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la crise du milieu de la vie

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Academic year: 2022

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la crise du milieu de la vie

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C H E Z L E M Ê M E É D I T E U R

PSYCHOLOGIE PATHOLOGIQUE, THÉORIQUE ET CLINIQUE, sous la direction de Jean BERGERET. Préface de D. WIDLOCHER. Collection Abrégés de Méde- cine. 1995, 6e édition complétée, 344 pages, 21 figures.

LA DÉPRESSION. ÉTUDES, sous la direction de André FELINE, Patrick HARDY, Monique DE BONIS. Collection Abrégés de Médecine. 1991, 308 pages, 7 figures, 11 tableaux.

PSYCHOLOGIE MÉDICALE, par Philippe JEAMMET, Michel RAYNAUD, Silla CONSOLI. Préface de H. FLAVIGNY. Collection Abrégés de Médecine. 1992, 6e tirage, 368 pages.

FACTEURS HUMAINS ET SITUATIONS EXTRÊMES, par Jean RIVOLIER. Collection Médecine et Psychothérapie. 1992, 264 pages, 7 figures, tableaux.

TROUBLES SEXUELS MASCULINS EN CONSULTATION DE PSYCHOLOGIE MÉDICALE,

par Jean TIGNOL, Collection Médecine et Psychothérapie. 1992, 152 pages,

4 figures, 5 tableaux.

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COLLECTION MÉDECINE ET PSYCHOTHÉRAPIE

la crise du milieu de la vie

p a r L. M I L L E T

avec la collaboration de J. PON et F. MILLET-BARTOLI

2e tirage

MASSON Paris Milan Barcelone

1995

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DANGER

PHOTOCOPILLAGE LE

TUE LE LIVRE

Ce logo a pour objet d'alerter le lecteur sur la menace que représente pour l'avenir de l'écrit, tout particulièrement dans le domaine universitaire, le développement massif du «photo- copillage».

Cette pratique qui s'est généralisée, notamment dans les établissements d'enseignement, provoque une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd'hui menacée.

Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisation, ainsi que le recel, sont passibles de poursuites.

Les demandes d'autorisation de photocopier doivent être adressées à l'éditeur ou au Centre français d'exploitation du droit de copie: 3, rue Hautefeuille, 75006 Paris. Tél.: 43 26 95 35.

Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction par tous procédésréservés pour tous pays.

Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans le présent ouvrage, faite sans l'autorisation de l'éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées, d'une part, les reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective, et d'autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d'information de l'œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle).

© M a s s o n , P a r i s , 1 9 9 3 ISBN : 2-225-84374-0

ISSN : 0982-2712

MASSON S.A. 120, bd Saint-Germain, 75280 Paris Cedex 06

MASSON S.p.A. Via Statuto 2/4, 20121, Milano

MASSON S.A. Avenida Principe de Asturias 20, 08012 Barcelona

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avant-propos

Deux équipes nous ont aidés à réaliser ce travail :

• l'une est celle du Service de Psychiatrie et Psychologie Médicale du C H U de Toulouse (Pr P. MORON), aux activités de laquelle nous participons depuis son origine,

• l'autre, celle que nous avons organisée à la Clinique de Montberon, depuis 1968, avec l ' a c c o r d des Drs, J. BOUE et J. SOLIER.

Nous tenons à remercier globalement chacun de leurs membres p o u r avoir a p p o r t e r sa pierre à notre effort de construction, mais plus particulièrement les Drs C. ANDRÉ, R. BAUX, P. CABAL, B. DESCLAUX, B. RIVES, M. RUDAZ- RIDOUARD, E. SOLLES, ainsi que Mmes J. DEMOLLIENS et M. SUDRIES.

Mme C. FABRE a été une collaboratrice compétente, intelligente, dévouée et efficace p o u r la dactylographie de ce rapport ; qu 'elle en soit vivement remerciée.

Nous avons reçu des remarques bibliographiques précieuses du Dr J. GARRABE et du Pr F. GRUNBERG; à tous deux, nous tenons à exprimer notre très vive gratitude. Celle-ci s'adresse, aussi, p o u r des raisons du même ordre, aux Prs B. BENSMAIL, M. ESCANDE, J. GUYOTAT, J.-M. LÉGER, J.-L. MONTASTRUC et D. PRINGUEY et aux Drs R. CHATELAIN, A. GASSIOT, J.-C. PENOCHET, C. RODIÈRE-REIN, L. SCHMITT, D. TRONCHE.

Nous tenons à dire notre admiration aux Drs D. M ARC ELLI et A. BRACONNIER, p o u r leur ouvrage sur la « Psychopathologie de l'adolescent », dont la qualité nous a aidés à structurer notre travail.

Au-delà de cette reconnaissance immédiate, et à des titres très divers mais tous très importants, nous remercions, de f a ç o n profonde et essentielle,

• p o u r leur affection attentive et leurs conseils, tous les membres de notre entourage familial,

• pour la confiance et l'attention qu'ils nous ont accordées, le Médecin Inspecteur Général J.-V. PARAIRE, le Pr Y. PELICIER et le Pr M. POROT, ainsi que R. G IRA U DON, L. NOT et A. TOUZEL,

• p o u r leur amitié et leur enseignement, notre Maître M. RISER, notre ami P.-F. COMBES, ainsi que l'écrivain R. ABELLIO, tous trois trop tôt disparus,

• p o u r l'aide qu'ils nous apportent à comprendre tels ou tels aspects de la vie humaine, les patients qui nous f o n t confiance.

L. MILLET.

Nous remercions le Professeur J.-M. LEGER qui, au nom du Congrès de

Psychiatrie et de Neurologie de Langue française nous a autorisé la reproduc-

tion de notre Rapport présenté à Lille en 1990.

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INTRODUCTION

Ce travail se donne pour but d'étudier et de discuter la notion de « Crise du Milieu de la Vie », peu usitée en France, fréquemment employée, au contraire, aux U.S.A., où elle semble entrée dans le langage courant. Son intérêt majeur nous paraît, dans le domaine de la psychopathologie, consis- ter à placer l'accent sur l'importance des changements possibles des compor- tements personnels au cours de l'âge moyen.

Notre article de 1983, dans les Annales Médico-Psychologiques, posait une question : « La crise du milieu de la vie : mythe ou réalité clinique ? » Il nous semble, aujourd'hui, possible d'y répondre avec une meilleure approche, car nous avons, très souvent depuis lors, rencontré de nombreux patients dont la problématique correspond bien à l'ébauche clinique que nous proposions. Peut-être, cependant, ne s'agit-il que d'un mythe, puisque la véritable réalité — à laquelle se confronte, tous les jours, notre pratique psychiatrique — concerne essentiellement l'existence concrète des person- nes dans leurs variétés et leurs unicités et non pas une abstraction, forcément théorique et trop générale ; mais il est des mythes dont l'intérêt explicatif est fécond et utile. Il nous semble que la notion de crise du milieu de la vie peut nous aider à comprendre certains de nos patients et à adopter à leur égard une attitude plus adaptée et plus satisfaisante.

Bien sûr, l'expression même de « crise du milieu de la vie » peut apparaî- tre discutable, ce que nous ne manquerons pas d'admettre et d'argumenter ; peut-être aurait-il mieux valu parler de « modifications psychologiques de l'âge moyen » ou encore de « tournant(s) de la vie adulte », mais nous avons préféré garder son aspect imagé en raison d'une part de ses lettres de noblesse, relevant du « divin » DANTE lui-même (il évoque le milieu de la vie), d'autre part de sa connotation populaire, relevant de la sagesse des nations (qui parle, aussi, du « démon de midi »). Il ne s'agit pas, en tout cas, d'un concept stéréotypé, d'une forme rigide ; chacun crée sa manière, profondément personnelle, de subir et de construire les moments de son existence. Quant à la notion de milieu, il faut la prendre dans son sens psychologique et non pas mathématique.

Le terme de crise, lui-même parfois contesté, laisse place en réalité à

une définition large qui lui permet de désigner, bien au-delà d'un trouble

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p a t h o l o g i q u e , u n e é v o l u t i o n v e r s l a m a t u r a t i o n e t l ' é p a n o u i s s e m e n t ( p e r m e t - t a n t p a r e x e m p l e à l a c h r y s a l i d e d e d e v e n i r p a p i l l o n ) .

