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française sur la base de données départementales
Francois Bonnieux
To cite this version:
Francois Bonnieux. Étude économétrique des disparités de l’agriculture française sur la base de don-nées départementales. 401 p., 1986. �hal-02856749�
ECONOMIE ET SOCIOLOGIE
RURALES /
RENNES 1986
français bannieux
ÉTUDE ÉCONOMÉTRIQUE DES DISPARITÉS
DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE
Résumé . • • Introduction
Chapitce Introductif L'évolution en longue période
l'agriculture française
1. Croissance agricole • • • • • • • • •
2. Orientation des productions • • • • •
3. Evolution des combinaIsons productives
4. Résultats économiques .. l à X 1 de 11 12 15 30 37
1ère Partie Essai d'explication des disparités de productivité
du travail . . 43
Chapitre 1. La persIstance des disparités départementales agricoles Section 1. Mise en évidence d'une relation
disparités-développement • • • .. .. • .. .. .. .. .. .. Section 2. Disparités régionales et agriculture
Chapitre 2. Orientation des productions et productivité du travail SectIon 1. Analyse typologique départementale de l'agriculture
Section 2. Productivité du travail ..
47 49 68 99 103 149
2ème Partie Analyse de la structure de la technologie à partir
d'une fonctIon trans10gari thmique • • • • • • 179
Chapitre 3. Substitutions factorielles et demande dérivée de facteurs 183
Sect ion 1. Cadre et méthodes • • 186
Section 2. Application du mod~le 203
Chapitre 4. Productivité, progr~s technique et capItal humain 231
Section 1. Analyses de productivité.
Section 2. Caractérisation du progr~s
Section 3. Mod~le à capital humain
Conclusion Annexe 1. Annexe 2.
Bibliographie
Table des mati~res
*
t • .. .. technique 232 255 284 305 317 341 377 397Les bouleversements qu'a connu l'agriculture française ce deToier quart de siècle ont eu pour effet un accroissement con-sidérable de la productivité et du revenu du travail. Mais tou-tes les régions et toutes les productions n'ont pas évolué au même rythme. D'ailleurs les deux sont liés, car la spécialisa-tion régiOnale s'est fortement accentuée. La géographie agricole s'e~t donc simplifiée, elle associe désormais un département, parfois une région à une ou deux productions dominantes.
A chaque période, les rapports des facteurs de production sont étroitement liés à l'orientation des productions, mais ils suivent une même évolution générale, caraçtérisée par l'intensi-fication de tous les autres facteurs par rapport au travail. Il s'agit d'un processus séculaire défini par l'accroissement du rapport terre-ho~ne, la substitution des consommations intermé-diaires et du capital au travail. Cette intensification tient à l'évolution des rapports de prix des facteurs, en particulier au renchérissement relatif du travail, et a été accompagnée d'un progrès technique biaisé économisant le travail.
Ces mutations s'inscrivent dans un contexte de croissance continue de la production agricole et de régression relative de l'agriculture dans l'économie. Elles s'accompagnent du maintien
de fortes disparités internes du secteur agricole. Leur observa-tion soulève des difficultés de mesure. Leur explicaobserva-tion conduit
à définir un programme de recherche dans lequel le processus de
spécialisation et d'intensification joue un rôle central. La
première question porte sur l'influence de ce processus sur la
productivité du travail et les disparités. La seconde plus
fondamentale doi t condui re à s'interroger sur les mécanismes
d'intensification. Elle peut s'exprimer en r,éférence à la
théo-rie de la produc.tion en étudiant les substitutions de facteurs
et l'influence du progrès technique.
La mise en oeuvre de ce programme de recherche soulève des questions de sources statistiques. L'approche la plus naturelle
consisterait en effet à utiliser des données micro-économiques
relatives à différentes périodes. On pourrait alors en
regrou-pant différents échantillons construire des séries chronologi~
ques. Malheureusement une telle approche n'est pas possible
faute d'un suivi statistique convenable des exploitations
agri-coles. Cette carence nous a conduit à privilégl,er une approche
régl,ona1e des disparités agricoles. Ceci est possible puisqu'on
dispose avec les comptes départementaux de l'agriculture de
séries homogènes relatives au compte de production qui débutent
en 1962, ces séries sont complétées par des données sur la
surface agricole utilisée et le travail (mesuré en unités
homo-gènes). Cet ensemble constitue une base de données
départemen-tales, en partie inédites. Les statistiques départementales sur
le capital (matérl,el, bâtiments et plantations) ne concernent
par contre que la décennie soixante-dix.
Cette recherche est centrée sur la période 1962-81, qui est replacée par rapport aux évolutions de très long terme. Elle est
organisée en deux parties. La première fournit tout d'abord un
constat sur l'importance et l'évolution des disparités. Puis
elle propose une analyse de la relation entre disparités et
Elle aboutit ainsi à un ensemble de résultats cohérents mais
insuffisants eu égard à leurs fondements théoriques. La seconde
partie en s'appuyant sur une spécification translogarithmique
pour représenter la fonction de production de l' agricul ture la
complète, en proposant un modèle explicatif de l'
intensifica-tion.
Première partie. ESSAI D'EXPLICATION DES DISPARITES DE PRODUC-TIVITE DU TRAVAIL
Les disparités régionales de productivité et de revenu du
travail sont plus élevées dans l'agriculture que dans les autres
secteurs. Par aillenrs, la prodnctivité du travail agricole
s'avère en général relativement plus faible. Cet écart intersec-toriel et l'importance des disparités internes de l'agriculture
expliqnent qu' un niveau élevé de disparités régionales toutes
activités confondues soit associé à une population active
agri-cole relativement plus nombreuse. Sa diminution a favorisé la
réduction des disparités et l'élévation de la productivité du
travail de l'ensemble de l'économie, qui ont été observées sur
longne période dans les pays développés.
Pour le secteur agricole, la convergence des disparités
régionales n'est pas la règle. En France, appréciées au nivean
départemental, elles étaient du même ordre au début des années
cinquante qu'un siècle auparavant. L'histoire des dernières
décennies et en particulier l'analyse fine de la période 1962-81
à partir du coefficient de variation interdépartemental de la
produc tivi té apparente du travail, révèle une certaine stabilité
des disparités. Cette absence de convergence n'est pas propre à
la France et se retrouve dans d'autres pays (Etats-Unis, Italie, Allemagne) •
Il n'y a pas simplement reproduction des inégalités mais au contraire des évolutions divergentes qui conduisent à définir quatre processus de croissance régionale
-
processus de marginalisation.-
processus de prospérité.-
processus de déclin.-
processus de décollage,selon le, niveau et' Il? taux de croissance de la productivité
apparente du travail. Les deux premiers participent à un accroissement des disparités tandis que les deux autres
favori-sent leur resserrement.
Leur jeu a entralné une extension de la zone prospère cen-trée sur le Bassin Parisien et le décollage de régions situées au pourtour sud (Vienne, Nièvre) ainsi que la poursuite du d~clin amorcé depuis longtemps du Nord et du Pas-de-Calais. Le déclin des r~gions méditerranéennes est plus récent et débute au cours des années soixante. La marginalisation des zones de mon-tagne avec une extension au sud-ouest du Massif Central corres-pOàd.à l'aboutissement d'une longue histoire.
Au début des années soixante, les productions végétales obéissaiellt à une localisation régionale plus marquée. Les der-nières décennies ont vu la poursuite du mouvement de sp~cialisa
tion et son extension à l'ensemble des productions. Il lui cor-respond une concentration régionale accrue. La comparaison de la situation au début des années quatre-vingt, à celle qui préva-lait vingt années auparavant permet d'apprécier la réalit~ de ce double processus de spécialisatioà et de concentration régio-uales, qui aboutit à une séparation de plus en plus nette entre
spécuL~tionsvégétales et spéculations animales.
