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L'effet du travail hors-ferme sur l'efficacité technique des fermes laitières : un modèle intégrant les biais de sélection sur les observables et inobservables

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Academic year: 2021

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L’effet du travail hors-ferme sur l’efficacité technique des fermes laitières

un modèle intégrant les biais de sélection sur les observables et

inobservables

Mémoire

Rosemarie Bégin

Maîtrise en économie rurale

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

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Résumé

L’adoption du travail hors ferme est une réalité pour les producteurs agricoles. Certains indicateurs laissent présager une augmentation de son recours chez les producteurs laitiers québécois. Ce mémoire s’intéresse à l’effet du travail hors ferme sur l’efficacité technique d’un échantillon de fermes laitières québécoises.

Les résultats sont basés sur un modèle stochastique de fonction de coûts. La particularité du modèle réside dans les corrections pour biais dus aux variables observables et inobservables. On pose l’hypothèse que les producteurs travaillant à l’extérieur et ceux ne travaillant qu'à la ferme sont différents. Les caractéristiques propres à chaque groupe influencent également l’efficacité.

Les résultats ont démontré que les producteurs travaillant hors ferme sont moins efficaces que leur contrepartie. On remarque que l’utilisation des corrections a une influence significative sur l’interprétation des résultats. Ce mémoire amène une contribution significative au niveau méthodologique dans le cadre des études d’impact utilisant des données d’observation.

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Table des matières

RESUME ... III LISTE DES TABLEAUX ... VII REMERCIEMENT ... IX

1. INTRODUCTION ET PROBLEMATIQUE ... 1

1.1MISE EN CONTEXTE ... 1

1.1.1 L’importance du travail hors ferme dans le contexte agricole ... 1

1.1.2 Le travail hors ferme chez les producteurs laitiers ... 5

1.1.3 Le problème des études non expérimentales... 6

1.2OBJECTIFS DE LA RECHERCHE ... 7

1.3ORGANISATION DU MEMOIRE ... 8

2. REVUE DE LITTÉRATURE ... 9

2.1 LE CONCEPT D’EFFICACITE TECHNIQUE ... 9

2.1.1 Les mesures d’efficacité technique ... 11

a) Les approches non paramétriques ... 11

b) Les approches paramétriques ... 12

2.1.3. L’efficacité technique et le travail hors ferme ... 14

2.2L’EFFET DE TRAITEMENT ET LES BIAIS DE SELECTION ... 16

2.2.1 La sélection sur les variables observables ... 17

2.3LA SELECTION SUR LES VARIABLES INOBSERVABLES ... 20

2.3.1 Le modèle de Heckman ... 20

2.3.2 L’estimation par variables instrumentales ... 22

2.3.2 L’estimation des biais dans les modèles non linéaires ... 23

2.4L’INTEGRATION DES BIAIS DE SELECTION SUR LES OBSERVABLES ET LES INOBSERVABLES ... 25

2.5SYNTHESE ET HYPOTHESE DE RECHERCHE... 25

3. MÉTHODOLOGIE ET BASE DE DONNÉES ... 27

3.1LA MODELISATION ... 27

3.1.1 La frontière stochastique de production ... 27

3.1.2 La correction pour les biais attribués aux variables non observables... 28

3.1.3 La correction pour les biais attribués aux variables observables ... 29

3.1.4 Modèle empirique et stratégie d’estimation ... 29

3.1.5 Considération pour l’appariement des données par score de propension ... 32

3.1.6 Les étapes de la modélisation ... 34

3.2LES DONNEES ... 35

3.2.1 Les données de la fonction de coût ... 35

4. PRÉSENTATION ET INTERPRÉTATION ... 39

DES RÉSULTATS EMPIRIQUES ... 39

4.1RESULTATS DES MODELES FRONTIERE ... 39

4.1.1 Aucun biais n’est pris en considération et le travail hors ferme est utilisé comme un paramètre de production. ... 39

4.1.2 Division des groupes et estimation de deux modèles frontière classiques... 42

4.1.3 Facteurs déterminants l’adoption du travail hors ferme ... 46

4.1.4 Correction pour les biais de sélection ... 50

a) Correction pour les variables inobservables ... 50

b) Correction pour les biais observables ... 52

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4.1.5 Synthèse des résultats ... 59

5. CONCLUSION ... 65 BIBLIOGRAPHIE ... 69

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Liste des tableaux

Tableau 1: Revenu familial moyen selon la source et la tranche de revenu total de la famille au Canada, en 2008 ... 3

Tableau 2 : Description des données utilisées dans l’estimation de la frontière de coût ... 36

Tableau 3 : Définition des variables de la fonction de coût ... 36

Tableau 4 : Définition des variables expliquant l’adoption du travail hors ferme ... 37

Tableau 5: Résultats de l’estimation du modèle frontière classique lorsque ... 40

Tableau 6 : Statistiques sur les scores d’efficience obtenus par la frontière classique ... 41

Tableau 7 : Résultats de l’estimation des modèles frontière sans correction ... 44

Tableau 8 : Statistiques sur les scores d’efficience obtenus par la frontière classique pour les ... 45

Tableau 9 : Distribution du score d’efficience pour le groupe travaillant hors ferme ... 46

Tableau 10 : Facteurs influençant le choix de travailler hors ferme ... 47

Tableau 11 : Résultats de l’estimation des modèles frontière avec corrections ... 51

Tableau 12 : Statistiques sur les scores d’efficience obtenus par la frontière intégrant les corrections ... 52

Tableau 13 : Repartions à l’intérieur des groupes ... 53

Tableau 14 : Résultats de l’estimation du modèle frontière classique lorsque ... 54

Tableau 15 : Statistiques sur les scores d’efficience obtenus par les frontières classiques : ensemble de la base de données et données appariées ... 55

Tableau 16 : Résultats des modèles frontières ... 56

Tableau 17 : Statistiques sur les scores d’efficience avec correction pour les biais sur variables observables... 57

Tableau 18 : Résultats de l’estimation des modèles frontière avec corrections ... 58

Tableau 19: Statistiques sur les scores d’efficience obtenus par les frontières classiques : ensemble de la base de données et données appariées ... 59

Tableau 20 : Synthèse des résultats pour l’ensemble de la base de données ... 60

Tableau 21 : Synthèse des résultats pour les données appariées ... 61

Tableau 22 : Sommaire des scores d’efficience ... 63

Liste des figures

Figure 1 : Distribution du revenu hors ferme moyen selon la source et bénéfice net d’exploitation en 2008 ... 4

Figure 2 : Représentation de l’efficacité technique et allocative ... 10

Figure 3 : Distribution des scores d’efficience obtenues par la frontière classique ... 42

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Remerciement

En préambule à ce mémoire, je désire adresser mes plus sincères remerciements à mon directeur, Lota Dabio Tamini, pour l’orientation, la confiance, la patience qu’il m’a offertes et qui ont constitué un apport considérable sans lequel ce travail n’aurait pas pu être mené au bon port. J’ai également eu la chance de bénéficier des judicieux conseils de mon codirecteur de mémoire Maurice Doyon. La latitude et la confiance dont m’ont fait part Lota et Maurice, ainsi que leur grande ouverture face à mes idées de recherche ont été très appréciés de ma part et qui m’ont permis d’affiner mes aptitudes pour la recherche. Je dois également souligner la contribution du centre de recherche en économie de l’environnement, de l’agroalimentaire, des transports et de l’énergie pour le soutien technique qui m’a été offert tout au long de ma maîtrise. Je tiens également à souligner la contribution importante à mon cheminement de l’ensemble des professeurs, personnels administratifs, collègues et amis qui m’ont appuyée de près ou de loin lors des dernières années d’études

Un tel travail n’aurait pas été possible dans le soutien financier dont j’ai eu la chance de bénéficier. À cet effet, mon projet de recherche a été rendu possible grâce au soutien financier du Fonds de bourse de la Commission canadienne du lait (CCL). Cette contribution permet définitivement à de jeunes étudiants de poursuivre leur cheminement aux études supérieures et d’ainsi contribuer au développement de l’industrie laitière canadienne.