N o u s s a v o n s d ' e m b l é e q u e n o t r e t r a v a i l n ' e s t q u ' u n e e s q u i s s e e t q u e , s a n s d o u t e , s o n s e u l m é r i t e ( s ' i l e n a u n . . . ?) c o n s i s t e r a à p r o v o q u e r d ' a u t r e s t r a v a u x s u r l e s t a t u t p s y c h o p a t h o l o g i q u e d e l ' a d u l t e a u m i d i d e l a v i e . N o u s n e s o u h a i t o n s p a s u n é c l a t e m e n t d e l a p s y c h i a t r i e , m a i s il f a u t b i e n le c o n s t a t e r , a u m o m e n t o ù l a p é d o p s y c h i a t r i e d e v i e n t a u t o n o m e , o ù l a p s y c h o - g é r i a t r i e é t e n d s o n d o m a i n e t h é o r i q u e e t p r a t i q u e , o ù d e t r è s n o m b r e u x t r a v a u x s o n t c o n s a c r é s à l a p s y c h o p a t h o l o g i e d e l ' a d o l e s c e n c e , l a p s y c h o l o - g i e e t l a p s y c h o p a t h o l o g i e d e l ' â g e m o y e n a p p a r a i s s e n t c o m m e l e s p a r e n t s p a u v r e s d e n o t r e r e c h e r c h e ; J . ROUART é v o q u a i t d é j à c e t t e c a r e n c e , il y a u n e q u i n z a i n e d ' a n n é e s : « T a n t a été c o n s i d é r é e c o m m e t y p i q u e c e t t e p s y c h o p a t h o l o g i e d e l ' a d u l t e q u ' o n a p e u s o n g é à e n v i s a g e r les f o r m e s m ê m e s q u e p r e n d s a m o r b i d i t é m e n t a l e , c o m m e d é t e r m i n é e s p a r les d i f f i c u l t é s d e s a t i s f a i r e a u x e x i g e n c e s s p é c i f i q u e s d e c e t â g e , m o i n s p e u t - ê t r e à celles q u e r é c l a m e n t d e l u i les c i r c o n s t a n c e s e x t é r i e u r e s q u e celles q u e p o s t u l e s a c o n f o r - m i t é à la r e p r é s e n t a t i o n a l l é g o r i q u e q u ' o n s ' e n f a i t . » N o t r e m o d e s t e a m b i t i o n e s t d e p a r t i c i p e r à r é p o n d r e à c e t y p e d e q u e s t i o n s , m u l t i p l e s à n o t r e a v i s , e t i m p o r t a n t e s à l a f o i s s u r le p l a n s o c i a l e t t h é r a p e u t i q u e .

A u n e c e r t a i n e p h a s e d e l ' â g e m o y e n , le s u j e t p r e n d , le p l u s s o u v e n t , u n e c o n s c i e n c e d e p l u s e n p l u s n e t t e e t c l a i r e d e l a c o n d i t i o n p r é c a i r e d e s o n i n d i v i d u a l i t é p r o p r e . A y a n t c o n s a c r é s e s p r e m i e r s e f f o r t s d ' a d u l t e à s ' a f f i r - m e r s o c i a l e m e n t e t a f f e c t i v e m e n t , e t f r é q u e m m e n t a u s s i p a r l a p a r e n t a l i t é , à s ' i n s c r i r e d a n s l a s u c c e s s i o n d e s g é n é r a t i o n s , il p a r v i e n t à u n e p é r i o d e o ù il f a i t u n b i l a n d e s o n p a s s é e t d e s e s r é a l i s a t i o n s , s ' i n t e r r o g e a n t d e f a ç o n p l u s o u m o i n s c l a i r e e t p r é c i s e s u r le s e n s d e s o n e x i s t e n c e ; il p r e n d p o u r c e l a u n e c e r t a i n e d i s t a n c e v i s - à - v i s d e l u i - m ê m e e t s ' a p e r ç o i t s o u v e n t q u e l a f i n d e l ' a d o l e s c e n c e n e s i g n i f i e p a s t o u t à f a i t l a m a t u r i t é ; il a p a r f o i s l ' i m p r e s s i o n d ' a v o i r é t é p r i s o n n i e r , e n g r a n d e p a r t i e , d e s o n p a s s é , d e s o n e n f a n c e e t m ê m e d e c h o i x i n i t i a l e m e n t r e s s e n t i s c o m m e t o u t à f a i t l i b r e s , a c t u e l l e m e n t é p r o u v é s c o m m e t r o p m a r q u é s e t c o n d i t i o n n é s p a r le g r o u p e f a m i l i a l i n t é r i o r i s é d o n t il e s t i s s u ; d a n s q u e l q u e s c a s , il s e d e m a n d e si le fil r o u g e d e s e s d é c i s i o n s n ' a p a s é t é p r é p a r é p a r l ' i d é a l d e s o n g r o u p e e t n o t a m m e n t d e s a m è r e . Il se r e n d c o m p t e q u e , d u f a i t m ê m e d e s c h o i x n é c e s s a i r e s , il a d û a b a n d o n n e r n o m b r e d e s e s a s p i r a t i o n s p e r s o n n e l l e s ; d a n s s a c o n s t r u c t i o n d e l u i - m ê m e , il n ' a p u f a i r e i n t e r v e n i r t o u t e s s e s c a p a c i - t é s e t s e s v i r t u a l i t é s . S a s i t u a t i o n , s o n d é s i r l ' a m è n e n t à s o u h a i t e r d e s c h a n g e m e n t s e t à les m e t t r e e n œ u v r e .

L e b i l a n d u m i d i d e l a v i e c o m p o r t e d o n c s o u v e n t d e s é l é m e n t s i m p o r t a n t s d e r e g r e t s e t d e d é c e p t i o n , d ' a u t a n t q u e le t e m p s s ' a m e n u i s e p o u r m e n e r à b i e n les a s p i r a t i o n s e n c o r e n o n r é a l i s é e s . D i v e r s e s t e n t a t i o n s s e p r é s e n t e n t a l o r s a u s u j e t : a s s u m e r le p a s s é e t r e c o n n a î t r e l a v a l e u r d e c e q u i a é t é c r é é ; p a r f o i s , il l u i s u f f i r a d ' é p a n o u i r l a s i t u a t i o n a c t u e l l e ; le s u j e t v a a l o r s

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d e v e n i r p r o f o n d é m e n t c r é a t e u r , n o t a m m e n t d e s a p r o p r e v i e , e t a u s s i d e c e q u i l a c o n d i t i o n n e ; il d e v i e n t a l o r s u n « c r é a t e u r t a r d i f » a u s e n s d e JAQUES.

P a r f o i s , a u c o n t r a i r e , le s e n t i m e n t d ' é c h e c l ' e m p o r t e a v e c t a n t d ' i n t e n s i t é q u e le s u j e t é p r o u v e le d é s i r d e d é t r u i r e s o n p a s s é , d e m o u r i r à s o i - m ê m e p o u r d e v e n i r a u t r e ; t e l e s t le s e n s q u e d o n n a i e n t l e s a n c i e n s a u x é p r e u v e s p r o p o s é e s p a r le « d é m o n d e m i d i », d a n s le s e n s d e l ' a u t o - d e s t r u c t i o n . P l u s i e u r s v o i e s s o n t , a l o r s , p o s s i b l e s : — c e l l e d ' u n e r é a d a p t a t i o n , d ' u n c h a n g e m e n t d e v i e p e r s o n n e l l e e t / o u p r o f e s s i o n n e l l e , é v e n t u e l l e m e n t d e l i e n e t d e l i e u ; p l u s o u m o i n s r é u s s i e , c e t t e n o u v e l l e o r i e n t a t i o n p l a c e à l ' é c a r t d u f u t u r t o u t e l ' e x p é r i e n c e p a s s é e , e t r i s q u e d e c r é e r u n e d i s s o c i a t i o n d i f f i c i l e à a s s u m e r . U n e a u t r e v o i e c o n s i s t e e n l a m a l a d i e , s o i t d ' o r d r e p s y c h o p a t h o l o - g i q u e , — tel e s t le c a s d e n o m b r e u s e s « d é p r e s s i o n s r é s i s t a n t e s », d ' h y p o - c o n d r i e s d é f i n i t i v e s , r é a l i s a t i o n d e r e f u g e s p e u é p a n o u i s s a n t s — , s o i t d ' o r d r e s o m a t i q u e p e r m e t t a n t a u s u j e t d e se d é - r e s p o n s a b i l i s e r , p l a ç a n t s a p a s s i v i t é s u r le c o m p t e d e l a d é f a i l l a n c e d e s o n c o r p s ; p e u t - ê t r e c e r t a i n s a c c i d e n t s g r a v e s p s y c h o - s o m a t i q u e s , v o i r e c e r t a i n e s i s s u e s d é f i n i t i v e s s o n t - e l l e s l i é e s à c e p r o c e s s u s . C e p e n d a n t , u n e m o d a l i t é p a r t i c u l i è r e d e r é a c t i o n o f f r e - t - e l l e l a f o r m u l e l a p l u s t y p i q u e d e c r i s e d u m i l i e u d e l a v i e : c e l l e d e l a « m a l a d i e c r é a t r i c e », m o m e n t d i f f i c i l e , o ù le s u j e t f a i t a p p e l a u m é d e c i n , se p l a c e d a n s u n e s i t u a t i o n d e « r e t i r a n c e » p a r r a p p o r t à s o n e x i s t e n c e h a b i t u e l l e , a v a n t d e r e t r o u v e r s o n d y n a m i s m e , o r g a n i s é s e l o n u n e f o r m e n o u v e l l e , p e r m e t t a n t u n n o u v e a u d é p a r t v e r s les h o r i z o n s p r é a l a b l e m e n t p r é v u s o u d a n s d e s d i r e c t i o n s n o u v e l l e s .

