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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Le plan mythique et la connaissance scientifique : Liaisons et problèmes

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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LE PLAN MYTHIQUE ET LA CONNAISSANCE

SCIENTIFIQUE:

LIAISONS ET PROBLEMES

Nicoletta LANCIANO DipartimentodiMatematica - Università di Roma 1

MOTS CLEFS Mythe, Connaissance, Astronomie, Culture globale et culture scientifique.

RESUME : L'usage des mythes dans la pédagogie est une possibilité pour considérer le plan émotionnel, le plan des perceptions sensorielles et le plan des symboles.

La rencontre entre mythe et science peut-elle être non pas un conflit, dans lequel l'un essaye d'éliminer l'autre, mais plutôt un enrichissement?

ABSTRACT : The use of myth in pedagogy is a possibility to consider de emotional plane, the plane of sensorial perceptions, and symbol's plane.

The meeting between myth and science canilbe not a conflict, in wich the one try to eliminate the other, but a redprocal enrichment?

Lavoro svolto con finanziamento 40 % MPI - 1987 A. GIORDAN, JL MARTINAND, Actes X, JES, 1988

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INTRODUCTION

L'évocation des mythes est une possibilité pour ne pas éloigner la culture globale et poétique de la connaissance scientifique du monde. D'autre part, le mythe est souvent l'expression d'une connaissance issue du contact direct de l'homme aveclanature, ses forces, ses phénomènes, une connaissance qui donne des noms aux choses, lesquels en justifient l'existence et l'histoire.

Dans les mythes les émotions qui naissent lors de ce contact - la peur et la stupeur, l'espoir et le désespoir - sont exprimées et prises en compte.

Pour des peuples qui sont en train de rencontrer la science occidentale - l'Afrique et l'Amérique du Sud ~ et qui gardent un patrimoine mythique important, la rencontre entre mythe et science peut-elle être non pas un conflit, dans lequel l'un essaye d'éliminer l'autre, mais plutôt un enrichissement.

Je vois dans l'enseignement de l'Astronomie une possibilité de connaissance integrée, de liaison entre mythe et science: la première attitude vers le ciel c'est, pour chacun, un rapport de type émotionnel et il est possible de ne pas mettre de coté l'émotion pour aller plus loin dans la connaissance du ciel.

1. DANS DES CULTURES DIFFERENTES 1.1 Un exemple qui vient du Mexique

Une amie biologiste enseigne au Mexique les sciences naturelles aux adultes non alphabétisés. Elle donne des leçons sur l'eau et elle propose des expériences sur l'évaporation. Ces mexicains pensent que les mort~ viennent nous rendre visite, surtOl! t pendant la nuit. Donc ils leur préparent de la nourriture, des tartes et de l'eau. Quelque temps après, ils reviennent et constatent qu'il n'y a plus d'eau, donc cela veut dire que les morts sont venus et ont apprécié le don. Voilà le problème: après avoir étudié l'évaporation, quelqu'un met en relation les deux choses et dit" peut-être que l'eau s'est évaporée".

Sa question que je reprends est: qu'est ce qu'ils perdent quand ils apprennent l'évaporation comme une nouvelle certitude et qu'ils mettent en cause leur culture où il n'y a pas de séparation entre les vivants et les morts, où il y a cette richesse de liaison entre les uns et les autres. On leur explique un petit phénomène mais chaque petite explication précise et ponctuelle, qui explique comment mais pas pourquoi, n'est pas si neutre. Cette science n'a pas beaucoup à dire sur les rapports avec les morts, n'a pas la vision cosmique du mythe, n'a pas de réponses pour les questions du mythe. Mais quelle est l'attention, quelle est la délicatesse de notre culture scientifique, de notre façon de la présenter, dans la rencontre avec une autre culture? C'est un problème identique qui se pose par rapport à la culture des enfants, à leurs interrogations sur le monde, àleur système d'exploration et d'explication.

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1.2 Au Sénégal

"Alors je vous souhaite du fond du coeur de retrouver le sens de l'angoisse devant le Soleil qui meurt. Je le souhaite à l'Occident., ardemment. Quand le Soleil meurt., aucune certitude scientifique ne doit empêcher qu'on le pleure, aucune évidence rationnelle qu'on se demande s'il renaîtra. Vous, vous mourez lentement, sous le poids de l'évidence. Je vous souhaite cette angoisse comme une résurrection".