Les analyses en coupe font apparaltre des différences importantes de la combinaison productive selon l'orientation des productions. La définition de systèmes de production départemen-taux relativement homogènes, permet de rendre compte, d'une part
de la structure de la production flnale, d'autre part des
rap-ports des facteurs de production entre eux. Un classement en
huit systèmes constitue une grille de lecture satisfaisante de
l'évolution des dernières décennies. Il distingue trois systèmes à dominante végétale (céréales-grandes cultures,
légumes-fruits-horticulture et vin), trois autres à dominante animale (lait,
hors-sol, bovin-viande) et deux de type polyculture-élevage.
A chaque période, les systèmes de production départementaux
sont bien différenciés tant du côté des facteurs que des
pro-d ui ts. Leur évolution est dominée par l'intensification des
antres facteurs par rapport au travail et une spécialisation
croissante. La poursuite du processus d'intensification suppose des élasticités de substitution entre facteurs relativement éle-vées. L'examen de cette hypothèse renvoie à des questions fonda-mentales sur la structure de la technologie qui introduisent la deuxième partie.
2ème partie. ANALYSE DE LA STRUCTURE DE LA TECHNOLOGIE A
PARTIR D'UIIE FONCTION TRANSLOGARITBMIQUE
Par rapport à la première, cette deuxième partie marque une
progression théorique, avec l'introduction pour représ"nter la
technologie, d'une fonction de production flexible de type
t ranslog(ari thmique). Elle permet une étude locale de la
frontière de production avec des hypothèses réduites à la
différentiabilité jusqu'à l'ordre deux. L'estimation d'une
fonction de productlon translog fournit en effet une estimation
des élastIcités de substitution partielle de Allen. De là, en
utilisant la dualité avec la fonction de coOt, il est possible
de déduire les élasticités-prix de la demande dérivée des
Si Y désigne le produit, la fonction translog à n facteurs de production Xl, ",Xn s'écrit Log Y = a + ~ a. Log X. + o 1. 1. l. 1 2 J.,J.~. b .. Log X. Log X.J.J J. J i , j = l , a .. n
L'homogénéité de degré un est réalisée si et seulement si 1 , ~ b
i ij ~J b ..J.J = o.
Cett'" fonction comporte donc un paramètre d'échelle ao ' une part le de Cobb -Douglas de paramètres ai et une partie propre-luent translog de paramètres bij' Elle n'est pas régulière en tout point de l'espace des facteurs.
La maximisation du profit conduit à un système de n équa-tions de parts de facteurs, linéaires par rapport aux
paramè-tres;
M.
J. i :::: 1 ... n,
où Mi désigne la part de Xi dans le produit. Lorsque la
fonction est homogène de degré UUt ce que nous supposons alors
tout le produit est réparti et seules n-l équations de parts de facteurs sont indépendantes.
Connaissant les bij, la matrice symétrique
5 = (sij) i,j = l, ••• n des élasticités de substitution partielle de Allen se déduit en tout point de l'espace des fac-teurs. 5i la. matri.ce 5 est semi-définIe négatIve la fonction de production est régulière au point consIdéré. Cette matrIce four-nit donc le moyen d'étudier localement la régularité sans passer par la matrIce hessIenne bordée. Par aIlleurs, elle permet de traiter. de façon élégante la séparabilité et l'agrégation des
facteurs de production. Enfin connaissant S, les élasticités-prix de la demande dérivée se calculent simplement
i , j = l , ...n
ou eij est l'élasticité de la demande de facteur Xl par
rapport au prix du facteur Xj'
Ce modèle a été appliqué à troIs coupes de données
départe-mentales relatives à 1970, 1975 et 1980 pour lesquelles les
don-nées suffisantes étalent dIsponibles. Trois facteurs de
produc-tion ont été considérés : les consommations intermédiaires, le
capital (matériel, bâtIments, plantations) et le couple
terre-travail. La meIlleure spécification considère un modèle avec une partie Cobb-Douglas spécifique des systèmes de production et des
coupes, la partie translog étant fixe. Le modèle est estimé par
la méthode du maximum de vraisemblance à information complète
appliquée à deux équations de parts de facteurs parmi les trois,
de façon à raisonner sur un système d'équations indépendantes.
L'équation éliminée n'a pas de conséquence sur l'estimation,
puisque la fonction de vraisemblance est indépendante du choix
de cette équation.
Les résultats obtenus à partir de différents ajustements
(prise en compte simultanée ou non des trois coupes, de tous les
systèmes de production) sont cohérents entre eux et recoupent
ceux de divers auteurs obtenus pour d'autres agricultures.
L'hypothèse de séparabilité faible de la technologie,
loca-lement et a fortiori globaloca-lement est rejetée. Ce résultat fort
s'applique en particulier aux consOlwnations intermédiaires et
montre qu'il n'est pas justifié de spécifier une fonction de
production agricole où la valeur ajoutée dépend des seuls
fac-teurs primaires. Une spécification correcte doit relier la pro-duction aux consommations intermédiaires et aux fac.teurs primai-l'es.
Les consommations intermédiaires sont· substituables aux
facteurs de production primaires. L'élasticité de substitution
partielle entre les consommations intermédiaires et le capital apparalt particulièrement élevée. Les relations entre le capital et le couple terre-travail sont moins nettes et il faut distin-guer selon les coupes et les systèmes de production. Il y aurait
en 1980, une relation de substituabilité en certains points de
la frontière de production et une complémentari té en d'autres.
Cette dernière apparalt nettement pour le système laitier et le système légumes-fruits-horticulture.
L'étude des élasticités-prix de la demande dérivée des
différents facteurs conduit à insister sur la forte sensibilité
de la demande de consommations intermédiaires et de capital aux
prix correspondants. Un classement des systèmes de production
des moins élastiques, aux plus élastiques permet de distinguer
la hiérarchie suivante :
- hors-sol, polyculture, vin, céréales-grandes cultures,
- bovin-viande, légumes-fruits-horticulture, lait.
Les éC'lrts inter-coupes de la partie Cobb-Douglas de la
fonction de production peuvent être interprétés en termes de
progrès technique. De façon similaire pour uue coupe donnée, les
écarts inter-systèmes de production sont associés à des
diffé-rences de productivité totale des facteurs. Ces interprétatIons
ont pu être testées de façon simple et rigoureuse puisque la
fonction translog admet un indice de productivité exact. Il
s'agit de l'approximation de Tornqvist de l'indice de Divisia.
L'analyse systématique des indices de productivité totale a
montré la pertinence du découpage de l'agriculture en systèmes
de production départementaux. Les différences inter-systèmes
évolution. Les taux moyens de croissance de la productivité
totale de 1970 à 1980 sont très variables selon les systèmes :
céréales~grandes cultures 1,1 % légumes-fruits-horticulture 0,8 % vin 0,2 % polyculture -0,6 % bors-sol 1,5 % bovin-viande 1,7 % lait -0,4 %
Ces évolutions ne modifient pas fondamentalement la
hiérar-chie des systèmes de production, le système céréales-grandes
cult'lres occupant toujours la première place en 1980 avec un
indice de productivité totale de 100, le second, le système vin
n'atteignant que l'indice
85.
Une spécification du modèle incluant des biais factoriels a abouti au rejet de la neutralité au sens de Hicks et a permis de
caractériser le progrès technique !'lu cours des années
soixante-dix. L'accroissement des consommations intermédiaires
et du capital ne résulte pas simplement de l'évolution des prix.
Le progrès technique a été fortement biaisé et a joué dans le
sens d'une plus grande utilisation de ces facteurs.
Corrélati-vement, il a entrainé une économie de terre et de travail. Ces
résultats corroborés par d'autres travaux paraissent solides.