N o t r e p r o p o s s e d é r o u l e e n t r o i s p a r t i e s e s s e n t i e l l e s .

A u c o u r s d e l a p r e m i è r e p a r t i e , n o u s n o u s e f f o r c e r o n s d e m o n t r e r les m u l t i p l e s m o d a l i t é s q u e p e u t r e v ê t i r la c r i s e d u m i l i e u d e la v i e , e n f o n c t i o n d e s œ u v r e s l i t t é r a i r e s e t d ' u n e r é f l e x i o n g é n é r a l e ; n o u s t e n t e r o n s d e m e t t r e e n é v i d e n c e l a s i g n i f i c a t i o n p s y c h o l o g i q u e q u ' i l f a u t d o n n e r à l ' e x p r e s s i o n

« m i l i e u d e l a v i e », q u i n e d o i t p a s ê t r e é t r o i t e m e n t c o n s i d é r é e c o m m e u n e n o t i o n c h r o n o l o g i q u e . N o u s e s s a i e r o n s , é g a l e m e n t , d e d é f i n i r l a c r i s e , d e f a ç o n l é g i t i m e m e n t é l a r g i e , d é p a s s a n t l a r g e m e n t s e s a s p e c t s p a t h o l o g i q u e s . N o u s v e r r o n s e n f i n c o m m e n t c e r t a i n s o n t p e n s é p o u v o i r t r a n s c e n d e r c e t t e p é r i o d e c a p i t a l e d e l ' e x i s t e n c e , c o n s i d é r é e p a r f o i s c o m m e n a i s s a n c e , r e n a i s - s a n c e , o u « v r a i e n a i s s a n c e ».

N o t r e d e u x i è m e p a r t i e c o m p o r t e t o u t d ' a b o r d u n e b r è v e r é f l e x i o n s u r la d i f f i c u l t é d e s l i m i t e s e n t r e s a n t é e t m a l a d i e , n o t a m m e n t a u t o u r d e l a n o t i o n d e d é p r e s s i o n ; d e n o s j o u r s d é s o r m a i s , le m é d e c i n n e s a u r a i t se c o n t e n t e r d ' é t u d i e r e t d e s o i g n e r les m a l a d i e s , m a i s d o i t s ' e f f o r c e r d e c o n n a î t r e e t d e p r o m o u v o i r l a s a n t é ; e l l e a p p o r t e , e n s u i t e , u n e s é r i e d e d o c u m e n t s c l i n i - q u e s : p l u s d e c i n q u a n t e o b s e r v a t i o n s , la p l u p a r t p e r s o n n e l l e s , m a i s q u e l q u e s - u n e s d e s o u r c e s d i v e r s e s , s o n t p r é s e n t é e s d e f a ç o n p l u s o u m o i n s d é t a i l l é e p o u r i l l u s t r e r t e l l e o u t e l l e f o r m e d e d é c o m p e n s a t i o n p s y c h o p a t h o -

(13)

l o g i q u e ; n o t r e p l a n r e s t e c e n t r é s u r l a n o s o g r a p h i e c l a s s i q u e m a i s t e n t e a u s s i d ' e n é l a r g i r l a c o n c e p t i o n .

N o t r e t r o i s i è m e p a r t i e e s q u i s s e u n e r é f l e x i o n p s y c h o p a t h o l o g i q u e e t s ' e f - f o r c e d e m o n t r e r q u e l s f a c t e u r s o n t p a r u j o u e r u n r ô l e m a j e u r d a n s l e s d é c o m p e n s a t i o n s c l i n i q u e s d e n o s m a l a d e s . C i n q p o i n t s , s u r t o u t , t e n t e r o n t d ' ê t r e d é g a g é s . L e p r e m i e r i n s i s t e r a s u r l ' i m p o r t a n c e m a j e u r e d e s s é p a r a t i o n s d a n s l a v i e , p r o c e s s u s n é c e s s a i r e à l a m a t u r a t i o n d e l ' ê t r e , m a i s d i f f i c i l e à a s s u m e r , s u r t o u t l o r s q u e l e s c i r c o n s t a n c e s e n s o n t p r o f o n d é m e n t d é f a v o r a - b l e s , e t p a r f o i s t r è s r é e l l e m e n t d é s t r u c t u r a n t e s , n e p e r m e t t a n t a u c u n e r e c o n s t r u c t i o n é q u i l i b r a n t e ; l a c r i s e d u m i l i e u d e l a v i e s e r a é t u d i é e d a n s c e t t e p e r s p e c t i v e c o m m e l a t r o i s i è m e p h a s e d e « s é p a r a t i o n - i n d i v i d u a t i o n » s e c o n d e a d o l e s c e n c e , é t a p e d e « m a t u r e s c e n c e » 1 p r é a l a b l e à l a f u t u r e s é n e s c e n c e . L e s e c o n d p o i n t e x p l o r e r a le s e n t i m e n t v é c u d e l a r é a l i t é d e l a m o r t i n d i v i d u e l l e e t d e l ' u n i q u e c y c l e d e v i e d o n t d i s p o s e c h a c u n ; c e t t e c o n s c i e n c e , p l u s n e t t e a u c o u r s d e l ' â g e a d u l t e , e s t a c c e n t u é e g r a v e m e n t p a r l a s u r v e n u e d a n s l ' e n t o u r a g e d e s d e u i l s r é e l s , p l u s o u m o i n s p r é m a t u r é s . L e t r o i s i è m e p o i n t a b o r d e r a l a q u e s t i o n d e s r e l a t i o n s d e c e v é c u p s y c h o l o g i q u e a v e c les m o d i f i c a t i o n s l i é e s a u v i e i l l i s s e m e n t b i o l o g i q u e . C e p o i n t e s t t r è s i m p o r t a n t e t n é c e s s i t e r a i t , à l u i s e u l u n é n o r m e v o l u m e ; n o u s n e p o u r r o n s , ici, y c o n s a c r e r q u e q u e l q u e s p a g e s , d o n t n o u s n e m e s u r o n s q u ' e n p a r t i e l ' i n s u f f i s a n c e ; les n o m b r e u x t r a v a u x b i o l o g i q u e s a c t u e l s s u r c e s u j e t a p p o r - t e n t t o u s les j o u r s d e s é c l a i r a g e s s u p p l é m e n t a i r e s , d e v a n t ê t r e i n t e r p r é t é s a v e c p r u d e n c e e t u n m i n i m u m d e r e c u l . L e q u a t r i è m e p o i n t , q u i d é p a s s e t r è s l a r g e m e n t n o s c o m p é t e n c e s e t a m é r i t é d e s é t u d e s s o c i o l o g i q u e s a p p r o f o n - d i e s , é v o q u e r a les v a r i a t i o n s d u v é c u d e l ' â g e m o y e n , s e l o n l e s d i v e r s e s c i v i l i s a t i o n s , m a i s d e v r a s e c o n t e n t e r d e b r è v e s r e m a r q u e s c o n c e r n a n t n o t r e s o c i é t é a c t u e l l e e t q u e l q u e s a s p e c t s d e l a s o c i é t é n o r d - a m é r i c a i n e . L e cin- q u i è m e p o i n t , e n f i n , e s s a i e r a d e m o n t r e r c o m m e n t , d a n s n o s o b s e r v a t i o n s , les r e l a t i o n s d e l ' ê t r e a v e c s o n e n t o u r a g e c o n d i t i o n n e n t e n p r o f o n d e u r t o u t e s les r é a c t i o n s d u s u j e t , l ' e n t o u r a g e i n f i l t r a n t , d e p u i s l ' e n f a n c e , l ' i n t é r i o r i t é d e c h a c u n , f o r m a n t p o u r le s u j e t u n b o u c l i e r d e d é f e n s e o u u n e t u n i q u e d e N e s s u s , u n e l i m i t e p r o t e c t r i c e o u u n e i n c l u s i o n d é s t r u c t u r a n t e ; t o u t s u j e t a p p a r a î t lié à s o n e n t o u r a g e p a r d e v é r i t a b l e s a t t a c h e s s y m b i o t i q u e s , n o t a m - m e n t d a n s l ' e n c h a î n e m e n t d e s g é n é r a t i o n s ; d e c e p o i n t d e v u e , l a c r i s e d u m i l i e u d e l a v i e d o i t ê t r e p r o f o n d é m e n t r a t t a c h é e a u x é v é n e m e n t s f a m i l i e r s s i g n i f i c a t i f s p a r m i l e s q u e l s d o i v e n t ê t r e , à n o t r e a v i s , p r i v i l é g i é s le v i e i l l i s s e - m e n t e t l a m o r t d e s p a r e n t s , l a m a t u r a t i o n , l a d i s t a n c i a t i o n e t l ' a u t o n o m i s a - t i o n d e s e n f a n t s , a i n s i q u e le d i v o r c e e t le v e u v a g e . U n e p l a c e à p a r t d o i t ê t r e f a i t e , d ' u n e p a r t , à l ' i n t e r f é r e n c e d e s c r i s e s i n d i v i d u e l l e s d a n s u n e f a m i l l e , l a « m a t u r e s c e n c e » d e l ' u n e n t r a n t e n r é s o n a n c e a v e c l ' a d o l e s c e n c e o u l a s é n e s c e n c e d e l ' a u t r e , d ' a u t r e p a r t a u d é c a l a g e e n t r e l a s i t u a t i o n

(1) Nous empruntons ce mot à C. ATTIAS-DONFUT, qui l'a proposé, la première.