(Cheikh Hamidou Kane - 1961 - L'Aventure Ambigue)

Au Sénégal, et dans d'autres pays d'Afrique, à la question "qu'est-ce qu'une éclipse?" les gens répondent à l'aide de mythes . Ces mythes montrent que l'homme et la nature sont liés dans un rapport étroit dans lequel l'homme n'est pas le maître de la nature; dans ce rapport les sénégalais conçoivent une force à l'origine des phénomènes, un dieu ou un animal.

Les gens de ces pays qui viennent étudier les sciences en Europe disent qu'ils ne croient plus aux mythes pour "croire" à la science. La science donc se trouve en conflit avec d'autres explications qui ne sont pas des connaissances ponctuelles et séparées, mais qui engagent un monde beaucoup plus vaste.

Ce qui me paraît inquiétant dans les pays où le monde mythique est encore si riche et vivace, où l'homme a des liaisons symboliques avec les choses, liaisons qui donnent un grand poids aux choses, c'est ce que le poète Kane exprime dramatiquement dans son livre "L'aventure ambigue" et ce que Christian Saglio écrit dans Sénégal: "A Dakar, en février 1963, un professeur de philosophie, Alassane Ndaw, aujourd'hui doyen de la faculté de Lettres, se demandait, lors d'une conférence, si l'étude des "acculturés" ne montrerait pas que le plus important, c'est ce qu'il gardent de leur propre culture.".

Par exemple ce Soleil qui disparait derrière la Lune pendant les éclipses, c'est quelque chose dont on s'aperçoit., qu'on regarde; on est en liaison avec cette nature dans la-quelle l'honune est frère et ami, ni dominateur ni maître.

Au moment où ce monde moins développé risq ue de perdre tout cela, j'essaye dans ma recherche pédagogique de récupérer un certain lien entre notre connaissance organisée et ce qu'il y aàla base,àl'origine, c'estàdire un certain rapport direct avec la nature, de proposer un regard d'amitié vers elle, vers cette nature qu'on a confiné à des connaissa nces séparées, dans des livres et des formules.

Je cherche à retrouver ce plan mythique dans le quel sont importantes les expériences sensorielles qui, quelque part dans le monde, est encore vivant et qui me paraît mettre l'homme dans un rapport "écologique" avec son entourage. Un rapport écologique qui nait surtout de la connaissance, du contact, de l'amitié et du respect plutôt que de la peur des désastres, et dont notre planète a un besoin vital.

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2. DEUX EXEMPLES DANS L'ORGANISATION DE L'ESPACE ET DU TEMPS

2.1 Le nombre 5 :

Giorgio De Santillana (1901-1974) a étudié la science ancienne qui vient de la connaissance du ciel. Les Pythagoriciens avaient choisi une planète, Vénus, qui avait le nom d'une déesse: les planètes se distinguaient parmi les étoiles et avaient des noms des Dieux.

Ce que les Pythagoriciens ont observé c'est qu'il y a des moments particuliers dans lesquels Vénus le Soleil et la Terre se trouvent" alignés sur une même droite" qui "pointe" sur une étoile. Ça arrive cinq fois tous les huit ans, et il y a cinq positions parmi les étoiles fixes qui se répètent également tous les huit ans. Si on joint ces 5 positions dans l'ordre temporel on s'aperçoit que Vénus dessinne dans le ciel une étoile à cinq branches, un pentacle. Donc ce que les Pythagoriciens ont reconnu c'est que Vénus avait une particularité; la beauté de son mouvement.Elle a été choisie comme guide de perfection, d'harmonie qui vient de la régularité d'un cycle qui se répète dans le temps.