Finalement, je tiens également à remercier ma famille et mes ami(e)s proches qui ont su m’encourager tout au long du processus. La recherche est un domaine où l’on se remet perpétuellement en question et cet appui est essentiel au maintien d’un équilibre.

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L’EFFET DU TRAVAIL HORS-FERME SUR L’EFFICACITÉ

TECHNIQUE DES FERMES LAITIÈRES

UN MODÈLE INTÉGRANT LES BIAIS DE SÉLECTION SUR LES

OBSERVABLES ET INOBSERVABLES

1. Introduction et problématique

1.1 Mise en contexte

Ce chapitre introductif permet tout d’abord de positionner le sujet de cette recherche en mettant en évidence la pertinence d’étudier l’effet du travail hors ferme sur l’efficience technique des fermes laitières. Le secteur laitier est le plus important secteur agricole du Québec générant près de 32 % des recettes agricoles (statistique Canada, 2008). Cependant, le contexte économique de libéralisation des marchés pourrait exercer de fortes pressions sur le système de gestion de l’offre en vigueur dans le secteur laitier. De plus, les conditions de marché actuelles font en sorte que les producteurs laitiers canadiens risquent de ne voir que de modestes hausses de revenus puisque la consommation de lait par habitant tend à se maintenir depuis quelques années (CCL, 2013). La combinaison de ces éléments justifie l’importance de la recherche dans ce secteur ainsi qu’un approfondissement de l’étude du travail hors ferme. En effet, un changement dans la structure de la mise en marché ainsi que le désir de toucher un revenu plus élevé ne sera pas sans conséquence sur l’adoption de l’agriculture à temps partiel. Dans les faits, l’augmentation du nombre d’agriculteurs bénéficiant d’un revenu extérieur dans les pays développés a suscité la curiosité des chercheurs qui ont tenté de bien comprendre le concept de la pluriactivité des ménages (Poon et Weersink. 2011, Beaudoin 2010, Lien et al 2010, Fernandez-Cornejo, J. 2007). Néanmoins, très peu ont étudié son effet sur l’efficacité des exploitations au Québec. Dans les sections suivantes nous revenons tout d’abord sur l’importance du travail hors ferme dans le secteur agricole et plus particulièrement dans le secteur laitier. Ensuite, nous explorons les différents problèmes liés aux études expérimentales. Et, enfin, nous définissons les objectifs de ce projet de recherche.

1.1.1 L’importance du travail hors ferme dans le contexte agricole

L’agriculture est un secteur économique qui se distingue des autres secteurs à bien des égards. Il est caractérisé par une forte instabilité dans la production et une incertitude des prix causées par la variabilité dans le prix des denrées alimentaires. Cette dernière s’explique, entre autres, par les variations de la demande et de l’offre à l’échelle internationale qui découlent de l’instabilité climatique et des politiques agricoles (Schmitz et al 2010). Cependant, ces facteur auraient une portées limitées si l’offre à court terme et la demande n’étaient pas inélastiques, Des chocs sur

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l’offre affectent davantage les prix d’équilibre lorsque la demande est inélastique1. Historiquement, la disparité des

revenus entre les producteurs agricoles et les non-producteurs a justifié l’intervention de l’état en agriculture. Aujourd’hui le problème agricole relève davantage de l’instabilité des prix et des questions environnementales (Schmitz et al 2010). Depuis les 50 dernières années, la structure agricole dans les pays développés a passablement changé. Une des démonstrations les plus frappantes de ce changement structurel est sans doute l’augmentation des revenus hors fermes reçues par les familles agricoles (Schmitz et al 2010). Au Canada en 2008, le revenu moyen des familles agricoles était de 100 031 $. De ce montant, 78,5 % provenait d’un revenu extérieur à l’exploitation (Statistique Canada 2008). Le revenu hors ferme provient en grande partie d’un salaire reçu à la suite d’un travail à l’extérieur de la ferme qui constitue près de 50 % du revenu total. Le recours à un salaire extérieur est un des facteurs qui a permis de réduire l’écart de revenus entre les familles agricoles et urbaines (Beaudoin 2010). Cette diminution de l’écart entre les différents types de ménages contribue à renforcer l’idée que le nouveau problème agricole ne réside pas dans la récurrence des revenus agricoles chroniquement faibles, mais plutôt dans la fluctuation des revenus. Le tableau 1 détaille les différentes sources de revenus par strate de revenu total de la famille agricole en 2008.

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Tableau 1: Revenu familial moyen selon la source et la tranche de revenu total de la famille au Canada, en 2008

Source : Statistique Canada, 2008

La lecture du tableau 1 révèle que ce sont les familles ayant un faible revenu qui dépendent davantage du revenu hors ferme (tranche de revenu de 10 000 $ à 19 999 $). Dans le cas des petites exploitations, c’est souvent les revenus hors ferme et plus précisément le travail hors ferme qui permet d’obtenir un revenu total positif.

Le Québec présente un cas de figure similaire. En 2008, le revenu moyen des ménages agricoles québécois était de 81 957 $ dont 64 % provenait d’un revenu hors ferme (Statistique Canada, 2008). Comme le démontre la figure 1, la plus grande partie de leur revenu s’expliquait par un salaire d’emploi à l’extérieur de la ferme - soit 42 % de leur revenu total alors que 36 % provient du bénéfice net d’exploitation. De façon générale, les producteurs québécois dépendent moins des revenus extérieurs que leurs contreparties des autres provinces canadiennes. Néanmoins, ces statistiques expriment bien l’importance financière du travail hors ferme.

Tranche de revenu total de la famille Nombre de familles agricoles Revenu d'un travail hors ferme (en $) Revenu de placement s (en $) Revenu de pensions (en $) Autres revenus hors ferme (en $) Revenu hors ferme (en $) Bénéfice net d'exploitatio n (en $) Revenu total % revenu hors-ferme dans le revenu total Moins de 10 000$ 5 530 14 097 4 845 5 562 5 405 29 909 -59 432 -29 523 48 10 000$ à 19 999$ 3 510 10 543 1 778 8 739 4 452 25 511 -10 347 15 164 70 20 000$ à 29 999$ 5 610 11 996 2 233 10 616 4 068 28 914 -3 374 25 539 47 30 000$ à 39 999$ 8 270 14 099 3 217 11 781 4 228 33 324 1 995 35 320 40 40 000$ à 49 999$ 9 160 20 413 3 645 11 683 4 927 40 667 4 454 45 122 45 50 000$ à 99 999$ 41 430 38 816 5 006 10 646 5 623 60 092 14 210 74 301 52 100 000 et plus 43 420 96 779 16 070 8 806 7 810 129 465 51 998 181 464 53 Total 116 930 53 845 8 643 9 825 6 162 78 475 21 555 100 031

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Figure 1 : Distribution du revenu hors ferme moyen selon la source et bénéfice net d’exploitation en 2008

Source : Statistique Canada 2008

Pourquoi le travail hors ferme?

