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L'evolution du controle judiciaire de la competence d'attribution des tribunaux administratifs

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(1)

DELA COMPÉTENCE D'ATTRIBUTION DES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS

Gabrielle Perrault Institut de droit comparé UniversitéMeGiII, Montréal

Mars 2002

«A thesis submittedto the Faculty ofGraduate StudiesandReseareh inpartial fulfilment of the requirementsofthe degree of

Master ofLaws (LL. M.)>>

(2)

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(3)

Remerciements

Je. tiens à remercier chaleureusement mon· directeur de thèse, le professeur· Yves-Marie Morissette, pour sa disponibilité et son amabilité, ses réflexions éclairantes lors de nos discussions ainsi que ses. multiples commentaires substantiels qui m'ont. sans cesse portéeà aller au-delà de ma première idée..

(4)

RÉSUMÉ

Depuis une qumzame d'années, la Cour suprême du Canada a amorcé un changement de càp important en ce qui concerne le contrôle judiciaire de la compétence d'attribution des tribunaux administratifs. Elle a délaissé une approche formaliste fondée sur la dichotomie juridictionnel! non juridictionnel pour adopter une attitude de retenue envers les tribunaux spécialisés. L'élaboration d'une analyse pragmatique et fonctionnelle a mené à la recherche de la norme de contrôle appropriée à chaque décision sous examen. Le présent mémoire est divisé en trois parties .dont la première est consacrée àl'étude des principes constitutionnels fondamentaux sous-jacents alors que la deuxième partie traite de la doctrine de l'excès de compétence pour ensuite décrire les diverses étapes de l'établissement d'une théorie unifiée menant à la détermination de la norme de contrôle appropriée à chaque cas. Finalement, la troisiême partie s'attarde plus précisément sur la détermination de l'expertise relative du tribunal administratif et la pluralité d'interprétations.

In the lastfifteen years, the Supreme Court of Canada operated a substantial move regarding judicial review of administrative action. It abandoned the formaI approach which rested upon a jurisdictional! non jurisdictional qualification in order to show more deference towards specialized agencies. The development of a pragmatic and functional analysis has led to the determination of appropriate standards of review for each decision. This thesis is divided in three parts. The first one is dedicated to the study of the fundamental principles underlying judicial review; the second part starts by examining the ultra vires doctrine and then proceeds to describe the differentsteps which led to a unified theory focussing on the determination of the appropriate standard of review. Finally, the last part looks at the way courts evaluate the tribunal's relative expertise and at the phenomenon of interpretive pluralism.

(5)

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION... 6 1. P.RINCIPES CONSTITUTIONNELS SUR LESQUELS

SE FONDE LA RÉVISION JUDICIAIRE... 8 1;1 LA <<RULE OFLAW» OU PRIMAUTÉ DU DROIT 9

Ll.l La version «extravagante» 10

1.1.2 Les critiques .: .. ;... ... ... ... ... ... ... ... 12 1.1.3 Un tempérament: la prérogative royale... .... 18 1.1.4 Vers une version contemporaire

en droit canadien '" 20

1.2 LASOUVERAINETÉPARLEMEN':fAmE 24

1.2.1 Le principe '" , ...•... 24

1.2.2 Ses limites .;... ... ... 26

1.3 LA SÉPARATION DES POUVOIRS... 28 1.3.1 1.3.2 1.3.3 1;3.4 Le principe , . . , . L'indépendancejudh:iaire .,. . . . Varticle 96 A.A.N.B .

Les clauses privatives .. , .

28 29 34 38 2. VOWETDU POUVOD;t.pE CONTBÔLE ET DE

SURVEILLANCE EXERÇÉPAR LESCPURS

SUPÉRIEURES: L'EXCÈS DECOMPÉTENCE 41 2.1 LES QUESTIONSÀPORTÉE

JURIDICTIONNELLE . 43

2.1.1 Verre.... juridktionnelle: tentative

de définition ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. . .. ... 44

2.1.2 Verre..rjuridictionnelle: ses

conséquences... .. 54

2.2 LA NORME DE CONTRÔLE . 59

2.2.1 La norme de contrôle:\lesdifférentes

étapes de son évolution... . ... ... ... ... ... ... 60

2.2.1.1 Première étape 60 2.2.1.2 Deuxièllleétape •... , .. , 62 2.2.1.3 Troi!i!ièrneétape '" 69 2.2.1.4 Quatrième~tàpe '" .. , 72 2.2.1.5 Cinqilièmeétape... 74 2:2.1.6 Sixième étape '" 77

(6)

TABLE DES MATIÈRES (Suite)

3. LA SPÉOALISATION DES TÂCHES: FONDEMENT

DE LA RETENUE JUDICIA1RE , 84

3.1 L'EXPERTISE DU TRIBUNAL . 86

3.1.1 L'expertise du tribunal administratif

par rapport à la cour de révision '" ... ... .. . .... 87 3.1.2 L'expertise du. tribunal administratif

par rapportàlânatDre de lâquestion

soumise 93

3.2 L'INTERPRÉTATION DU TRIBUNAL '" 102 3.2.1 Le toumanHnterprétatif... 102 3.2.2 Ouverture au pluralismeinterprétatif 108 3.2.3 Leparam~tre du caractère raisonnable III

CONCLUSION... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... 116 BffiLIOGRAPHIE ET AUTORITÉS " , 118 LÉGISLATION 118 JURISPRUDENCE 118 DOCTRINE: MONOGRAPHIES... 121 DOCTRINE: PÉRIODIQUES... 122

DOCTRINE: OUVRAGES COLLECTIFS , 124

(7)

L'ÉYOLUTION DU CONTRÔLE JUDICIAIRE DE LA

COMPÉTENCE D'ATTRIBUTION

DES TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS

INTRODUCTION

Le contrôle judiciaire. de la compétence d'attribution des tribunaux administratifs est considéré autant par les théoriciens. que les praticiens comme l'un des domaines les plus complexes du droit. En effet, la cour de révision doit constamment se soucier de preserver un juste équilibre entre, d'une part, le respect de la volonté du législateur de co11.fieràdes organismes spécialisés la solution finale de certaines questions (qui s'appuie sur le principe .de la souveraineté parlementaire) et, d'autre part, l'exercice de son rôle de COIJr de dI:oitcommun qui, .en vertu de la compétence générale résiduaire qui lui est attribuée, doit. veiller àce qu'il ne soit pas contrevenu au principe de la «Rule.ofLaw». Afin de compliquerun peu plus ce qui l'est déjà passablement, il faut aussi s'aSsurer de respecter les. normes qui découlentgu principe de la séparation des pouvoirs, telles qu'elles ontété développées en droit canadien.

En plus de l'interaction des principes fondamentaux sur lesquels se fonde le pouvoir de cQntrôle et· de ••. surveillance, il faut aussi tenrr compte des développements significatifs qui sont survenus dans le domaine de larévision judiciaire, surtout au cours des deux dernières décennies. En effet, un mouvement de retenue judiciaire, fondé principalement sur la reconnaissance deJa spécialisation des tâches, a considérablement modifié l'approche de la Cour suprême du Canada envers Je contrôle des. décisions des tribunaux administratifs. Ainsi, la plus haute cour a délaissé une approche formaliste fondée sur

la

dichotomie juridictionnel 1non juridictionnel au profit d'une approche contextuelle. Au moyen d'une analyse pragmatique et fonçtionnelle dont les facteurs à prendre .en compte sont clairement identifiés, la Cour détermine la marge de. manœuvre qIJé le législateur a voulu laisser à chaque tribunal administratif en regard.

de

chaque question que· ce. dernier a à trancher. ·Cette marge de· manœuvre se traduit. en une norme de contrôle positionnée sur un axe nommé spectre Ou continuum. A l'une des extrémités,

(8)

on retrouve la norme de la décision correcte, qui équivaut au contrôle le plus strict. Au milieu du spectre, est positionnée la norme. de la décision raisonnable.simpliciter·alors qu'à l'autre extrémité, se retrouve la décision non manifestement déraisonnable, qui justifie la plus grande retenue. La Cour suprême. applique maintenant l'analyse pragmatique et fonctionnelle dans tous les cas relatifs au contrôle judiciaire de la compétence d'attribution des tribunaux administratifs qui sont portés devant· elle. Elle s'est.·donc démarquée du droit •anglais qui, pour sa part, continue de s'appuyer sur. la doctrine de l'ultra vires. Cette nouvelle approche contextuelle constitue, selon nous, une nette amélioration par rapport àla catégorisation formelle qui l'a précédée. Au lieu de se concentrer uniquement sur la.disposition à interpréter, elle.tient compte comme d'un tout cohérent, des caractéristiques particulières du tribunal dont la·décision est sous étude ainsi que de l'ensemble des dispositions de sa loi constitutive. Le résultat risque donc d'être plus conforme à la réalité vécue par le tribunal administratif

Dans le but de jeter une cêrtaine lumière sur les rouages de ·la révision judiciaire, la. première partie du présent mémoire sera consacrée .aux principes constitutionnels qui en constituent le fondement. Ainsi, les principes de la «Rule of Law», de la souveraineté parlementaire ainsi que de la séparation des pouvoirs seront tout· d'abord étudiés. L'examen de ce dernier principe incluera la protection des pouvoirs exclusifs des tribunaux supérieurs de l'article96 de la LQiconstitutionnellede 18671 au regard des clauses restrictives de juridiction (communément appelées clauses privatives), .ces clauses étant d'ailleurs abondamment utilisées parle législateur québécois.

