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Regulation by law and by technology of works and information availability on the networks

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-00666307

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00666307v2

Submitted on 10 Dec 2015

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

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Regulation by law and by technology of works and

information availability on the networks

Melanie Dulong de Rosnay

To cite this version:

Melanie Dulong de Rosnay. Regulation by law and by technology of works and information availability on the networks. Law. Université Panthéon-Assas - Paris II, 2007. English. �tel-00666307v2�

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Université Panthéon-Assas Paris II

Droit – Economie – Sciences Sociales

École Doctorale de droit public interne, science administrative, science politique

et information et communication

CERSA - Centre d’Etudes et de Recherches de Science Administrative

LA MISE À DISPOSITION DES ŒUVRES ET DES

INFORMATIONS SUR LES RÉSEAUX

RÉGULATION JURIDIQUE ET RÉGULATION TECHNIQUE

Thèse pour l’obtention du doctorat en droit de l’Université Panthéon-Assas Paris II (loi du 26 janvier 1984 – arrêté du 25 avril 2002)

Présentée et soutenue publiquement le 26 octobre 2007 par

Mélanie DULONG de ROSNAY

Sous la direction de Danièle BOURCIER

JURY

Philippe Aigrain, Directeur de Sopinspace, Habilité à Diriger des Recherches (examinateur) Danièle Bourcier, Directrice de recherche au CNRS/CERSA Université Paris II (directrice) Ghislaine Chartron, Professeur au CNAM, Chaire d'Ingénierie documentaire (rapporteur) Gilles Guglielmi, Professeur à l’Université Panthéon-Assas Paris II (examinateur)

Yves Poullet, Professeur aux Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix de Namur, Directeur du Centre de Recherche Informatique et Droit (rapporteur)

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Université Panthéon-Assas Paris II

Droit – Economie – Sciences Sociales

École Doctorale de droit public interne, science administrative, science politique

et information et communication

CERSA - Centre d’Etudes et de Recherches de Science Administrative

LA MISE À DISPOSITION DES ŒUVRES ET DES

INFORMATIONS SUR LES RÉSEAUX

RÉGULATION JURIDIQUE ET RÉGULATION TECHNIQUE

Thèse pour l’obtention du doctorat en droit de l’Université Panthéon-Assas Paris II (loi du 26 janvier 1984 – arrêté du 25 avril 2002)

Présentée et soutenue publiquement le 26 octobre 2007 par

Mélanie DULONG de ROSNAY

Sous la direction de Danièle BOURCIER

JURY

Philippe Aigrain, Directeur de Sopinspace, Habilité à Diriger des Recherches (examinateur) Danièle Bourcier, Directrice de recherche au CNRS/CERSA Université Paris II (directrice) Ghislaine Chartron, Professeur au CNAM, Chaire d'Ingénierie documentaire (rapporteur) Gilles Guglielmi, Professeur à l’Université Panthéon-Assas Paris II (examinateur)

Yves Poullet, Professeur aux Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix de Namur, Directeur du Centre de Recherche Informatique et Droit (rapporteur)

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« L’Université Panthéon-Assas Paris II n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs. »

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Remerciements

Danièle Bourcier pour m’avoir accordé sa confiance et accompagnée patiemment à chacune des étapes de ce travail.

Francis Rousseaux pour m’avoir initiée à la recherche et suivie tout au long de cette thèse. Sans Francis Rousseaux, je n’aurai peut-être pas commencé cette recherche, et sans Danièle Bourcier, je ne l’aurai peut-être pas terminée. C’est un plaisir de les remercier pour leur disponibilité, leurs conseils avisés, leurs critiques pertinentes et leurs encouragements.

Les membres du jury Philippe Aigrain, Ghislaine Chartron, Gilles Guglielmi et Yves Poullet pour avoir accepté de lire et d’évaluer ce travail.

Filipe Borges, François Déchelle, Guillaume Gomis, Anne-Catherine Lorrain, Thierry Maillard, Nadia Nadah, Thomas Robyn pour leurs remarques et corrections sur des chapitres et modèles de cette thèse.

Laurence Allard, Olivier Blondeau, les membres du CERSA, des communautés Creative Commons, Creative Commons France et MPEG, du réseau Droit et Systèmes d’Information et des commissions du CSPLA qui m’ont aidée dans ma recherche.

Cette thèse a été financée par le programme CIFRE (Convention Industrielle de Formation par la Recherche) de l’ANRT (Association Nationale de la Recherche Technique) en convention avec le CERSA/CNRS Université Paris II et l’entreprise Medialive que son fondateur Daniel Lecomte m’a permis de représenter à MPEG. Hugues Vinet et Vincent Puig m’ont recrutée à l’Institut de Recherche et Coordination en Acoustique/Musique et encouragée à poursuivre ma thèse. Bruno Bachimont m’a invitée à enseigner la propriété littéraire et artistique à l’Université de Technologie de Compiègne et a été présent pendant cette recherche.

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Table des abréviations et acronymes

AJDA : Actualité juridique en droit administratif Cah. PI : Les Cahiers de la Propriété Intellectuelle D. : Semaine Juridique Dalloz

EIPR : European Intellectual Property Review

Fasc. : fascicule

JCP : Jurisclasseur périodique

PI : Propriétés Intellectuelles, revue de l’IRPI (Institut de recherche en Propriété Intellectuelle

Henri-Desbois)

RDP : Revue du Droit Public

RDPI : Revue du Droit de la Propriété Intellectuelle

RIPIA : Revue Internationale de la Propriété Littéraire et Artistique RIDA : Revue Internationale du Droit d’Auteur

RLDI : Revue Lamy Droit de l’Immatériel

Vol. : volume art. : article

CA : Cour d’Appel Cass. : Cour de Cassation

CEDH : Convention Européenne des Droits de l’Homme CJCE : Cour de Justice des Communautés Européennes CPI : Code de la Propriété Intellectuelle

JORF : Journal Officiel de la République Française JOCE : Journal Officiel des Communautés Européennes LCEN : Loi sur la Confiance dans l’Economie Numérique s. : suivant

PLA : Propriété littéraire et artistique TGI : Tribunal de Grande Instance A2K : Access to Knowledge

ADPIC : Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle touchant au commerce AFNOR : Association Française de Normalisation

ARMT : Autorité de Régulation des Mesures Techniques

ASCAP : American Society of Composers, Authors and Publishers BMI : Broadcast Music, Inc.