(14)

a c t u e l l e m e n t v é c u e e t l e s p r o j e t s a n t é r i e u r e m e n t p r é v u s d a n s l e c a d r e d e l ' i d é a l i s a t i o n n o r m a l e e t p a t h o l o g i q u e d u s u j e t .

D a n s l ' e s p a c e t r o p l i m i t é d e c e t r a v a i l , il s e r a d i f f i c i l e m e n t q u e s t i o n d e l ' a b o r d t h é r a p e u t i q u e , h o r m i s q u e l q u e s r e m a r q u e s g é n é r a l e s t e n a n t c o m p t e e n p a r t i c u l i e r , d ' u n e p a r t d e l a n é c e s s i t é , à c e t t e p é r i o d e d e l a v i e , d ' u n e c e r t a i n e « d i s t a n c i a t i o n » ( e l l e d o i t s e t r a d u i r e f r é q u e m m e n t p a r l ' a c c e p t a - t i o n d e m o m e n t s d e r é f l e x i o n d a n s le c a d r e d e c e q u e n o u s d é s i g n o n s s o u s le t e r m e d e « r e t i r a n c e »), d ' a u t r e p a r t d e l a n o t i o n d e « m a l a d i e c r é a t r i c e », b i e n q u ' à n o t r e a v i s , t o u s les s y m p t ô m e s n e d o i v e n t p a s t o u j o u r s ê t r e r e s p e c t é s , c a r p a r f o i s , e n e u x - m ê m e s , ils s o n t s o u r c e s d e c o m p l i c a t i o n e t d ' a g g r a v a t i o n d e l a c r i s e , e t m ê m e d e c h r o n i c i s a t i o n ; l a c h i m i o t h é r a p i e , d e c e f a i t , n o u s a p p a r a î t e x t r ê m e m e n t u t i l e , e t s o u v e n t i n d i s p e n s a b l e d a n s l a p l u p a r t d e s f o r m e s p a t h o l o g i q u e s , a s s o c i é e s à l ' a i d e p s y c h o l o g i q u e e t / o u à l a p s y c h o t h é r a p i e 2

E S Q U I S S E H I S T O R I Q U E

F a i s a n t r é c e m m e n t a u x U . S . A . le b i l a n d e s t r a v a u x s c i e n t i f i q u e s s u r l a

« p s y c h o l o g i e e t l a p s y c h i a t r i e d e l ' â g e m o y e n », R . N . BUTLER é v o q u e t o u t d ' a b o r d q u e l q u e s a u t e u r s l i t t é r a i r e s : il c i t e — d ' u n e p a r t , d a n s l a l i t t é r a t u r e e u r o p é e n n e BALZAC, TOLSTOÏ, DICKENS, T h o m a s MANN — d ' a u t r e p a r t le b e s t - s e l l e r d e l ' a m é r i c a i n W a l t e r B . PITTKIM, p u b l i é e n 1 9 3 2 « l a vie c o m m e n c e à 4 0 a n s ». Il d i t , p a r a i l l e u r s , q u e l q u e s m o t s d e JUNG q u i « e n 1 9 6 0 , t e n t a d e d é l i m i t e r les é t a p e s d e l a v i e » e t d e FREUD, q u i « f u t p e s s i m i s t e s u r l ' â g e m o y e n et l a v i e i l l e s s e e t m a n i f e s t a p e u d ' i n t é r ê t t h é o r i q u e et p r a t i q u e à l e u r s u j e t . I r o n i q u e m e n t , FREUD i l l u s t r e l u i - m ê m e la c r é a t i v i t é c o n t i n u e à t r a v e r s l ' â g e a v a n c é , a l o r s q u ' i l n e s e r a i t q u ' à p e i n e r e m a r q u é d a n s l ' h i s t o i r e m é d i c a l e p o u r s o n t r a v a i l s u r l a c o c a ï n e , s ' i l é t a i t m o r t a v a n t 4 0 a n s . S o n œ u v r e m a j e u r e ,

" l ' i n t e r p r é t a t i o n d e s r ê v e s " f u t p u b l i é e q u a n d il a v a i t 4 4 a n s ».

P o u r BUTLER, l e s r é f é r e n c e s s c i e n t i f i q u e s d e s p l u s a n c i e n n e s d a n s c e d o m a i n e s o n t l e s t r a v a u x d e BENEDEK, e n 1 9 5 0 , s u r l a p a r e n t é e t l a m é n o - p a u s e c o m m e é t a p e s d u d é v e l o p p e m e n t , d e BERGLER, e n 1 9 5 7 , s u r « la révolte d e l ' h o m m e d ' â g e m o y e n », e t d ' E R I K S O N q u i , e n 1 9 5 9 , a c o n t r i b u é à

« c o n c e v o i r le c y c l e d e la vie c o m m e u n e n s e m b l e ». Il c i t e é g a l e m e n t GAIL SHEEHY p o u r s o n o u v r a g e « P a s s a g e s , les c r i s e s p r é v i s i b l e s d e l ' â g e a d u l t e » p u b l i é e n A m é r i q u e e n 1 9 7 4 ( e t e n F r a n c e e n 1 9 7 7 ) . Il i n s i s t e , s u r t o u t , s u r l e s r e c h e r c h e s r é a l i s é e s — d ' u n e p a r t , p a r l e « C o m i t é d ' é t u d e s s u r le d é v e l o p p e m e n t h u m a i n d e l ' U n i v e r s i t é d e C h i c a g o », e x p r i m é e s n o t a m m e n t

(2) N.B. Nous nous permettrons d'utiliser le plus souvent, désormais, dans ce travail, le sigle C.M.V., comme équivalent de « crise du milieu de la vie » ; nous prions le lecteur de nous en excuser, et d'en comprendre la raison dactylographique.

(15)

e n 1 9 6 8 , p a r les t r a v a u x d e B. NEUGARTEN, — d ' a u t r e p a r t , p a r le « p r o - g r a m m e d u d é v e l o p p e m e n t d e l ' a d u l t e d e l ' U n i v e r s i t é d e C a l i f o r n i e » p u b l i é e n 1 9 7 5 , p a r M . F. LOWENTHAL e t c o l l . , — e n f i n p a r D. LEVINSON, à l ' U n i v e r - s i t é d e Y a l e , e n 1 9 7 8 . A v r a i d i r e , d e n o m b r e u x a u t r e s t r a v a u x a n g l o - s a x o n s o n t é t é c o n s a c r é s à l a c r i s e d u m i l i e u d e l a v i e p a r m i l e s q u e l s n o u s r e t i e n - d r o n s , p a r t i c u l i è r e m e n t , l a c o n f é r e n c e r é c e n t e d e P . - H . MILLARD p r o n o n c é e e n F r a n c e , l o r s d e l a r é u n i o n s u r le « d é f i c i t n e u r o b i o l o g i q u e d e l a c i n q u a n - t a i n e » ( D . N . B . C . ) . N o u s é v o q u e r o n s l e s p r i n c i p a l e s r é f é r e n c e s a n g l o - s a x o n - n e s d a n s le c o u r s d e c e t r a v a i l . C e p e n d a n t l ' e s p a c e l i m i t é d e n o t r e r a p p o r t n e n o u s a p a s p e r m i s u n e r e v u e e x h a u s t i v e d e t o u t e s les p u b l i c a t i o n s e n l a n g u e a n g l a i s e ; c ' e s t p o u r q u o i n o u s a v o n s d o n n é u n r é s u m é d e t o u s l e s t r a v a u x q u e n o u s a v o n s p u c o n n a î t r e , d a n s c e d o m a i n e , d a n s l a T h è s e d ' E . SOLLES, q u i c o n t i e n t é g a l e m e n t u n c e r t a i n n o m b r e d ' o b s e r v a t i o n s p e r - s o n n e l l e s q u e n o u s n ' a v o n s p u e x p o s e r ici.

