ANALYSE DIDACTIQUE DE L'EPREUVE DE BIOLOGIE
AUX BACCALAUREATS C ET D DE 1970 A 1985
AU SENEGAL
Babacar GUEYE
Professeur de Sciences Naturelles à Dakar (Sénégal). Docteur es Didactique des Disciplines option Biologie et Educationàl'Environnement - Université Paris 7
MOTS-CLES : BIOLOGIE· DIDACTIQUE - BACCALAUREAT - EXAMEN.
RESUME: La première partie est un historique montrant la dynamique et les raisons de l'évolution des sujets de Biologie au baccalauréat depuis leur forme la plus traditionnelle jusqu'à celle que nous connaissons aujourd'hui. Cette étude a été effectuée en France d'où ont été importés ces types de sujets.
Nous avons ensuite fait un inventaire des sujets posés avant de les catégoriser dans leurs formes, leurs objectifs et leurs thèmes pour mener une réflexion critique sur leur élaboration, leur présentation et plus profondément leur conception.
La troisième partie est l'étude des conséquences de l'épreuve de Biologie sur les autres éléments du curriculum (programmes, manuels, professeurs, élèves).
SUMMARY : The flrst part is a historical survey showing the process of and the reasons for, the evolution of biology tests for university entrance examination starting from their most traditional form to the latest. This study has been carried out of France from where these kind of tests have been imported.
Then we have reviewed the subjects set, before categorizing them accordind to their fOnDS, their goals and their themes, in order to undertake a critical assessment of the way they worked out, presented and more deeply conceived.
The third part is the study of the consequences of the biology test on the others points of the curriculum (program, books, teachers, schoolchildren).
1. INTRODUCTION
Tous ceux qui interviennent dans le système éducatif savent plus ou moins qu'il y a énormément de difficultésàmettre en place une évaluation précise des objectifs poursuivis.
Notre recherche, qui constitue une première au Sénégal, est une analyse épistémologique et didactique de l'épreuve de Biologieàla fin des études secondaires durant la période allant de 1970 à 1985.
Nous avons jugé utile de mener ce travail car nous pensons qu'il est absolument nécessaire de faire de temps en temps une étude approfondie des moyens d'évaluation afin de voir s'ils sont demeurés pertinents et valides. C'est de cette façon que l'on pourra déceler les imperfections éventuelles et trouver des hypothèses de remèdes.
L'épreuve de Biologie au baccalauréat du Sénégal a été marquée en 1977 par une importante réforme dans la manière de concevoir et de présenter les sujets. A la place des anciens sujets qui ne faisaient appel qu'à la seule mémoire des élèves, les textes officiels demandaient d'en proposer d'autres qui feraient beaucoup plus appel à leur intelligence.
A cette fin, ils devraient prendre la forme de problèmes à réSOudre, l'élève étant mis face à une documentationà exploiter.
Notre étude comprend trois parties:
- Une première, dans laquelle nous avons étudié l'origine de cette innovation ainsi que ses objectifs. - Une deuxième partie qui est l'étude critique des sujets proposés dans le cadre de cette réforme au Sénégal. - Une dernière partie qui est consacrée à l'examen des conséquences de ce type d'épreuves de Biologie au baccalauréat, sur les autres éléments du curriculum, dans les classes de Première et de Tenninale au Sénégal.
2. ORIGINE
Très tôt, nous avons découvert que la réforme était en fait importée de France. Elle était la copie conforme d'une innovation qui avait été appliquée dans ce pays depuis 1969 (circulaire nO IV/69 188 du 11/04/1969).
Dès lors, notre préoccupation première a été de mener une étude historique, en France, pour retrouver la dynamique et les raisons de l'évolution des sujets de Biologie au Baccalauréat. C'est ainsi que nous sommes remontés jusqu'en 1910 pour découvrir que la réforme de 1969 était la dernière étape de différentes tentatives de réponses apportées à une même question: celle de l'évaluation de l'acquis des élèves lors de travaux pratiques.
Jusqu'en 1969 toutes les solutions adoptées pour la conception de l'épreuve de Biologie au baccalauréat ont échoué dans leur but de sortir l'enseignement des Sciences naturelles de son caractère livresque et dogmatique. La pression constamment exercée par les professeurs pour hisser leur discipline au même niveau que les Sciences Physiques et les Mathématiques n'a jamais donné les résultats espérés.
A partir de ce constat, nous avons essayé de savoir si au Sénégal la dernière innovation a réussi là ou les autres avaient échoué.