Des études menées sur longue période (1912-68) aux Etats-Unis
aboutissent en particulier à des conclusions analogues ; biais
élevés dans le sens cl1une forte consommation dtengrais et de
matériel, d'une importante économie de travail tout au moins à
part lr de la seconde guerre mondiale. Une spécification plus
sophistiquée du modèle reposant sur une mesure des services des
.facteurs en unités efflcaces, a permis d'introduire un taux de
Enfin, l'influence du niveau de la formation scolaire des
agriculteurs, sur la répartition du produit, toutes choses
égales par ailleurs, a pu être testée. Le système d'équations de parts de facteurs prend alors la forme suivante :
M. = a. + E b Log X. + biE E i 1 n
l l j ij J
...
et E biE o.i
où E est une variable supplémentaire qui mesure le niveau de
formation. C'est une variable artificielle qui est la première
composante principale d'un ensemble de onze variables qui
décri-vent la formation scolaire des agriculteurs. L'estimation de
cette spécification du modèle constitue un test positif de la
INTRODUCTION
Sur longue période, la croissance continue de la production
agrle.oh~ s'inscrit dans un contexte de régression relative dans
l'économie et s'accompagne de fortes disparités internes.
Oepui.s le 18è siècle, au delà de variations conjoncturelles dueH en partie aux conditions climatiques, la product.ion agrico-le fl:"ançalse a augmenté réguli.èrement. Mais comparée à cl'autres
pays, ses progrès sont relativement modestes jusqu'à la seconde
guerr.e mondiale. Le début des années cinquante correspond à une
r11pture marquée par une forte hausse du taux de croissance. Ce
changement de tendance dnre jusqu'au début des années
soiKante-dix; le premier choc pétrolier apparaît corrélatif d'un retour
à des tauK de croIssance de la production nettement plus
fai-bles. Durant le.q dernières décennies, l'agriculture a donc,
com-me le r.eBte de l'économie subi deux ruptures importantes de
croissance .. Toutefo.is, l'amplitude de ces changements est
par l'évolution séculaire de la population active et de la pro-ductIon agricoles. Mais la diminution du nombre d'actIfs
agrico-les correspond à un recul absolu alors que pour la production,
il s'agit d'un recul relatif, puisqu'elle augmente, mais moins
que celle des autres secteurs. La contribution de l'agriculture
à la richesse natlonale a donc diminué relativement. Ces
mouve-ments de longue période se sont accélérés depuis les années cin-quante. La période qui coUvre les deux ou trois dernières
décen-nies apparait donc partlculièrement Intéressante sur le plan
agricole par les mutatIons qui l'ont caractérIsée.
Quelle que soit l'optIque retenue les disparités Internes à
l'agriculture apparaissent particulièrement élevées et
persis-tantes. Si l'on se réfère à la distribution des revenus par
ménage selon les catégories socio-profe,;sionnel1es, il ..pp..r .. it
que les exploitants agricoles COnstituent le groupe où les dis-parités sont les plus élevées et pour lequel la dispersion a le
moins diminué (Bobé 1978, p. 146). Si l'on considère ies seuls
revenus d'origIne agricole, on est conduIt au même constat de
fortes disparItés, avec une échelle de revenus extrêmement éten-due (BonnIeux et Rainelli 1982).
Les inégalités de revenu agricole sont étroItement liées
aux écarts de productivité des différents systèmes de
produc-tion. La localisation des productions obéit à un ensemble
com-plexe de facteurs qui se traduisent par une spécialisation
régionale. Les disparités observées à l'échelon des
exp10lta-tions agricoles s'expriment donc aussi en termes de disparités -régionales.
L'observation et la mesure des inégalités de revenu et de
productivité du travail agricole sont difficiles. L'analyse
descriptive ne saurait cependant constituer qu'une première
étape. Une analyse posit ive des dis pari tés internes au secteur
agricole doit s'efforcer d'identifier les facteurs explicatifs.
A cet égard, la croissance de la production agricole a été
caractérisée pa r deuK phénomènes majeurs, la spécialisation et
l'intensification. Ils paraissent devoir jouer un rôle central
dans une telle analyse.
Spécialisation et intensification constituent les deux
volets dtun processus de croissance) général dans les pays d€ve-loppés et qui s'est accéléré en France depuis les années
soixan-te avec la mise en place de la politique agrlcole commune. La
recherche d'une plus grande efflcaclté condult à l'abandon de
certaines productlons et au développement des plus rentables
compte tenu de la dotat.ion en facteurs, des condlt.ions
naturel-les, de l' envl ronnement économlq ue et des rapports de prlx. Ce
phénomène de spécialisation s'accompagne d' une évolution de la
combinalson productive dans le sens d'une lntensHication de
tous les autres facteurs par rapport au travail. Il s'agit d'un
accroissement du rapport terre-homme et d'une substitution des
consommations intermédiaires et du capital au travail.
La politique agricole commune basée jusqu'à une date
récente à peu près eKclusivement sur une politique de soutien
des prix à des niveaux largement déconnectés de ceux du marché mondial a entra1né des distorsions qui ont favorisé la
crois.san-ce de certaines productions (Rainelli 1984). Ces distorsions
apparaissent d'autant plus fortes que le soutien des prix s'est
accompagné d'importants progrès techniques. Les céréales, les
conjontJ.on de facteurs favorables. A l'inverse certaines produc~
tions, comme celle de viande bov~ne, de fruits et de légumes non
tratlsformes n'ont bénéficié ni d'un soutien aussi élevé des
prix, ni de progrès technique aussi sensibles.
Les investissements pubLlcs sont à l'origine d'autres
dis-torsions de la concurrence. Les travaux de drainage et d'irriga-tion ont permis de modifier les condid'irriga-tions naturelles et d'éle-ver le.s services retldus par la terre, et ont accéléré la
substi-tution des consommations intermédiaires et du capital au
tra-vail. Ils ont joué par exemple en faveur de l'extension de la
culture du maïs et ont renforcé les ef fets favorables du soutien
des prlx et de l'augmentation des rendements. De façon plus
générale la recherche agronomique, les infrastructures, les
itldustries d'amont et d'aval sont source d'effets externes posi-tifs pour l'agriculture (De Veer 1982). Leur influence n'est pas
également répart ie, mais leur jeu favorise le développement de
product Ions pa rtlcnlières et l'emploi de certains facteurs de
production.
Dans un contexte d\, difficultés budgétaires et de
surpro-duction, 1 'orientat ion de la po Utique agricole commune est
remise en cause (Mahé 1985). L'introduction des quotas laitiers
a inaugur.é une série de nouvelles mesures .. Les discussions sur
le pai-ement du blé selon sa qualité permettent d'augurer des
déctsions modifiant les rapports de prix au détriment des
céréa-leS destinées à l'alimentation animale. Sur un autre plan, les
investissements lourds en faveur de l'agriculture seront de plus
en plus examinés en termes d' allocati.on optimale. de moyens de
pr.oduction devenu rares au niveau global. La réorIentation de la poli tique économique int rodui ra sans doute de nouvelles distor-sions. Elie ne parait pas pour autant susceptible d'interrompre
1'.'1. poursui u~ d'une croissance fondée sur la spécialisation et
lwes l'agricuture française. Mais, i l ne faut pas oublier que ces phénomènes de spédalisation et d' intensifi cation s' inscri-vent dans une bien plus longue histoire. Cette période apparatt exceptionnelle dans la mesure où ces processus se sont
accélé-rés, la politique agricole commune jouant 'lU rôle
amplifica-teur ..
Se pose alors la question de la relation entre ce mode de développement agricole et l'évolution des disparités. La
spécia-l isat ion et l' intensHicat ion influencent-elles le niveau et
l'évolution de la productivité et du revenu du travail? Poser
la question sous cette forme, c'est supposer impl.icitement que
les processus de spécialisation et d'intensification jouent un
rôle déterminant dans l'origine des disparités du secteur agri-cole. Ce sera en effet l'hypothèse centrale.