En plus de traiter de la doctrine de l'ultra vires et de ce· qu'elle implique, la deuxième partie du mémoire démontrera comment, par étapes successives, la Cour suprême en est venue à délaisser le vocabulaire «juridictionnel 1nonjuridictionneh> lié à cette doctrine pour appliquer l'analyse pragmatique et fonctionnelle à tousilescasde révision judiciaire des décisions des tribunaux administratifs. .Cette analyse, qui sert à déterminer la norme de contrôle applicable à la décision de chaque.tribunal administratif>

(9)

sera étudiée en détail afin d'en comprendre le plus possible les implications sur le processus décisionnel.

Puisque l'analyse pragmatique et fonctionnelle a été élaborée dans le cadre du mouvement de retenue judiciaire initié par la plus haute cour à la fin des années 1970, il s'avère pertinent de se pencher plus particulièrement sur le phénomène de la spécialisation des tâches, motif principal de la déférence démontrée par la Cour envers les décisions de certains tribunaux. Le troisième chapitre du mémoire y sera donc consacré. En plus d'examiner comment la cour de révision. doit s'y prendre pour déterminer l'expertise relative d'un tribunal administratif, il y sera fait référence au phénomène de la pluralité d'interprétations, une conséquence directe de la reconnaissance de la spécialisation des tâches.

1.

PRINCIPES CONSTITUTIONNELS SUR LESQUELS SE

FONDE LA RÉVISION JUDICIAIRE

Si l'on demandait à plusieurs juristes quels sont les principes constitutionnels fondamentaux qui entrent en jeu lors de la· révision judiciaire des décisions de l'Administration,. on arriverait sans doute facilement à un consensus quant aux principes suivants et à leur ordre de priorité: (1) la «Rule of Law», (2) la souveraineté parlementaire et (3) la séparation des pouvoirs.

n

faut aussi tenir compte de l'interprétation judiciaire de l'article 96 A.A.N.B. qui est venue limiter la portée des clauses restrictives de juridiction insérées par le législateur dans un grand nombre de textes législatifs.

Les opinions seront sans doute plus partagées· quant à la détermination du rôle exact que joue chacun des principes constitutionnels au regard. deJa révision judiciaire. Les cours de justice se sont traditionnellement appuyées sur la version diceyenne de la «Rule of Law» qui promeut la suprématie du droit commun appliqué par les cours de droit commun, afin de justifier leur pouvoir de révision des décisions de l'Administration. Mais est-ce toujours ce que véhicule une version plus contemporaine de la «Rule of

(10)

Law»? En ce qui concerne la souverainete parlementaire, elle pourrait être.considérée à première vue comme étant un obstacle àla révision judiciaire, en· particulier lorsque le législateur insère des clauses restrictives de juridiction dans ses lois. Or, il s'avère que les· cours de· justice se fondent précisément sur ce principe pour réviser toute décision administrative qui semble excéder la compétence d'attribution de l'organisme en cause. Enfin, la séparation des pouvoirs sert aussi de justification à une plus grande intervention des cours de justice qui, en raison de leur impartialité, se prétendent .les mieux placées pour réviser les décisions d'organismes dont elles sont totalement indépenda,ntes, négligeant que de ce fait, ce sont des juges non démocratiquement élus qui ont le dernier mot sur des décisions qui ont pour but d'appliquer des volontés politiques. De plus, la plupart des organismes administratifs sont eux aussi soumis à des règles. d'impartialité et d'indépendance, bien que celles-ci soient généralement moins· sévères que pour les cours de justice puisqu'elles sont adaptées à leur mode de fonctionnement. TI s'avérera donc utile d'étudier chacun des grands principes fondamentaux susmentionnés ainsi que leur évolution afin de comprendre pourquoi leur coexistence a rendu passablement complexe l'application du pouvoir de contrôle et de surveillance des tribunaux adrninistratifspar les cours supérieures2. Ces théories seront donc abordées ci-après,àcommencer par la «Rule

of Law» dont la détermination exacte suscite encore bien des débats.

1.1 LA «RULE OF LAW» OU PRIMAUTÉ DU DROIT

Bien peu de principes juridiques fondamentaux ont dû faire couler autant d'encre que la «Rule of Law» (ou la primauté du droit, selon la· traduction utilisée dans le

2 Le professeur Gilles Pépin affinned'ailleurs, dans. son article <<L'absence de pouvoir des organismes

a~istratifspourdes motifs d'ordre constitutionnel: L'artiqle 96 del'A.A.N.B. eHa Charte canadienne des droits etlibertés» dans Institut Canadien d'administration deIajustice,Lecontrôle judicigire desorgapi~mes administratift, Cowansville, Yvon Blais, .1983, 225au~pp. 227-228, ce qui •Sllit:<<ÉtailtdoJ]fié la.g~Jléralité de son objet et la diversité de ses sujets, le champ d'action du pouvoir de Surveillance ne. pourra jamaiS se présenter sous la fonne de·quelques règles facilesà appliquer. [..;l L'histoire enseigntlque la délimitation du rayon d'action du pouvoir de surveillance est le résultat avant tout d'un jeude forces auquel ontgaIticipé le Parlement, l'Administration et les •.j~ges,•• mais sous le .couvert de respecter les•.volontés . explicites, implicites ou présumées du premier. Les règles relativesàunjt',u dtlforcesse prêtentllialàune co.dification exempte de toute ambiguïté. Elles peuvent difficilement nier aux juges le. rôle. politico-juridique qu'ils ont joué jusqu'ici et qui en.a fait en quelque sorte des«mïnistresdela.ruleoflaw».

(11)

Préambule .de la Loi constitutionnelle de 198i) et le débat conceptuel l'entourant demeure toujours aussi vivant4• On associe habituellement la primauté du droit à la célèbre maxime «A governrnent oflaws and not of men» inspirée d'unécrit d'Aristote5. En •effet, ce dernier a fait 1~ promotion d'un principe général· idéalisé selon. lequel ·la réglementation par la loi (<<he who asks Law to ·rule»), neutre et à l'abri .des passions et des émotions, doit primer sur la réglementation par les hommes6. Nul n'est besoin d'une très longue démonstration pour comprendre que l'idéal d'Aristote ne peut se transposer tel quel dans la réalité juridique car pour que la justice puisse régner, des lois

et

diverses règles en· découlant doivent être .dûment adoptées et mises en application par des institutions dçmt la composition ne peut être qu'humaine. Le principe abstrait. et idéalisé du règne de la justice doit être transposé en principes généraux qui lui apporteront une concrétisation matérielle, tels l'assujettissement detous, y compris le gouvernement, à la loi, l'exigence d'un fon4ement légal à toute décision de l'Administration qui touche les droits individuels, l'établissement de règles procédurales et d'équité, un formalisme et une régularité. visant à atteindre une certaine certitude au niveau juridique ainsi que l'intolérance enVers l'arbitraire.

1.1.1 La version «extravagante»

Certains ~uteurs, inspirés par la célèbre· maxime, ont par ailleurs élaboré ce que Kenneth Culp Davis a nommé la version extravagante de la «Rule of Law». Celle-ci s'oppose à tout pouvoir discrétionnaire qui pourrait être octroyé à l'Administration sous prétexte que la détermination des droits juridiques ne peut être que l'apanage exclusif des tribunaux de droit commun7. Les plus connus de ces auteurs sont Albert Venn Dicey8,

3Annexe B de laLoi de 1982 sur le Canada (R.-U), 1982, c. U.

4 Voir, à titre d'ex~U1ple,D. Dyzenhaus, dir., Recrafting the Rule of Law: The Limits of Legal Order,

Oxfort-P<>rtland Oregon, Hart Publishing, 1999.

5Aristote,The Politics, BookIJI, ch. 6, traduit parT.A. Sinc.lairet T.l Sounders, Hannondsworth, Penguin,

1981 aux pp. 225-226.

6 Voir à ce sujet B.l Weinrib,«The InteHigibilityof The Rule of Law» dans A.C.Hutch1nson et P.

Monahan. diT.,The Rule ofLaw:ldealorldeology, Toronto, CarsweU, 1987,59 aux pp. 60-61.

7K.C. Davis,Administrative Law Text, 3eéd., St-Paul,Minn., WestPublishing Co., .1972, aux pp. 15-16.

(12)

John Dickinson9 et FriedrichA. HayeklO. On peut dès lors affirmer que leur conception

de la «Rule of Law» s'inscrit dans un courant dit formel, pour emprunter les termes du professeur Paul Craig, courant qui s'intéresse à la procédure de promulgation des lois et règles qui en découlent, à la clartéet à la précision des normes juridiques ainsi qu'à leur dimension temporelle, sans toutefois chercher à émettre un jugement de valeur sur le contenu de ces normesll. C'est d'ailleurs sur la conception formelle de la «Rule of Law» que nous nous attarderons puisqu'elle constitue le fondement de la révision judiciaire des décisions des tribunaux administratifs en regard de leur légalité. L'aspect subst~ntiel,

quant à lui, sert de fondement pour réviser la conformité des textes législatifs avec les principes constitutionnels.