BNF : Bibliothèque Nationale de France

CC : Creative Commons, système de licences comportant les options suivantes : BY : Attribution

NC : Pas d’utilisation commerciale (non commercial) ND : Pas de modification (non derivative)

SA : Partage des conditions à l’identique (share alike) CeCILL (licence) : CEA CNRS INRIA logiciel libre

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8 CIFRE : Convention Industrielle de Formation par la Recherche

CISAC : Confédération Internationale des Sociétés d’Auteurs et de Compositeurs CNAM : Conservatoire National des Arts et Métiers

CNIL : Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique

CRID : Centre de Recherche Informatique et Droit

CSPLA : Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique

DADVSI : Droit d’Auteur Droits Voisins dans la Société de l’Information DMCA : Digital Millenium Copyright Act

DMP : Digital Media Project DRM : Digital Rights Management EDI : Echange de Données Informatisées EUCD : European Union Copyright Directive

GESTE : Groupement des Editeurs de Services en Ligne GNU-GPL : General Public License

HTML : Hypertext Markup Language IA : Intelligence Artificielle

ICANN : Internet Corporation for Assigned Names and Numbers IFPI : International Federation of Phonographic Industry

INA : Institut National de l’Audiovisuel

ISO : Organisation Internationale de Normalisation IP : Internet Protocol

IP : Intellectual Property

IPMP : Intellectual Property Management and Protection IPR : Intellectual Property

IRCAM : Institut de Recherche et de Coordination Acoustique Musique JPEG : Joint Picture Expert Group

LAL : Licence Art Libre

MIDI : Musical Instrument Digital Interface MPAA : Motion Picture Association of America MPEG : Motion Picture Expert Group

MTI : mesure technique d’information MTP : mesure technique de protection

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economique ODRL : Open Digital Rights Language

OMA : Open Mobile Alliance

OMC : Organisation Mondiale du Commerce

OMPI : Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle ONG : Organisation Non Gouvernementale

OWL : Web Ontology language P2P : peer-to-peer, pair à pair

PICS : Platform for Internet Content Selection P3P : Platform for Privacy Preferences

RIAA : Recording Industry Association of America

SACD : Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques

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9 SCAM : Société Civile des Auteurs Multimedia

SCPP : Société Civile des Producteurs Phonographiques SDMI : Secure Digital Music Initiative

SDRM : Société pour l'administration du Droit de Reproduction Mécanique SELL : Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs

SGAE : Sociedad General de Autores y Editores

SMSI : Sommet Mondial sur la Société de l’Information SPRD : Société de Perception et de Répartition des Droits

SPRE : Société Civile pour la Perception de la Rémunération Equitable RAND : Reasonable and Non Discriminatory Terms

RDD : Rights Data Dictionary

RDF : Resource Description Framework REL : Rights Expression Language UML : Unified Modeling Language

UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture URL : Uniform Resource Locator

VOD : Vidéo à la demande

XML : Extensible Markup Language

XrML : Extensible Rights Markup Language W3C : World Wide Web Consortium

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11

Sommaire

Introduction générale ... 13

Première partie : L’impossible autonomie du droit et la technique... 49

Titre I : La confrontation entre le droit et la technique ... 51

Chapitre 1. Le droit d’auteur : une adaptation du droit à la technique... 52

Chapitre 2. La normalisation technique : une régulation technique sans régulation juridique... 60

Chapitre 3. Filtrage et données personnelles : une instrumentalisation juridique de la technique... 104

Titre II : La coopération entre le droit et la technique ... 119

Chapitre 1. La protection technique de modèles économiques ... 123

Chapitre 2. L’architecture technique des systèmes de gestion numérique... 144

Chapitre 3. Les mesures techniques de protection et d’information comme contrats électroniques ... 174

Chapitre 4. La protection juridique des mesures techniques de protection et d’information ... 213

Seconde Partie : L’intégration du droit et de la technique ... 261

Titre I : Les enseignements de la documentation et de l’intelligence artificielle : les métadonnées juridiques ... 262

Chapitre 1. L’intérêt de la représentation des connaissances et de la construction d’ontologies ... 264

Chapitre 2. Les ontologies de la transaction en ligne de contenus immatériels ... 293

Chapitre 3. La modélisation d’une ressource pour la mise à disposition d’œuvres et d’informations... 343

Titre II : La reconfiguration de certaines représentations conceptuelles juridiques ... 375

Chapitre 1. Proposition de nouvelles catégorisations juridiques ... 380

Chapitre 2. L’émergence de nouveaux principes du droit... 425

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12

Bibliographie ... 540

Ouvrages non juridiques... 540

Ouvrages juridiques ... 544

Articles juridiques... 552

Articles non juridiques ... 573

Rapports et études ... 583

Actes de colloques, conférences, séminaires non publiés... 589

Mémoires, thèses et habilitations... 590

Normalisation et standardisation technique : contributions, normes et brevets ... 593

Droit français ... 597

Textes réglementaires, administratifs et autres... 597

Droit communautaire ... 598

Droit international... 600

Textes législatifs étrangers ... 601

Décisions françaises... 601

Décisions communautaires... 603

Décisions étrangères ... 604

Décision internationale... 605

Table des figures... 607

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Introduction générale

Le contexte des échanges d’œuvres et d’informations sur les réseaux

Les développements techniques entraînent une croissance exponentielle de la circulation des œuvres et informations sur les réseaux, et remettent en question l’effectivité de modèles de régulation conçus sur les paradigmes de l’ère analogique. La rareté et l’exclusivité du support des œuvres sont remises en question par le numérique, fondé sur les paradigmes de la copie, de la réappropriation et du partage. Le modèle économique de la diffusion se transforme en modèle économique de l’attention et du lien. La propriété littéraire et artistique a été développée et adaptée en même temps que les techniques de reproduction et de diffusion des œuvres comme un correctif artificiel destiné à octroyer une exclusivité temporaire d’exploitation économique et un contrôle sur la destinée des oeuvres.

Le droit et la technique ont été pensés de manière indépendante, et l’histoire de la propriété littéraire et artistique s’est façonnée autour des progrès techniques, entraînant tensions entre les industries culturelles et le public. Les processus d’élaboration des normes et standards techniques et l’extension des droits exclusifs sont inadaptés à l'administration de la circulation des ressources numériques. Cette conception autonome de la régulation juridique et de la régulation technique conduit à un enchevêtrement de lois et de mesures techniques de protection, dispositifs électroniques automatisant a priori l’application unilatérale de contrats, contredisant les principes fondamentaux du droit et de l’informatique.

Nous présentons dans le prolongement des recherches sur la lex informatica1 et d’autres un

modèle d’intégration entre régulation juridique et régulation technique. Notre proposition est fondée sur l’influence réciproque entre les disciplines scientifiques, vers la reconception de la catégorisation juridique et l’expression technique des droits.

1 D’après Reidenberg Joël, « Lex Informatica : the formulation of information policy rules through technology »,

Texas Law Review, vol. 76, p. 553, 1998. La lex informatica est nommée code par analogie entre le code

informatique et le code juridique par Lessig Lawrence, Code and other laws of cyberspace, (ci-après Code), Basic Books, New York, 1999, 297 p.

(17)

16

Les développements techniques

La mémoire des ordinateurs, leur capacité de stockage, ainsi que les outils de traitement de l’information, logiciels et systèmes d’identification se sont développés à une vitesse exponentielle. Des normes techniques ont permis le développement de réseaux de télécommunication2 et la compression3 numérique des données. La convergence de ces développements techniques a entraîné l’explosion de la copie et de la diffusion d’œuvres et d’informations à un coût marginal4 quasi nul. Ces techniques de reproductibilité suscitent controverses, espoirs et craintes, de l’utopie réalisable5 du savoir et de la culture accessibles universellement à tous, à la remise en question des modèles économiques des industries de l’information et de la culture basés sur le contrôle exclusif, et l’élargissement des possibilités du contrôle perçu comme nécessaire pour les uns et dangereux pour les autres.

L’organisation de l’information

L’organisation de l’information et des manières d’y accéder dépendaient des contraintes de l’espace physique. L’espace numérique permet au contraire de rendre l’information disponible en plusieurs endroits en même temps, de la réorganiser instantanément selon des critères non déterminés à l’avance par les autorités de classement, distributeurs, bibliothèques et archives. Chacun peut annoter et réagencer toute collection : les tags, mots-clés ou étiquettes que les personnes qui déposent et consultent des centaines de millions de photos sur la plateforme

2 Internet est la mise en œuvre d’une norme d’interopérabilité, la norme TCP/IP (« Transmission Control

Protocol/Internet Protocol »).