Tel que mentionné par Poon et Weersink (2011), le revenu agricole et hors ferme dépendent de l’effort optimal alloué entre la pratique de l’agriculture et le travail hors ferme. L’incertitude et le niveau des prix varient entre les différentes productions et affectent du même coup la propension des producteurs à se lancer dans le travail hors ferme. Les producteurs œuvrant dans des secteurs où le revenu relatif est plus faible seront plus enclins à accepter un emploi en dehors de la ferme puisque leur coût d’opportunité à délaisser l’entreprise est moindre. De plus, le travail hors ferme offre un effet de diversification des revenus qui permet de couvrir les risques liés à la pratique de l’agriculture. Par conséquent, il est plus probable que les exploitants de productions caractérisées par une grande volatilité dans les prix adoptent davantage le travail hors ferme. D’autres raisons sont évoquées pour le choix de la pluriactivité : la possibilité de toucher un revenu plus élevé, la nécessité de rembourser les emprunts inhérents à l’établissement des jeunes agriculteurs ou la possibilité d’accéder plus rapidement au titre de propriétaire (Info-transfert 2006). De plus, les avancements dans les technologies et les communications ont favorisé l’essor d’une agriculture pluriactive en rendant les tâches agricoles plus automatisées libérant ainsi le facteur travail (Lien et al 2010). 42% 5% 8% 7% 2% 36% Revenu d'emploi Revenu de placement Revenu de pension Transfert du gouvernement Autres revenus hors ferme Bénéfice net d'exploitation

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5 Certaines études ont démontré le caractère bénéfique de ce mode de production. Par exemple, Beaudoin (2010) a établi que la possibilité de toucher un revenu supplémentaire en période d’établissement a un impact positif sur les dépenses du ménage ainsi que sur le financement de l’entreprise. En ce sens, le revenu d’emploi constitue une véritable stratégie pour les jeunes entreprises agricoles. Néanmoins, certains effets néfastes peuvent être associés au travail hors ferme et avoir des implications sur la productivité et l’efficience des entreprises par exemple, le temps consacré à travailler à l’extérieur aurait des répercussions sur le temps consacré aux activités de gestion de la ferme (Info-transfert 2006).

1.1.2 Le travail hors ferme chez les producteurs laitiers

Le secteur laitier est en quelque sorte un cas à part dans le dossier du travail hors ferme. D’après le recensement d’agriculture Canada, les exploitants de ferme laitière étaient considérablement moins susceptibles de déclarer du travail hors ferme, comparativement à ceux de toutes autres exploitations agricoles (Statistiques Canada, 2008). Au Québec en 2008, 35 % des revenus étaient attribuables au travail hors ferme et 65 % au bénéfice net d’exploitation (Statistique Canada, 2008). Selon une étude menée par le George Morris Center ce résultat s’explique par le fait (1) que cette production nécessite une présence soutenue laissant ainsi peu de temps aux occupations hors fermes et (2) que la protection offerte par la gestion de l’offre assure une stabilité au revenu. De plus, le niveau des revenus supérieurs n’est pas un incitatif pour les exploitants à recourir au travail hors-ferme. Entre 2006 et 2010, le bénéfice net d’exploitation d’une ferme laitière était de 107 535$ contre 42 051$ pour l’ensemble des fermes laitières au Canada (Agriculture et agroalimentaire Canada, 2013). Cependant, une réalité intrinsèque au secteur – soit la difficulté d’accès au quota- pourrait favoriser l’adoption du travail hors-ferme.

Les recherches vouées au travail hors ferme dans le secteur laitier ont surtout étudié les déterminants de son adoption, les caractéristiques des travailleurs hors ferme ainsi que le lien entre la variabilité des revenues et l’offre de travail hors ferme (Sumner 1982, Mishra et al 1997, Weersink et al 1998, Fernandez-Cornejo 2007, Lien et al 2010). Ces études amènent quelques constats intéressants sur le travail hors fermes dans le secteur laitier et corroborent les résultats du George Morris Center. Par exemple, l’étude menée par Fernandez-Cornejo (2007) révèle que les producteurs laitiers aux États-Unis sont moins enclins à travailler hors ferme étant donné l’intensité du travail propre au secteur laitier. De plus, les producteurs laitiers qui travaillent hors ferme ont tendance à exiger une compensation plus élevée que ceux des autres

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productions, en d’autres mots, le coût d’opportunité de ces producteurs est plus élevé (Fernandez-Cornejo, 2007).

Dans tous les cas, cette réalité de la pluriactivité des ménages agricoles nécessite un questionnement quant à savoir s’il faut encourager ou non ce genre de pratique, spécialement dans un contexte où l’État tend à se désengager en termes de soutien agricole. Certaines études ont démontré la présence d’une corrélation inverse entre le soutien et l’adoption du travail hors ferme (Poon et Weersink 2011 et Weersink et al 1998). Weersink (1998) stipule que les producteurs laitiers américains dépendent davantage des revenus hors ferme que les producteurs canadiens. L’auteur affirme que ce résultat s’explique par le fait que les Américains ne bénéficient pas des mêmes filets de sécurité sociale que les Canadiens – notamment en matière d’assurance maladie et de sécurité du revenu- ce qui contribue à accroitre la volatilité de leur revenu agricole. Par conséquent, on peut s’attendre à ce qu’un changement dans le mode de mise en marché du lait et un coût élevé d’établissement combiné à une difficulté d’accès aux quotas contribuent à exercer une pression à la hausse sur l’adoption du travail hors ferme chez les producteurs laitiers.

Maintenant que le phénomène de l’adoption du travail hors ferme est bien établi, la question fondamentale de cette recherche est de savoir quel est son effet sur l’efficacité des entreprises. Tel que mentionné précédemment, un plus grand dévouement aux activités extérieures à la ferme implique une diminution du temps consacré aux activités productives et de gestion. Or la recherche d’efficacité est essentielle à la viabilité du secteur laitier. En effet, si les producteurs ne peuvent se fier au marché pour augmenter leurs revenus ou pour maintenir un certain niveau de vie, ils devront compenser par une diminution de leur coût de production ou une meilleure utilisation des intrants. Par conséquent, dans la situation hypothétique où le travail hors ferme prendrait de l’importance dans le secteur de la production laitière, il importe de pouvoir se prononcer à savoir si ce mode de production à un impact sur l’efficacité.

1.1.3 Le problème des études non expérimentales

On retrouve dans la littérature quelques études abordant le sujet de l’effet du travail hors ferme sur l’efficience (Goodwin et Mishra 2004, Kumbhakhar et al. 2009). Cependant, ces études comportent certaines lacunes. Lorsque l’on tente de répondre à une question d’inférence causale du type « Quel est

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l’effet du travail hors ferme sur l’efficience des fermes? », il faut pouvoir évaluer la situation contrefactuelle

c’est-à-dire comment la ferme aurait performé dans le cas où les producteurs n’auraient pas adopté le travail hors ferme (Duflo et al., 2007). La comparaison de ces deux cas de figure permettrait de mesurer réellement l’effet du travail hors ferme sur l’efficience. Or, ces deux situations sont habituellement absentes des bases de données puisqu’elles ne peuvent coexistées. Cette recherche s’inscrit dans la littérature des études d’impacts et nécessite une méthodologie solide afin de réduire les potentiels biais associés aux études non expérimentales2.

Une façon de contourner le problème de l’absence de données contrefactuelles serait de sélectionner un groupe de producteurs consacrant l’entièreté de leur temps à la ferme, mais possédant un ensemble d’autres caractéristiques identiques au groupe travaillant hors ferme. L’attribution d’un score d’appariement des données est une technique statistique permettant de créer des groupes homogènes et qui tiennent compte de plusieurs des caractéristiques des producteurs (Bravo-Ureta et al., 2011). La création de ces groupes permet de comparer les performances techniques des producteurs nettes de l’effet de certaines variables observables qui pourraient influencer à la fois le choix de travailler hors ferme et ces performances techniques.

Un autre problème est à prendre en considération dans ce type d’étude, il s’agit des biais de sélection basés sur les variables inobservables. Ce type de biais survient lorsque les producteurs moins efficaces sont plus enclins que les plus efficaces à travailler à l’extérieur de la ferme. En fait, la décision de travailler hors ferme peut se prendre par le producteur en se basant sur des caractéristiques intangibles, telles que le désir de poursuivre une carrière, l’insatisfaction de la vie rurale ou un fort niveau d’aversion au risque, etc. Dans ce cas, il est possible que certains facteurs influencent à la fois le choix de travailler hors ferme et l’efficacité. Plusieurs études ont utilisé la correction de Heckmann (1979) pour aborder le problème de biais de sélection. Un autre modèle plus récent, proposé par Greene (2010), utilise un estimateur de maximum de vraisemblance simulé qui permet de prendre en compte le problème lié aux biais de sélection tout en étant bien adapté au modèle de frontière stochastique.