Un des auteurs de cette version extravagante de la «Rule of Law», Albert Venn Dicey, dont la théorie a le plus marqué la tradition de common law jusqu'à nos jours, a pour la première fois formulé sa version de la «Rule of Law» en 1885. Cette formulation se divise en trois aspectsl2 et nous démontre très clairement l'accent mis par Dicey sur un

8AV, Dicey,Introduction to the Study ofLaw ofthe Constitution, 4" éd., London, MacMillan&Co., 1893. 9J. Dickinson,Administrative Justice and the Supremacy ofLaw in the United States, New York, Russell&

Russell, 1955.

10F.A Hayek, The Road to Serfdom, Phoenix Books, The University of Chicago, 1944.

11P. Craig, «FonnaI and Substantive Conceptions of the Rule of Law: An Analytical Frameworlo>, [1997] Public Law 467àla p. 467. Les auteurs Hutchinson et Monahan, pour leurpart, nomment ce courant la «thin versiOn» de la «Rule of Law», par contraste avec la «thick versiOn» qui, elle, tout en englobant la conception formelle, va plus loin en y ajoutant une conception substantielle qui garantit le respect des droits fondamentaux en accord avec les valeurs tiques. Voiràce sujet A C. Hutchinson et P. Monahan, «Democracy and the Rule of Law» dans AC. tchinson et P. Monahan, 00.,supra note 6,97 aux pp. 100

à 102; voir aussi AC. Hutchinson, «The Rule of Law Revisited: Democracy and Courts», dans D. Dyzenhaus, 00., supra note 4, 196 aux pp. 198 à 201. Aussi sur ce point, R. Dworkin, A Matter of Principle, Cambridge, Harvard University Press, 1985, pp. Il et 12 oùilqualifie la conception formelle de «rule book conception» alors que la conception substantielle est qualifiée de «rights conception». Dworkin est un des grands promoteurs de la conception substantielle de la «Rule of Law».

12Formulation tirée de AV, Dicey,supra note 8: Premieraspect: «that no man is punishable or can be lawfully made to suifer in body or goods except for a distinct breach of law establishedinthe ordinary legal manuer before the ordinary Courts of the land.»(p. 177) Dicey résume par la suite ce premier principe de la façon suivante: <dt means, inthe first place, the absolute supremacy or predominance of regular law as opposed to the influence of arbitrary power, and excludes the existence of arbitrariness, of prerogative, or even ofwide discretionary authority on the part of the government.»(p. 191) Deuxièmeaspect: «we mean [... ] when we speak of the "rule of law" as a characteristic of our country, not oilly that with us no man is above the law, but (what is a different thing) that here every man, whateverhehis rank or condition, is

(13)

assujettissement égalitaire et universel à la «loi ordimüre» appliquée par les «tribunaux ordinaires», s'opposant ainsi à tout pouvoir arbitraire de l'Administration, dans lequel il semble inclure tout pouvoir discrétionnaire. Pour mieux comprendre la formulation de Dicey, il.s'avère impératif de la replacer dans son contexte. L'époque où Dicey a pour la première fois publié sa formulation de la «Rule of Law» était grandement marquéepar.un vaste courant de pensée libéral qui préconisait la. promotion des. droits et lib~rtés

individuels à l'intérieur de .. sphères délinIitées13 Deplus, on envisageait unesépanition hermétique entre les sphères privée et publiqlle. Le principe dela«Rule of Law». s'avérait donc un fondement solide pour établir la portée et les limites de la conduite des citoyensà l'intérieur de leur sphère d'autonomie au moyen de règlesgénéral~s et prédéterminées qui s'appliquent également à touS14. Quant à ce qui intéressait Dicey au moment ou il a

formulé sa propre notion de la «Rule of Law», ç'était la nature des relations. entre l'État et ses .citoyens. en regard d'un champ bien restreint des pouvoirs de l'Administration publique, soit celui touchant la protection des droits individuels,engloban1 le droit personnel à la li1)erté, le droit d'association et d'expression ainsi que le droit de propriétë5.

1.1.2 .Les critiques

stibjeCtto the ordinary la'Y of the reaIm andamel1able tothejurisdiction of the ordinaryWi>unals.» (p. 183) Le résumé faitparDicey nous apprendcequi suit «It 11leans,<again,eq~itybefore the la'Y' orthe equal subjectionofaH classes to theordinaryJawof the land administered by theiordinary LawCourts»(j:>. 192) Troisième aspect: «Wemay say that the constitutionis pervaded bythe mIeoflaw Qntheground that the generalprinciples of the constitutiol1{asforexanlple the righttopersol1alJiberty, ortheright of public meeting) are. with us. the resll1t ofjudicial decisionsdeternrining therights .of private personsin particu1ar cases brought beforethe Courts;»(p. 185) Dicey réswne ce troisièwepoint devue~ela fayon suivante: «with .us .the. law orthe.• constituti0i\the .. mIes •. whichin .foreigncountriesnatumlly .. form. part. of a constitutionalco<ie, . are .not the source .but·. the.co~uence•of therightsof individuals, as. defined and enforced by the Courts; that, in short, theprin~iplesof private.lawhave withus been by the action/of the Courts and Parliament soextendedas to determine the position of the Crown and of its servants; thus the constitution is. the resultof the ordinary lawof the land.» (p. 192),

13Voir àce sujet R Dussall1t,L. Borgeat, Traité de droit administratif, 2· .00., Tome Ill, Les Presses de

l'Université Laval,1989,.àla p. 43.

14D. Sugannan, «The Legal Boundaries of Liberty: Dicey, Liberalism and Legal Science»,(1983)46J'v[od.

L. Rev. 102àlap.108.

15E. C. Wade, en introductionàA.V. Dicey,Introductitm ta the Study of the Law of the Constitution, 10· éd., London, MacMillan& Co.,1965,aux pp. ci, cxiv et cxxvi

(14)

Dicey fut l'objet de vives critiques, entre autres. de la part de' l'auteur

n.w.

Arthurs. Ce dernier lui a reproché sa vision très limitée de ce que doit être le droit public, parce qu'elle omet de tenir compte' de l'évolution de la société ses nouvelles exigences16. Selon.Arthurs, Dicey s'est refusé d'envisager toute réconciliation du droit avec les. impératifs d'une saine •. administration publique lorsqu'il" a considéré que le pouvoir discrétionnaire exercé par l'Administration était l'antithèse du droit. Arthurs est d'avis qu'il s'agit plutôt de trouver un point d'équilibre entre· le .. droit. et le pouvoir discrétionnaire en soupesant les avantages de chacun. Il crpit possible de s'assurer que le pouvoir discrétionnaire de l'Administration soit exercé conformément aUX valeurs démocratiques. Quant à la confianceexc1usive .. de DiCeyenvers le pOllvoit judiciaire,

n.w.

Arthurs rétorque que la notion dejustice ne veut fien dire par elle-même et qu'elle doit être considérée selon les normes et la conduite qui s'imposent dans le contexte particulierOù elle s'applique. Arthurs se lance. à la défense des tribunaux administratifs qui, dans des situations qui demandent une expertise. particulière, peuvent utiliser leurs qualifications pour régler les questions de fait et même, quoique plusJimitativement, les questions de droit qui sont spécialement applicables dans. leur •domaine, .. et ce, de meilleure façon que les tribunaux de droit commun.

Un autre auteur,

K.c.

Davis,aaussi critiqué les auteurs qui ont condamné tout pouvoir discrétionnaire de l'Administration. Il adopte, pour Sa part, J.me position mitigée, préférant limiter tout pouvoirdisctétionnaire à ce qui est jpgé nécessaire. Il estime pouvoir y arriver par la formulation de règles et dir~ctives interne.s assez précises qui dictent aux décideurs la conduite à suivre en présence de text~slégislatifs trop généraux. Selon ses termes, .«discretionarypowershould beeliminatedorcontrolled .to whatever extent it can beeliminated or controlled without undue sacrifice of other values that we may deemmore important.»l?

JI

a d'ailleurs élaboré dans ce sens une technique qui comprend trois volets, soit «collfining, structtlfÎngand checkingdiscretion»18 Cette

16 H.W. Arthurs, <<Rethinking Administrative. Law, A SlightlyDiceyBusiness», (1979) 17 Qsgoode Hall

L.J. J.

17

K-c.

Davis,supranote 7

àm

p.23.

18

K-c.

Davis, Discretionary Justice: A Preliminary lnquiry, Bâton Ronge, Lomsiana State. University Press,1969.

(15)

position· fut

â

l'origine d'un débat qui eut surtout cours dans les années '70 et qui ne semble toujours pas réglé, sur les avantages et désavantages de l'établissement de règles et directives précises par rapport

à

l'octroi de. pouvoirs discrétionnaires (<<mIes 1 discretion»i9.