3 « La compression est l’ensemble des moyens mis en œuvre pour réduire la quantité de signaux nécessaire au

stockage ou à la transmission des données représentant après codage les informations. Celles-ci-sont souvent structurées et redondantes : ce sont ces redondances qu’on cherche à éliminer ainsi que les informations physiologiquement non perceptibles dans le cas particulier des images ou du son. » Bonard Pierre, Macher Jean, Vasseur Pierre, « Compression », in Cacaly Serge et al. (dir.), Dictionnaire encyclopédique de l'information et de

la documentation, Nathan, 1997, p. 147

4 Le coût marginal en économie est le coût pour la production d’une unité supplémentaire. La reproduction et la

diffusion d’un fichier n’a aucun coût au-delà de l’amortissement du matériel et de la connexion.

(18)

17 Flickr6 sont plus nombreux et divers que les codes des catalogues des bibliothèques ou les classifications des genres de musique, de livre ou de film des distributeurs. Au lieu de devoir savoir à l’avance ce que l’on cherche, ou de découvrir une œuvre ou une information au gré du hasard ou par une recommandation d’un proche ou de la presse7, il est possible de parcourir et hiérarchiser l’information selon des critères infinis, multiples et de les croiser à volonté, la seule barrière étant la langue, dans l’attente du développement des techniques de traitement automatique du langage.8

Définition des termes du sujet

La mise à disposition

La mise à disposition est une autorisation d’utiliser qui se traduit par une convention entre l’offrant du service, de la prestation ou du personnel détaché et le bénéficiaire. Elle peut être conclue à titre gracieux ou onéreux. La mise à disposition est un « terme neutre » qui porte sur des personnes ou des choses ; dans le cas des choses, c’est « la modalité de délivrance qui consiste à tendre une chose accessible à son destinataire de manière à ce que celui-ci puisse effectivement en prendre possession »9.

6 Flickr est une application de gestion et de partage des photographies numériques http://www.flickr.com/ 7 Dans de nombreux magazines de musique, mensuels et hebdomadaires, le choix par la rédaction des disques

chroniqués est fortement influencé par le budget publicitaire que l’éditeur est prêt à investir. Entretiens auprès de dirigeants de labels indépendants de musique électronique et expérimentale (Le Cri de la Harpe, Aspic Records) ayant obtenu cette information par des journalistes de ces magazines. Des chroniques dépendent la vente de disques et la capacité à trouver des dates de concerts. Les réseaux communautaires tels que MySpace suppriment ces inconvénients : les commentaires critiques et l’organisation de tournées ne nécessitent plus forcément l’envoi de disques et dossiers de presse à une liste de contacts à constituer : les personnes intéressées participent volontairement. Voir à propos de la situation de nombreux musiciens au moment de signer un contrat avec un label le commentaire de Steve Albini, musicien et producteur de rock alternatif : « The Problem With Music »,

Maximum RocknRoll, n°133, 1993. http://www.negativland.com/albini.html

8 Ce paragraphe sur le changement de statut de l’information et des informations permettant de classer et

d’accéder à l’information s’inspire du prologue et du premier chapitre de l’ouvrage de Weinberger David,

Everything is Miscellaneous: The Power of the New Digital Disorder, Times Books, New York, 2007, 277 p.

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18 L’expression de « mise à disposition » est utilisée plus particulièrement dans le domaine de la propriété littéraire et artistique, de nombreux contrats s’y référant dans le domaine des œuvres littéraires et artistiques, des logiciels et des bases de données. Le droit de mise à disposition du public désigne plus spécifiquement l’acte de téléchargement ascendant ou upload de fichiers sur des réseaux pair-à-pair et l’expression a été utilisée dans ce sens par la jurisprudence10. Dans certains cas, la mise à disposition est effectuée sans l’autorisation des titulaires de droits (auteurs et autres auxiliaires de la création, artistes-interprètes, producteurs... bénéficiant d’un droit exclusif contrôlant l’exploitation de leur œuvre dès la création) et ces actes sources de controverses remettent en question certains modèles économiques des industries culturelles et de l’information basés sur l’exclusivité de la distribution, source de rémunération.

Dans le prolongement des traités internationaux sur le droit d’auteur11, le traité sur le droit d’auteur de l’OMPI (Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle) de 1996 définit le droit de distribution et le droit de communication au public par la mise à disposition du public12. Le traité sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes13, ainsi que la

directive « droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information » de 200114

9 Cornu Gérard (dir), Vocabulaire Juridique Association Henri Capitant, PUF Quadrige, 7ème éd., 2005, p. 581 et

582.

10 Voir par exemple TGI Paris, 31ème chambre/2, 8 décembre 2005, Monsieur G. Anthony c/ SCPP.

http://www.juriscom.net/documents/tgiparis20051208.pdf

11 Depuis la convention de Berne en 1908.

12 Article 6 Droit de distribution : « 1) Les auteurs d’œuvres littéraires et artistiques jouissent du droit exclusif

d’autoriser la mise à la disposition du public de l’original et d’exemplaires de leurs œuvres par la vente ou tout autre transfert de propriété. » et article 8 Droit de communication au public « les auteurs d’œuvres littéraires et artistiques jouissent du droit exclusif d’autoriser toute communication au public de leurs œuvres par fil ou sans fil, y compris la mise à la disposition du public de leurs œuvres de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit de manière individualisée », Traité de l’OMPI sur le droit d’auteur, Genève, 20 décembre 1996. http://www.wipo.int/treaties/fr/ip/wct/trtdocs_wo033.html

13 « Article 2 Définitions : On entend par (…) e) “publication” d’une interprétation ou exécution fixée ou d’un

phonogramme la mise à la disposition du public de copies de l’interprétation ou exécution fixée ou d’exemplaires du phonogramme avec le consentement du titulaire des droits » et article 8 Droit de distribution « 1) Les artistes interprètes ou exécutants jouissent du droit exclusif d’autoriser la mise à la disposition du public de l’original et de copies de leurs interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes par la vente ou tout autre transfert de propriété. ». Traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes, Genève, 20 décembre 1996. http://www.wipo.int/treaties/fr/ip/wppt/trtdocs_wo034.html

14 « Article 3 Droit de communication d'œuvres au public et droit de mettre à la disposition du public d'autres

objets protégés. Les États membres prévoient pour les auteurs le droit exclusif d'autoriser ou d'interdire toute communication au public de leurs œuvres, par fil ou sans fil, y compris la mise à la disposition du public de leurs œuvres de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit individuellement » et

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19 après directive DADVSI) reprennent cette expression dans des termes similaires. La loi française de transposition de 2006 (ci-après loi DADVSI) réserve l’usage de cette expression à certains droits voisins et connexes15, ainsi qu’aux logiciels de partage de fichiers16. En droit français, le droit de mise à disposition du public est « un droit patrimonial qui confère à son titulaire le pouvoir d’autoriser ou d’interdire la mise à disposition du public des supports matériels incorporant l’œuvre ou tout objet protégé par les droits voisins »17. Le code français de la propriété intellectuelle (ci-après CPI) accorde depuis la loi du 3 juillet 1985 ce droit aux producteurs de phonogrammes, de vidéogrammes et aux entreprises de communication audiovisuelle pour la vente, l’échange, le louage18, englobant la location et le prêt, tandis que les auteurs et les artistes-interprètes exercent ces prérogatives par l’intermédiaire du droit de reproduction. Son équivalent en droit belge et américain ainsi que dans la directive location-prêt19 est le droit de distribution.