La spécialisat ion de l'agrIculture est un processus qui a
cl'abord concerné certaines production.s., en particulier les
pro-ductions maraîchères au voisinage des villes. il s'est poursuivi
au 19è siècle avec le développement des transports et a porté
davantage sur les productions végétales, céréales et vins, pour
lesquelles existaient un marché plus large compte tenu des facl-lHés de stockage.
Le développement d'exploitatlons agricoles fortement
orien-tées ve rs les product ions animales es t plus récent. Il a été
rendu poss ib le par l'évolution des technIques et l'insertion
crols~iante de 1tagriculture dans l'économie. Elle se tradui.t par
une plus grande ouverture tant vers l'amont avec le
développe-ment des achats de biens et de services que vers l'aval avec
l'ex-portation. Il en résulte une dissociation de. plus en plus forte
des différentes productions entre elles et par conséquent une
spécialisation croissante des exploitations agricoles.
Le développement d'exploitations laitières, d'exploitations
porcines ou d'exploitations spécialisées dans la production
d'oeufs ou de volailles a marqué les dernières décennies. Il
correspond à une poursui te du mouvement de spécialisation et à
son extension à l'ensemble des productions agricoles.
L'élimination des activités traditionnelles et la spéciali-sation dans les productions les plus rentables se traduit sur le plan régional par une certaine uniformité des systèmes de
pro-duction. A ce niveau en effet, les facteurs de localisation des
productions sont relativement homogènes, qu'il s'agisse des
con-ditions naturelles, des structures agraires ou des industries
liées à l'agriculture. Alors qu'auparavant on faisait de tout
partout, chaque région tend à être caractérisée par une ou deux
spéculations dominantes. Le processus de spécialisation entraine
donc une différentiation spatiale et Une simplification de la
géographie agricole.
Le travail agricole est un facteur de production largement
contraint. Sa composante essentielle, le travail familial, est
en effet déterminée par la demande de travail des autres
sec-teurs, c'est-dire par des facteurs exogènes, et par les
condi-tions démographiques. Le processus d'intensification suivi par
l'agriculture apparait donc comme le moyen logique d'élever la
productivité du travail et le revenu agricole. Il a sans doute
réussi puisque l'agriculture n'a pas abandonné les régions à
haut niveau de salaire pour s'installer dans les régions à
fai-ble rémunération salariale. C'est-ce que montre le développement
qu'à l'inverse certaines zones périphériques font l'objet d'un déclin marqué.
Le processus d'intensif ication suppose des élas tici tés de
substitution entre facteurs élevées. De plus i l n'a été rendu
possible que pa r d ' importants progrès techniques, progrès
méca-ni<] ues qui. ont permis de cult iver davantage de terre par
tra-vailleur. progrès biologiques qui se sont traduits par une
élé-vation des rendements.
*
L'explication des dispari tés internes de l'agriculture
conduit à définir un programme de recherche dans lequel le
pro-cessus de spécialisation et d' intens ification joue un rôle cen-trCil. La première question porte sur l'influence de ce processus
Sllr la product lvité du travail et les disparités. La seconde
plus fondamentale doit condui re à stinterroger sur les
mécanis-mes d'intensifi.cation. Elle peut s'exprimer en référence à la
théorie de la production, en étudiant les substitutions de
fac-tellrs et l'influence du progrès technique. Pour y répondre on
peut recourir à une formalisation en termes de fonction de
pro-ductlon.
Des fonctions classiques comme la fonction de Cobb-Douglas et la CES ne peuvent pas être retenues parce qu' elles imposent a
priori des hypothèses sur les élasticités de substitution. Il
faut considérer une fonction qui impose le minimum de
contrain-te~ et qui puisse être facilement estimee par des moyens
écono-métrlques. La fonction translogarithmiqlle possède à cet égard
xi-ble au sens où elle fournit une approximation du second ordre de
fonctions de productions générales. Elle permet donc d'étudier
les caractéristiques des frontières de production qui font
intervenir des dérivées partielles du premier et du second
ordre, donc en particulier les élasticités de substitution, sans
leur imposer de valeurs a priori. De plus, ces valeurs ne sont
pas uécessairement fixes, mais peuvent varier selon la combinai-son proùuct ive. La fonction translogari thmique permet ùe consi-dérer un nombre quelconque de facteurs de production, en
parti-culier les consommations intermédiaires) à c8té du capital, de
la terre et ,lu travail. Elle fournit donc un cadre théorique
pour étudier les possibilités de substitution entre
consomma-tions intermédiaires et facteurs primaires.
Pour mesurer le degré de substituabilité entre facteurs,
les élasticités de substitution partielle de Allen s'avèrent
adéquates. Elles sont Eaciles à obtenir dans le cas d'une
technologie mu1tifacteurs représentée pour une fonction trans1o-garithmique. A partir de ces élasticités, il est possible d'étu-dier la demande dérivée de facteurs et les questions
fondamenta-les de. théorie de la produc tion posées par la séparabilité et
l'agrégation des facteurs. Par ailleurs, l'introduction du
progrès technique sur la base de cette fonction conduit à une
spécification qui permet d'étudier la question des biais
factoriels et des rythmes de progrès technique. Ce modèle
général perme t donc de séparer dans le processus
d'intensification les effets des rapports de prix de ceux du
progrès technique.
*
La mise en oeuvre de ce programme de recherche souli!ve des questions de sources statistiques. L'approche la plus naturelle
consisterait en effet à utiliser des donnés micro-économiques
relatives à différentes périodes. On pourrait alors en
regrou-pant différents échantillons construire des séries
faute d'un suivi statistique convenable de~ exploitations
agri-coles. La source micro~économique la plus complite, qui est le
Réseau d' Infol'lllation Comptable Agricole développé sous l'égide
de la Commission des Communautés Européennes à partir de 1967,
ne pel'lllet pas de constituer de telles séries. De plus, la
cou-verture du champ est insuffisante pour les très grandes et les tris peUtes exploitaUons. (Cranney et de Miribel 1983).
La carence des sources statistiques conduit à privilégier
une approche régionale des disparités agricoles. Ceci est
pos-sible puisqu'on dispose avec les comptes départementaux de
l'agriculture de séries homogènes qui débutent en 1962 et cou-vrent donc une période de grandes mutations agricoles. Il s'agit
de données constituant une base de données départementales et
qui sont pour partie inédites.
Le choix du département constitue un compromis entre la
région économique trop hétérogène et la région naturelle qui
relive d'un découpage mal adapté
à
la collecte de données. Ledépartement est une circonscription administrative en place
depuis longtemps sans changement, ce qui pel'lllet de constituer
des séries chronologiques. Par ailleurs il s'avère suffisamment homogène sur le plan agricole ce qui pel'lllet de comparer
valable-ment .les agrégats des différents départements. Comme nous le
verrons il est possible de caractériser l'agriculture au niveau du département par un ensemble restreint de variables qui décri-vent l'orientation des productions et les facteurs de production mis en oeuvre.
Ce . travail constitue une progression d'une approche
des-criptive et statistique·dont les limites apparaissent clairement
à la fin de la premUre partie, à une analyse fondée sur une
approche moderne de la technologie. Il en résulte une
présenta-tion en deux parties.
1ère partie :
Essai d'explication· des disparités de
producti-vité du travail.
2ème partie : Analyse de la structure de la technologie
àpartir
d'une fonction translogarithmique.
La
première
partie
fO\1rnit
tout d'abord
un
constat
sur
l'importance et l'évolution des disparités.