1.2 Objectifs de la recherche

L’objectif général de cette recherche est d’analyser l’effet du travail hors ferme sur l’efficacité technique des fermes laitières au Québec. Pour atteindre cet objectif, deux objectifs spécifiques ont été établis :

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 Établir une mesure qui permet de comparer l’efficacité des entreprises qui ont adopté le travail hors ferme et celles qui ne le font pas en tenant compte des biais de sélection;

 Comparer un modèle tenant compte des biais de sélection avec un qui n’en tiendrait pas compte afin de vérifier la présence de ce type de biais ainsi que la pertinence d’un tel modèle; de manière spécifique, l’impact du biais de sélection sur la mesure d’efficience technique sera documenté. Même si ce mémoire propose une étude empirique, son principal intérêt réside dans les aspects méthodologiques en testant si la prise en compte des biais de sélection dans le calcul de l’efficacité permet d’obtenir des résultats plus robustes. Ainsi la méthodologie proposée pourrait être réutilisée pour d’autres études d’impacts. Advenant le cas où l’étude démontre une corrélation négative entre l’adoption du travail hors ferme et la performance des producteurs laitiers, certaines implications politiques devront en être tirées. La recherche d’efficacité est à la source de la compétitivité des exploitations laitières qui pourraient devoir livrer bataille dans un environnement plus ouvert commercialement. Dans ce cas, il faudrait pousser la recherche au niveau des motivations qui poussent les producteurs laitiers à se tourner vers le travail hors ferme et trouver des compromis afin d’assurer la pérennité du secteur. Cependant, les résultats pourraient démontrer qu’au contraire, le travail hors ferme assure la santé financière des ménages agricoles, ce qui amène le débat vers une autre dimension à savoir si la possibilité de toucher un revenu supplémentaire s’avère être un substitut au soutien public en agriculture. En d’autres termes, la stabilisation des revenus agricoles n’est plus directement liée à la stabilisation des revenus des familles (Poon et Weersink, 2011).

1.3 Organisation du mémoire

La suite de ce document sera consacrée dans un premier temps à la présentation des travaux que l’on retrouve dans la littérature portant sur les motivations de l’adoption du travail hors ferme ainsi que sur son effet sur l’efficacité des entreprises. Les concepts théoriques qui sont à la base du modèle empirique seront exposés tels que le concept d’efficacité technique et de biais de sélection. Une revue des différentes méthodes permettant de contourner ce type de biais sera également présentée. Dans un deuxième temps, les aspects relatifs à la méthodologie utilisée pour répondre aux objectifs de ce mémoire seront détaillés en profondeur ainsi qu’une description de la base de données utilisée. Ensuite, le quatrième chapitre sera consacré à la présentation des résultats. Finalement, le cinquième et dernier chapitre conclu ce document en résumant les résultats ainsi que leurs limitations tout en élaborant d’autres avenues de recherche en lien avec le sujet

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2. REVUE DE LITTÉRATURE

Ce travail de recherche tente de joindre deux grands champs méthodologiques de la littérature économique : la modélisation des frontières stochastiques de coûts et les évaluations d’impact. Ce chapitre présente les concepts théoriques reliés à ces thèmes ainsi que les outils analytiques utilisés pour atteindre des objectifs similaires à ceux de cette étude. Le concept d’efficacité et de frontière stochastique ainsi que les mesures d’efficacité seront présentés. Par la suite, une attention particulière sera portée à l’importance des biais de sélection dans les études causales. Les méthodes proposées dans la littérature pour contourner ce problème seront également exposées.

2.1 Le concept d’efficacité technique

Les premiers travaux relatifs à l’analyse de la productivité des firmes reviennent à Koopmans (1951) et Debreu (1951). Depuis ce temps une importante littérature s’est développée sur les méthodes d’estimation des frontières de coûts et de production ainsi que sur les mesures du degré d’efficacité des firmes. Le concept d’efficience économique est apparu à la suite de l’observation que des entreprises en apparence identiques ont des résultats différents en termes de productivité, et ce même si elles utilisent la même technologie et les mêmes facteurs de production (Guarda et Rouabah, 1999). Cependant c’est Farell (1957) qui a posé les bases théoriques du concept d’efficience qu’il décompose en deux éléments. D’une part, on retrouve l’efficacité technique qui définit la capacité d’une firme à obtenir le maximum d’extrant considérant une quantité donnée d’intrants, et d’autre part il y a l’efficacité allocative qui réfère à la capacité de la firme à utiliser ses intrants dans des proportions optimales considérant leurs prix respectifs. En outre, l’étude de l’efficacité permet de déterminer si une unité de production peut accroître sa production sans recourir à davantage de ressources ou de maintenir son niveau de production tout en diminuant sa consommation d’au moins un intrant (Amara et Romain, 2001). Parallèlement, certains modélisateurs utilisent une fonction de coût en utilisant le coût de production ainsi que le coût unitaire de chacun des intrants (Ghazalian et al. 2010).

L’étude de l’efficacité technique est d’un grand intérêt autant pour les entreprises que pour les gouvernements. Ce concept permet de cibler les facteurs qui conditionnent l’efficacité et par le fait même de diriger les politiques vers l’amélioration de l’utilisation de ces facteurs. Au niveau des firmes, la

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connaissance des déterminants de l’efficacité permet d’adopter un mode de gestion qui favorise leur bien-être économique.

Figure 2 : Représentation de l’efficacité technique et allocative

La figure 1 illustre le concept d’efficience telle que définie par Farell (1957). L’isoquant SS’ représente les différentes combinaisons des facteurs de production et la droite AA’ est l’isocoût possédant une pente égale au ratio des prix des facteurs, et Q’ est le point optimal de production. Cependant même si le point Q n’est pas un optimum, l’efficacité technique y est de 100 %. L’efficacité technique est mesurée par la distance qui sépare le niveau de production à la fonction de production. Dans le cas de la firme inefficace, le ratio d’efficacité technique sera inférieur à 1 alors qu’il sera égal à 1 pour la firme parfaitement efficace. Néanmoins, l’efficacité économique d’une entreprise dépend également des proportions selon lesquelles elle utilise les facteurs de productions étant donné leurs prix relatifs. En ce référent à la courbe d’isocoût AA’ de la figure 1, on constate que le point Q’ est le point optimal de production puisque l’efficacité allocative est également respectée. L’efficacité allocative est représentée par la distance entre la courbe d’isocoût et le niveau de production. Par conséquent, même si le point Q et Q’ sont efficaces techniquement, le coût de production de Q’ représente une fraction de celui de Q.

R Q’

Q

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11 2.1.1 Les mesures d’efficacité technique

La mesure de l’efficacité nécessite l’établissement d’une frontière de production ou de coût (Y) qui est construite selon différentes hypothèses (libre disposition des facteurs, convexité, etc.) (Shephard, 1970). Dans la littérature, on retrouve deux approches permettant d’estimer ces frontières : les approches paramétriques et les approches non paramétriques.

a) Les approches non paramétriques

La frontière non paramétrique n’est pas associée à une forme fonctionnelle précise. L’isoquant convexe associé à un niveau de production efficace est construit à partir d’un nuage de points de telle sorte qu’aucune observation ne se situe à ni à gauche ni au-dessous de cet isoquant (Amara et Romain, 2001). Dans ces analyses, les estimations sont basées sur les techniques dites d’enveloppe telles que DEA (data

enveloppement analysis). La méthode de DEA fut développée par Farrell (1957) et popularisée par

Charnes et al. (1978). Cette méthode possède un certain nombre d’avantages (Kalaitzandonakes et al., 1992) par rapport à la méthode paramétrique qui sera présentée ultérieurement :

 elle n’impose pas une forme fonctionnelle à la fonction;

 elle n’impose pas de restriction à la distribution du terme d’erreur;

 elle permet l’estimation de frontière de production dans le cas où la firme produit plus d’un output et utilise plusieurs intrants sans imposer de restriction supplémentaire.