D’une manière générale, le droit de mise à disposition rassemble les droits exclusifs de représentation et de reproduction20, qu’il n’y a plus lieu de distinguer sur les réseaux et avec

les techniques dites de l’information et de la communication21 puisque toute communication

considérant 24 : « Le droit de mettre à la disposition du public des objets protégés qui est visé à l'article 3, paragraphe 2, doit s'entendre comme couvrant tous les actes de mise à la disposition du public qui n'est pas présent à l'endroit où l'acte de mise à disposition a son origine et comme ne couvrant aucun autre acte. » Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, JO n° L 167 du 22/06/2001, p. 10.

15 Les droits voisins des artistes-interprètes et producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes n’ont pas la

même terminologie que le droit d’auteur. On parle notamment de « fixation, reproduction, communication ou mise à disposition du public » (article L. 335-4 du Code de la Propriété Intellectuelle). De même, le droit des producteurs de bases de données emploie l’expression de « mise à disposition du public » pour désigner la réutilisation, corollaire de l’extraction et équivalents du tandem reproduction-représentation en droit d’auteur.

16 « un logiciel manifestement destiné à la mise à disposition du public non autorisée d'oeuvres ou d'objets

protégés », article 21 de la loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, JORF n° 178 du 3 août 2006, p. 11529, article L. 335-2-1 du Code de la Propriété Intellectuelle. Il s’agit ici de la mise à disposition de logiciels de mise à disposition d’oeuvres.

17 Cornu Marie, de Lamberterie Isabelle, Sirinelli Pierre, Wallaert Catherine, Dictionnaire comparé du droit

d’auteur et du copyright, CNRS éditions, 2003, p. 71.

18 Articles L. 213-1, L. 215-1 et L. 216-1 du CPI.

19 Directive 92/100/CEE du Conseil, du 19 novembre 1992, relative au droit de location et de prêt et à certains

droits voisins du droit d'auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle (droit d'auteur), JO n° L 346 du 27/11/1992, p. 61-66.

20 En ce sens une doctrine et une jurisprudence unanimes, voir par exemple Lucas André, Droit d’auteur et

numérique, Litec, 1998, 355 p.

21 Lesdites techniques ont été baptisées « nouvelles » lors de leur apparition. Notre travail intervenant près d’une

décennie après leur introduction auprès du grand public, nous ne jugeons pas opportun de reprendre cette expression de nouvelles techniques de l’information et de la communication (NTIC).

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20 implique à la fois une reproduction dans la mémoire du dispositif technique de restitution et une représentation auprès d’un public, l’utilisateur devant son écran.

Notre utilisation de l’expression de la « mise à disposition » est sensiblement plus large que l’acception qui en est faite par le droit positif français. Nous n’avons pas choisi d’utiliser l’expression de « communication au public » afin de ne pas étendre notre étude au droit de la communication22 et en vue inclure d’autres modalités de la mise à disposition, comme l’accompagnement de la ressource par des mesures techniques ou la transmission23. Nous n’avons pas non plus retenu l’expression de « distribution » ou de « droit de la distribution » afin de ne pas réduire notre champ aux droits exclusifs de propriété littéraire et artistique, ni celle de « publication » au sens de rendre public, du latin publicare, qui est le terme utilisé par le législateur dans la loi sur la presse de 1881, afin de conserver une neutralité vis-à-vis de ces dispositions. Nous n’avons donc pas souhaité réduire notre champ à un aspect du droit de l’information en particulier24.

La notion de mise à disposition implique une relation dynamique et volontaire entre un émetteur et un récepteur25, le cadre juridique de la mise à disposition d’œuvres et

d’information n’étant pas intégralement subi mais pouvant être choisi, négocié ou ignoré par les acteurs. La langue anglaise utilise peu l’expression « put at disposal »26 mais plutôt les verbes provide, offer to the public, make available.

22 On distingue l’information qui est le contenu diffusé de la communication qui régit les processus entre source

et destinataire, et de même on sépare le droit de l’information (défini plus loin) au droit de la communication qui comprend des règles spécifiques pour les médias, la presse et le cinéma.

23 Au sens de Régis Debray qui coordonne communiquer, « transporter une information dans l’espace » et

transmettre, « transporter une information dans le temps », Debray Régis, Introduction à la médiologie, PUF, 2000, p. 3 et 15. La médiologie a pour objet les interactions entre technique et culture tandis que le rapport entre droit et technique soulève des questions politiques.

24 Cependant, les contenus répréhensibles au titre du droit pénal ou d’autres dispositions juridiques ne seront pas

directement traités dans ce travail : courrier non sollicité, images pornographiques, contrefaçon au sens de plagiat et non de reproduction non autorisée…

25 L’émetteur et le récepteur peuvent être des entités fictives, par exemple dans le cas d’échange de fichiers avec

des techniques qui partagent le téléchargement entre plusieurs sources disponibles indistinguées comme Bittorent.

26 Cette expression a été retenue par les équipes néerlandaises et françaises en charge de la traduction et de

l’adaptation dans leur droit national des licences Creative Commons. D’après l’équipe néerlandaise, l’expression traduit le caractère non-transférable de la licence. D’après la version française rédigée par nos soins, elle exprime la possibilité d’utiliser et de réutiliser une œuvre sans possibilité de sous-licence.

(22)

21 Nous définissons donc la notion de mise à disposition comme l’ensemble des actions27 effectuées par des acteurs sur des œuvres et informations et sous-tendues par des droits exclusifs ou d’autres prérogatives, qu’elles soient de nature législative28, prétorienne et doctrinale29, contractuelle30 ou technique. Ces actions sont d’une part mises en œuvre par le titulaire des droits, l’auteur, son représentant ou un programme et permettent d’autre part à d’autres utilisateurs d’effectuer certaines actions suite à cette mise à disposition. Les actions sont conditionnées par des droits exclusifs (le tandem représentation/reproduction et ses corollaires distribution, adaptation…) et se traduisent par des techniques de restitution ou de manipulation (lecture, copie, interprétation, modification, citation, conservation, diffusion, indexation, illustration…). La mise à disposition est alors un processus non fini, un cycle entre une chaîne d’acteurs successifs aux rôles évolutifs, du créateur vers l’utilisateur, l’un pouvant succéder à l’autre. Elle englobe la création, la production, toutes les sortes de traitements, la distribution, l’accès et la réutilisation. Elle obéit à des règles juridiques et techniques. Ainsi, la titularité ou la cession du droit de reproduction autorise l’impression, et le droit de citation ainsi que la faculté technique de copier puis coller une portion d’un document dans un autre permettent la reproduction partielle selon certaines conditions. « La production d’une information peut se faire à partir de rien et l’on parlera alors d’information

Voir « Creative Commons Retranslation of the Dutch translation » et « Creative Commons Retranslation of the French translation », les premiers résultats d’une recherche des termes « put at disposal » dans Google le 19/07/2007.

http://creativecommons.org/worldwide/nl/english-changes.pdf http://creativecommons.org/worldwide/fr/english-changes.pdf

27 « Une action est une intervention sur le réel pratiquée par un acteur, de nature à avoir des effets perceptibles

sur les autres, sur une situation, ou sur un objet. » in Lamizet Bernard, Silem Ahmed (dir.), Dictionnaire

encyclopédique des sciences de l’information et de la communication, Ellipses, 1997, p. 7. Ici, le réel sera une

œuvre ou une information, les effets seront perceptifs, techniques, juridiques.