3. ETUDE CRITIQUE
Pour mener cette critique, nous avons fait l'inventaire de tous les sujets de Biologie proposésàl'écrit au baccalauréat du Sénégal en série Cet D de 1970à1985. nous les avons ensuite catégorisés dans leurs thèmes et leurs objectifs avant de mener une réflexion approfondie sur leur élaboration, leur présentation et leurs imperfections.
Les résultats se résument ainsi:
- Tous les thèmes du programme ne sont pas considérés de la même façon au oaccalauréat. Il y a des préférendums liés à la facilité de trouver des documents et de confectionner les sujets. Les chapitres de l'Endocrinologie et de la Génétique tombent très souvent, tandis que d'autres comme l'évolution ou la multiplication végétative sont délaissés.
- La plupart des sujets, bien qu'ayant l'aspect de problèmes ne permettent pas de mesurer la maîtrise des différents objectifs. Il existe encore de très nombreuses questions qui, sous une forme déguisée, font beaucoup plus appelàla mémoire des élèves qu'à leur pensée logique.
- Les sujets proposés ne permettent pas de mesurer les attitudes et les démarches des élèves.
- Denombreux exercices qui logiquement ne pouvaient être posés qu'une seule fois - la connaissance de leurs solutionsàtravers les annales corrigées leur ôtant toute signification - ont été repris et transformés. - Beaucoup de sujets prennent des proportions trop importantes du fait qu'ils sont construits à partir d'expériences dont la description du déroulement et l'exposé des résultats donnent un texte trop long. - Certains sujets comportent des erreurs scientifiques graves qui montrent que certaines expériences proposées n'ont pas réellement été effectuées, mais simplement inventées sur le papier.
- Lacomposante iconographique est trop négligée. On ne fait pas la différence entre dessin, schéma et modèle.
- Aujourd'hui, l'épreuve de Biologie au baccalauréat se situe dans une perspective réductionniste des résultats de la Biologie fondamentale moderne. Les concepteurs de sujets éprouvent de nombreuses difficultés dans la recherche d'un niveau de langue compréhensible par les élèves. Le vocabulaire du questionnement est devenu très flou et imprécis et ne fait que cacher mal une demande de récitation de connaissances mémorisées.
En raison de la logique, qui lie tous les éléments d'un curriculum, l'épreuve de Biologie au baccalauréat va avoir des conséquences dans les classes de Première et de Terminale.
4. CONSEQUENCES SUR LES AUTRES ELEMENTS DU CURRICULUM
Dans cette partie, nous avons étudié les conséquences de ce type d'épreuve sur les programmes, les manuels scolaires, les professeurs et les élèves.
- Les programmes officiels sont complètement modifiés et sont calqués sur ce qui se fait au baccalauréat. Aujourd'hui, les chapitres qui sont privilégiés au baccalauréat le sont aussi en classe. Ceux qui n'apparaissent pas dans les sujets ne font plus l'objet d'un enseignement.
- Les manuels scolaires sont devenus très complexes et de niveau très élevé, du fait qu'ils ont suivi 375
l'épreuve de Biologie moderne. Ce sont beaucoup plus des outils du professeur que des élèves.
- Les professeurs des classes de Première et de Terminale enseignent de manière dogmatique et livresque pour pouvoir terminer les programmes exorbitants. Ils suppriment les travaux pratiques et font parfois des heures supplémentaires gratuites. Ils ne se soucient presque plus de l'application des sciences au monde qui entoure les élèves.
- Les élèves s'adonnent au bachotage systématique et apprennent leurs cours par coeur. Même devant les situations nouvelles, ils réfléchissent peu et essaient de placer leurs connaissances stéréotypées.
Notre analyse débouche sur la conclusion suivante:
Contrairement à ce que certains ont cru, cette dernière innovation de l'épreuve de Biologie au baccalauréat n'est pas un point d'aboutissement, mais plutôt un point de départ. Si elle n'a pas prémuni l'enseignement de la Biologie contre une inflation des connaissances, elle a cependant obligé à poser en termes totalement nouveaux, le problème de la place et du rôle des expériences dans l'enseignement scientifique.
Aujourd'hui, une réflexion sur les sujets de Biologie au baccalauréat devrait conduire à discuter aux moins deux points:
- Quelles techniques peut-on réellement réaliser en classe? Qu'est-ce qu'on ne pourra jamais faire, mais seulement imaginer à partir de documents? Cette description permet-elle de comprendre la procédure expérimentale dans laquelle elle s'inscrit?
- Quels raisonnements attend-t-on sur ces faits expérimentaux décrits sous forme de textes, photos, graphiques, tableaux?
La balle est maintenant dans le camp des enseignants, des didacticiens de la Biologie et de tous ceux qui réfléchissent aux modalités de l'enseignement scientifique.
5. BIBLIOGRAPHIE
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