Néanmoins, quelques critiques ont été adressées à cette technique3. Le caractère déterministe de la

fonction frontière implique que toutes les firmes utilisent la même technologie et que leurs performances techniques sont obtenues en comparant leur niveau de production au niveau optimal présenté par la frontière. En fait, tout écart de la frontière est expliqué par l’inefficacité des firmes. Ainsi la possibilité que la différence entre les niveaux de production soit due à des facteurs hors du contrôl du producteur, tels que les aléas climatiques, est complètement écartée. Cette méthode est également très sensible aux observations extrêmes (Guarda et Rouabah, 1999). De plus, elle ne permet pas de faire des tests statistiques et de vérifier des hypothèses (Amara et Romain, 2001).

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12

Néanmoins, depuis quelques années cette méthode a connu un regain en popularité, ce qui s’explique entre autres par la facilité de son application. Dans la littérature, on retrouve quelques exemples d’auteurs qui ont appliqué cette méthode au secteur agricole. Lansink et Reinhard (2004) ont utilisé DEA pour examiner les possibilités de croissance technique, économique et la performance environnementale des fermes porcines néerlandaises. Picazo-Tadeo et al. (2010) l’ont utilisé pour calculer l’efficience environnementale d’un groupe de producteurs agricoles espagnols puisque cette technique permet de modéliser facilement une production multiproduit tels que les biens agricoles et les dommages environnementaux. Hansson et Öhlmer (2008) ont étudié l’effet de l’adoption des pratiques de gestion opérationnelle sur l’efficacité technique et allocative des fermes laitières de Suède. Ils ont démontré qu’une meilleure gestion des accouplements augmente l’efficacité technique alors que le choix des fourrages améliore l’efficacité allocative. Un potentiel problème avec cette étude comparative est qu’elle ne prend pas en compte les potentiels biais de sélection dus au choix au non d’adopter de meilleures pratiques de gestion. Cook et Seiford (2009) font une revue des récents développements dans l’application de DEA.

b) Les approches paramétriques

Les approches paramétriques diffèrent de la précédente par le recours à une forme fonctionnelle caractérisant le processus de production (Cobb-Douglass, CES, Translog). Aigner, Lovell et Schmidt (1977) ont proposé un modèle d’analyse d’efficience qui supporte une forme fonctionnelle flexible. Cette approche dite « frontière stochastique » permet d’estimer un score d’efficacité technique spécifique à chaque firme. Cette technique décompose le terme d’erreur en deux composantes : une composante d’inefficacité, , et un terme d’erreur aléatoire, , reflétant les erreurs de mesure et les chocs exogènes. Le terme d’erreur aléatoire suit une distribution normale classique. Le terme d’inefficience mesure le pourcentage par lequel une firme n’atteint pas l’efficacité technique. Puisque ce terme ne peut être négatif, des distributions de type exponentielle, gamma ou normale tronquée sont proposées.

Kumbhakar et Lovell (2000) ont convenu que le modèle de frontière stochastique est une approche plus appropriée pour les études reliées au secteur agricole parce qu’il permet d’intégrer une composante aléatoire, de faire des tests d’hypothèse traditionnels et d’estimer en une étape l’effet d’inefficacité.

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13

Étude empirique sur l’efficacité en agriculture

Mbaga et al. (2003) ont mesuré le niveau d’efficacité technique des fermes laitières au Québec. Ils ont également testé si le choix de la forme fonctionnelle et de la distribution de l’indice d’inefficacité technique avait un effet sur la robustesse du modèle. À titre comparatif, ils ont également calculé un score par la méthode DEA. Les résultats démontrent que les producteurs laitiers du Québec sont efficaces en affichant des scores moyens en dessus de 90 % pour les différentes spécifications. Ce résultat implique qu’une augmentation de l’efficacité technique n’augmentera pas de beaucoup l’output. Les auteurs affirment également que le changement structurel advenant une éventuelle abolition de la gestion de l’offre ne serait pas dû à une différence dans l’efficacité technique, mais plutôt dû à certaines caractéristiques des producteurs comme leur âge ou leur capacité à emprunter. Leurs différents tests démontrent également que la spécification de la forme fonctionnelle et de la distribution du terme d’erreur ne sont pas critiques pour le classement de l’efficacité technique. Cependant, les résultats obtenus avec DEA sont statistiquement différents ce qui démontre une certaine divergence entre les méthodes. Yélou et al. (2010) ont utilisé la même base de données pour la période 1993 à 2003. Ils ont analysé l’efficacité technique par un modèle de frontière stochastique qui permet de contrôle pour l’hétérogénéité entre les firmes en utilisant une multiple-regime threshold production function. Leur objectif était de déterminer si la plus grande productivité des firmes de grandes tailles provient d’une utilisation différente de la technologie ou simplement d’un emploi plus efficace des inputs. Leurs résultats démontrent également que le choix de la forme fonctionnelle (Cobb-Douglas ou Translog) n’influence pas la tendance ni la dispersion statistique des scores d’efficience. Ceux-ci attestent également que les producteurs ont un niveau très élevé d’efficacité – soit un score d’environ 0,96 peu importe la modélisation. Les données sont très peu de variabilité ce qui s’explique par la présence de la gestion de l’offre dans le secteur.

D’autre part, Reinhard et al. (2000) ont estimé une frontière de production stochastique de forme translog sur des données panel provenant du secteur laitier néerlandais. Ces auteurs trouvent qu’environ 90 % des 613 fermes néerlandaises possèdent généralement un haut niveau d’efficience technique, du moins durant la période 1991 à 1994. Cabrera et al. (2010) ont étudié les déterminants de l’efficacité technique auprès des producteurs du Wisconsin. Ils ont utilisé une spécification Cobb-Douglass pour leur fonction de production. Leurs résultats démontrent que l’efficacité technique de l’échantillon est de 88 % ce qui suggère que du point de vue technique, il y a une opportunité pour augmenter la production de lait en utilisant le niveau actuel d’intrant et de technologie disponible. De plus, les auteurs remarquent que l’utilisation de

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nouvelles technologies telles l’intégration d’hormones de croissance ou d’un système de production plus intensif permettrait aux producteurs du Wisconsin d’améliorer leur efficacité. Cependant, les auteurs affirment, à juste titre, que leurs résultats n’indiquent pas si les pratiques entraînent l’efficacité économique et que le champ de recherche sur l’efficacité économique devrait être mis de l’avant.

2.1.3. L’efficacité technique et le travail hors ferme

Une des premières études portant sur l’effet du travail hors ferme sur l’efficacité est attribuable à Kumbhakar et al. (1989). Le modèle utilisé est composé de deux facteurs endogènes, le travail et le capital, et de trois facteurs exogènes, l’éducation, le travail hors ferme et la taille de l’entreprise. L’ensemble de ces facteurs est intégré dans la frontière stochastique de production qui est estimée par maximum de vraisemblance. Ainsi, le travail hors ferme est considéré comme un facteur de production. Leur hypothèse de base est que le travail de l’opérateur principal est un facteur indivisible. Par conséquent, lorsque ce dernier s’affaire davantage au travail des conséquences négatives peuvent se faire ressentir au niveau de l’efficacité. Leurs résultats indiquent que le travail hors ferme est négativement associé à l’efficacité technique. Cependant, cette étude n’intègre pas les spécificités propres aux études d’impact, à savoir l’effet des biais de sélection dans l’adoption du travail hors ferme. Néanmoins un constat important ressort de cette étude. Le coefficient d’élasticité du facteur de production travail est beaucoup plus important dans le cas dans entreprises de petite taille. Par conséquent, ces entreprises bénéficieraient davantage d’une présence accrue à la ferme ou du fait d’engager un nouvel employé. Or, c’est principalement cette catégorie de ferme qui s’adonne le plus au travail hors ferme.