Puis
elle propose
une analyse de la relation entre disparités et croissance basée
sur la spécialisation et l'intensification. Elle aboutit ainsi
àun ensemble de résultats cohérents mais insuffisants eu égard
àleurs fondements théoriques. La seconde partie en s'appuyant sur
une spécification translogarithmique pour représenter la
fonc-tion de producfonc-tion de l'agriculture la complète, en proposant un
modèle explicatif de l'intensification.
Cette recherche est centrée sur la période 1962-81, aussi
a-t-il paru opportun de faire précéder son exposé d'un chapttre
introductif. Il propose uoe fresque de l'évolution de
l'agricul-ture française en longue période et fournit des points de
repè-res utiles pour certaines interprétations.
CHAPITRE
INTRODUCTIF
L'EVOLUTION EN LONGUE PERIODE DE L'AGIl.ICULTURE FRANCAISE
Ce chapitre introductif fournit des points de repère utiles à la compréhension des développements ultérieurs. Il propose une fresque de l'agriculture française. les dernières décennies étant replacées danR' la longue période. Sans proposer d' inter-prétation générale, les évolutions sont illustrées à partir de certains facteurs explicatifs. L'infuence des rapports de prix et du progrès technique est ainsi privilégiée.
Cette fresque est organisée en quatre parties
1. Croissance agricole.
2. Orientation des productions.
3. Evolution des combinaisons productives. 4. Résultats économiques.
1. Croissance agricole
Replacée dans une perspective historique, la croissance
agricole des dernières décennies revêt par Sâ vigueur un
carac-tère exceptionnel. Différentes sources statistiques permettent
'<l.,
le mont rer. Sans être exactement comparables. ellesapparais-sent relatilrement cohérentes quant aux variations du rythme de
la croissance.
Pautard (1965, p. 38 et sq.) considère qne le milieu du 19è siècle marque 1<, début d'une période de "démarrage méthodique"
caractérisée par une croissance rapide de la production jusque
vers 1892, ensuite 11 y aurlla eu un plafonnement jusqu'à la
seconde guerre mondiale et une accélération de la croissance à partir de 1950.
Ces premières observations peuve1lt être complétées en s'
ap-puyant sur les données de Toutain (1961) qui constituent les
séries les plus longues puisqu'elles couvrent la période
1.700-1958. Cet auteur a déterminé une série d'agrégats agricoles
'lui peuvent être rapprochés, sans qu' il
Y
ai t correspondanceexacte, des not.lons ut nisées dans les comptes de l'agriculture établis dans le système élargi de comptabilité nationale (Wagner et
"t.,
1977).Tout erl insistant sur le degré d'incertitude élevé de ces
données, surtout avant 1840 date de la première enquête
agrico-le décennaagrico-le, on peut faire apparattre quatre périodes
distinc-tes, à ia vitesse de croissance de plus en plus rapide. La
première s'étend de 1700 à la Révolution (ou jusqu'à la fin du
Pre••ier Empir'" i l es t rliff lcile d' êt re plus précis). La seconde
couvre le 19è siècle et va jusqu'à 1914. Enfin, la deuxième
guerr.e mondiale sépare la tl'oisième période dl~ la quatrième.
Compte tenu de ce découpage,il y aurait eu une croissance
jusqu'à la Révolution; puis une accélération avec 0,9 % de
l815-24 à 1905-14. L'entre deux guerres seraIt caractérisé par
uu tau'K plus élevé de 1) 3 % et les années cinquante par une
rupture très nette avec 4,4 % de 1945-49 à 1955-58.
L'analyse de l a croissance française depuis la fin du 19è siècle, menée dans un cadre comptable plus rigoureux confirme ce découpage en périodes (Carré et aL, 1972). La production
agri-cole a augmenté au taux de 1,0 % par an de 1892 à 1914, puis
\,2
%
de 1920 à 1938 et enfin de 3,3%
de 1945 à 1964. Comparéeà d'autres agricllltures (.Japon, Allemagne, Danemark, Royaume-Uni.
et Etatg-Unis), la croIssance agricole française apparaît
parti-culièrement faible jusqu'à la séconde guerre mondiale, puisque
seul le Royaume-Uni réalise une performance inférieure (RlIttan
et al., 1978 p. 49). Il semble bien que l'après-guerre ait
cor-respondu à lin changement du rythme de croissance. A la
diffé-renCt~ de l'industrie il ne peut être considéré comme le
rattra-page des retards dus à la crise et à la guerre, dans la mesure
où la production agricole a été relativement moins affectée par ees évènements (Carré et aL, 1972 1'.41).
En ce 'lui conce rue la période suivant le deuxième conflit
mondial, l'année 1973 marque une rupture de croissance et ceci
plus nettement dans l'agriculture que dans le reste de
l'écono-mie (DuboIs 1980, 1985). En effet, eu base 1971, le taux de
croissance de la production finale passe de 2,6 % par an de 1959
à 1973 à 2,0
%
de 1973 à 1983. En plus longue période, pour lavaleur ajoutée) la rupture est encore plus nette, avec un taux
de croissance de 2,4
%
de 1951 à 1973 et de 1,4%
de 1973 à 1984(Dubois, 1985).
La erolssance agr.icole sur longue période s'est ac-compagnée
d1un recul relatif dans l'économie natIonale. L'agri.cultllt'e
représent'Jit près de 80 %de la population employée dans la
pro-duet ion matérielle
à
la veille de la Révolution et 58 %en 1911(Harezewski 1965, tableau 17). Cette évolution s'est ensuite
accélérée et poursuivie dans la période récente. D'après les
la comptabilité nationale selon la base 1956 (INSEE, 1981) il Y
avai t 29 % des actifs employés par l'ensemble agrIculture,
sylviculture et pêche en 1949. Selon les séries de la base 1971,
ce pourcentage vaut 22,1
%
en 1959 et 7,8%
en 1984.La contribution de l'agriculture au produit physique a été dépassée par celle de l'industrie et de l'artisanat probablement assez tôt au 19è siècle (Marczewski 1965 p. XIV). En 1911, elle
ne représentaIt plus que 40
%
du total (Marczewski 1965, tableau17). Selon les ~omptes natIonaux en base 1956, la part de
l'agriculture (laquelle inclut toujours la sylvIculture et la
pêche) diminue assez peu au cours des annees cinquante, puisque
sa valeur ajoutée brute représente 12,7 % de la production
intérieure brute en 1949 et 10,9 % en 1959. Par contre la
réduction est beaucoup plus importante au cours des 25 dernières
années d'après les comptes nat ionaux en base 1971 la part
passe de 10,6 % du produit IntérIeur brut marchand en 1959 à
seulement 4,2 % en 1983 (Pierre et Polllna, 1984) et 4,1 % en
1984 selon les données provIsoIres.
Tout au long du lYè siècle et celà à l'inverse de
l'Angle-terre (Marcewski, 1965) la part de l'agriculture dans la
popula-tion employée est constamment supérieure à sa part dans le pro-duit. Cette différence est demeurée très importante en France et correspond à un écart de productivité apparente du travail entre
l'agriculture et le reste de l'économie, ce qui fait aussi que
les mIgratIons agricoles ont pu avoir un Impact sensIble sur la
croIssance de l'économie, tout au moins jusqu'en 1973 (Dubois,
1985).
Les historiens insistent à juste titre sur les
transforma-tions de l' agricul ture au cours des dernières décennies, mar-quée,s par une modification profonde de sa plac.e dans le système productif et les échanges extérieurs ainsi que par une mutation
des rapports sociaux du monde rural (Gervais et al., 1977). Ces
transformations se traduisent par une évolution des orientations et des combinaisons productives. Nous examinerons donc le
végéta-les) et eelui des faeteurs physiques de la croissance
(consomma-tions intermédiaires, terre, capital, travail) puIs les
résul-tats économiques de l'agriculture saIsis à travers différents
indicateurs de productivité et de revenu du travaIL Cette
ana-lyse globale s'appuie sur les séries homogènes de comptabilIté
nationale en base 1971, quI démarrent en 1959 (Pierre et
Pollina, 1984). Autant que faire se peut, nous la replacerons
daas le mouvement économique de très longue période. Cette
approche générale servira de toile de fond aux analyses des
d ispa. rités de l'agriculture quI seront développées par la suite et qui constituent le coeur de cette recherche.