De façon plus contemporaine, le professeur Roderick A Macdonald soutient lÇi thèse. du contrôle non exclusif de l'action gouvernementale par les cours de justice20. Il croit . que lorsqu'on envisage de. prendre les moyens nécessaires afin d'assurer l'indépendance des organismes· de réglementation, on ne doit pas considérer ces derniers comme. des «governments in miniature», possédant une section judiciaire .dont les attributs sont semblables aux tribunaux inférieurs de droit commun, ceqlli laisse entrevoir la révision judiciaire ·de leurs décisions comme étant une conséquence toute naturelle. Il

semblerait plus approprié de parler de. «governance in miniature»· qui laisse présager une surveillance de l'organisme par des in~titutions mettant plutôt l'accent sur l'amélioration de son processus décisionnel. Le professeur Macdonald rappelle que lorsqu'on..réfère à l'impartialité des organismes gouvernementaux, cela n'implique pas nécessairement une totale indépendance politique. Il faut néanmoins s'assurer que· les pqlitiques qui gouvernent ces organiSmes aient été adoptées démocratiquement. Il ajoute: «IbeIieve strongly in. the cOIltribution of non-judicial, system-focused institutions of external oyersight to ensuring that both govemments and agencies remainfaithfulto pl'inciples of democratic accountability.»21

Les commentaires. des auteurs Arthurs, Davis et Macdonald nous paraissent fondés: ils préconisent, chacun à .leur façon, le contrôle mais .• non J'élimination complète du pouvoir discrétionmiire accordé àl'Administration et refusent de considérer la révision

19Pour unrésmné de

ce

débat, voir P.P. Craig,Administrative Law, 4" éd., London, Sweet& Maxwell,

1999 aux pp. 521ss.

20 Vqir à cet effet R.A. Macdonald, «The. Accoustics of Accountability<~-Towards Well-tempered

Tribunals» (non encore publié), conférence donnée. à. Budapest le 4 mai 2001 à la neuvième conférence annuelle surl'indiYidu -vs-l'État.

(16)

judiciaire comme l'uniqlJemoyen valable de contrôler ce pouvoir discrétionnaire. En effet, ilfaut considérer l'élément économique et social rattaché à la plupart des questions soumises aux tribunaux administratifs, ces questions s'inscrivant dans une approche politique globale dont il faut aussi tenir compte. De plus, on ne doit pas négliger la volonté du législateur de faire décider de ces questions par des organismes souples et diversifiés dont la structure interne est adaptée àla nature des problèmes soumis. Enfin,

il faut reconnaître qu'un grand nombre de décideurs administratifs sont des experts dans leur domaine. respectif ou, à. tout le moins, ont développé une compétence spécialisée à force de régler des différends dernême nature. Tout cela fait en sorte que le contrôle des décisions administratives· selon une.. approche .. strictement légaliste ne peut plus être considérée comme étant la seule solution envisageable pour assurer la légitimité des décisionsadministratives22.

Plus particulièrement en ce qui concerne la version diceyenne de la «Rule of Law», la critique apportée par Arthursnous apparaît fondée: lorsqu'il a manifesté son opposition catégorique à l'exercice de tout pouvoir discrétionnaire par l'Administration, Diceyaomisde distinguer comme

il

aurait dû le faire. le pouvoir discrétionnaire du pouvoir arbitraire. Bien que tout pûuvoirexercé arbitrairement soit tout· à fait condarnnable23, l'octroi de pouvoirs discrétiol1nairesbien encadrés est indispensable·à une

saine administration. En effet, la législation ne peut prévoir précisément la réponse adéquate à chacun des problèmes qui seront potentiellement soulevés entre l'Administration et les citoyens. Cette façon de procéder enfermerait d'ailleurs les décideurs administratifs dans un carcan qui leur. enlèverait une grande part de leur efficacité.. De plus, il f<:tut réaliser que toute décision porte en eHe une certaine part de discrétion dont l'intensité varie selon la nature de la questionàrésoudre. En conséquence, l'exerpice d'une certaine· forme de discretionn'est pas l'apanage exclusif des décideurs administratifs. Les juges doivent aussi exercer une discrétion plus ou moins étendue dans le cadre. de leurs fonctions. En .quoi la· discrétion exercée par des juges .serait-eHe plus

22Ybiràce sujet l'article de Harry W.

Arthurs,.

«Protection against JWlicial Review».dans.Institut canadien d'administration de lajustice, Le contrôle judiciaire des organismes administratifs, Cowansyille, Yvon Bla.ïs, 1983, 149.

(17)

légitime que celle exercée par.des décideurs administratifs soumIS à des règles et mécanismes qui leur assurent un degré suffisant d'indépendance et d'impartialité? S'appuyer sur la «Rule of Law» pour s'oppos~r catégoriquement à tout pouvoir discrétionnaire exercé par l'administration s'avérerait donc une. proposition trop radicale qui priverait les organismes administratifs d'une grande part de leur efficacité.

Une autre remarque a trait à l'opposition farouche de Diceyau système de droit administratifautonome tel qu'il existait déjà à son époque en France, convaincu qu'il était de la. supériorité d'un système de droit à l'intérieur duquel les conflits. entre les citoyens et l'État peuvent être contrôlés par les principes de. droit commun24.Pourtant, les auteurs frflnçais ont développé dès le début du Xxesiècle la doctrine de l'État de droit qui subordonne l'État au droit25.Ainsi, bien que le système de droit administratif français, dont l'organe hiérarchique supérieur est le. Conseil· d'État, soit un système ·totalement autonOl:nedudroit commun, ce système est encadré par ladoetrine>de l'État de droit qui, en >consa.crant la. suprématie du droit sur l'État, protège l'administré contre tout pouvoir arbitraire qui pourrait être exercé par l'exécutif et ce, de façon tout aussi efficace que ne·le fait la «Rule ofLaw» dans les traditionsjuridiques de comm.on law26.

24Voir E.C. S. Wade, supra note 15 àlap. cxiv.

25 Voir, entre autres Léon Duguit,Études de droit public, l'État, le droit objectifet la loi positive, vol. l,

Paris, Bibliothèque de l'Histoire du Droit et des Institutions, 1901. A la p. 259, Duguit affirme: «l'État est soumis à la règle de droit comme les individus eux-mêmes; la volonté des gouvernants n'est une volonté juridique, pouvant s'imposer par la contrainte, que lorsqu'elle se manifeste dans les limites qui lui sont tracées par la règle de droit.» Duguit définit la règle de droit comme étant une règle de conduite née de la solidarité sociale, qui s" à chaque individu bien qu'eHe ait un caractère général (voir pp. 91 à 100). Un autre auteur,R.Carré alberg, nous apprend ce qui suif: «L'un des traits caractéristiques du régime de l'État de droit consiste précisément en ce que, vis-à-vis des administrés, l'autorité administrative ne peut user quedemoyens autorisés par l'ordre juridique en vigueur, et notamment par les lois. Ceci implique deux choses: d'une part, l'autorité administrative, lorsqu'eHe entre en rapport avec les administrés, ne peut, ni aller à l'encontre des lois existantes, ni s'en écarter: elle est tenue au respect de la loi. D'autre part, dans l'État de droit parvenu à son complet développement, l'autorité administrative ne peut rien imposer aux administrés qu'en vertu d'une loi: eHe ne peut mettre en œuvre, à leur égard, que des mesures prévues explicitement par les lois ou du moins autorisées implicitement par elles.» R. Carré de Malberg, Contribution àla théorie générale de l'État, t. 1, Paris, Sirey, 1920-1922, à la p. 489. Plus récemment, Léo Hamon affirme que l'expression État de droit «désigne un rapport de subordination au droit de la puissance de fait, rapport de subordination conçu comme garantissant la sécurité des acteurs de la société sujets du régime ... »L.Hamon, «L'État de droit et son essence», [1990] Rev. F.D. Const. 699àla p. 700.

26 Pour une comparaison entre l'État de droit et la «Rule of Law», voir D. Modde, «L'État de droit et la

(18)

En ce qui concerne le deuxième aspect de la fonnulation de la «Rule of Law» par Dicey, soit la promotion de l'égalité de tous, y compris du gouvernement, dans leur soumission àla loi aiI1l)i que le troisième aspect qui énonce que les droits constitutionnels sont d'abord définis et imposés par les cours de droit commun, il s'agit de propositions qui dqiventtout de même être tempérées par l'existence de la prérogative royale, qui sera étudiée plus en détail ci-après.

Les critiques ne se sont pas seulement limitées à la théorie diceyenne de la «Rule of Law». Des tenants de divers courants juridiques se sont aussi attaqués de façon plus générale aux cOl1lPosantes de la «Rule of Law»~. particulièrement parce qu'elles proviennent de l'école de pensée libérale. Ainl)i, au cours des armées 1920 et 1930, l'école réaliste (<<legal realists») s'est érigée contre le formalisme et le conceptualisme dans le droit en mettant en doute le caractère purement objectif de l'existence dedroits27. Selon les réalistes, les droits découlent d'une décision judiciaire plutôt que d'en être la justification. Les réalistes ont aussi remis en question .l'existence d'une démarcation claire entre.. le droit publ~c et le. droit privé, l'État ayant de nombreuses possibilités d'intervenir dans cette dernière sphère. Enfin, les réalistes. ont.abordé le droit non pas comme·une entité complètement distinctç et·neutre mais plutôt· selon· une. vision globale qui tient compte des interrelations entre le droit, la politique et les courants sociaux, ce qui a grandement influencé les courants de penséeconte111porains. Une autrç école de pensée améticaineidentifiée sous le vocable de «CriticalLegal Studies» (ci-après C.LS.) s'est vivement attaquée àla «Rule of LaW»28. Ce mouvement.inspiré de la pensée socialiste remet en question la prétendue méthode neutre et impersonnelle qui est .censée présider à

27 Voir à cet effet E. Mensch, «The History of Mainstream Legal Thought» dansD. Kairys, dir., The PoUties ofLaW.' A Progressive Critique, 3e

éd., New Yod<,Basic Books, 1998, 23·aux pp. 32à 36.