28 Nous distinguerons ultérieurement (voir supra partie II, titre I, section 3, §1) les droits exclusifs des droits

négatifs qui apparaissent en filigrane par l’absence de régulation (par exemple le domaine public).

29 Liberté fondamentale, le droit à l’information du public ne dispose pas d’une assise juridique solide, au-delà

d’une justification sociale, des décisions de justice l’ont mis en œuvre. Voir la thèse de Geiger Christophe, Geiger Christophe, Droit d’auteur et droit du public à l’information. Approche de droit comparé, Litec, Le droit des Affaires, Collection IRPI Série Propriété Intellectuelle, Institut de Recherche en Propriété Intellectuelle Henri-Desbois, 2004, 442 p.

30 Par l’intermédiaire de contrats de cession, licences et autres conditions d’utilisation déterminées de manière

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22 primaire. »31 En revanche, l’incorporation d’informations préexistantes peut être libre ou soumise à autorisation.

Œuvres et informations

Nous distinguons les œuvres et les informations. Même si la notion générale d’information englobe les œuvres de l’esprit, nous avons choisi de maintenir le terme d’œuvre en première place pour traduire leur importance dans cette recherche par rapport à d’autres types d’informations objets de nouvelles controverses, les dispositifs juridiques et techniques qui ont été développés depuis une décennie pour contrôler leur mise à disposition sur les réseaux. Les œuvres sont régies par le droit de la propriété littéraire et artistique, qui comprend le droit d’auteur, les droits voisins des artistes-interprètes, producteurs de phonogrammes, de vidéogrammes, de bases de données. Contrairement à l’œuvre32, l’information n’est pas nécessairement appropriable exclusivement comme un bien, elle peut être considérée comme une chose qui peut appartenir à tout le monde ou à personne33. On notera que les œuvres peuvent être considérées comme des données, des matériaux informationnels auxquels il est possible d’appliquer des traitements en vue de la recherche d’information et de la transformation de l’information dans des œuvres dites dérivées.

Les rapports entre droit et information sont multiples : droit de l’information, droit à l’information, droit sur l’information. Le droit à l’information, sous-entendu le droit à l’information du public par rapport aux prérogatives des producteurs et diffuseurs de l’industrie de l’information, est de source prétorienne et internationale34. Il fait partie des

31 De Lamberterie Isabelle, « Droit de l’information », in Cacaly Serge et al., op. cit., p. 199.

32 Nous reprenons l’argumentation de Galloux Jean-Claude, « Ebauche d’une définition juridique de

l’information », in Bourcier Danièle, Thomasset Claude (dir.), L’écriture du droit. Législation et technologies de

l’information, Diderot Multimédia, 1996, p. 132-148 qui lui-même s’appuie sur Planiol pour dire que « la chose

deviendrait un bien lorsqu’elle serait appropriée par quelqu’un ». Le droit de propriété est le signe du « passage de la chose au bien », de la réservation, p. 144.

33 Voir infra partie II, titre I, chapitre 1, section 3, §2, sur l’absence d’exclusivité, les res nullius et les res

communes.

34 Sur le droit du public à l’information, voir les analyses de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789, la

Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 et la Convention Européenne des Droits de l’Homme de 1950 par Geiger Christophe, Droit d’auteur et droit du public à l’information. Approche de droit comparé, Litec,

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23 droits humains, mais bénéficie d’une moindre reconnaissance que son homologue le droit d’auteur. Les informations peuvent être produites par d’autres acteurs que les industries de l’information, on dénombre les données personnelles (qui sont régies par les dispositions sur la vie privée), les données confidentielles (courrier, rapports d’entreprises), ainsi que les données publiques produites par l’Etat (leur mise à disposition est aussi source à controverse, entre appropriation privée par des éditeurs et accès ouvert). Enfin, les informations peuvent être des « métadonnées », c’est-à-dire des informations sur l’information, des descripteurs de contenu au sens de la documentation. Ces informations peuvent être de type bibliographiques (nom de l’auteur, genre…) ou juridique : il s’agit des « informations sur les droits » ou mesures techniques d’information qui renseignent les utilisateurs sur les conditions juridiques de mise à disposition des œuvres auxquelles elles sont associées.

Nous proposerons la notion de ressource35 numérique par analogie aux ressources naturelles. Les ressemblances sont nombreuses : le droit de l’environnement et le droit de l’information sont à la croisée du droit et de la technique, les biens publics peuvent être informationnels ou physiques36, leur appropriation oppose des intérêts industriels de profit à court terme à des

intérêts publics de préservation à long terme. On parle d’environnement et de patrimoine naturel mais on peut aussi parler d’environnement et de patrimoine culturel et informationnel37. La ressource numérique sera donc une œuvre, une information, une métadonnée et devra être préservée afin d’être accessible, mise à disposition et utilisée.

Le droit des Affaires, Collection IRPI Série Propriété Intellectuelle, Institut de Recherche en Propriété Intellectuelle Henri-Desbois, 2004, 442 p. Voir les commentaires du même auteur de la jurisprudence Utrillo. Un reportage télévisé sur une exposition de peintures a reproduit intégralement certaines œuvres. La chaîne de télévision n’a pas pu se prévaloir de l’exception de courte citation ni de l’article 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme sur la liberté d’expression : Geiger Christophe, « Anmerkungen zum Urteil des TGI Paris v. 23.2.1999 - "Utrillo" », Gewerblicher Rechtsschutz und Urheberrecht, Internationaler Teil (GRUR Int.) 2001, p. 252-255 ; « Anmerkungen zum Urteil der Cour d'Appel de Paris v. 30.05.2001-"Utrillo" », GRUR Int. 2002, p. 329-333 ; « Anmerkung zu dem Urteil der Cour de Cassation vom 13. November 2003 », International

Review of Intellectual Property and Competition Law (IIC), 2004, Band 35, n°6, p. 716-726.

35 Voir partie 2, titre 1, chapitre 2, section 2, §3, 2) à propos d’un droit à la préservation des ressources

numériques subjectivées.

36 Aigrain Philippe, Cause commune : l'information entre bien commun et propriété, Fayard, coll. Transversales,

2005. http://www.causecommune.org/

37 Sur la notion d’environnementalisme culturel, voir Boyle James, « The Second Enclosure Movement and the

Construction of the Public Domain », Duke Law and Contemporary Problems, Vol. 66, pp. 33-74, 2003.

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24

Les réseaux

Terme polysémique38, les réseaux39, désignent ici des systèmes techniques, des infrastructures de communication interconnectées qui transportent des signaux : téléphone, radiodiffusion, télédiffusion, câble, télématique, cellulaire ou mobile… Nous entendons par réseaux les liens entre ordinateurs et autres dispositifs mobiles ou non, en premier lieu l’Internet40. Les réseaux

pourront aussi être entendus dans leur sens social, les communautés d’auteurs ou d’utilisateurs à l’existence réelle ou virtuelle. Internet n’est pas seulement un protocole de communication, un « système technologique complexe »41, c’est aussi un lieu d’échange virtuel, le cyberespace, une « interface »42 entre machines et utilisateurs.