2. Orientation des productions
De 1959 à 1983, la progression du volume de la production
finé! le Il'a pas été régulière (graphique 1). Certaines années ont
el1r"gistré une baisse de production (1961, 63, 69, 81) suivie
d'une reprise sensible. La période 1974-77 se distingue bien par
une rupture de l'évolution passée ; les fortes hausses de 1978
(7,1 %) et de 1979 (8,1 %) ne permettent pas de rattraper la
tendance antérieure (2,6 % par an). Cette rupture d' ord re plus
général a été aggravée pour l'agriculture, par les mauvaises
condi t ions climatiques de 1976. Elles ont eu des conséquences
immédiates sur les productions végétales et plus étalées sur les productions animales.
Graphique 1. Evolution du volume de la production finale de 1959
à
1983 •..
..
...
PF.
...
..
~"","---=---;.'-~----.\n"'---;.;---~--••
"'----~·_.
.
..
Ce processus de croissance s'est accompagné de changements profonds qui ont modifié l'orientation des productions. Certai-nes ont augmenté à des taux très élevés, d'autres au cont raire ont régressé, tout au moins en termes relatifs. C'est ce que nous verrons dans un premier sous-paragraphe. Ces évolutions seront ensuite reliées à celles des prix dans le cadre d'un modèle si.mple de productions jointes. Cette explication en termes de hiérarchie des prix agricoles et d'évolution différen-tielle du système de prix joue d'ailleurs un rôle central chez c.ertains auteurs d'inspiration marxiste (Gervais 1972). Certes importante, cette analyse ne saurait constituer cependant qu'une première étape.
Pour faire apparattre les mouvements de fond, nous nous efforcerons d'éliminer les variations conjoncturelles en raison-nant sur des moyennes pluri-annuelles. Pour ce faire. la période de forte croissance 1959-73 est divisée en cinq sous-périodes de
trois années. Trois autres sous-périodes sont ensuite
2.1 Evolution des différentes productions
Le tableau 1 fournit par sous-période la structure de la
production finale. Il distingue trois postes pour les
produc-tions végétales (céréales, légumes-fruits, vin) et trois postes
pour les productions animales (bovins, porcs-oeufs-volailes,
lait) qui représentent de 87 % à 88 % du total. Il fournit de
plus la part de l'ensemble des produtions végétales et des pro-duction animales.
Tableau 1. Structure de la production finale en volume (en %)
léguJœs productioo: porcs,œufs produc. produc.
céréale fruits vin végétale bovins volailles lait aniJœ.le finale
195%1 9,4 15,7 10,5 42,S 20,1 15,8 15,4 57,5 100,0 1962";4 10,9 15,1 12,1 45,1 18,3 15,2 16,0 54,9 100,0 196s.,;7 12,2 14,1 10,4 43,5 18,9 15,4 16,9 56,S 100,0 1968-70 14,0 13,8 9,9 45,2 18,0 15,1 16,9 54,8 100,0 1971-74 17,2 11,9 9,7 46,7 17,5 15,3 16,1 53,3 100,0 1974-77 15,9 10,3 9,9 43,8 18,4 16,7 16,7 56,2 100,0 197&-81 18,0 10,0 9,2 45,0 17,0 17,4 16,5 55,0 100,0 1982-83 18,3 9,3 10,7 46,1 16,0 17,6 16,4 53,9 100,0
Source • Pierre et Pollina (1984)
Le rapport entre production animale et végétale après avoir
dimi.nué de 1,4 en 1959-61 à 1,1 en 1971-74 a augmenté par la
suite pour retrouver les valeurs de l'ordre de 1,2 qu'il avait
au cours des années soixante. La diminution de la production à
part ;.r de 1974 est principalement due au recul des productions
végétales, les productions animales suivant une évolution plus
régulière.
La relative stabilité du rapport des productions végétales
terme (Tou tain 1961, p. 171). Au cours de la première moitie du
18è siècle les productions vegetales sont largement dominantes
et representent sans doute plus de 80 % du produit agricole
final. Les progrès de l'e1evage à partir de la fin de l'Ancien
Regime vont permettre une progression plus rapide des
produc-tions animales qui. representeront en gros la même valeur que les
productions vegetales à la fin des annees 1930. Le mouvement
s'est donc poursuivi dans les annees quarante et cinquante
jusqu'à un certain équilibre qui. continue à prevaloir autour
d'un partage de la production finale en 45 % de productions
vegetales et 55 %de productions animales.
Le quasi-doublement de la part des céréales depuis 1959 ne
s'inscrit pas dans la tendance à long terme marquée par une
régression relative jusqu'en 1938 (Toutain, 1964, p. 171 et
sq.). En corollaire la part des fruits et légumes a diminue,
celle du vin est restee stable. Parmi les productions animales,
la production de viande a depassé celle de lait vers la fin des
annees 1930 (Tou tain 1961, p. 172 et sq.). Le rapport ne s'est
pas profondement modifié depuis 1959. mais dans 1 '.ensemble
viande, les bovins ont régressé en termes relatifs au profit des
porcs et des volailles. Comme on le verra ces évolutions peuvent
être reliees au progrès technique et aux rapports de prix
relatifs, et de là à la politique agricole commune.
La progression du volume des ceréales s'est effectuee de
façon continue excepte de 1974 à 1976. Les trois principales
(ble tendre, orge et maIs) qui représentent environ Y5 % de la
production de céréales) ont vu leur volume s'accroître à des
taux très rapides 4,4 % pour le blé tendre de 1959 à 80, 17 %
pour le màïs de 1959 à 75 et 5,3
%
pour l'orge de 1959 à 80. Ils'en suit un bouleversement de la structure de la production
ceréalière avec une nette diminution de la part du ble tendre et de l'orge et un doublement de celle du maIs (tableau 2).
Tableau 2. Structure de la production de céréales en .vo1ume (en %)
blé
tendre orge mars autres total
1959-61 67,2 19,0 9,6 4,2 100,0 1962-64 65,5 21,5 9,3 3,7 100,0 1965-67 59,3 22,5 14,0 4,2 100,0 1968-70 53,0 20,6 21,0 5,4 100,0 1971-73 52,0 18,6 24,3 5,1 100,01 1974-77 54,8 18,5 21,0 5,7 100,0 1978-81 57,1 17,6 21,1 5,2 100,0 1982-83 61,0 13,8 21,8 3,4 100,0
Source Pierre et Pollina (1984)
L'accroissement de la production de céréales résulte tout d'abord d'une augmentation considérable des rendements. Ils sont multipliés par 2,1 pour le blé tendre, 2,2 pour le mars et par 1,6 pour l'orge (tableau 3). Le recul des rendements au cours de la période 1974-77 est imputable aux hausses de prix des consommations intermédiaires après 1973, leurs conséquences ayant été aggravées par la sécheresse de 1976. Cette année correspond à un minimnm relatif des rendements.