28PieITe Issalys,dans un article intitulé«Laloi

dans

le droit tradition, critique et transforJnation»,(1992)

33 C. de D.665,affirme ce qui suità lap.688:. «Dans le monde anglo-sax0n,parex~tnple,le coumntdes

Critù::al Legal Studiesreprend etactlIalîse certaines des thèses marxiennes, et viseàl(lfoisledroit légiféré

eUe droit jurisprUdentiel. Dans l'un et l'autre, il voit sous le couvert d'une «méth()d.e>Fjuridique aux procédés maIliiJll1ables à l'iIlfini W1e pure rhétorique politique. Celle~ci cherche. aproouirelilleffet Illystifi<:ateur etlég~timant,defawnà préserver l'hégéIll0nie d'un. pouvoir qUe rien ne justifie.. [... ] L'énoncé abstrait de règles ~versellesrecuJ,e devant. l'irruption dans le texte légal lui-même, du débat politique et économique. La loi ne tente.plus de surplomber l'histoire: elle est elle-même le terraillet l'enjeu des conflits sociaux.)

(19)

l'adoption des lois ainsi que l'analyse des questions judiciaires puisque dans la réalité, le contexte social et politique est forcément pris en compte et un choix doit être. fait entre les divers intérêts en cause. Le principe de l'égalité formelle est aussi. pris à partie car selon les C.L.S., l'omission de tenir compte des disparités économiqUes, politiques et sociales des individus mène à une·injustice matérielle29. ·Cebrefs\Jrvol des· critiques. provenant de mouvements américains de gauche nous mène au constat· qu'elles sont. surtout dirigé~s

contre la conception classique libéraJe de la «Rule of Law» mais ne s'attaquent pas au principe idéologique et abstrait comme tel. Ce n'est donc pas.véritablement .la «Rule of Law» qui est mise en pièces mais la conception qu'en •ont eue les tenants de l'école de pensée libérale30. Cette conception peut cependant êtl'emodifiée et même remplacée sans pour autant anéantir le principe idéologique de la «Rule of Law».

1.1.3 Un tempérament: la prérogative royale

Nous avons vu que les deuxième et troisième aspects de la formulation diceyenne de la «Rule of Law» doivent être tempérés par l'existence de la prérogative royale. Qu'en est-il aujuste de ce principe? Le concept de la prérogative royale s'avère difficile à circonscrire, tel qu'en font foique1ques définitions larges qui peuvent tout de même être d'une quelconque utilité. Ainsi, Dicey la décrit ainsi: «The residue pfdiscretionary or arbitraryauthority, which. at any giventime isleft in the hal1ds ofthe CrpWID)31 alors que Peter Hogg la perçoit comme étant <<the powersand •privileges accorded bythe common law to the CroWID)32. Une caracteristique. essentielle de la prérogative royale .est sa dévolution exclusive

à

la Couronne: «By the word prerogative we usuaHy understand

29Voirà ce sujet R. Belliotti, «The Rule of Law.andthe Critical Legal StudiesMovement»,<(l986) 24

U. W.O.L.Rev.67 aux pp.68à 78.

30 Voir àcet effet J.M. Evans, H.N.Janisch, .D.J. Mullan etR.C.B. Risk, Administrative Law 4eéd.,

Toronto, Emond· Montgomery Publications

L.td,

1995 àla p. ·27 où nous retenons pllrticulièrement les propos suivants: «Like the concepts of liberty anddemocraey, the ruleof lawhas •no generallyagreed meaningasapplied to law and administration. Therule oflaw is also like1iberty anddemocracy il1tllatit is rejeeted by few, although particular versions of it are keenly. contested.»

31A.V.Uicey,Introduction ta the Study oftheLawofthe Constitution, 106éd.,London, Macmillan, 1959à

lap.424.

(20)

that special pre7"eminence, which the king hath, over and above aH other persons, and out of the ordinary course ofthe.common law, in rightofhis regal dignity»33. De nos jours, qu'entend-on par la Couronne? A qui bénéficie la prérogative royale? Selon le professeur Hogg, il s'agit du premier ministre et de ses ministres34, opinion. partagée tout récemment parla Cour d'appel de l'Ontario35. La brancheexécuti"ed~ l'État peut donc bénéficier de certains pouvoirs ou immunités n'ayant aucune assise démocratique puisque provenant.de privilèges historiquernentdévolus au monarque36. Ces priyilègeset immunités peuvent

par contre •être limités ou remplacés par des dispositions législatives37 et l'onf en fait été, ce qui a réduit l'étendue de la prérogative royale38. Historiqu~ment, les cours dejustice ont fait preuve de retenue en présence d'un privilège ou d'une immunité faisant partie·de la prérogative royale, ce qui peut sans doute s'expliquer par un respect pour l'ancienneté du principe39.

Qu

s'est •longtemps contenté de vérifier si le .privilège ou l'immunité en question faisait vraiment partie de la prérogative royaléo.Plus récemment, par contre, la

33

W.

Blackstone, Commentaries on the Laws ofEngland, vol. l, 15eéd., London,A. .Stnlh.an, taw Prînter, 1809,àlap. 239.

34Voici comment le professeur Hogg s'en exprime: «Although weDOWhave a "collstitutiona! monarchy", inwhich the role of the Queen (and ofher representatives in the Cornmonwealthcountries)·has.~ome almost entirely formal,the letm "the ClOwn" has peJ;sistedas the name for the eXecutiyebranch (but not the legislative bnm.ch)ofgovermnent. Executive power isactually exercised bythe Prime Ministerandthe other Ministers who direct theworkof the civilservants in the varlousgovernment deparnnents.»P. Hogg et P. Monafian, Liabilityoftr,eCrown,. 3eéd., Toronto, Carswell, 2000àla],. Il.

35Blackc, Canaria (prime Ministet), [2001] O.J.no.1853 auxpara.32-33 (Ç.AO.),en ligne: .QL(0.1.).

36 Parnri les privilèges inclus dans la prérogative royale, cette deJ;niètenepouvant .d'ailleurs plus être

élargie, on retrouve, àtitre d'illustration, le droit à la priorité de paiementàti~e4ecréancier,le droit de propriété surtousterrain~Yê;lcantsetsur les métaux précieux, le droit de recevoir le fruit des arnendeset pénalités prévues parIa loi, l'immunité de poursuite en responsabilité (<<the King can 40 no wropg» ), l'innnunitéenvers la législation, ainsi qne différents privilèges tels le pouvoir de convoquer ou de dissoudre le parlement, de déclarer iaguerre, de. n01l11ll7rlesjuges,d'accorder le pardon, d'arrêter des poursnites critninelles, de menerl~saffairesétrallgères du pays, de conférer des distinctions et honneurs,etc.

37BlackC. Canada (prime Minister), supranote 35 au para. 27.

38P. Hogg, supra note 32àlap.16.

39W. Holdsworthaffirme, dans A Nistory ofEnglishL

mv,

vol. 3, 5e éd., London, Methuen, 1942,à.lap.

459 : «Infact, the prerogative istheo14estpartorthe constitution, and the law which centersaround· it bears tipon ittheilltlfKS of allthe variedpbases through which the constitution bas passed. It is this fact which gives to it its "p(lculiar împort, "and :malces it itnpossible to define.itcompletely "by. any theoryof executive functions".>}

(21)

«House of Lords» a donné ouverture à la révision de décisions prises en vertu de la prérogative royale sur la base de trois critères, soit «illegality», «irrationality» et «procedural impropriety»41 Au Canada, depuis l'arrêt Operation Dismantle /nc. c. La Reine42, la Cour suprême43 a ouvert la porte à la révision judiciaire de tout pouvoir ou

immunité fondé sur la prérogative royale afin d'en vérifier la conformité avec la Charte

canadienne des droits et libertés44. .Collséquemment, malgré la réduction des pouvoirs

accordés en vertu de la prérogative royale par l'adoption de dispositions législatives les limitant ou les remplaçant, certains de ces pouvoirs demeûrent tout de même bien ancrés dans notre paysage constitutionneL Les tribunaux refusent toujours de réviser certains de ces pouvoirs qui Ile touchent pas· aux droits individuels tels larelllisede distinctions et honneurs45, ceux dont la nature est·· politique tels ·la dissolution de la Chambre des communes ou ceux qui impliquent l'intérêt national, tels la signature de traités internationaux et généralement. tout ce qûi concerne les affaires extérieures. C'est pourquoi .la prérogative royale constitué encore .. de nos jours un tempérament à l'application exclusive du droit par 1es<cours de justice ainsi qu'à l'assujettissement du gouvernement à la loi, selon la formulation qu'en avait faite Dicey.