E n F r a n c e , m a l g r é l ' o u b l i a c t u e l e t c e r t a i n s a s p e c t s d é s u e t s d e c e t t e œ u v r e , il f a u t r a p p e l e r l ' i n t é r e s s a n t e p u b l i c a t i o n , e n 1 9 1 4 , p a r P a u l BOURGET, d u r o m a n , a l o r s t r è s c é l è b r e , a c t u e l l e m e n t i n t r o u v a b l e e n l i b r a i r i e , « L e D é m o n d e M i d i » ; t o u t le m o n d e c o n n a î t d é s o r m a i s c e t t e e x p r e s s i o n , n ' e n r e t e n a n t s o u v e n t q u e l a s i g n i f i c a t i o n é t r o i t e d e g r i v o i s e r i e p l u s o u m o i n s c a c h é e d u n o t a b l e d e 5 0 a n s ; P a u l BOURGET a v a i t s u , p l u s p r o f o n d é m e n t , c r e u s e r l a p s y c h o l o g i e d e s c h a n g e m e n t s , p a r f o i s p r o f o n d s o u p a s s i o n n e l s , d a n s l a v i e a d u l t e ; s o n r o m a n a v a i t é t é é t u d i é , p a r REPOND, d a n s l ' É v o l u t i o n p s y c h i a t r i q u e . P a r l a s u i t e , c e p e n d a n t , p e u d e t r a v a u x s c i e n t i f i q u e s n o u s s e m b l e n t a v o i r é t é c o n s a c r é s à l a c r i s e d e l ' â g e m o y e n e n d e h o r s d e c e u x p u b l i é s — e n 1 9 7 4 , s o u s le t i t r e g é n é r a l « P s y c h a n a l y s e d u G é n i e c r é a t e u r » c o m p o r t a n t e n p a r t i c u l i e r l a c o n t r i b u t i o n d e D. ANZIEU, « v e r s u n e m é t a p s y - c h o l o g i e d e la c r é a t i o n » e t l a t r a d u c t i o n d e l ' a r t i c l e d e E . JAQUES « m o r t et c r i s e d u m i l i e u d e la vie », — e t , e n 1 9 7 9 , d a n s « c r i s e , r u p t u r e et d é p a s s e - m e n t », a v e c n o t a m m e n t , d e s a r t i c l e s d e R . KAES « I n t r o d u c t i o n à l ' a n a l y s e t r a n s i t i o n n e l l e », d ' A . MISSENARD s u r « N a r c i s s i s m e et r u p t u r e » , d e D . AN- ZIEU « la d é m a r c h e d e l ' a n a l y s e t r a n s i t i o n n e l l e e n p s y c h a n a l y s e i n d i v i d u e l l e », e t d e J . GUILLAUMIN « p o u r u n e m é t h o d o l o g i e g é n é r a l e d e s r e c h e r c h e s s u r les c r i s e s ». U n e a u t r e c o n t r i b u t i o n d e R . KAES a é t é p u b l i é e d a n s le n u m é r o h o r s - s é r i e d u « J o u r n a l d e s p s y c h o l o g u e s » d e m a i 1 9 8 8 , c o n s a c r é a u x

« T e m p s d e l a v i e ».

U n c h a p i t r e i m p o r t a n t s u r l a c r i s e d u m i l i e u d e l a v i e , r a p p r o c h é e d e l a

« c r i s e p a r e n t a l e » e s t c o n s a c r é , d a n s l e u r o u v r a g e s u r l a « P s y c h o p a t h o l o - gie d e l ' a d o l e s c e n t », p a r D. MARCELLI e t A. BRACONNIER. P a r c o n t r e , il n ' e s t , à n o t r e c o n n a i s s a n c e , g u è r e f a i t m e n t i o n d e c e t h è m e d a n s l e s a u t r e s m a n u e l s o u t r a i t é s d e p s y c h i a t r i e d e L a n g u e F r a n ç a i s e , e x c e p t é c e l u i d e LALONDE e t GRUNBERG, é d i t é a u C a n a d a .

E n c e q u i n o u s c o n c e r n e , n o u s a v o n s r é a l i s é e n 1 9 8 1 , le M é m o i r e p o u r le C . E . S . d e P s y c h i a t r i e d e J . - R . PON, c o n s a c r é à « l a c r i s e d u m i l i e u d e l a

(16)

v i e » q u e n o u s a v o n s r e p r i s e t r é s u m é d a n s n o t r e c o m m u n i c a t i o n e n 1 9 8 3 , d e v a n t la S o c i é t é M é d i c o - P s y c h o l o g i q u e .

A v r a i d i r e , si le t e r m e d e « m i l i e u d e vie » t r o u v e s e s s o u r c e s l i t t é r a i r e s les p l u s p r o f o n d e s e t b r i l l a n t e s d a n s l a D i v i n e C o m é d i e , c ' e s t à C a r l G u s t a v JUNG q u e r e v i e n t le m é r i t e , n o u s s e m b l e - t - i l , d ' a v o i r i n t r o d u i t c e c o n c e p t s o u s le t e r m e d e « t o u r n a n t d e l a v i e ». C e t a u t e u r é t u d i e le p r o c e s s u s q u i c o n d u i t n o r m a l e m e n t l ' ê t r e h u m a i n v e r s l ' u n i f i c a t i o n d e s a p e r s o n n a l i t é e t le d é s i g n e s o u s le t e r m e d ' « i n d i v i d u a t i o n », p r o c e s s u s s ' é t e n d a n t s u r le c o u r s e n t i e r d e la v i e h u m a i n e ; c e t t e d e r n i è r e p a s s e p a r u n e s é r i e d e m é t a - m o r p h o s e s q u i c o n d u i s e n t le s u j e t , à p a r t i r d e l a s y m b i o s e p s y c h o l o g i q u e a v e c l a m è r e j u s q u ' à l ' â g e a d u l t e e t à l a v i e i l l e s s e . L e « t o u r n a n t d e l a v i e », e n t r e 3 2 e t 3 8 a n s , c o n s t i t u e l ' u n e d e s p r i n c i p a l e s m é t a m o r p h o s e s , n é c e s s a i r e , e n t r a î n a n t u n p r o f o n d c h a n g e m e n t , p r o g r e s s i f o u b r u t a l s e l o n les i n d i v i d u s . C ' e s t a l o r s q u e « les p r o b l è m e s , les d e v o i r s , o u les b e s o i n s n é g l i g é s p e n d a n t la p r e m i è r e p a r t i e d e la vie s e m a n i f e s t e n t . A i n s i , u n h o m m e q u i a t o u j o u r s r e f o u l é s o n b e s o i n d ' a m o u r s e r a f a c i l e m e n t la p r o i e d u " d é m o n d e m i d i " ». A i n s i s ' e x p r i m e H . ELLENBERGER à q u i n o u s e m p r u n t o n s l ' e s s e n - t i e l d e c e t t e é v o c a t i o n d e s t r a v a u x d e JUNG ; il p o u r s u i t « D a n s d ' a u t r e s c a s , la n é v r o s e a u r a s a s o u r c e d a n s d e s b e s o i n s i n t e l l e c t u e l s o u s p i r i t u e l s l o n g t e m p s refoulés... L e s u j e t d o i t c h a n g e r d e m o d e d e vie s ' i l n e v e u t p a s m a n q u e r la s e c o n d e m o i t i é d e s a vie. D e m ê m e q u ' i l i m p o r t e , e n a t t e i g n a n t la m a t u r i t é , d ' a b a n d o n n e r c e q u i a p p a r t i e n t à l ' e n f a n c e o u à l ' a d o l e s c e n c e , d e m ê m e l ' i n d i - v i d u d o i t s e d é t a c h e r d e c e q u i a p p a r t i e n t à la p r e m i è r e p a r t i e d e s a vie q u a n d il e n t r e d a n s la s e c o n d e . L a s e c o n d e m o i t i é d e la vie e s t u n e p é r i o d e d e c o n f r o n t a - t i o n s a v e c les a r c h é t y p e s d e l ' e s p r i t et d e soi. JUNG d é p l o r e la p s e u d o - j e w z e s s e d e s g e n s â g é s d a n s la c i v i l i s a t i o n o c c i d e n t a l e . . . L o r s q u e / ' i n d i v i d u a t i o n est a c h e v é e , le m o i n ' e s t p l u s le c e n t r e d e la p e r s o n n a l i t é , m a i s r e s s e m b l e à u n e p l a n è t e t o u r n a n t a u t o u r d ' u n s o l e i l i n v i s i b l e . L ' i n d i v i d u a t t e i n t la s é r é n i t é et n e c r a i n t p l u s la m o r t ; il s ' e s t t r o u v é l u i - m ê m e et il a a p p r i s e n m ê m e t e m p s à é t a b l i r d e s r a p p o r t s a u t h e n t i q u e s a v e c a u t r u i . JUNG n ' h é s i t e p a s à u t i l i s e r le m o t q u e l q u e p e u d é m o d é d e " s a g e s s e " ( p o u r l e q u e l le t e n n e m o d e r n e d e " m a t u - r i t é " n ' e s t q u ' u n s u b s t i t u t i n s a t i s f a i s a n t ) , et il d é c l a r e "la f i n n a t u r e l l e d e la vie h u m a i n e n ' e s t p a s la s é n i l i t é , m a i s la s a g e s s e " . L ' i n d i v i d u a t i o n p e u t s ' i n t e r r o m - p r e e n c o u r s d e r o u t e et il r e v i e n d r a a u p s y c h o t h é r a p e u t e d ' a i d e r le p a t i e n t à é c a r t e r les o b s t a c l e s q u i p o u r r a i e n t e n t r a v e r le d é v e l o p p e m e n t c o n t i n u d e s a p e r s o n n a l i t é .