Tableau 3. Evolution des rendements par hectare (1968-70= 100)
blé orge,
tendre mars hiver et
d' hiver nrintemns 1959-61 69,5 56,1 80,7 1962-64 81,7 55,6 90,7 1965-67 89,7 82,6 99,3 1968-70 100,0 100,0 100,0 1971-73 123,1 101,3 118,1 1974-77 117,4 89,8 109,3 , 1978-81 11982-83
1
138,9 144,4 107,6 124,3 130,1 130,9L'évolution des superficies en céréales est replacée en très longue période au tableau 4. Au début des années soixante
le sarrasin était pratiquement abandonné et le seigle était
devenu marginal. Une part croissante des superficies en céréales
est alors occupée par le blé tendre, le maIs et l'orge: 81
%
en1963, 84
%
en 1970, 90%
en 1979 et 91%
en 1983.Tableau 4. Evolution des surfaces consacrées à quelques cultures
(1000 ha) j
1
,
1852 1882 1906 1934 1953 1963 1963 1970 1979 1983 (1) (1 ) (1) (1 ) (1 ) (1) (2) (2) (2) (2) blé tendre!1
698/, 7191 6539 5374 4336 4265 3812 3585 3986 4713 maIs 601 548 492 341 387 910 952 1184 1994 1685 seigle 2160 1744 1256 683 418 235 233 135 116 101 orge 1018 976 713 724 1168 2353 2573 2953 2802 2143 sarrasin 709 645 513 305 89 40 45 total céréales 9029 9226 9801 9389 bett. ind. 112 240 277 316 399 381 371 403 545 490 colza 93 31 11 87 102 120 336 345 470 Domme de t. 829 1338 1509 1410 952 771 834 384 275 203(1) Source: Cuigou (1972, tome 2) p. 76. (2) Statistique Agricole Annuelle.
La ftn du 19è siècle correspond à un maxi.lnum des
superfi-cies consacrées au blé et au maIs qui régressent par la suite.
La product Ion nat lonale es t concurrencée par les importations
massives de blé, de maIs (Amérique du Nord, Argentine) et d'au-tres céréale,8 (riz en provenance d'Indochine).
A partir de la fin des années cinquante on a une certaine stabilité des superficies en blé (si on excepte la forte hausse
de 1979 à 83) et une augmentation forte de la production,
permi-se par une méc'lnisat Ion généralisée et l'introduction de
nouvel-les variétés. A ces facteurs, s'ajoute pour le maIs une
exten-sion considérable des superficies de 1953 à 1979. Celle-ci a été
rendue possible, hors des zones traditionnelles du Sud-Ouest par l'introduction des mais hybrides plus précoces, qui peuvent être
cultivés au nord de la Loire. Le mars grain tend à devenir un
substitut du blé tendre j les superficies consacrées
à
ces deuxcultures s'accroissent de façon régulière à partir de 1970. Pour
l'orge, après une hausse continue les superficies diminuent. Ce
recul es t imputable
à
la concurrence d'aliments pour animauxfabriqués à partir de produits '{Olportiis (soja, manioc). Les
concurrences entre céréales secondaires, destinées à
l'alimenta-tion animale rendent compte de l'évolul'alimenta-tion des superficies.
Dans le groupe deR. fruits et légumes, se,u1e la production
de fruits frais progresse (1,4 %par an de 1959
à
80). Lespro-ductions de légumes frais, de légumes secs et de pommes de terre
régressent aux taux respectifs annuels de - 1,7 % - 2,4 % et
-3,5 %. Il s'en suit une modificat.1on complète de la structure
du poste fruits et légumes (tableau 5) caractérisée par la
bais-se de la part .des pommes de terre de 27 % à 16 % du total,
compensée par la hausse de celte des fruits de 24
%
Il
34%.
Cette régression de la culture des pommes de terre s'observe
toutefois dès le début du 20è siècle. Elle s'est accélérée au
cours des années soixante par le remplacement progressif de la
pomme. de terre dans l' alimentat ion animale, la consommation
humaine diminuant dans une moindre mesure (Bonnieux et al.,
1976) •
Tableau 5. Structure de la production en volume de fruits et
légumes (en
%)
1
pommes de légumes légumesterre secs frais frais . total
1959-61 27,7 2,2 46,2 23,9 100,0 i959-64 27,0 2,i 45,1 25,8 100,0 1965-67 21,9 1,8 48,1 28,2 100,0 i 968-70 19,6 1,5 47,0 31,9 100,0 1971-73 19,4 1,1 45,7 33,8 100,0 i974-77 19 2 1 2 48 4 31 2 100 0 1978-81 1982-83 18,9 . 16 3 1,3 1 7 46,7 48 5 33,1 33 5 100,0 100 0 Source Pierre et Pollina (1984)
Parmi les autres productions végétales il faut insister sur
la croissance plus rapide de la production de vins de qualité
que de celle de ~ins courants, il s'en suit que le rapport des
premiers aUX seconds est passé de 0,7 en 1959-61 à 1,1 en
1982-83. Ces é~olutions divergentes entraînent des modification
profondes de la concentration régionale de la viticulture au
détriment des régions méditerranéennes.
La croissance du ~olume de la production .de plantes
indus-trielles (3,8 % par an de 1959-80) peut être replacée dans la
longue période pour la betterave industrielle et le colza
(tableau 4). Les superficies en bettera~es industrielles ont
augmenté depuis le lu.ilieu du 19è siècle. Dans la période récente
la hausse a été fa~orisée à partir de 1968 par la mise en place
du régime communautaire des betteraves. La croissance des super-ficies assocIée à des progrès importants des rendements entraine une augmentatIon de la part des betteraves industrielles dans la
production finale, elles sont passées de 2,1 % en 1959-61 à
2,5
%
en 1982-83 a~ec un maximum à 2,8%
en 1978-81.Les superficies en colza ont considérablement régressé
pen-dant la première moitié de ce siècle pour augmenter par la
suite, avec une mult Ipllcatlon par 3,9 de 1963 à 1983 (tableau
4). Au cours des deux dernières décennies, en dépit des attaques
menées cont re la quaIi té de l'nuLle de colza qui ont eu des
effets à court terme, la production du colza et plus
générale-ment des oléagineux s'est fortegénérale-ment accrue. Elle ne représentait
que 0,2 % de la produc.tion finale en 1959-61 alors qu'elle
atteint 1,8 %en 1982-83 c'est-à-dire davantage que les pommes
de terre ou les fleurs. Une sole oléagineux-céréales tend à se
développer tou·!: comme aux Etats-Unis (Mounier, 1984, p.l05).
On Ile dipose pas pour les productions animales des éléments
s taUs tiques nécessaires auX études de très longue période. A
partir de'? série'? récentes, quelques remarques peuvent être
fai-tes sur les évolutions depuis 1959. Dans chacun des groupes,
bovins d'une part, porcs-oeufs et volailles d'autr.e part les
La production de gros bovins a augmentê
à.un taux supêrieur
à
celui de l'ensemble de la production finale, alors que celle
des veaux a stagnê. Le taux de croissance est en effet de 2,4 %
de 1959
àSOpour les gros bovins et de 0,6
%
pour les veaux. Il
s'en suit un accroissement de la part des gros bovins (tableau
6). Les êvolutions n'ont pas êtê dgulli!res, les fluctuations de
la
production
de
veau
ont
été
marquées
par
des
variations
d'amplitude considérables.
Tableau 6. Structure de la production en volume de bovins et du
groupe porcs-oeufs-volailles (en
%)
1
bovins
porcs - oeufs
volailles
,
gros
veauxtotal
porcs
oeuf.s
volailles
total
bovins
,..