1.1.4 Vers une version .contemporaineen droit canadien

Qu'en est-il donc de l'application de ce principe général et abstrait de la «Rule of law» en droit canadien? Ce principe aurait été importé. dans notre droit au moyen du

41Cou11cilofCivil Service Unionsc. Ministerforthe Civil Service, [1984] 3 AlI ER 935; [1984] 3 WLR

1174 (HL).

42[1985] 1 R.C.S.441.

43. Dans

.le.

présentmémoire, les expressions «Cour suprême» ou .«la. CÇuD> •devront être comprises comme faisant référence àla Cour suprême du eanada,carJa jurisprudel1pe m~ntiol1l1~eau 111émoire provient presqu'exclusive111ent de cette cour étant donné la grande valeur que l'on peut attribuer aux décisions de la plus hautejnstance dupays tout en tCnantC9mpte de l'énorme difficulté de rendre compte, enaussi pel} de pages, de la multitude de décisions renduespàr les instances inférieuresr~lativementauxsl}jets ici abordés. 44Partie 1 de laLoi constitutiormeile de 1982,constituant l'annexe Ede laLoi de 1982surle Canada, (R.~

U), 1982,C, Il [ci~aprèsCharte canadienne].

(22)

préambule de l'A.A.N.B., de parles termes «avec une constitution reposant surIes mêmes principes que celle du •Royaume-Uni».• C'est du moins ce qu'affirme la Cour sllprême dans l'arrêt Renvoi: Droits linguistiques au Manitoba46• On y a par. la suite .fait

expressément référence dans le préambule de la Loi constitutionnelle. de 198247. L'application du. principe de la «Rule of Law» .ne peut toutefoh; pas être réalisée dans notre droit sans passer par l'étape de sa concrétisation de façon matérielle. Cette concrétisation s'effectue par la reconnaissance de certaines normes propres à faire triompher la prim(l.utédu droit,. ces normes ne devant toutefois pas être considérées comme l1gées dans le temps mais ayant plutôt un caractère évolutifafin de s'adapter aux nouvelles exigences lie la société contemporaine. Il semble indiqué, pour déterminer ces normes, de s'inspirer des différentes formulations de la «Rule of Law» élaborées jusqu'à ce jour48 tout en gardant en tête que deux idées· principales se dégagent du principe général et abstrait de la «Rule of Law»: tout d'abord, il ya l'idé.e de la suprématie de la loi, illustrée aux paragraphes nos. 1à 5ci;..après, d'où. découlent les principes de certitude, de •précision et de non rétroactivité de la loi, puis il y a l'idée de la séparation des pOllvoirs,d'oùdécouJe le principe de J'indépendance des déddeurs49, qui se. retrouve dans les énoncés 6 et7. Voici donc la formulation d'une version contemporaine deJa «Rule of Law» qui pourrait être appliqllée en droit canadien:

46 [1985] 1 RC.S. 721 àlap.750.

47Supranote 3: «Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit»

48 En plus des fonnulations de Dicey et de Friedrich Hayek (The Raad ta Berfdom, supra note 10), nous

avons tenu compte de deux conférences internationales sur le sujet, soit la Conférence de 1957tenue à l'Université de Chicago sous l'égide de l'U.N.E.S.C.O. ainsi que la Conférence de New Delhi en 1959,puis des fonnulations de Sir William Wade et C. Forsyth dans Administrative Law, 8e éd. Oxford, Clarendon Press, 2000 aux pp. 20 et ss., de Joseph Raz dans son article «The Rule of Law and its Virtue», (1977) L.Q. Rev. 195, cene de Geoffrey de Q. Walker dans son livre The Rule of Law, Melbourne, Melbourne University Press, 1988, aux pp. 24 à 41, de Raymond Belliotti, supra note 29, ainsi quelaversion de LucB.

Tremblay dans son livre The Rule of Law, Justice, and Interpretation, Montréal & Kingston. McGill-Queen's University Press,1997,pp.22et ss.

49Cette idée veut que toute question concernant l'interprétation d'une règle de droit ou le règlement d'une confrontation entre deux parties qui cherchent à faire départager leurs droits respectifs soit décidée par un tiers indépendant et impartial rejoint la thèse d'Alexandre Kojève, Esquisse d'une phénoménologie du droit, Paris, Gallimard, 1981. Ce dernier propose une définition «behavioriste» du phénomène du droit qu'il énonce de la façon suivante: «l'essence du Droit se réalise et se révèle (ou se manifeste) dans et par l'interaction entre deux êtres humains A et B, qui provoque nécessairement l'intervention d'un tiers impartial et désintéressé C, cette intervention de C annulant la réaction de B opposée à l'action de A.»(àla p. 28)

(23)

1. Sauf de façon exceptionnelle en ce qui concerne la prérogative royale, la loi s'applique àtous, y compris la puissance publique et tous sont égaux devant la loi;

2. Tout pouvoir de l'Administration publique doit avoir une assise en droit;

3. Il ne peut exister de crime ni de sanction en l'absence d'une règle de droit valide; 4. La législation doit être prospective, publique, compréhensible et doit atteindre

un certain degré de précision.

S. La législation doit aussi être relativement stable, prévisible dans ses applications etautanlque possible, de portée générale;

6. La séparation des pouvoirs entre les diverses branches de l'État facilite le respect de .la primauté du· droit;

7. Des tribunaux indépendants, qu'ils soient judiciaires ou administratifs, ontpour tâche de faire respecter. la loi;

8. Les tribunaux doivent respecter les règles de justice naturelle (ce terme incluant les règles d'équité procédurale appropriées aux tribunaux.administratifs);

9. Les tribunaux doivent être facilement accessibles;

10. Le droit doit s'adapter et tenir compte des valeurs sociales du moment.

Ainsi donc, lorsqu'Qn s'appuie .sur la «Rule of Law» comme principe. fondamental donnant droit à la révision judiciaire, il ne faut pas y voir exclusivement la formulation de Diceymais plutôt une version contemporaine plus souple qui tient compte de l'adaptation du droit à là complexité des tâches dévolues aux autorités publiques afin de rencontrer les exigences actuelles de notre société. C'est d'ailleurs ce qu'affirmait la juge Wilson en 19905

°.

Selon elle, le sentiment de méfiance envers les tribunaux administratifs qui a longtemps découlé de l'approche diceyenne et qui portàÏt les cours de justice à vouloir contrôler· sévèrement tous ·.les actes de l'Administration de la même façon que· s'il s'agissait de cours de justice infériemes est maintenant révolusl. La nouvelle approche

50Dans l'arrêtNational Corn Grower$ Assn.c. Canada (l'ribunal des importations),[1990]2R.C.S. 1324 [ci-aprèsNational Corn Growers].

(24)

adoptée depuis quelques décennies par la Cour suprême est d'ailleurs brillamment résumée par lajuge McLachlin (teUequ'eUeétait alors)52 selon qui il faut voir la «Rule of Law» comme· un assemblage. d'idéaux qui· sont largement acceptés par la majorité des citoyens53, sur lesquels doit primer une culture de la justification. ToujouJs selon la juge McLachlin, cette culture de la justification dans une. société démocratique implique que «l'exercice du pouvoir public sera uniquement approprié lorsqu'il peut être. justifié en termes de rationalité et d'équité» [notretraduction]54. La juge affirme de plus que le Canada a récemment développé une culture de la justification ••.• qui est de ·nature fonctionnelle, ce qui permet aux tribunaux administratifs d'être .perçus comme des participants à part entière dans le maintien· des règles fondamentales dé justice, surtout depuis la reconnaissance par les cours qu'en certaines circonstances, le législateur a voulu confier un pouvoir de décision exclusifàdes tribunaux spécialisés en raison de l'expertise qu'ils ont développée ainsi que de leur plus grande efficacité55.

Cette perception de la «Rule of Law» par des juges de la plus haute ..cour du Cahada démontre à quel point ce principe fondamentaVne se trouve pas figé dans une conception rigide et fixée du droit mais au contraire, possède un caractère assez souple et malléable qui lui. permet en fait d'évoluer dans le

temps

afin de s'adapter et de· mieux refléter les transformations vécues par nos sociétés modernes. Étant donné la reconnaissàncesanséquivoque de cette évolution au sein de. la doctrine et de la jurisprudence, il semble extrêmement douteux qu'un retourà la théorie classique de la «Rule of Law» telle qu'exprimée par Dicey puisse à nouveaujllstifier un plus grand interventionnisme de la Cour au regard du·· contrôle des décisions des tribunaux administratifs.

52L'honorable B.McLachlin, «The Roles of Adminj.strative Tnbupalsand Courts in Maintaining ilieRule ofLaw>},(1998-99)12C.J.A.L.P.171aux pp. 17:;à175.

53Atitre d'illustration, voir les10principes énoncés ci-haut. 54HonorableB.l\1cLachlin, supranote52àlap. 174.

(25)

La «Rule of Law» n'est cependant pas le seul principe constitutionnel sur lequel se fonde les tenants d'un certain interventionnisme judiciaire. La souveraineté parlementaire est aussi un facteur important que l'on ne peut passer sous silence.