Chang et Wen (2010) ont étudié la différence entre les niveaux de production, d’efficacité technique et du niveau de risque des producteurs travaillant hors ferme et ne travaillant pas hors ferme. Ils ont estimé deux frontières stochastiques qui permettent de modéliser simultanément l’efficacité technique et le risque pour les producteurs travaillant et ne travaillant pas hors ferme. Le critère de dominance stochastique est utilisé afin de comparer les différences dans la distribution des paramètres estimés représentant l’efficacité technique entre les deux groupes. Leurs résultats démontrent que le travail hors ferme n’est pas associé à une diminution de l’efficacité technique. En effet, pour les producteurs se trouvant dans les percentiles les plus bas de la distribution de l’efficacité, ceux travaillant hors ferme sont plus efficaces que leur contrepartie.

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15 Goodwin et Mishra (2004) ont considéré la relation entre l’efficacité sur la ferme et l’adoption du travail hors ferme. Dans un premier temps, ils ont caractérisé les facteurs affectant l’adoption du travail hors ferme. En plus d’inclure dans leur modèle les facteurs traditionnels, ils ont ajouté un important facteur intangible : les objectifs de carrière. En effet, une composante importante du retour implicite du travail est la satisfaction personnelle qu’un individu peut en retirer. Pour capter cette variable, ils ont fait une enquête auprès d’un groupe de producteurs. Dans un deuxième temps, ils ont évalué la relation entre le travail hors ferme et l’efficacité en faisant l’hypothèse que l’offre de travail hors ferme est endogène à l’efficacité puisque l’efficacité est un facteur déterminant le salaire implicite pour le travail hors ferme. Les auteurs n’ont pas utilisé une frontière stochastique pour estimer l’efficience, mais ils ont estimé deux équations à forme réduite représentant l’offre de travail hors ferme et l’efficacité. Leur mesure d’efficacité est donnée par le ratio du revenu brut agricole sur le coût variable total. Les résultats démontrent qu’un plus grand engagement dans le travail hors ferme implique une diminution de l’efficacité et qu’alternativement une plus grande efficacité a un effet négatif sur l’offre de travail.

D’autre part, Lien et al. (2010) ont étudié les déterminants du travail hors ferme et ses effets sur la performance des producteurs de grains en Norvège. Ces auteurs formulent l’hypothèse selon laquelle le travail hors ferme et la production sont endogènes et déterminés simultanément. Dans un système d’équations simultanées, ils ont estimé la fonction de production et l’offre de travail hors ferme. Les auteurs ont pris en considération l’hétérogénéité de la production agricole (topologie, le type de sol, la température, etc.) et l’attitude face au travail hors ferme est également prise en compte. Puisqu’ils utilisent des données de panel, les biais dus aux facteurs non observés invariables peuvent être contrôlés dans la fonction de production et la fonction de décision. Un autre aspect unique de cette étude est que les deux facteurs endogènes, soit le niveau de production et la décision de travailler, sont inclus dans les deux équations du système. Pour accommoder ces hypothèses, le modèle permet à la fonction de choix d’influencer le niveau d’output et vice-versa. Leurs résultats démontrent que le travail hors ferme n’a pas une influence significative sur l’efficacité. Ce résultat peut s’expliquer par le fait qu’étant donné la diminution des heures consacrées aux travaux de la ferme, les producteurs doivent s’assurer de faire le meilleur usage du temps qu’ils y consacrent. Ainsi les producteurs travaillant hors fermes doivent travailler plus intelligemment.

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16

Ces deux dernières études ont pris en considération l’existence des biais de sélection dans l’analyse de l’impact du travail hors ferme sur l’efficacité. Cependant, ces analyses ne permettent pas de capter l’ensemble des biais de sélection qui peuvent être à la fois dus aux variables observables et inobservables. De plus, ces études ne portent pas spécifiquement sur l’efficacité technique. Par conséquent, il n’existe pas, à notre connaissance, à ce jour d’étude ayant comme cadre d’analyse la problématique proposée et prenant en considération les biais de sélection dus aux variables observables et inobservables.

2.2 L’effet de traitement et les biais de sélection

Les objectifs de cette recherche ne se limitent pas à l’étude de l’efficacité technique des entreprises, mais s’inscrivent également dans la lignée des études d’impact. Le fait de vérifier l’effet du travail hors ferme sur l’efficience des entreprises nécessite une méthodologie particulière qui permet de prendre en considération les biais de sélection dus aux variables observables et non observables. Puisque les producteurs décident de leur propre chef de recourir au travail hors ferme, les biais de sélection jouent un rôle important dans l’analyse des résultats obtenus. De manière formelle, pour chaque individu i d’un échantillon N, on observe un ensemble de variables aléatoires. Supposons que l’adoption du travail hors ferme (le traitement selon la littérature d’évaluation des programmes) soit représentée par une variable binaire prenant la valeur de 1 si l’individu a effectué du travail hors ferme ou de 0 dans le cas contraire. L’efficacité technique (dénotée par la variable Y) d’un producteur est observée soit dans le cas où il a adopté (Y1 ) soit dans le cas il n’a pas

adopté (Y0), mais elle n’est jamais observée simultanément pour un même individu. Ainsi, si un individu

effectue du travail hors ferme, Y1 est observé alors Y0 est inconnue. On dit que le résultat Y0 est le résultat

contrefactuel (World Bank, 2006). Formellement, la situation contrefactuelle est définie comme est une représentation fictive de l’état d’un individu dans une situation non observée. Les études d’évaluation d’impact sont donc en présence d’un problème de données manquantes dû à l’absence de données contrefactuelles (Rosenbaum et al., 1983).

L’effet causal du traitement est défini pour chaque individu par l’écart qui représente la différence entre des résultats du même individu dans les deux situations étudiées (travaillant hors-ferme et ne travaillant pas hors-ferme). Deux caractéristiques ressortent de cet effet causal :

 il est inobservable, puisque seule une seule des situations peut être observée pour un individu  il est individuel, ce qui implique qu’il existe une distribution de l’effet causal dans la population

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17 La présence des biais de sélection implique que la situation moyenne des individus qui ont reçu le traitement n’aurait pas été la même en l’absence de traitement que celle des individus dans le groupe n’ayant pas été traités. Ceci s’explique par le fait que l’assignation des individus dans un groupe n’est pas aléatoire. Dans le cas de cette présente étude, l’adoption du travail hors ferme s’explique par certaines variables, notamment par le niveau d’éducation, l’aversion au risque, le désir de poursuivre une carrière professionnelle ou le niveau de satisfaction avec la vie à la ferme. Par conséquent, ceux qui adoptent le travail à l’extérieur se distinguent significativement de ceux qui se consacrent totalement aux travaux de la ferme. Dans le cas, où les caractéristiques déterminant l’adoption influencent également l’efficacité, alors les résultats obtenus comparant les deux groupes sont caractérisés par un biais de sélection.

Dans le cas d’une étude expérimentale où l’attribution du traitement se fait de façon aléatoire, le problème des biais de sélection ne se pose pas. Cependant, ce type de conception est dispendieux à implanter et parfois tout simplement impossible. La plupart des études en sciences sociales utilisent des données d’observation c'est-à-dire qu’elles sont collectées dans un environnement non contrôlé. Le choix de se lancer dans le traitement ou non dépend d’un ensemble de caractéristiques. C’est donc l’absence de distribution aléatoire entre les individus traités et non traités qui a motivé le développement de méthodes permettant de contrôler pour les biais de sélection rendant par le fait même l’échantillon aléatoire (Duflo et

al., 2007). Deux cas de figure sont à distinguer : les biais de sélection sur les variables observables et ceux

sur les variables non observables.