JUNG é v o q u e a u s s i " l ' é n a n t i o d r o m i e " , s i g n i f i a n t le " r e t o u r à la c h o s e o p p o s é e " . C e r t a i n s p r o c e s s u s m e n t a u x se t r a n s f o r m e n t , à u n m o m e n t d o n n é , e n l e u r c o n t r a i r e , c o m m e p a r u n e s o r t e d ' a u t o - r é g u l a t i o n . . . C e p h é n o m è n e m y s t é r i e u x s e r e t r o u v e d a n s l ' e x p é r i e n c e d e c e u x q u i s o n t s o r t i s v a i n q u e u r s d ' u n e m a l a d i e c r é a t r i c e . Tel p e u t a p p a r a î t r e , p a r e x e m p l e , le " t o u r n a n t d e la vie" : c e l u i - c i p e u t , e f f e c t i v e m e n t , se t r a d u i r e p a r u n e s o r t e d e m a l a d i e , q u i " g u é r i t " e n s u i t e s p o n t a n é m e n t et s u b i t e m e n t , e n g e n d r a n t a l o r s u n s e n t i m e n t d ' e x a l t a t i o n . . . P a u l

(17)

VALÉRY a m o n t r é c o m m e n t la p e r s o n n a l i t é d ' u n é c r i v a i n c r é a t e u r p o u v a i t ê t r e r e m o d e l é e à l ' i m a g e m ê m e d e s o n œ u v r e . D a n s le c a s d e la m a l a d i e c r é a t r i c e , la m é t a m o r p h o s e e s t e n c o r e p l u s p r o f o n d e . C ' e s t c o m m e s i c e l u i q u i p a s s e p a r c e t t e c r i s e a v a i t e n t e n d u l ' a p p e l d e S t A u g u s t i n : " n e c h e r c h e p a s a u d e h o r s , r e n t r e e n t o i - m ê m e , c a r c ' e s t d a n s l ' h o m m e i n t é r i e u r q u ' h a b i t e la v é r i t é " . JUNG i n s i s t e , p a r a i l l e u r s , s u r la n é c e s s i t é d e p r e n d r e c o n s c i e n c e d e la r é a l i t é e x t é r i e u r e et i n t é r i e u r e et d e la s i t u a t i o n p r é s e n t e , s u r le b e s o i n d ' e x p r i m e r à q u e l q u ' u n e n q u i o n a t o t a l e c o n f i a n c e c e q u ' i l a p p e l l e les " s e c r e t s p a t h o g è n e s " et d e c l a r i f i e r , v i s - à - v i s d e s o i - m ê m e , s a p r o p r e a t t i t u d e à l ' é g a r d d e la r e l i g i o n ; c e n ' e s t q u ' a p r è s a v o i r a c c o m p l i c e t t e r é f l e x i o n s u r s o i - m ê m e q u e le s u j e t , s ' i l n ' a p a s r e t r o u v é u n e h a r m o n i e i n t é r i e u r e s u f f i s a n t e , d e v r a a b o r d e r u n e f o r m e p l u s t e c h n i q u e et p l u s s p é c i a l i s é e d e p s y c h o t h é r a p i e . JUNG d é f i n i t , a u s s i , le b u t d e t o u t e l ' i n d i v i d u a t i o n : p l u s u n i n d i v i d u e s t " d e v e n u ce q u ' i l est", p l u s il s e r a u n h o m m e v é r i t a b l e m e n t s o c i a l . »

O n p e u t , s e l o n ELLENBERGER, r a p p r o c h e r q u e l q u e s c o n c e p t i o n s d e JUNG d e s i d é e s d e R u d o l f STEINER, s o n c o n t e m p o r a i n q u i p r o p o s e l ' é v o l u t i o n d e l ' ê t r e h u m a i n v e r s u n é t a t p a r t i c u l i e r , o b t e n u g r â c e à u n e m é t h o d e d ' e n t r a î n e m e n t p s y c h i q u e l u i p e r m e t t a n t d e p r e n d r e c o n s c i e n c e d e c e r t a i n e s f a c u l t é s l a t e n t e s d e l ' e s p r i t l ' a m e n a n t à u n e c o n n a i s s a n c e d i r e c t e d e m o n d e s s u p é r i e u r s p u r e m e n t s p i r i t u e l s . C o m m e JUNG, « STEINER p e n s a i t q u e le " t o u r - n a n t d e la vie", c ' e s t - à - d i r e 3 5 à 4 0 a n s , e s t le m o m e n t p r i v i l é g i é , p o u r a c c é d e r à c e s c a p a c i t é s , a c c e s s i b l e s à t o u s , m a i s a y a n t n é c e s s i t é la p r a t i q u e d ' e f f o r t s p r o l o n g é s d a n s la r e c h e r c h e d e la vérité, l ' a p p r e n t i s s a g e d e la d i s t i n c t i o n e n t r e l ' e s s e n t i e l et l ' a c c e s s o i r e , la p e r c e p t i o n d e c h a q u e ê t r e d a n s s a d i m e n s i o n t e m p o - relle, c ' e s t - à - d i r e d a n s s o n c y c l e e x i s t e n t i e l et e n f i n d a n s la m a î t r i s e n o n s e u l e - m e n t d e s e s s e n t i m e n t s et d e s e s p e n s é e s , m a i s e n c o r e d e s o n s o m m e i l e t s e s r ê v e s ».

Les nombreuses expressions utilisées par les divers auteurs « tournant de

la vie, manifestations critiques de l'âge moyen, passages, transitions, démon de

midi, deuxième carrière, nouvel âge, maturescence... », expriment une certaine

réalité des modifications survenant entre l'adolescence et la sénescence ; le

terme de « crise du milieu de la vie » met en évidence l'importance majeure

de ces changements, entraînant parfois une véritable réorientation des atti-

tudes existentielles, quelquefois marqués par des épisodes psychopathologi-

ques de diverse gravité ; nous allons tenter de les évoquer.

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PREMIÈRE PARTIE

APPROCHE PSYCHOLOGIQUE DE LA CRISE

DU MILIEU DE LA VIE

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1. LES ÂGES DE LA VIE

« Il est un temps p o u r toute chose sous le soleil, dit l'Écclésiaste, un temps p o u r naître et un temps p o u r mourir, un temps p o u r jeter des pierres, un temps p o u r les ramasser, un temps p o u r coudre, un temps p o u r déchirer, un temps p o u r enlacer, un temps p o u r se soustraire aux enlacements... »

« On entre, on crie, et c'est la vie... on baille, on sort et c'est la mort. » Malgré sa h a u t e u r de vue, on ne s a u r a i t se c o n t e n t e r de cet a p h o r i s m e d ' u n h u m o r i s t e noir, qui place le discours de la vie u n i q u e m e n t e n t r e les p a r e n t h è s e s de la n a i s s a n c e et de la m o r t . Si l'on p e u t c o n s i d é r e r q u e la vie ne d u r e q u ' u n instant, elle c o n s t i t u e bien un long et vrai voyage, c o m m e l'envisage p o é t i q u e m e n t Ch. SINGER : « N o u s s o m m e s tous gens du voyage.

E t ce voyage est la vie. N o u s traversons l'un après l'autre des pays où les perspectives et les aventures ne se comparent p a s entre elles, où change j u s q u ' à la perception que nous avons des êtres, des choses, du temps et de l'espace. Ces pays ont leurs villes, leurs campagnes, leurs m o n t s et leurs mers — et les cols vertigineux qui les séparent en font des territoires a u t o n o m e s dont l'exploration successive constitue l'existence humaine. Cette traversée, nous ne l'effectuons p a s seuls, mais, bon gré m a l gré, avec la caravane de la génération avec laquelle nous nous s o m m e s mis en m a r c h e et dont les rangs iront s'éclaircissant j u s q u ' a u terme. Tantôt pleine d'ardeur, elle nous porte de son élan ; tantôt rétive et incertaine, elle nous grève de son anxiété... Celui qui n'a p a s reconnu que la vie est incessante métamorphose n ' a u r a p a s sa p a r t du miracle. Étranger, tant a u pays qu'il traverse q u ' à celui qu'il convoite, il se verra, tout c o m m e la femme de Loth qui rechignait aussi à avancer, transformé en statue de sel. » Il n'est donc pas é t o n n a n t que, d e p u i s toujours, l'on ait essayé de p r e n d r e des r e p è r e s p o u r la c a r t e de cet e s p a c e - t e m p s . D a n s cette o p t i q u e , de n o m - breuses p r o p o s i t i o n s o n t été avancées. R a p p e l o n s - e n q u e l q u e s - u n e s .