1.2 LA SOUVERAINETÉ PARLEMENTAIRE

1.2.1 Le principe

Au Royaume-Uni, la doctrine orthodoxe de la souveraineté parlementaire soutient que le pouvoir de légiférer du parlement est illimité. L'affirmation suivante de Dicey illustre bien ce point: «Parliament thus defined has, under the English constitution, the right to make or unmake any law whatever, and further, no person or body is recognized by the law of England as having a right to override or set aside the legislation of Parliament»56. Bien que certains auteurs aient tenté de remettre en question cette omnipotence57, les juges ont respecté la souveraineté parlementaire, reconnaissant que leur rôle se limite à appliquer la loi. En fait, dès le XVlle siècle, les deux autres branches du gOllvernement, soit la Couronne et les. tribunaux, ont reconnu ·la.· prééminence d'une législation validement adoptée par un parlement démocratiquement élu. Le Parlement est toutefois en quelque sorte prisonnier de son omnipotence puisqu'il ne peut lier ses successeurs. Cela signifie qu'Hlui est toujours possible d'abroger ou de modifier toute loi déjà adoptée. Un tempérament a cependa.nt été apporté par certains auteurs qui prétendent que le parlement peut s'obliger quant à la procédure (<<manner and form») d'adoption .de ses lois58, un point de vue qui a d'ailleurs été retenu par la Cour suprême du Canada59.

56A.v. Dicey, supra note 31 aux pp. 39-40.

57Aussitôt qu'en 1610, Sir Edward Coke déclarait: «when an Act of Parliament is against common right or

reason, orrepugnaut, or impossible tohe.performed, the common law will control it,and adjudge such Act tohevoid» dans la causeDr. Bonham'sCase,(l610)8Co.Rep. 113, 118; 77 E,R 646, 652(K.B.)..Plus contemporainement, voir les articles de LordWoolf, «Droit Public -- English Style», [1995] P.L. 57àlap. 68; Sir Stephen Sedley, «HumanRights:aTwenty-FirstCentury Agenda», [1995] P.L. 386 aux pp. 388-389 et Sir John Laws, «Law and Democracy», [1995]P.L. 72 aux pp. 84à90.

58 Voirà cet effet W.I. Jennings, .TheLaw.and The Constitution,Aeéd., London, University of London

Press, 1952 aux pp. 147-149; RF.V. Heustqn, Essays inConstitutional Law, 2e éd., Toronto, Carswell, 1985, pp. 6-7; P. Hogg,supra note 32 aux pp. 289à 294. Le professeur R Elliot propose, quantàlui, une approche différente axéesur~les valeurs démocratiques: le juge devrait décider quelle solution assurerait le

(26)

Il res~ort du principe delasouverainet~parlementaire que puisque toute loi peut être abrogée, les États qui, .cOIIlme .1e •Royaume-Uni, ne. possègent pas de constitution écrite ne peuvent bénéficier de garanties constitutionnelles à moins •qu'une révolution ne crée une discontinuité juridique qui permette de recréer système de droit60. L'avenir nous dira dans quelle mesure l'accession .du Royaume-pni àla Communauté européenne en 197361 puis l'enchâssement en droit interne britannique de la Convention européenne des droits de lapersonne en 199862transformeront cetétat de chose.

AuCaml.da, tOl,ltcomme pouria «Rule of Law», le principe de la souveraineté parlementaire

a

.été introduit viaJe préambule de l'A,A.N.B.63 Cependant, notre système fédéraliste adqrmé lieu à un partage des pouvoirs entre un parlement fédéral et des assemblées législatives provinciales, selon les champs de compétence définis par les articles 91 et 92 de l'A.A.N.a. Les tribunaux canadiens ont donc eu, dès l'entrée en vigveur de l'A.A.N:B., à surveiller la constitutionnalité des lois en vertu du respect des champs. de compétence octroyés, ce qui constitue une limite à la souveraineté de chaque organe législatif. Par contre, la somme des compétences provinciales et fédérale équivaut à la souveraineté pleine par le principe •de la· distribution •exhaustive des pouvoirs législatifs64. L'imposition d'une limite plus importante découle de l'adoption de la Charte

mieux le. respect et la promotioll des valeurs juridiques et politiques de la société. Voir R Elliot, «R.eth.inlcing MannerandForm: froInParliamelltal)' Sovereignty to Constitutional Values», (1991) Osgoode HalH L.J. 215.

59Voir l'arrêtR. c.Mercure, [1988] 1 RC.S. 234 dans lequel la Cour a affirmé que l'assemblée législative

de Saskatchewan était liée par l'article 110 de l'Acte des territoires du Nord-Ouest (loi adoptée avant la constitution de la province) qui exige que toutes les lois soient adoptées et publiées dans les deux langues officielles.

60Voir Sir W. Wade et Christopher Forsyth,supranote 48 àlap. 27.

61En vertu duEuropean Communities Act, 1972 (R-u.)c. 68 qui,àson article 2(4) consacre la primauté du

droit des communautés européennes sur le droit britannique.

62En vertu deThe HurnanRightsAd1998(R-U.),c.42.

63A.Tremblay,Droit constitutionnel, Principes,26éd., Montréal, Éditions Thémis, 2000àla p.133. 64P. Hogg,supranote 32 à la p. 283; A.-G.Ontarioc.A.-G. Canada,[1912] A.C.571aux pp. 581,583.

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canadienne65 qui restreint l'action étatique par l'octroi d'une protection constitutionnelle des droits et libertés qui y sont énumérés. Il faut cependant tenir compte de l'article 33 de laCharte, appelé clause dérogatoire ou nonobstant, qui permet de soustraire une loi aux effets de ses articles 2 et 7 a 15, le législateur ayant ainsi la possibilité de recouvrer sa souveraineté vis-a-vis une part importante des droits et libertés qui y sont protégés. Enfin, d'autres limites a la. souveraineté du parlement se rajoutent, tels le respect de la. procédure de modification constitutipnnelle66, l'interdiction de la délégation de pouvoirs entre .le parlement fédéral et les législatures provinciales67 ainsi que la limite territoriale imposée au pouvoir de légiférer des provinces68.

1.2.2 Seslimites

En plus des limites qui peuvent être imposées au parlement par la constitution,il faut aussi tenir compte de la tendance des cours de justice, face a une loi qui paraît créer une injustice, d'en atténuer les effets· par interprétation. A ce propos, l'approche du professeur Luc B. Tremblay m'apparaît intéressante en. ce qu'elle reconnaît l'importance de cet outil qu'est l'interprétation des lois par les juges afin d'arriver à atténuer l'effet de certaines 16is, ce que la do<:;trine orthodoxe de la souveraineté parlementaire ne permet pas de discerner puisqu'elle ne s'intéresse qu'à la relation juridique quiprévauLentre le juge et. le législateur, relation où· le juge s'incline devant la prééminence de ·la loi et reconnaît qu'il ne peut que l'appliquer69. On peut pourtant pousser plus loin ce raisonnement en reconnaissant que pour arriver à appliquer le droit aux circonstances devant lui, le juge effectue un· va.> et vient continuel entre l'interprétation de la règle. de droit et l'application de cette règle aux faitsrlont il est saisi, l'àpplication ayant par

65Supranote 44.

66VoirPartieVdelaLoi constitutionnelle de 1982,$Upranote1,qui inclut les articles38à49.

67VoirP.Hogg,$Upranote32 auxpp.336à339.

68Ibid.auxpp.298ss.

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conséquent autant d'influence sur l'interprétation que le contraire70. De plus, la théorie

moderne de l'interprétation confirme le rôle créateur de l'interprète, fondé sur la reconn.aissance du. caractère indéterminé des mots utilisés dans un texte ainsi que sur l'admission de la quasi-impossibilité de faire ressortir la véritable. intention du législateur71. Il découle de ces· constatations que l'interprétation d'un texte tient compte du contexte que l'interprète lui apporte, fondé sur sa culture, ses connaissances et ses valeurs admises.

On retrouve dans l'arrêt Anisminic Ltd c. Foreign Compensation Commission [ci-après Anisminic] une illustration du rôle que peut jouer l'interprète72: La Bouse of Lords y a interprété la Foreign Compensation Act 1950 de façon à donner ouverture à la révision judiciaire malgré la présence de l'article 4(4) de cette loi,. une clause restrictive de juridiction qui interdisait la révision judiciaire de façon étanche puisqu'elle couvrait «The determination by the Commission of any· application made to them under tbis •Act»73. On peut remarquer que Lord Pearce y affirme que la recherche de l'intention du législateur afin de s'assurer que le tribunal inférieur s'y conforme «is simply ah enforcement of Parliament's mandate to the tribunal»74. Ainsi, la Rouse of Lords, en interprétant l'article 4 de la loi de façon à donner ouverture à la révision judiciaire malgré la présence d'une clause privative étanche, prétend prendre appui .sur le·· principe de la souveraineté parlementaire puisqu'elle déclare avoir recherché la véritable intention du législateur.

On peut donc affirmer que même si .le principe de la souveraineté· parlementaire semble a priori un obstacle.àla révision judiciaire, les juges ont réussi àl'utiliser comme

70VoirJ.A Corry, «Administrative Law and the Interpretation of Statutes», (1936) 1U.T.L.J. 286aux pp.