2.2.1 La sélection sur les variables observables

Hypothèses de base

L’évaluation d’impact par l’utilisation de données d’observation (non expérimentales) se fait à l’aide de deux populations, les participants et les non-participants, qui diffèrent en raison de la distribution des caractéristiques individuelles observables qui affectent la probabilité de participation. Dans le cas de cette étude, l’hypothèse d’indépendance entre le niveau d’efficacité et le choix de travailler hors ferme est peu probable. Une hypothèse moins forte serait de considérer que l’indépendance entre le niveau d’efficacité et la participation au travail hors ferme est conditionnelle à un ensemble de caractéristiques observables des entreprises agricoles ou de leurs gestionnaires. L’hypothèse d’indépendance conditionnelle (HIC) est fondamentale pour les études d’évaluation. Cette hypothèse est également connue sous le nom de l’hypothèse d’absence de confusion (unconfoundedness) (Imbens et Wooldridge, 2009 et Cameron et

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18

Trivedi, 2005). Une seconde hypothèse est l’hypothèse de chevauchement ou l’hypothèse

d’appariement. Cette condition implique qu’un ensemble de caractéristiques doit être représenté autant

par des individus dans le groupe des travailleurs hors ferme que ceux ne travaillant pas hors ferme. Si cette hypothèse est omise, alors on peut se retrouver avec des groupes à comparer qui sont complètement différents. Ainsi chaque individu travaillant hors ferme possède sa contrepartie ne travaillant pas hors ferme possédant des caractéristiques similaires. Ces deux hypothèses assurent la forte ignorance de l’assignation de traitement (soit l’adoption du travail hors ferme dans ce cas) au sens de Rosenbaum et al. (1983), ce qui signifie que le conditionnement sur l’ensemble des variables affectant à la fois le traitement et le résultat assure l’attribution aléatoire du traitement. En d’autres mots, la « randomisation » est assurée sur cet ensemble et non sur l’attribution aléatoire au traitement (Brodatt et al., 2002).

Les approches de contrôle sur les observables

Il existe différentes approches pour contrôle les variables observables. Dans le cas où l’ensemble des caractéristiques à contrôler est de petite dimension, on peut utiliser un estimateur d’appariement sur les caractéristiques observables proposées initialement par Rubin (1977). La méthode consiste à associer chaque individu i traité à un autre individu non traité dont les caractéristiques sont identiques au sens du vecteur de variables observées. L’effet de traitement se trouve à être la moyenne de chaque groupe pondérée par le nombre d’observations dans ces groupes. Angrist (1998) a utilisé cette méthode pour évaluer l’impact du service militaire sur le revenu des vétérans. Les auteurs ont noté que cet effet était difficile à mesurer puisque les vétérans décident à la fois de leur sort et sont également choisis par les militaires créant ainsi des biais dans la sélection. Leur stratégie consiste à comparer les candidats qui s’enrôlent et ceux qui ne s’enrôlent pas en contrôlant pour les caractéristiques utilisées par les militaires pour sélectionner les soldats de l’ensemble des candidats. Ils ont contrôlé pour l’âge, l’éducation et le résultat d’un test utilisé par les militaires. Ils font l’hypothèse que le choix de s’enrôler est ignorable selon ces variables. Cependant, cette méthode ne convient pas dans le cas où le vecteur des caractéristiques à contrôler contient beaucoup d’éléments ou inclut des variables continues (Duflo et al., 2008).

Ce problème de dimensionnalité est fortement corrigé par une autre méthode proposée par Rosenbaum et

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19 l’indépendance n’est plus conditionnelle aux variables observables, mais à un score de propension qui est lui fonction des variables observables. Formellement, on définit le score de propension comme la probabilité pour un individu d’être dans le groupe de traitement conditionnellement à un vecteur de variables observées. Une hypothèse clé dans les études d’évaluation est la condition de balancement. Cette condition implique que les individus possédant un score de propension similaire pourront, de manière aléatoire, adopter ou non le travail hors ferme. Rosenbaum et al. (1983) ont démontré que le respect de la condition de balancement est suffisante pour assurer l’hypothèse d’indépendance conditionnelle. Ce résultat implique qu’il n’est pas nécessaire d’apparier les individus sur l’ensemble des variables de conditionnement, mais uniquement sur le score de propension qui représente un résumé de l’ensemble de ces variables (Brodaty et al., 2002)4.

Dans le secteur agricole, cette approche a été utilisée pour l’évaluation des programmes. À titre d’exemple, Rodriguez et al. (2007) ont étudié l’impact du programme MAUNLAD qui vise à diminuer la pauvreté dans les communautés productrices de noix de coco aux Philippines. Ce programme inclut différentes composantes afin d’assister les producteurs tels que l’aide au transfert technologique, l’amélioration à l’accès au crédit ainsi que des séances de formation. L’objectif de leur recherche est d’évaluer l’efficacité du programme ex post en utilisant des données de panel sur deux périodes. Pour se faire, ils ont combiné l’utilisation d’un score de propension et l’approche de double différence pour les données de panel. Cette dernière procédure permet de corriger pour les biais dus aux variables invariables dans le temps alors que le score de propension permet de contrôler pour les facteurs observables variant dans le temps. Un test-t fut également entrepris afin de vérifier la propriété de balancement qui assure que les participants et les non-participants ont des moyennes similaires en regard à leur score de propension. Afin d’assurer la condition de chevauchement, les participants du programme possédant un score de propension au-dessus du score de propension le plus élevé et au-dessus du score le moins élevé dans le groupe témoin sont retirés de l’échantillon. À cet égard, les auteurs soulignent que le fait de retirer des observations de l’échantillon constitue une faiblesse de la méthode. Les résultats démontrent que l’utilisation de l’appariement des données selon le score de propension constitue un bon substitut à l’observation contrefactuelle. De plus, le fait d’omettre les potentiels biais de sélection sur observables contribue à sous-estimer l’efficacité du programme. Plus près de la région d’étude, Tamini et al. (2011) utilise l’approche pour évaluer l’impact des activités de conseil sur l’adoption d’un certain nombre de pratiques

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20

agroenvironnementales. L’auteur montre l’importance de l’adoption d’un modèle permettant de corriger pour les biais de sélection dans les études d’impact.

Autant que nous sachions, seuls Owusu et Abdulai (2010) ont appliqué cette méthode au travail hors ferme. Ces auteurs ont examiné l’impact du travail hors ferme sur le revenu familial et la sécurité alimentaire au sein des familles d’une région du Ghana. Ils ont utilisé l’appariement des données par score de propension afin de prendre en considération les éventuels biais de sélection. Le choix des variables indépendantes utilisées pour modéliser le score de propension provient de la littérature sur les déterminants du travail hors ferme. Le score de propension est estimé à partir d’un modèle probit en utilisant l’algorithme d’appariement de type «caliper mathching». Leur résultat démontre la présence de biais de sélection et justifie l’utilisation du score de propension afin de balancer la distribution des variables entre les groupes traités et non traités. Néanmoins, même si cette méthode permet de corriger en partie les biais de sélection certains d’entre eux seront encore présents dans le cas où les biais proviennent de variables évoluant dans le temps.

2.3 La sélection sur les variables inobservables

Tel que mentionné plutôt, l’introduction d’une correction telle que le score de propension ne permet pas de régler tous les problèmes liés aux biais de sélection. Dans certains cas, la décision de participation est liée à des variables qui peuvent difficilement être mesurables quantitativement tels que l’ambition ou les qualités de gestionnaires de l’entreprise. Ainsi, une solution alternative permettant de résoudre les problèmes de sélectivité est d’utiliser une modélisation jointe des résultats potentiels (Y0, Y1) et de l’affectation au

traitement, en posant l’hypothèse que ces trois variables dépendent du terme d’erreur inobservable, potentiellement corrélé entre eux (Brotady et al., 2002). Heckman (1979) est le premier à avoir formalisé un modèle où les éléments inobservés affectent le traitement et les résultats potentiels.

2.3.1 Le modèle de Heckman

La procédure d’estimation en deux étapes proposée par Heckman est en théorie assez simple. La première étape consiste à identifier les sources de différenciation existantes entre les deux groupes à l’aide d’un modèle probit. Cette étape permet de déterminer les effets des différentes variables du modèle sur la variable dépendante afin de pouvoir les contrôler lors de l’estimation du modèle (seconde étape). Cette méthode permet de capturer les effets non mesurés par les variables observées sur la variable dépendante.