Le m é d e c i n KHI-PA, d a n s le NEI-KING, livre sacré de m é d e c i n e chinoise,

situe l'inflexion d u p r o c e s s u s vital à 40 ans, d a n s le c a d r e d ' u n e division

c e n t r é e s u r les décennies. « A l'âge de 10 ans, les organes de l ' h o m m e sont

fermes, son énergie est concentrée vers le bas du corps, c'est p o u r q u o i les enfants

a i m e n t toujours courir. A l'âge de 20 ans, le s a n g et l'énergie sont en période

(21)

de croissance, on se sent vif et léger. A l'âge de 30 ans, les cinq organes sont en parfait fonctionnement, l'énergie et le sang sont à leur maximum d'intensité, la démarche est tranquille. A l'âge de 40 ans, la chair et l'épiderme commencent à se relâcher, les cheveux tombent, l'énergie et le sang sont en équilibre, on aime à s'asseoir. A l'âge de 50 ans, l'énergie du foie commence à s'affaiblir, la sécrétion biliaire diminue, l'acuité visuelle baisse. A l'âge de 60 ans, l'énergie du cœur s'affaiblit, on a tendance au sommeil. A l'âge de 70 ans, l'énergie de la rate diminue, la peau se dessèche. A l'âge de 80 ans, l'énergie des poumons s'affaiblit, l'esprit commence à se troubler, on perd la mémoire, on se trompe en parlant. A l'âge de 90 ans, l'énergie des reins s'affaiblit à son tour l'homme s'épuise. A l'âge de 100 ans, l'énergie des organes a disparu, l'esprit s'en va, il ne reste que le corps physique. »

La valeur symbolique du chiffre sept, basée sur la connaissance de sept planètes avait, elle, fasciné les CHALDEENS, qui décrivaient ainsi sept âges particuliers. — L'enfance, correspondait à la Lune « à cause de sa moiteur et de son humidité », la seconde période correspondait à Mercure « c'est l'âge où l'homme commence à parler distinctement et avec l'usage de raison et néanmoins se plaît aux ébats, et s'adonne tout ensemble à l'apprentissage des arts et des lettres », l'adolescence correspond à Vénus « à cause qu'en cet âge l'homme commence à ressentir les aiguillons de la chair et d'être capable d'engendrer son semblable », la jeunesse, quatrième âge, correspond au Soleil « d'autant que la beauté de l'homme reluit le plus en cet âge », la cinquième période correspond à Mars. C'est l'âge de la virilité.

« L'homme en sa parfaite vigueur en est plus assuré, résolu, courageux et plus capable de discipline et de conduite militaire ». La première vieillesse correspond à Jupiter ; c'est l'âge de la gravité, de la pleine maturité, de l'expérience et du bon conseil. La dernière vieillesse ou décrépitude corres- pond à Saturne « à cause de sa froideur et faiblesse extrêmes ».

SHAKESPEARE, dans « Comme il vous plaira », reprend une symbolique

du même ordre, avec l'humour qui le caractérise. « Le monde entier est un

théâtre et tous, hommes et femmes n'en sont que les acteurs. Tous ont leurs

entrées et leurs sorties et chacun y joue successivement les différents rôles d'un

drame en sept âges. » « C'est d'abord l'enfant vagissant et bavant dans les bras

de la nourrice. Puis, l'écolier pleurnicheur, avec sa sacoche et sa face radieuse

d'aurore, qui, comme un limaçon, rampe à contrecœur vers l'école. Et puis,

l'amant, soupirant, avec l'ardeur d'une fournaise, une douloureuse ballade

dédiée aux sourcils de sa maîtresse. Puis le soldat, plein de jurons étrangers,

barbu comme un léopard, jaloux sur le point d'honneur, brusque et vif à la

querelle, poursuivant la fumée réputation jusqu'à la gueule du canon. Et puis,

le juge dans sa belle panse ronde garnie d'un bon chapon, l'œil sévère, la barbe

solennellement taillée, plein de sages dictons et de banales maximes, et jouant,

lui aussi, son rôle. Le sixième âge nous offre un maigre Pantalon en pantoufles,

avec des lunettes sur le nez, un bissac au côté ; les bas de son jeune temps bien

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conservés, mais infiniment trop larges pour son jarret racorni ; sa voix, jadis pleine de mâle, revenant au fausset enfantin et modulant un aigre sifflement.

La scène finale, qui termine ce drame historique, étrange et accidenté, est une seconde enfance état de pur oubli : sans dents, sans yeux, sans goût, sans rien. » Dans une optique plus idéologique, et moins poétique, l'Ordre de la ROSE- CROIX voit en la vie humaine une progression de périodes durant approxima- tivement, chacune, sept années solaires complètes. La première période 0- 7 ans est celle où l'on commence à prendre conscience de soi et où l'on apprend à se connaître soi-même pendant que nous nouons des rapports avec le monde matériel objectif, la deuxième période 7 à 14 ans, est celle des changements et du développement physique, la troisième période de 14 à 21 ans voit le développement du versant psychique de la nature humaine, la quatrième période de 21 à 28 ans voit l'évolution se concentrer sur la nature émotive du sujet, la cinquième période de 28 à 35 ans assiste à l'évolution créatrice de l'esprit, la sixième période de 35 à 42 ans voit l'homme arriver à un stade de développement qui l'amène à réfléchir sur les grands mystères qui l'habitent et qui habitent la vie. Cette période doit être perçue comme l'apogée du cycle. La septième période (7x7 !) qui va de la quarante deuxième à la quarante neuvième année, entraîne chez l'être humain un changement caractéristique qui se développe avec force

« jusqu'à ce que l'individu devienne un être nouveau, orientant ses désirs et ses espoirs vers de nouveaux buts ou un nouvel idéal » écrit SPENCER LEWIS ; les périodes suivantes sont marquées par l'affaiblissement progressif des différentes fonctions, l'évolution progressive permettant le passage d'un être physique à un être spirituel.

PYTHAGORE avait pour sa part choisi la division de la vie en quatre périodes d'âges, établies en parallèle avec les quatre saisons.

Scipion Du PLEIX, en 1606, nous révèle une nouvelle distinction des âges

basée sur « La diuerfe conftitution & difpofition de la chaleur naturelle

auec l'humide radical : laquelle eftant de trois fortes, il faut auffi diftinguer

noftre vie en trois âges. Car en premier lieu le chaud & l'humide és premières

années après la naiffance font tref-abondans en l'homme, à caufe que fon

corps eft recentement formé de la femence & du fang menftrual qui abondet

en chaleur et humidité... après ce temps-là le chauf et l'humide eftant plus

tempérés en l'homme, fon corps qui eftoit mol, fouple & flexible, commence

à fe fortifier & affermir en ce fécond âge, qui eft fubdiuifé en deux. La

jeuneffe s'éftend de vingt & quatre ou vingt cinq ans, jufqu'à trente & cinq

ou trente & huit : & la virilité de là jufqu'à cinquante ans ou environ. Ainfi

fe paffe l'orgueil & la vanité de l'homme en peu de temps. Nous mourons

tous & nous efcoulons comme des eaux, qui ne retournent plus. Ainsi que

nous enfeigne l'efcriture fainte. Car le deffaut qu'aporte la continuelle cor-

ruption & changement (dit S. GREGOIRE) qu'eft ce autre chofe qu'une pro-

lixité de mort ? »

(23)

A s p e c t s évolutifs d e la C . M . V .

1. D é s a r r o i i n i t i a l ( " é p r o u v é " a n x i o g è n e d u v i e i l l i s s e m e n t e t d e l a m o r t i n é l u c t a b l e s ) .

2. T r o i s p r i n c i p a u x a s p e c t s é v o l u t i f s ( n o n e x h a u s t i f s ) e n f o n c t i o n d e s

" f a c t e u r s d e p r o t e c t i o n " (1) e t d e " r i s q u e s " (2).

(1) F a c t e u r s de p r o t e c t i o n - I n t é r i e u r s

. Cohésion i n t é r i e u r e s o u p l e . C a p a c i t é d ' i n s i g h t . b o n n e d i s t a n c e à s o i - m ê m e . sens des réalités

. g é n é r a t i v i t é et i n t é g r i t é - E n t o u r a g e

. c o h é s i o n s o u p l e . c a p a c i t é d ' a t t e n t i o n . c a p a c i t é d ' a i d e

. sans d é s i r de d o m i n a t i o n - H a r m o n i e e n t r e r e s s o u r c e s i n t é r i e u r e s et e n t o u r a g e

(2) F a c t e u r s de r i s q u e s - I n t é r i e u r s

. F a i b l e c o h é s i o n i n t é r i e u r e . R i g i d i t é des défenses . Défaut d ' i n s i g h t

. M a u v a i s e d i s t a n c e à s o i - m ê m e . T e n d a n c e s m é g a l o m a n i a q u e s . I d é a l o p a t h i e

. S t a g n a t i o n et d é s e s p o i r - E n t o u r a g e

. F a i b l e c o h é s i o n , crise possible . Figé

. D o m i n a n t o u é t o u f f a n t . E x i g e a n t u n s u p p o r t

- H a r m o n i e faible, o u d y s h a r m o n i e e n t r e le s u j e t et son e n t o u r a g e .