29Q-291ainsi que R. A Macdonald; «On the Administration of Statutes}),(1987) 12Queen's L.J.488àla p.

493.

71Voirà ce sujet P.-A Côté,. «L'interprétationde la loi, une création sujette à des contraintes», (1990) 50R.

duB. 329,.thème qui est repris dans la monographieInterprétation des lois, 3eéd., Montréal, Les Éditions Thémis, 1999aux pp.24à30. Voir aussi sur ce sujet le sous-titre3.2ci-dessous.

72[1969] 2 AC. 147; [1969] 1AUE.R. 208.

73Pour le texte delaclause restrictive, voir[1969] 1AU E.R. à la p.212. 74ArrêtAnisminic, supranote72aux pp.233-234.

(29)

fondement de leur prise de position, tel qu'il vient <J'être démontré. De plus, la protection constitutionnelle des droits et libertés, dont les· juges.s'estiment les gardiens, a aussi ouvert une brèche qui, bien que ne mettant pas en·· péril le. principe même de la souveraineté parlementaire, l'a tout de même affaibli. Enfin, ces limites peuvent sans doute aussi expliquer la cohabitation possible de deux principes fondamentaux qui, à prime abord, peuvent paraître s'opposer, soit lasouverainetéparlem.entaire et le principe de la séparation des pouvoirs, qui fait l'objet du prochain sous-fitre.

1.3 LA SÉPARATION DES POUVOIRS

1.3.1 Le principe

La théorie> de la séparation des pouvoirs fut cOllceptualîséepar Montesquieu, qui s'inspira de la constifutiond'Angleterre75.Après avoir identifié trois sortes de pouvoirs, soit la puissance législative, la puissance exécutrice del'Etat et la puissance de juger76, Montesquieu affirme que ces trois pouvoirs doiventdemeurer séparés afin de fllaintenir la liberté politique des citoyens. De plus, Montesquieu est d'avis que ces trois pouvoirs doivent se retrouver sur un pied d'égalité afin. qu'ils puissent· se contraindre mutuellement par la possibilité de s'opposer l'un à l'autre. C'esfcet équilibre entre les trois pouvoirs exercés par des personnes différentes qui pourra éviter un gouvernement tyrannique, c'est-à-dire un gouvernement qui gouverne dans son propre intérêt plutôt que dans l'intérêt des citoyens.

Au Canada, l'A-A-N.B. ne prévoit pas expressément la séparation des pouvoirs77,

contrairement à la. constitution.. américaine. qui identifie les .trois branches du gouvernement

à

ses premiers articles.. Il existe cependant sur une base fonctionnelle une

75 Charles de Seconda!, baron de Montesquieu, De l'esprit des lois, Paris, Qlmier, 1973.

76Montesquieu, De l'esprit des lais dans Œuvres Complètes,. Paris,

Gallimard,

1951, aux pp. 396-397.

77VoirP.Hogg, supra note 32~la p.lOl;L. MSossin, BoundariesofJudiCial Review, The Lawof Justiciability in Canada, Toronto, CarsweU, 1999 à la p.. 9; P.H.Russell, The Judiciary in Canada: The third Brpnch ofGovernment, Toronto, McGraw-HiH Ryerson Li:mited, 1987, à la p. 75; D. J. Mulla», Administra~ive Law,Toronto, Irwin Law, 2001 à la p, 38.

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certaine separation des pouvoirs, d'ailleurs reconnue par la Cour suprême78. Mais notre système politique, de par sa structure de gouvernement responsable, laisse peu de place à up.e forte théorie de la séparation des pouvoirs entre les branches légi$lative et exécutive p-uisque ce· sont les députés les· plus influents du parti au pouvoir qui .sont nommés au cabinee9. Le principe de la separation des pouvoirs s'applique surtout à la branche judiciaire afin d'ep. consacrer l'indépendance bien qu'encore là, on ne puisse déceler ici une séparation totale. Ainsi, la Cour suprême du Canada de même que les Cours d'appel des provinces peuvent, .au moyen de renvois, se faire demander des opinions juridiques de la part de la branche exécutive. De pills, il. est permis de nommer des membres. de la magistrature pour présider des commissions parlementaires8o. D'autre part, on reconnaît

au législateur la possibilité de conférer des fonctions de nature judiciaire à des tribunaux administratifs, telle l'interprétation des lois81.

1.3.2 L'indépendance judiciaire

78 Lejuge.en chefDickson, dansl'arrêtFraserc. Commission des relations de travail dans la Fonction publique,[1985]2RC. S. 455,aflïnne ce qui suit aux pp. 469-470: «Ilexiste .au Canada une séparation des pouvoirs entre les. trois branches du gouvernement -. le législatif, l'exécutif et le judiciaire. En termes généraux,Je rôle du judiciaire est,ilva sans dire, d'interpréter etd'appliquerIa loi; le rôle du législatif est de prendre des décisions et d'énoncer des politiques; le rôle de l'exécutif est d'administrer et d'appliquer ces politiques.» [Traduction] Voir aussiR.Dussault etL. Borgeat, Traité de droit administratif, supranote 13

àla p. 20 ainsi que William R Lederman, «The Independence of the Judiciary», (1956) 34R. du B. cano 769 et 1139, pp. 1166-1167.

79VoirR.Dussault et L. Borgeat,supranote13aux pp. 21 et 22.

80Il faut cependant tenir compte des commentaires émis par le Conseil canadien de la magistrature dans le

cadre de principes de déontologie jlldiciaire. émis en 1998.. Eneifet, l'article 8 des commentaires sur les principes relatifs à J'indépendance de la magistrature émet une mise en garde sérieuse aux juges, les enjoignant d'étudier soigneusement la proposition de nominationqlÜleur est faite afm d'en prévoir les rép(lrcussions .sur . l'indépendance judiciajre. On y précise, entre . autres, ..• que «[l]es juges .doivent soigneusement examiner leur mandat, ainsi que les facteurs en cause, tels que le temps et les ressources dont ilsdisposent,afm de s'assurer que tous ces éléments sont compatibles avec la fonction judiciaire.» On

peut consulter lesPrincipes de déontologie judiciaireen ligne, au: www.cjc-cem.gc.ca.

81 Le juge en.chef Lamerle reconnaît dans Bell c.Canada (C.C.D.P.)(subnom. Coopere. Canada (C.C.D.P.)), [1996] 3 RC.s,854 au.para. 10 [ci-aprèsCooper]. Nous verrons toutefois plus loin qlle le tribunal administratif n'a généralement pas droità .l'erreur lorsqu'il interprète des dispositions extérieuresà

(31)

L'indépendance judiciaire dans la colonie britannique de l'Amérique du Nord s'est établie de façon lente et progressive, postérieurement

à

ce qui s'est fait en Angleterre82. En effet, dès ·1701 une loi britannique a officiellement consacré deux conditions essentielles de l'indépendance judiciaire, soit l'inamovibilité et la sécurité financière83 pour les «central courts of common law». Dans la colpnie, ila fallu attendre jusqu'en 1830 pour qu'une politique impériale interdise aux Juges d'être aussi des membres de l'exécutif ou de l'assemblée législative. C'est le rapport Durham qui recommanda d'accorder à. la magistrature de la colonie les mêmes garanties de sécurité d'emploi et de sécurité financière qui prévalaient déjà. en Angleterre84. Lors de l'entrée en vigueur de l'A-A.N.B., l'indépendance de la magistrature canadienne était établie depuis peu. On peut.d'ailleurs constater que les. articles <99 et 100 de l'A.A.N.B., portant respectivement sur l'inamovibilité et sur la sécurité financière des membres des cours supérieures, de district et de comté des provinces, sont inspirés du par. 7(3) de l'Act of Settlement: Ceci nous amène à. nous interroger sur la nature des garanties constitutionnelles qui donnent effet .au principe de l'indépendance judiciaire. Force est de constater qu'à. part l'article Il d) de laCharte canadienne.qui ne s'applique qu'en matière pénale, aucune disposition de notre constitution écrite ne consacre de façon générale le principe de l'indépendance judiciaire. Les articles 96 à. 100 de l'A.A.N.B. etplus particulièrement les articles 96, 99 et 100 fournissent aux juges des cours supérieures des provinces les assises de leur indépendance pour ce qui concerne leur nomination, leur inamovibilité et leur sécurité financière85. Qu'en est-il des tribunaux inférieurs? Le pouvoir de contrôle et· de surveillance que possèdent les cours supérieures envers les excès de compétence de ces tribunaux leur permettent d'intervenir en cas de. décision partiale de ces derniers, ce qui

82 Ace sujet, voir l'excellent historique fait par le professeur WilliamR. Lederman,supra note78aux pp.

769 et 1139.

83Parl'Act ofSettlement,1701(R.-u.), 12& 13 WilliamnI,c. 2, art. 7(3).

84W.R.Lederman,SUpranote78aux pp. 1150-1151.

85!Lfaut cependantremarquer que l'article 99 relatifàl'inamovibilité ne vise que les cours supérieures alors que les articles 96 et 100 visent aussi les cours de district et de comté. Cela n'a par contre pas beaucoup d'impact au Québec Pwsqu'il n'y existe aucl.lne cour de district et de comté.

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