Les réseaux actuels constituent une révolution plutôt qu’une évolution comme l’ont été d’autres techniques de reproductibilité depuis l’imprimerie, et pour trois raisons : l’interactivité, l’individualisation et la conjonction de l’absence de support (la dématérialisation) et de territoire (la déterritorialisation). Contrairement aux médias de masse précédents (radio, télévision), l’Internet et bientôt les dispositifs et réseaux mobiles permettent une communication multipoints, de tous vers tous, et non plus de quelques uns vers tous. De plus, on passe d’une logique de flux avec le même programme pour tous, ou du tout moins pour le public de la chaîne, à une logique de stock et d’accès43 dans laquelle chacun peut constituer son programme. Enfin, même si la décentralisation ainsi que la réduction des contraintes matérielles, temporelles et géographiques ne constitue pas une nouveauté, les réseaux remettent en question certains des éléments fondamentaux de la pensée du droit, de

38 De rêts (filet), net en anglais.

39 Le réseau est un « ensemble de liens ou de relations entre des éléments d’une organisation, qu’elle soit sociale,

linguistique, technologique ou neurologique », in Lamizet Bernard, Silem Ahmed, op. cit., p. 481. Cette définition rassemble les réseaux tels que nous les définissons dans ce travail, ainsi que les réseaux de transport, de villes, d’entreprises, de personnes, de vaisseaux sanguins…

40 Sur les différents réseaux et technologies permettant d’accéder à l’internet, voir par exemple Balle Francis,

Médias et sociétés, Montchestien, 12ème éd., 2005, p. 170 et s.

41 de Rosnay Joël, « La société de l’information », in Parrochia Daniel (dir.), Penser les réseaux, Champ Vallon,

collection milieux, 2001, p. 35.

42 Au sens de François Dagognet, voir Chazal Gérard, « Internet : interface baroque », ibidem, p. 54-66. 43 Rifkin Jeremy, L’âge de l’accès. La vérité sur la nouvelles économie, La Découverte Pocket, 2000, 494 p.

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25 l’économie, de la société : l’espace44 et la valeur, qui peut naître ailleurs que dans l’appropriation privative ou l’échange monétaire.

La régulation

Lawrence Lessig a élaboré un modèle de la régulation45 qui opère sur tout élément à partir de

quatre contraintes exercées de manière collaborative ou compétitive :

- la loi, qui peut agir directement ou indirectement en modifiant la structure de l’une des trois contraintes suivantes,

- le marché, les prix,

- les normes sociales imposées par la communauté,

- l’architecture, définie comme la conception, le design, qu’il soit technique, physique, biologique, urbain.

Les différents types de normes constituent les outils de pilotage d’un phénomène plus large : la régulation46 qui associe une pluralité de moyens juridiques ou non pour orienter une politique sectorielle. « La problématique de la régulation débouche ainsi sur une vision instrumentale du droit, faisant passer au second plan l’idée de commandement qui était au cœur de la conception moderne. Plus fondamentalement, la question de la pertinence du droit en tant que dispositif de régulation se trouve posée par certaines évolutions scientifiques et techniques. Les difficultés de régulation d’Internet sont à cet égard exemplaires : elles témoigneraient, non seulement de l’incapacité de l’Etat à saisir un objet dématérialisé n’ayant pas de contact avec un territoire, mais aussi de l’inadéquation des frontières entre les

44 Le droit dépend fortement de la notion de territoire, de frontière pour son application. La souveraineté des

Etats est territoriale. Une décision de justice s’applique difficilement à l’extérieur des frontières. Un émetteur d’information sur Internet condamné peut délocaliser sa société, son hébergement et reprendre ses activité dans un autre pays à la législation moins contraignante. Voir notamment Serres Michel, Hominescence, éd. Le Pommier, 2001, p. 227 et s. à propos de l’adressage et Mancini Anne, La sagesse de l’ancienne Egypte pour

l’Internet, l’Harmattan, 2002, 238 p.

45 Lessig Lawrence, Code and other laws of the cyberspace, Basic Books, New York, 1999, p. 88 et s.

46 Miaille Michel (dir.), La régulation entre droit et politique, L’Harmattan, Coll. Logiques Juridiques, Paris,

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26 catégories juridiques classiques (et notamment des notions de « public » et de « privé », de « bien» et de « personne »47) »48 vers une nécessaire reconceptualisation de ces catégories.

La régulation juridique

La régulation juridique rassemble les dispositions mises en place par la loi (conventions internationales, directives européennes, lois, règlements, décrets…), la justice (décisions de diverses juridictions). Elle comprend aussi des mesures appartenant aux nouveaux instruments de la gouvernance basés sur un droit mou (soft law) par opposition au droit dur de la loi et de la justice (autorégulation, codes de conduite, étiquette, recommandations…). L’expérimentation de ces nouveaux mécanismes fait prévaloir les exigences pragmatiques de l’efficacité et de la légitimité procédurale au sens d’Habermas sur celles de légalisme et de validité formelle. Cette régulation juridique recourt à des normes qui peuvent être formulées en termes de principes, de standards49 à interpréter et ne s’appliquent pas nécessairement de manière contraignante comme la loi (les normes techniques50).

La régulation juridique est-elle dépassée ? Doit-elle être adaptée aux nouvelles possibilités et contraintes de l'architecture des réseaux et comment ? La technique laisse-elle émerger de nouvelles formes de régulation, signe d'une transformation de la norme vers plus de flexibilité, d'autorégulation, de privatisation, de contractualisation, de souplesse et d'autonomie individuelle dans la création, l'application et l'effectivité du droit ? Quels sont les besoins et conséquences en matière de subsidiarité51 et de transparence52 si la régulation

47 Frison-Roche Marie-Anne, « Les bouleversements du droit par Internet », in Chevalier Jean-Marie, Ekeland

Ivar, Frison-Roche Marie-Anne et Kalika Michel, Internet et nos fondamentaux, PUF, Paris, 2000, p. 37.

48 Chevallier Jacques, L’Etat post-moderne, LGDJ, Droit et Société vol. 35, Paris, 2003, p. 129 s’appuyant sur

les travaux de Michel Miaille et citant Marie-Anne Frison-Roche, ibidem.

49 Sur la notion de standards du droit, voir supra partie II, titre II, chapitre 2, section 1. 50 Sur la norme technique, voir supra partie I, titre I, chapitre 2.

51 La subsidiarité est un principe de répartition des compétences ou de gouvernance qui consiste à choisir le

niveau adéquat de la régulation au plus près du problème à régler. D’après l’article 5, al. 2 et 3 du traité CE, « la Communauté n’intervient (…) que si et dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les Etats membres et peuvent donc en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire ». Johnson et Post l’envisagent sous l’angle de la conception d’un système complexe et prônent une architecture décentralisée. Johnson David. R., Post David G., « The New ‘Civic Virtue’ of the Internet: A Complex Systems Model for the Governance of Cyberspace »,

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27 juridique cède le pas à la régulation scientifique et technique, norme « a-juridique (…) ne prenant, à travers des règlements, des protocoles, etc., la forme du droit que pour mieux prendre la place de celui-ci. » 53 ? Si la norme technique remplace la norme juridique, la règle de droit est-elle appliquée de manière plus effective, a priori, sans possibilité d'enfreindre la loi ?

