (1, 0), sont donn´ ees par les num´erateurs et d´enominateurs des r´eduites f
no` u l’entier n est impair et de la forme 8k − 1. Le plus petit de ces entiers est 7. Maple donne f
7=
1520273. le couple d’entier (1520, 273) est solution de l’´equation x
2− 31y
2= 1.
Comme − 1 n’est pas un carr´e modulo 31, l’´equation x
2− 31y
2= − 1 ne poss`ede pas de solution enti`ere.
3. On consid`ere l’´equation x
2− 53y
2= −1. Maple donne le d´ eveloppement de √
53 en fraction continue : √
53 = [7, 3, 1, 1, 3, 14]. Donc la plus petite p´eriode est m = 5 donc impaire. Le th´eor`eme 0.0.23 montre que que l’´equation poss`ede des solutions enti`eres et que les solutions dans N
2sont donn´ees par les num´erateurs et d´enominateurs des r´eduites f
no` u l’entier n est pair et de la forme 5k − 1. Le plus petit de ces entiers est 4. Maple donne f
4=
18225. Donc le couple d’entier (182, 25) est solution de l’´equation x
2− 53y
2= −1.
En ce qui concerne l’´equation de Pell-Fermat x
2− 53y
2= 1, les solutions dans N
2, autres que (1, 0), sont donn´ ees par les num´erateurs et d´enominateurs des r´eduites f
no` u l’entier n est impair et de la forme 5k − 1. Le plus petit de ces entiers est n = 9. Toujours grˆ ace ` a Maple on obtient : f
9=
662499100et donc (66249, 9100) est solution de x
2− 53y
2= 1.
Les inversibles de l’anneau Z [ √ d ].
L’ensemble des nombres r´eels de la forme x + √
dy forment un sous-anneau du corps des r´ eels not´e Z[ √
d ]. L’entier d n’´etant pas le carr´e d’un entier, tout ´ el´ement z de Z[ √
d ] s’´ecrit de mani`ere unique sous la forme z = x + y √
d o` u x et y sont deux entiers relatifs. On peut donc d´ efinir une application, appel´ ee conjugaison, de Z[ √
d ] dans lui-mˆeme qui ` a z = x+y √
d associe z = x−y √ d.
Il est imm´ediat de v´erifier la conjugaison est un homomorphisme d’anneaux. Ensuite on d´ efinit la norme (au sens de l’arithm´etique) d’un ´el´ement z de Z[ √
d ] par
N(z) = zz. Donc si z s’´ecrit z = x + y √
d o` u x et y sont deux entiers relatifs, on a la relation
N(z) = x
2− dy
2. L’application
N