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De là vient la liaison entre le nombre 5 et la planète Vénus, De là vient aussi la liaison avec le pentagone, la forme que'Aphrodite "dessine dans le ciel". La forme dite "magique" du pentagone est vue par des yeux qui sont capables d'un enrichissement mutuel entre la science et l'émotion. La séduction qu'exerce cette forme, fermée et régulière, estàla mesure de la persévérance dans l'observation: car, pour voir cette étoile à 5 branches, pour y reconnaître un pentagone, il faut observer et enregistrer les phénomènes du ciel avec ce que Giorgio De Santillana appelle la "mémoire synoptique" des Anciens. Il faut un regard complexe, religieux et scientifique, un regard qui laisse parler l'harmonie de cette forme.

2.2 Les sept corps planétaires

Dans une culture dans laquelle le temps et le calendrier s'organisent, la Lune est très importante: 4 fois 7 jours c'est le mois, le cycle de la Lune, avec ses phases.

D'autre part depuis la fin du XII siècle av.J

.c.,

les Babyloniens avaient donné aux planètes les noms de leurs dieux : les Grecs et les Romains ont fait de même. Les

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jours de notre semaine, établie par les Romains à l'époque d'Auguste, suivant une tradition d'origine babylonienne passée en Egypte, portent les noms des planètes. Lundi est le jour de la Lune, Mardi de Mars, Mercredi de Mercure, Jeudi deJupiter, Vendredi de Venus, Samedi de Saturne et DImanche est le jour du Soleil (sunday, changé dans la culture judéo-chrétienne en jour du Seigneur, Dominus donc Dimanche).

Mais pourquoi cet ordre pour les jours de la semaine?

On a par rapport à la distance de la Terre, dans la cosmologie de Ptolémée déjà adoptée par les Pythagoriciens, cet ordre d'éloignement pour les 7 corps planétaires:

Lune - Mercure - Vénus .. Soleil - Mars - Jupiter - Saturne.

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Dans cette culture ancêtre de la nôtre, qui dédie chaque heure du jourà un dieu ou à une planète, si on dédie la première heure d'une journée à la Lune, on appelle cette journée Lundi, et comme le nombre des heures est devenu 24 dans l'histoire de l'organisation du temps, et 24 n'est pas un multiple de 7, la première heure du jour suivant sera dédiéàMars et on aura Mardi ...

Si on rejoint les 7 corps planètaires dans J'ordre qu'on vient de trouver, on a une étoile à 7 pointes qui fournit une règle pour se souvenir de l'ordre des jours de la semaine.

On part donc d'une observation de l'espace, des distances des planètesàla Terre, et on construit une organisation du temps, la semaine.

~ATURNE _

JuPITE.R

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Une attitude complexe est à la base de l'organisation de l'espace et du temps: nos racines sont dans l'enrichissement mutuel entre science et mythe.

On continue à appeler ainsi les jours de la semaine, on continue à voir les 7 corps planétaires même si on ne les regarde pas même si on n'est pas capable de les reconnaître. Mais souvent on méconnait les liens entre les planètes, éléments de la nature observables, et les noms des jours de la semaine, invention de l'homme. Nos horloges rendent un instant identique à chaque autre. La culture qui a organisé la semaine avait la richesse de donner à chaque heure sa particularité.

2.3 Quelques questions

Ce qui risque d'arriver avec les autres pays c'est ce qui risque d'arriver avec tous les enfants scolarisés, qui ont en propre un patrimoine fertile d'expériences sensorielles et d'explications de type mythique et globale. Il sont chargés d'émotions mais le risque est que l'enseignement tel qu'il est, étouffe ces richesses.

Je me demande en revanche dans l'étude des conceptions, quelle est la place des mythes locaux ou des mythes dominants, expression de l'imaginaire coIIectif, dans les images "spontanées" de chaque culture, dans les dessins et dans les discours des enfants qui ne séparent pas leurs idées en disciplines, qui ne séparent pas leur vécu de ce qu'ils savent, de ce qu'ils aiment?

Je me demande encore quelle peut être la place des références mythiques dans l'enseignement scientifique.

Indications bibliographiques

- "Due numeri tra cielo e terra cinque e sette" N . Lanciano - L'educazione matematica (en publication)

- Reflections on Men and ldeas 1968 , Falo antico ejalo moderno, edit. ital.

Adelphi -

ODe

Santillana

- "Au Sénégal entre Soleil et Lune" N.Lanciano -Cahiers Clairaut, n 38 -1987

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