Faut-il plus de régulation ou moins de régulation publique et plus d'autorégulation par les acteurs privés54 ? Comment et par quels acteurs doit-elle s'exercer et avec quel degré de coordination, de centralisation doivent être élaborées et appliquées les politiques publiques ? Quelle « policy-making » pour le cyberespace ? Les choix politiques doivent-ils être effectués collectivement sur un forum en ligne ou par l’intermédiaire des représentants élus démocratiquement ? La démocratie représentative devient-elle participative avec la

Stanford Technology Law Review, Featured Working Paper, October 1997. La régulation juridique d’Internet

peut s’effectuer selon le principe des couches de celui-ci, « layers » et respecter l’architecture technique en minimisant la distance entre la couche où l’infraction se produit et la couche à laquelle s’adresse la régulation. La transparence est assurée par le principe « end-to-end », cité pour la première fois dans Saltzer Jerome H., Reed David P., and Clark David D., « End-to-end arguments in system design », ACM Transactions on

Computer Systems 2, 4, November 1984, p. 277-288.

http://www.reed.com/Papers/EndtoEnd.html

Une conception similaire des couches de l’Internet est donnée dans Lessig Lawrence, The Future of Ideas: the

Fate of the Commons in a Connected World, Random House, 2001, p. 5-23 et dans l’article de Solum Lawrence

B., Chung Minn, « The Layers Principle: Internet Architecture and the Law », University San Diego Public Law

Research Paper n°55, 115 p. Les couches énumérées dans ces articles sont les suivantes (notre traduction) :

• La couche contenus : les symboles et images communiqués

• La couche applications : les programmes utilisés par l’Internet : HTTP, FTP, SMTP, DNS… • La couche transport qui fragmente les données numériques en paquets : TCP…

• La couche protocole qui gère le flux de données sur les réseaux : IP (Internet Protocol), LAN (Local Area

Network)…

• La couche lien : l’interface entre l’ordinateur de l’utilisateur et la couche physique

• La couche physique : les câbles, satellites, lignes, modem, fibres optiques… qui relaient le signal vers les machines.

52 Au sens de Rawls John, Théorie de la Justice. La condition de publicité (par opposition au secret) permet aux

parties d'évaluer une mesure et de la corriger peut être transposée pour le code juridique par la condition de code source ouvert, par opposition au code fermé qui concentre le contrôle. Voir aussi Lessig Lawrence, « The Limits in Open Code: Regulatory Standards and the Future of the Net », 14 Berkeley Technology Law Journal 779, 1999 et http://plato.stanford.edu/entries/publicity/.

53 Frison-Roche Marie-Anne, « Le contrat et la responsabilité : consentements, pouvoirs et régulation

économique », RTD Civ.,1998, Chroniques p. 43.

54 David G. Post remet en question le présupposé de l'ouvrage Code and Other Laws of Cyberspace de Lawrence

Lessig. L'action de la main invisible pour réguler le cyberespace ne conduira pas nécessairement à un

cyberespace dont les valeurs ne seraient pas souhaitables (p. 1442) et il n'est pas certain que plus de politique ou d'action gouvernementale soit souhaitable pour dessiner les plans du cyberespace qui seraient conformes au bien commun (p. 1458-9) in Post David G. « What Larry Doesn't Get: Code, Law, and Liberty in Cyberspace »,

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28 consultation des utilisateurs dans la mise à jour des contrats standard de mise à disposition ouverte ?

Entre régulation économique de problèmes techniques et démocratie politique, « la question principale n'est pas de trouver des solutions satisfaisantes à des problèmes techniques compliqués (aussi important cela soit-il), mais aussi de parvenir à des décisions sur une base participative, en donnant aux citoyens l'opportunité de faire connaître et de défendre leurs préoccupations (… et de) garantir que les personnes concernées jouissent de la liberté effective de se joindre au processus de décision, plutôt que de simplement s'entendre dire l'avis des experts »55

La régulation technique

La régulation des conditions d’accès et d’utilisation des œuvres de l’esprit et des informations ne s’effectue pas uniquement par le droit sous le contrôle de l’État. De nouvelles formes de régulation technique principalement d’origine privée (qualifiée de private ordering56 par la doctrine américaine) sont mises en place sur certains supports et formats de fichiers. Il s’agit des mesures techniques de protection et des mesures techniques d’information sur les droits développées par des experts issus de l’industrie des télécommunications, du matériel électronique, des logiciels et de la culture et dans une moindre proportion d’universités et de centres de recherche en informatique et traitement du signal audiovisuel.

Cette régulation par la technique est qualifiée de régulation par le code57 informatique (l’architecture et les règles implémentées par des lignes de code dans les ordinateurs et les

55 Sen Amartya, L'économie est une science morale, La Découverte Poche, Essais, 2003, p. 116-117.

56 Sur la notion de private ordering vs public ordering, voir Elkin-Koren Niva, « A Public-Regarding Approach

to Contracting over Copyrights », in Dreyfuss, Zimmermann, First (eds), Expanding the Boundaries of

Intellectual Property, Oxford University Press, 2001, p. 192-193.

57 Joël Reidenberg et Lawrence Lessig ont théorisé la montée en puissance de la technologie (code informatique)

qui complète et remplace le droit (code juridique) vers des normes augmentant le niveau de contrôle dans les domaines du copyright, de la vie privée et de la liberté d’expression. Reidenberg Joël, «Lex Informatica: The Formulation of Information Policy Rules Through Technology», Texas Law Review, 1998, vol. 76, p. 553-584 ; Lessig Lawrence, Code and other laws of cyberspace, New York, Basic Books, 1999.

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29 logiciels), par opposition à la régulation par le code juridique (les textes de loi et les contrats qui respectent ces textes de loi). Lawrence Lessig a popularisé cette distinction par l’expression « code as law », « le code informatique fait loi ». On peut aussi parler de « micro-régulation » car la régulation s’exerce au niveau local du support, du fichier ou de la machine de l’utilisateur. Ces nouvelles formes de régulation par la technique sont à leur tour protégées par la loi depuis les années 1990. Cet enchaînement a été largement commenté par la doctrine qui y voit un millefeuille58 ou une valse à trois temps59 et s’interroge sur la pertinence de cumuler protection juridique, protection technique, et protection juridique des protections techniques.

D’après Giovanni Sartor60, le fonctionnement des programmes informatiques est soumis à des règles virtuelles (comparables à la lex electronica de Joël Reidenberg et au code de Lawrence Lessig) qui prévoient quelles actions seront possibles ou difficiles à accomplir, quelle information sera donnée à l’utilisateur sur les actions possibles. Des agents intelligents sont utilisés par exemple pour imposer un certain lecteur, ou bloquer le téléchargement, action qui a été rendue possible par l’architecture de l’Internet et nuit à la transposition des modèles économiques de l’industrie culturelle en l’état : ce qui est juridiquement possible est remplacé par ce qui est virtuellement possible. Et l’action du droit peut être déplacée vers ceux qui essaient de bloquer ou contourner ces règles virtuelles (les sanctions pour le contournement de mesures techniques de protection peuvent être plus importantes que celles pour téléchargement non autorisé).