1959.,.61
65,6
34,4
100,0
61,4
16,6
22,0
100,0
1962-64
.62,8
37,2
100,0
59,3
17,0
23,7
100,0
1965-67
66,4
33,6
100,0
59,7
15,7
24,6
100,0
1968-70
66,8
33,2
100,0
56,2
17,2
26,6
100,0
1071-73
69,7
31,3
100,0
55,4
16,2
28,4
100,0
1974-77
72,2
27,8
100,0
53,6
16,1
30,3
100,0
1978-81
69,6
30,4
100,0
51,8
15,2
33,0
100,0
1982-83
69,8
30,2
100,0
48,4
15,1
36,5
100,0
Source
Pierre et Pollina (1984).
une croissance régulière au
volailles, il faut distinguer deux sous-pêriodes,
La production d'oeufs a suivi
tau'" moyen de 2,4
%l'an de 1959
à1980. Pour les porcs et les
l'annêe 1971
correspondant
à la date charnière. Dans la première sous-période
la production pOrcine stagne (0,9 % par an) alors que celle de
volailles augmente fortement (4,0
%par an). Les annêes soixante
di'" correspondent dans les deux cas
à une accêHlratlon de la
croissance avec respectivement 2,6
%par an pour les porcs et
5,5
% par an pour les volailles. Il en rêsulte uue êvolution dn
rapport de la production porcine
àcelle de volailles (tableau
2.2 Modèle de productions jointes
A l'échelon de l'exploitation agricole, a fortiori aux
.niveaux régIonal et national les productions agricoles sont
jointes. Il n'y a sans doute pas de produits indépendants sur le
plan technique puisque même dans le cas de l'élevage ovin le
rapport entre la production de laine et la production de viande
est susceptible de va,ier. On peut rendre compte du choix des
productions à partir d'une fonction de production multi-produits
susceptible d'une représentation graphique simple lorsque leur
nombre se réduit à deux. Il est alors possible de montrer
l'in-fluence des rapports de prix sur le choix des productIons. Cette analyse partielle permet d'illustrer l'évolution de la structure de la production finale.
Les prix
graphIque 2
étant supposés
deux produi ts
exogènes, on considère sur
YI et Y2 et la courbe
le de
transformation Co associée à un niveau donné d'input et un
état fixé des techniques. L'opposé de la pente de la tangente à
la courbe Co mesure le taux de transformation des produits,
c' est-à-di re la proportion suivant laquelle i l faut sacrifier
Y2 pour obtenIr plus de YI (ou inversement). Si le rapport
du prix du produit YI au prix du produit Y2 est représenté
par la valeur absolue de la pente de la droite Eo Do, le
point Ao qui est le point de contact entre Eo Do et Co
correspond au rapport optimal entre Y2 et YI pour une
el)treprlse qui maximise son profit. Le rapport Y2/Yl est
encore représenté par la pente de la droite OAo ' Si le prix
relatif de Y2 par rapport à Y1 augmente, la pente de OAo
Graphique 2. Courbes de transformation des produits.
D,
c,
Si le progrès technique profite également alll' deux
produc-tions, l'évolution des courbes de transformation peut être
représentée par uue famille d'arcs de ,cercles concentriques, qui
s'éloignent de l'origine à mesure que le niveau de progrès
technique s'élève. Généralement. il n'y a pas lieu de faire une
telle hypothèse. Ainsi, sur le graphique Z on a supposé que le
passage de la courbe Co à la courbe Cl se traduisait par un
ac.croissement en proportion plus important de la production de
Yz que de la production de Yl. La courbe Cz correspond à
la situatl'Jn inverse.
Soit tout d'abord le passage de Co à Cl· La droite El
Dl est parallèle à (lo Do donc le point Al correspond au
nouvel équilibre associé au mÊ!me rapport de prix que Ao • mais
de Ao à Al i l y a un accroissement de YZ/Yl. Les points
A" A3 et A4 correspondent aux trois autres cas possibles
- AZ, le prix relati.E de YZ s'accroit et le rapport
YZ/Yl augmente fortement,
A3, le prix relatif de YZ diminue et le rapport
YZ/Yl augmente plus faiblement, la baisse de prix étant
compensée par la déformation de la courbe de transformation.
A4,
le prix relatif de YZ diminue forte.nent et lerapport YZ/Yl diminue en dépit de la déformation de la
cour-be de transformation.
Si maintenant AS désigne le point de contact de
El Dl et de CZ, à même rapport de prix la déformation de
la courbe de Co en Cz et a fortiori de Cl en Cz se
traduit par une diminution du rapport YZ/Yl.
production pour former un seul lnput permettant d'obtenir tous
l,,,, produits ; 11 permet de donner une interprétation à
certai-nes subs titutions qui ont eu lieu au cours de la période que
llOUS -étudions.
Le tableau 7 fournit l'évolution des prix et des quantités pOlIr cinq couples
- céréales - lait, - maIs - blé tendre,
- oléagineux - c·éréalest
- laIt - viande bovine, - volailles - porcs.
Tableau 7.Substitutiou des productions (1968-70 = 100)
céréales/lait maIs/blé tendre oléagineux lait/ volailles/
céréaies viande bovine ' porcs
. p q p q p q p q p q 1959-61 104,5 73,2 128,0 36,2 105,2 25,1 127,9 81,4 123,2 75,8 1962,-63 103,4 81,7 105,0 35,8 101,9 47,6 112,1 93,0 108,1 84,4 1964-67 LOl,7 86,8 102,9 59,7 95,0 82,6 104,2 95,0 100,3 87,0 1968-70 100,0 100,0 100,0 100,0 iOO,O 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 1971-7:1 87,4 127,9 98,6 118,3 96,2 98,4 96,0 98,1 99,7 108,0 1974-77
n,6
114,0 108,7 97,0 96,9 84,3 101,8 97,0 97,1 119,9 19713-81 86,7 131,2 lOB,9 93,5 100,6 108,6 104,6 103,7 104,1 134,0 19132-133 85,6 13'3,7 U5,9 90,3 120,0 169,8 103,2 109,7 98,2 159,2 .not<' : Pour chaque production on a établi un indice de prix et
de volume par sous-période en base 100 en 1970
(Source: Pierre et Pollins 1984). Les indices pet q dU.tableau
sont des indices de prix et de volume relatifs obtenus en fai-sant le rapport des Indlces correspondants, pour les productions c"ncernées. On a choisi comme origine de ces indices relatif s l a
La substltution céréales-lait est particulièrement
intéres-sante eu égard au poids de ces productions dans la production
finale totli1e. Sur longue période le prix relatif des céréales
diminue et les quantités de céréales suivent une évolution
géné-rale à la hausse mais avec une bais se relative en 1974-77. Il
faut noter que les rendements relatifs des céréales par rapport au lait suIvent la même évolution que les quantités relatives. ,Ce rapport peut servir d'indicateur de l'évolution relattve des
"techniques. l..a substtt.,tior' des céréales au lait semble donc
correspondr.e à une déformation du type Co vers Cl et passage
de Ao en A3, où
Y2
représente les céréales etlait. Derrière cette évolution générale i l semble qu'il
une sous-période centrée sur 1975, pendant laquelle la
YI le
y ait eu déforma-tiol1 de la courbe de transfo.rmat Ion a joué en faveur du lait, il
y auralt alors eu UI1 équilibre provisotre 'lui peut <ltre
repré-senté par A6 situé sur la courbe Cz. Cette sous-période est
mar'luée par deux phénomènes majeurs, la hausse brutale du prIx
de l'énergie et la sécheresse de 1976. Aussi peut-elle être
con-sidérée comme atypique.Il est clair que cette .interprétation
correspond à une simp1ificatlon et que la courbe de
transforma-tion se déforme de façon continue.
Dans le groupe des céréales, la subs titution du mais au
blé, observée sur longue période paraIt s'<ltre déroulée en deux l'hases. Au cours de la première, en termes relatifs les quanti-tés (table".u 7) et les rendements de maIs (tableau 3) augmentent tandi." que les prix dienlnuent (tableau 7). La seconde phase est caractérisée par une inversion de ces évolutions. Si le maIs est
reprêsenté par YZ et le blé tendre par YI, la déformat iem
peut être figurée par le plissage de Co à Cl suivie d'une
déf.ormation durable de Cl en CZ' Les poInts d' équili bre