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CONCLUSION

« Le milieu de la vie, un des secrets les mieux gardés de notre société et probablement de l'histoire humaine. »

LEVINSON Au terme de ce travail, nous tenons à rappeler notre conscience claire de ses insuffisances et de ses lacunes ; nous souhaitons surtout qu'il constitue une interrogation et un point de départ pour une réflexion nouvelle.

Parmi les remarques nous paraissant essentielles, retenons tout d'abord la connotation paradoxale de l'âge moyen : la « fleur de la vie », le « bel âge », le « nouvel âge » peut aussi apparaître comme la peau de chagrin du temps qui reste, la « mise en quarantaine » (J.-L. SERVAN-SCHREIBER),

« l'âge terrible, implacable, qui ne pardonne rien » (PEGUY). Si la vie peut

« commencer à 40 ans » (PITKIM), elle peut aussi s'y terminer. Le sujet a

acquis le pouvoir de l'adulte mais aussi ses lourdes charges ; s'il veut chan-

ger, il rencontre des difficultés majeures, extérieures et intérieures ; l'adoles-

cent pouvait (devait) s'éloigner d'une situation obligatoire ; l'adulte mûri a

de la difficulté à s'écarter de ce qu'il a déjà construit par ses choix anté-

rieurs ; souhaitant devenir, enfin, vraiement lui-même, il est sollicité de

s'occuper des autres dans une nécessaire générativité. Or, « l'homme arrive

novice à chaque âge de la vie » (CHAMFORT). Devant la difficulté de la tâche

de l'âge moyen, il risque donc d'être tenté de « passer de la dépense

inconsciente à la gestion jalouse » (J.-L. SERVAN-SCHREIBER) ou encore de

continuer à rêver sa vie, quitte à « changer de rêve » (LEVINSON), plutôt que

de devenir, dans l'effort, créateur de soi, à travers, mais aussi au-delà de

son personnage social. La réalité des circonstances peut être un facteur de

décompensation ; l'aspect relativement tragique de l'existence humaine,

souligné par KIERKEGAARD ou SCHOPENHAUER, est le plus souvent occulté

par le « divertissement » pascalien, mais se trouve accentué, chez certains,

par des difficultés majeures, échecs, ruptures ou deuils. En aucun cas, entre

l'adolescence et la sénescence, la vie adulte ne se déroule dans le calme et

la platitude, elle n'est pas un « long fleuve tranquille » ; aucun des événe-

ments obligatoires de cette période ne saurait être considéré comme seule-

ment source de satisfaction ; il n'est pas étonnant, de ce fait, qu'hormis les

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solutions « transcendantes » évoquées au chapitre 4, celles qui sont envisa- gées par médecins et psychologues apparaissent comme mitigées : « rési- gnation constructive », ou « optimisme tragique », selon JAQUES, « absence de solution satisfaisante durablement » selon JUNG et BUTLER, « se passionner pour tout en essayant de ne s'identifier à rien ou presque » pour J.-L. SERVAN- SCHREIBER. L'« intégrité » parfaite, selon ERIKSON, est rare, de même d'ail- leurs, heureusement, que le « désespoir », bien que l'un ou l'autre puissent se rencontrer en pratique. La plupart des issues sont banales, compromis entre rêves antérieurs et réalité actuelle ; l'activisme superficiel ou factice semble plus fréquent, mais peut être compatible avec des formes plus authentiques de créativité. Plus graves sont les formes massives de déni, favorisant les conversions somatiques ou les passages à l'acte, caractériels ou délictueux. Les formes mineures d'hypocondrie sont actuellement fré- quentes, favorisées d'ailleurs par les mentalités, liées à la carence de généra- tivité, chacun devenant dans l'« auto-pitié », sinon « son unique et seul enfant », au moins son enfant privilégié. Ainsi, n'y a-t-il pas à s'étonner que le psychiatre soit, souvent, le dernier à rencontrer un certain nombre de sujets en difficulté. J. ROUART évoquait déjà cette notion : « Il semble que ces prédisposés trouvent dans la Société certaines possibilités d'y vivre, malgré leurs difficultés secrètes, grâce aux ressources que leur fournissent les sublima- tions, le non-investissement de certaines activités, les perversions et, si peu que ce soit, la minime complaisance de la Société elle-même qui, après tout, n'est pas organisée et animée, même dans ses sphères les plus agissantes, uniquement par des personnes dont l'évolution libidinale, le mode de relation soient arrivés au degré qui caractériserait la normalité, si l'on prenait comme critère l'achève- ment de l'évolution psycho-sexuelle. On peut en effet penser que la normalité sociale courante ne coïncide pas tout à fait avec ce que nous considérons comme absence de traits névrotiques et psychotiques... Enfin, pour évident que ce soit, il y a intérêt à rappeler qu'une structure névrotique de la personnalité, si elle témoigne d'une certaine fragilité, parfois pouvant faire craindre l'effondre- ment des défenses, prémunit (dans bien des cas, grâce à son aptitude à user de procédés défensifs bien organisés et préventifs) le sujet contre la surprise terrorisante de l'irruption psychotique de l'inconscient. »

Le psychiatre, et tout médecin, ne devrait tout de même pas méconnaître ces problèmes, cachés, mais capables d'expliquer nombre de plaintes atypi- ques.

Une réflexion globale sur la crise du milieu de la vie amène par ailleurs, à s'interroger de façon majeure sur l'« individuation », dans l'espèce humaine.

Bien au-delà de l'aspect érotique tant célébré de nos jours, la sexualité

programme l'être humain, à perpétuer l'espèce dans une sorte d'obéissance

à une mission biologique, qui explique la gravité du deuil des parents et

l'importance existentielle de la procréation ; dans cette optique, l'individu

ne représente qu'un maillon de la chaîne, sans intérêt en soi autre que sa

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fonction de transmission. Cependant le propre de l'homme est de s'admirer en tant qu'individu ; enfant, il a l'illusion partielle que ses parents (en réalité aussi au service de l'espèce) ne sont au service que de lui-même, comme s'il représentait une divinité ; il est vrai que, pour eux, il est le support de la vie et de l'espoir ; il augmente leur propre vitalité, leur sentiment d'utilité, il donne un sens à leur vie. Le danger, pour lui, est, alors, de rester durable- ment dans cette illusion mégalomaniaque (sans en prendre une conscience précoce, ce qui est possible) ; la déception sera terrible pour certains à l'adolescence, les précipitant dans le gouffre schizophrénique ou la toxico- manie ; certains ne la percevront clairement que lors de la crise du milieu de la vie. Ce n'est, cependant, pas s'enfoncer dans la mégalomanie que de suivre DOSTOÏEVSKI, qui souhaite, pour l'Homme, la capacité de n'être pas qu'un reproducteur, mais aussi de pouvoir apporter une « parole nou- velle » ; tout sujet qui pratique honnêtement son « métier d'homme » nous paraît réellement apporter cette contribution positive : MARIAS nous indique que tout être humain est « original », au sens fort, et créateur, surtout quand il évite de rechercher avant tout l'originalité. Malheureusement, cette dernière voie est fréquente et conduit à la surestimation individualiste de soi.

C'est, sans doute, pour éviter les aléas et inconvénients parfois graves favorisés par cette tentation « individualiste », que les sociétés traditionnel- les restent longtemps proches d'une structure tribale où l'individuation est limitée et la place de chacun déterminée essentiellement par les lois du groupe. Au contraire, les sociétés modernes fonctionnent, le plus souvent sur un mode paradoxal : chaque enfant, porteur adulé de l'espérance de la mère ou du clan familial, y est élevé dans l'hyperprotection, à la suite de quoi il risque à l'adolescence d'avoir à affronter une lutte féroce pour s'intégrer dans la société. Préparer une civilisation où chacun pourrait trouver un épanouissement personnel apparaît hautement souhaitable, mais difficile à réaliser, hors, en tout cas, des seules compétences et possibilités médicales ; dans leurs travaux, cependant, les psychiatres américains propo- sent nombre de mesures sociales préventives, non forcément utopiques.

Lorsque surviennent des manifestation plus ou moins pathologiques de la C.M.V., un certain nombre d ' thérapeutiques paraissent néces- saires.

Tout d'abord, savoir attacher de l'importance à ces troubles, percevoir qu'ils peuvent être les prémisses d'une destructuration grave, voire défini- tive du sujet, mais aussi connaître l'éventualité d'une « maladie créa- trice » ; aider le sujet à accepter celle-ci, en évitant le déni et en demandant de l'aide : ce n'est que par une réflexion sur lui-même, avec l'aide du

« thérapeute-miroir-éclairant » que le sujet pourra dépasser et éventuelle-

ment transcender la crise, c'est-à-dire les séquelles de la mégalomanie.

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