Les mesures techniques de protection sont des technologies qui empêchent ou limitent l’utilisation des œuvres conformément à la volonté des titulaires de droits, tandis que les mesures techniques d’information permettent d’identifier et de signaler les conditions d’utilisations exprimées par les titulaires de droits. Les deux types de mesures techniques

58 D’après l’expression consacrée par Pierre Sirinelli.

59 Benabou Valérie-Laure, « La directive droit d’auteur, droits voisins et société de l’information : valse à trois

temps avec l’acquis communautaire », Communication – Commerce Electronique, éd. Jurisclasseur, oct. 2001, p. 8-11.

60 Sartor Giovanni, « Virtual Rules and Internet Law », in dir. Ed. Taeger J. and Wiebe A., Informatik–

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30 bénéficient d’une protection juridique contre le contournement de leurs effets ou leur suppression.

Les mesures techniques de protection et les mesures techniques d’information

Les mesures techniques de protection sont définies en droit français, transposition de la directive européenne de 2001 (DADVSI) et des conventions internationales de l’OMPI de 1996, par la loi du 1 août 2006 intégrée dans l’article L 331-5 du Code de la Propriété Intellectuelle :

« Les mesures techniques efficaces destinées à empêcher ou à limiter les utilisations non autorisées par les titulaires d'un droit d'auteur ou d'un droit voisin du droit d'auteur d'une oeuvre, autre qu'un logiciel, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme sont (définies comme) toute technologie, dispositif, composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, accomplit la fonction prévue par cet alinéa. Ces mesures techniques sont réputées efficaces lorsqu'une utilisation visée au même alinéa est contrôlée par les titulaires de droits grâce à l'application d'un code d'accès, d'un procédé de protection tel que le cryptage, le brouillage ou toute autre transformation de l'objet de la protection ou d'un mécanisme de contrôle de la copie qui atteint cet objectif de protection.

Un protocole, un format, une méthode de cryptage, de brouillage ou de transformation ne constitue pas en tant que tel une mesure technique au sens du présent article. » Les mesures techniques d’information sont d’après l’article L 331-22 :

« Les informations sous forme électronique concernant le régime des droits afférents à une oeuvre, autre qu'un logiciel, une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme ou un programme, sont protégées dans les conditions prévues au présent titre, lorsque l'un des éléments d'information, numéros ou codes est joint à la reproduction ou apparaît en relation avec la communication au public de l'oeuvre, de l'interprétation, du phonogramme, du vidéogramme ou du programme qu'il concerne. On entend par information sous forme électronique toute information fournie par un titulaire de droits qui permet d'identifier une oeuvre, une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme, un programme ou un titulaire de droit, toute information sur les conditions et modalités d'utilisation d'une oeuvre, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme, ainsi que tout numéro ou code représentant tout ou partie de ces informations. »

http://www.cirsfid.unibo.it/~sartor/GSCirsfidOnlineMaterials/GSOnLinePublications/GSPUBgsartor2003Kilian. pdf

(32)

31 Les mesures techniques de protection et d’information bénéficient d’une régulation juridique61 qui se limite, à quelques dispositions près, à l’interdiction de leur contournement ou de leur suppression, sans régulation juridique directe de leurs effets. Il est légitime de s’interroger sur la nature et la valeur de ces techniques qui encapsulent, expriment et mettent en œuvre des règles de droit ( ces règles sont-elles issues de la loi ou de nature contractuelle ?) ainsi que sur leur relation avec les régulations juridiques en place sur le droit d’auteur, les mesures techniques et les données personnelles : la législation et la jurisprudence, mais aussi les usages, des transactions précontentieuses à l’autorégulation des acteurs.

Ces mesures techniques surnommées « DRM » (abréviation de Digital Rights Management, gestion numérique des droits) automatisent-elles la gestion des droits de propriété littéraire et artistique ou du copyright, celle des usages privés non régulés par ces dispositions, ou encore celle des transactions commerciales ? Pourquoi leur régulation juridique s’inscrit-elle dans le droit de la propriété littéraire et artistique et les lois sur le droit d’auteur et le copyright alors qu’elles peuvent a priori s’appliquer aussi à d’autres types d’informations comme les données personnelles ou confidentielles qui ne bénéficient pas des mêmes exceptions aux droits exclusifs que le droit d’auteur ?

Selon quelles procédures sont-elles élaborées et sous quel contrôle62 ? Constituent-elles des compléments ou des alternatives à la régulation juridique par le droit, qu’il soit rigide ou souple ? Constituent-elles un dispositif de l’autorégulation ? Sont-elles assimilables à des contrats électroniques, à des offres de contrats d’adhésion, à des licences ? Les effets du contrat sont mis en oeuvre par les mesures techniques de protection qui auto-exécutent a

priori les règles dont elles contiennent l’expression. Cette caractéristique leur confère-elle une

nature spécifique ? Les mesures techniques de protection ont-elles l’obligation légale, la possibilité technique et le devoir vis-à-vis des utilisateurs de respecter les droits et libertés fondamentales du public (exceptions aux droits exclusifs, droit à l’information, vie privée et

61 Pour une présentation juridique générale, voir Latreille Antoine, Maillard Thierry, « Mesures techniques de

protection et d’information », Jurisclasseur Propriété Littéraire et Artistique, fasc. 1660, février 2005, 30 p.

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32 anonymat des utilisations…) ? Quant aux mesures techniques d’information utilisées seules, c’est-à-dire sans l’association d’une mesure technique de protection automatisant la mise en œuvre de la règle exprimée, ont-elles un pouvoir effectif de régulation, une force exécutrice supérieurs à la simple prescription comparable aux panneaux de circulation du code de la route en l’absence de contrôle de police ou de radar en état de marche ? Le développement et la généralisation de l’usage des mesures techniques commandées par des expressions des droits contribue-t-il à influencer le droit, voire à le modifier ? Réciproquement, les usages peuvent-ils influencer la nature et la définition des règles contenues dans ces dispositifs techniques et leur architecture ?

Un vocabulaire commun : les métadonnées juridiques

L’automatisation de la gestion des droits requiert la définition d’un vocabulaire standardisé pour décrire les conditions d’accès et d’utilisation des contenus numériques63. Il s’agit de « l’expression des droits ». Ces « expressions sur les droits » sont assimilables à des « métadonnées », les informations documentaires décrire et indexer les œuvres : auteur, éditeur, titre, genre, date de diffusion…

Les métadonnées juridiques ou éléments juridiques des systèmes de gestion numérique des « droits » (« droits » est entendu comme conditions juridiques et contractuelles d’accès et d’utilisation des ressources) sont regroupées dans :

- des langages d’expression des droits (les Rights Expression Languages ou RELs fournissent la syntaxe, la grammaire pour créer des phrases qui vont exprimer des « droits ») et

- de dictionnaires des droits (les Rights Data Dictionaries ou RDD fournissent la sémantique, le vocabulaire pour exprimer le contenu de ces « droits »).

63 Cette tâche n’est pas spécifique au numérique, ni même au droit, mais à la documentation. Sur la

méthodologie de description et d’indexation d’un ensemble documentaire juridique, ainsi que sur « les principes de constitution d’un vocabulaire commun » en vue de la constitution et de l’exploitation, voir Bertrand Edmond, Catala Pierre, Mehl Lucien, Constitution et exploitation informatique d’un ensemble documentaire en droit, Rapport de synthèse de l’action thématique programmée « Informatique juridique appliquée au droit de l’urbanisme et de la construction », CNRS, 1974, sp. p. 59 et s.

Figure

Figure 2 : Typologie des mesures techniques de protection

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