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21 Les résidus de l’équation de sélection (première étape) correspondant aux effets non observés servent à construire un facteur dit de contrôle du biais de sélection, qui correspond au ratio inverse de Mill (RIM). Dans la seconde étape de la procédure, le RIM est introduit dans le modèle en tant que variable explicative additionnelle. Le coefficient associé au RIM peut être interprété comme la part des caractéristiques non observées corrélées avec la variable dépendante. Par conséquent, les autres variables explicatives du modèle sont exemptes des biais causés par les facteurs non pris en compte dans le modèle initial.

Une façon intuitive d’interpréter cette méthode est la suivante. Il est connu que l’omission d’une variable dans un modèle économétrique aboutit à des estimations biaisées des coefficients. Si le modèle utilisé ne permet pas de prendre en considération l’effet de sélection, l’estimateur omet un facteur important c'est-à-dire les facteurs qui déterminent la participation au programme. L’inclusion du facteur de correction calculé à la première étape permet d’obtenir une approximation de ce biais. C’est pourquoi l’inclusion d’une telle variable permet l’obtention d’estimateurs non biaisés si le modèle est bien spécifié.

Néanmoins, lorsque l’on applique une procédure en deux étapes dans laquelle la deuxième étape inclut une variable qui est estimée dans la première, la matrice de variance-covariance doit être corrigée afin de tenir compte de l’hétéroscédasticité. Il est souvent proposé dans la littérature d’utiliser une correction de Murphy-Topel (Greene, 2010 ; Wollni et Brümmer, 2011) ou alors, lors des tests d’hypothèse d’utiliser des méthodes de bootstrapping .

Applications empiriques

On peut repérer dans la littérature des études qui ont combiné les mesures d’efficacité et des corrections pour les biais de sélection dus aux variables non observées. Dans le domaine agricole, Sipiläinen et Oude Lansink (2005) ont mesuré et comparé l’évolution de l’efficacité technique des producteurs agricoles conventionnels et biologiques. Leur hypothèse de base de base est que les producteurs biologiques gagnent en expérience avec le temps et deviennent plus efficaces. Ils ont utilisé une frontière stochastique avec une spécification translog pour mesurer l’efficacité technique des fermes organiques et conventionnelles où le changement technologique est mesuré par une variable temporelle. Ils ont également utilisé la procédure d’Heckman pour contourner les effets de sélection. Les résultats démontrent que la présence de biais de sélection était significative et que les changements technologiques sont plus grands chez les producteurs biologiques.

(32)

22

2.3.2 L’estimation par variables instrumentales

Les biais de sélection surviennent en raison de la corrélation entre la variable indiquant le traitement et le terme d’erreur aléatoire dans l’équation à estimer. La méthode d’estimation par variables instrumentales (VI) permet également de résoudre le problème de biais de sélection et consiste essentiellement dans la détermination d’une ou plusieurs variables qui influencent la sélection (dans notre cas, l’adoption du travail hors ferme), mais non le résultat, l’efficacité technique de l’entreprise. Par conséquent, la variable instrumentale ne devrait pas être corrélée avec le terme d’erreur aléatoire et elle peut ainsi servir à l’estimation sans qu’il y ait de biais.

Cependant, le choix d’un instrument valable peut être difficile. Comme mentionné, l’instrument doit être corrélé au choix de participation, mais non aux résultats. Plus cette corrélation est forte plus la capacité de la variable instrumentale à obtenir des estimateurs non biaisés est importante (Greene et Schlachter, 2003). Ainsi, la difficulté avec cette méthode est de trouver une variable qui répond à ces deux conditions.

Cette méthode se distingue de la précédente dans le sens qu’elle permet d’obtenir des estimateurs non biaisés (si le modèle est bien spécifié) en une seule étape et n’exige pas la modélisation explicite du processus de participation. Cependant, elle ne permet pas de déterminer l’ampleur du biais de sélection comme dans le cas de la procédure de Heckman (Brodaty et al., 2002).

Application empirique

Key et McBride (2008) ont utilisé l’estimation par variables instrumentales afin d’évaluer si la contractualisation permet d’augmenter la productivité des fermes. Les auteurs font remarquer que pour mesurer l’effet des contrats sur la productivité, il est nécessaire de contrôler pour les différences entre les producteurs qui utilisent les contrats et ceux qui ne le font pas. Par exemple, les producteurs qui l’utilisent peuvent tenir des entreprises de plus grande taille tendent à être localisés dans certaines régions, ont plus de contraintes de crédit, sont plus averse au risque, valorisent moins l’autonomie, ont moins d’aptitudes en gestion, etc. Cependant, certains de ces facteurs sont corrélés à la décision d’utiliser les contrats de production et à la productivité des fermes. Dans ce cas, une simple régression de la productivité sur les facteurs exogènes et l’adoption de contrat donne des paramètres estimés biaisés. La procédure en deux étapes n’a pas été retenue pour cette étude principalement pour deux raisons. Premièrement, des problèmes peuvent survenir dans le cas où plusieurs (ou toutes) variables dans l’équation de sélection sont

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23 incluses dans l’équation de résultats. Ceci peut conduire à un niveau élevé de colinéarité entre les régresseurs de l’équation de résultat et le RIM. Par conséquent, les estimateurs sont sensibles à la spécification du modèle. Deuxièmement, les coefficients estimés par l’approche en deux étapes sont sensibles à l’hypothèse sur la distribution du terme d’erreur dans l’équation de sélection et des résultats. Pour ces raisons, l’estimation par VI est privilégiée. La possibilité de contracter, mesurée comme la prévalence de contractualisation dans la région où la ferme est située, est utilisée comme instrument de la contractualisation. La possibilité de contracter influence les coûts de transaction liés à la production sous contrat et devrait donc influencer le choix de contracter. Par ailleurs, cette VI ne devrait pas influencer le niveau de productivité de la ferme. Les résultats indiquent que l’utilisation de contrat est associée à une augmentation de la productivité chez les finisseurs de porcs aux États-Unis.

2.3.2 L’estimation des biais dans les modèles non linéaires

L’approche proposée par Heckman est de loin la plus utilisée dans la littérature depuis les 20 dernières années (Greene, 2010). Or certains auteurs, tels que Kumbhakar et al. (2009) et Greene (2010), lui reprochent de ne pas être appropriée dans le cas où le modèle à estimer n’est pas linéaire. Ainsi, certaines modifications ont été apportées au modèle de base proposé par Heckman afin de le rendre plus adéquat. Kumbhakar et al. (2009) ont estimé de façon jointe le choix technologique et l’efficacité technique des entreprises laitières conventionnelles et biologiques d’un groupe de producteur finlandais. L’idée vient du fait que la différence de productivité entre ces deux modes de production justifie l’octroi de subventions. Certains observateurs ont argumenté que cette subvention a attiré des producteurs non efficaces dans la production biologique créant ainsi un effet de sélection. Dans l’objectif de construire des programmes de soutien efficace, il faut être en mesure de déterminer quelle part de la différence de productivité provient de la différence technologique et quelle part provient de l’inefficacité technique. Puisque l’inefficience apparaît dans la fonction de choix et dans la fonction de production, les modèles de choix discrets standard ne peuvent pas être utilisés sans avoir préalablement estimé l’efficacité en premier lieu. Les auteurs ont utilisé une approche systémique pour estimer la fonction de production et l’équation de choix de façon simultanée. Les équations sont estimées par le maximum de vraisemblance en permettant une différenciation dans les frontières de production biologique et conventionnelle. Dans leur spécification, l’inclinaison vers la production biologique dépend d’un vecteur de variable et de l’inefficacité technique. L’efficacité technique ne peut pas être simplement mesurée par la fonction de production, mais doit également exploiter l’équation qui détermine le choix technologique (conventionnel vs biologique). La méthode proposée par

Figure

Tableau 1: Revenu familial moyen selon la source et la tranche de revenu total de la famille au Canada, en 2008
Figure 1 : Distribution du  revenu hors ferme moyen selon la source et bénéfice net d’exploitation en 2008
Figure 2 : Représentation de l’efficacité technique et allocative
Tableau 3 : Définition des variables de la fonction de coût
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Références

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