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Autorité et contrat dans l'administration moderne

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Autorité et contrat dans l'administration moderne

BELLANGER, François

BELLANGER, François. Autorité et contrat dans l'administration moderne. Annuaire européen d'administration publique , 1997, p. 225 ss.

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:41833

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(2)

par François BELLANGER(*)

Corinne CHAPPUIS BUGNON (**) et Bettina FLEISCHMANN (***)

La présente chronique d'actualité administrative en Suisse pour 1' année 1997 se propose, dans un premier temps, d'examiner les modifications constitutionnelles et législatives qui ont été soit acceptées soit refusées dans le cadre de votations populaires (1). Puis sera abordé l'examen des législations les plus importantes entrées en vigueur en 1997. Enfin, il sera procédé à l'exposé de quelques arrêts importants en matière administrative rendus par le Tribunal fédéral.

I. MODIFICATIONS CONSTITUTIONNELLES ET LÉGISLATIVES

Modifications soumises au référendum constitutionnel

Une modification constitutionnelle peut intervenir soit sur la base d'un projet voté par le Parlement, soit sur la base d'une initiative populaire ayant recueilli au moins 100.000 signatures d'électeurs. Cette dernière possibilité est largement utilisée en dépit du peu de succès qu'elle remporte en réalité (2). Une modification constitutionnelle n'est acceptée que si elle recueille la double majorité du peuple et des cantons.

Le 8 juin 1997, le peuple et les cantons ont rejeté (3) l'initiative populaire du 21janvier1994 (4) intitulée« Négociations d'adhésion à l'Union Européenne: que

Avocat, Docteur en droit, Chargé de cours suppléant à l'Université de Genève.

Assistante à l'Université de Genève, titulaire du brevet d'avocat Assistante à l'Université de Genève.

Dans cette étude, seul le droit fédéral a été pris en compte.

Sur 123 initiatives populaires soumises au peuple et aux cantons jusqu'au 28 septembre 1997, seules 12 ont été acceptées.

A 1.189.440 non contre 416.720 oui; tous les cantons défavorables; Feuille fédérale (ci- après : FF) 1997 IV 334.

Annuaire Européen d'Administration Publique, Volume XX 1997

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le peuple décide ! », lancée par les Démocrates suisses et la Ligue des Tess·

Cette initiative visait à soumettre à l'accord du peuple et des cantons }' ouve 1

~

négociati?ns ~~vue d'une adhésion de la ~uisse à l'Unio~ européenne (U.E.):

le Conseil federal que le Parlement avaient recommande aux citoyens de l'initiative, pour deux motifs. D'une part, elle était inutile comme la Consti fédérale (5) rend déjà obligatoire le vote du peuple et des cantons sur un é traité d'adhésion à l'Union Européenne. D'autre part, les autorités estimèrent qu'une telle initiative aurait entravé la conduite de la politique exté du gouvernement.

A la même date, le peuple et les cantons ont rejeté (6) l'initiative popul · 24 septembre 1992 (7) «pour l'interdiction d'exporter du matériel de gue Cette initiative chargeait tout d'abord la Confédération de promouvoir les internationaux visant à limiter le commerce de matériel de guerre et à rédtl' armements au profit du développement social. Deuxièmement, elle avait pô d'interdire totalement l'exportation de matériel destiné à des fins guerrières;

l'initiative exigeait que l'exportation de matériel de guerre ne soit autorisée condition que l'utilisateur final puisse en garantir un usage exclusivement civ Conseil fédéral et le Parlement ont recommandé aux citoyens de rejeter l'initi jugeant son contenu trop radical et ses conséquences nuisibles tant à I'éco qu'à la défense nationale. Conscient toutefois que l'exportation de matériel de devait être soumise à un contrôle strict, le Conseil fédéral avait déjà propo Chambres fédérales l'adoption d'une nouvelle loi fédérale sur le m guerre (8). Cette dernière, qui est entrée en vigueur le 1er avril 1998, n'aut exportations de matériel de guerre que si elles ne mettent pas en danger la p stabilité dans le pays acquéreur. Par ailleurs, elle interdit totalement les a destruction massive et les mines antipersonnel. La question des biens à usage a également été réglée par la loi du 13 décembre 1996 (9).

Toujours à la même date, le peuple et les cantons ont accepté(l modification du 13 décembre 1996 de la Constitution fédérale (11) visant à a monopole de la Confédération sur la fabrication et la vente de la poudre de Cette disposition soulevait des difficultés, car elle entravait l'usage de explosive par des entreprises en vue de la fabrication ou l'importation d'aii

destinés aux véhicules, par exemple. ··

Le 28 septembre 1997, le peuple et les cantons ont rejeté (12) l'in· · populaire du 22 juillet 1993 (13) dite «Jeunesse sans drogue». Cette plaidait en faveur d'une politique stricte visant à l'abstinence, en ordo Confédération de prendre toutes mesures propres à restreindre la de stupéfiants et le nombre de consommateurs, à soigner la toxicodépendance, à

(4) FF 1992 III 349.

(5) Du29 mai 1874 (RS 101; ci-après: Cst. féd.).

(6) A 1.243.869 non contre 361.164 oui; tous les cantons défavorables; FF 1997 IV 334.

(7) FF 1993 I 95.

(8) La loi fédérale sur le matériel de guerre (LFMG) a été adoptée le 13 décembre 1996;

officiel (ci-après : RO) 1998 1 794.

(9) Voir infra, note 11.

(10) A 1.268.162 oui contre 275.049 non; tous les cantons favorables; FF 1997 IV 334.

(11) FF 1996 Il 1023.

(12) A 1.314.060 non contre 545.713 oui; tous les cantons défavorables; FF 1997 IV 1130.

(13) FF 1993 III 539.

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les dommages sociaux et économiques dus à la consommation de stupéfiants et à combattre effectivement tout trafic illicite. Par ailleurs, l'initiative visait à interdire la distribution de stupéfiants, sous réserve d'applications strictement médicales. Le Conseil fédéral et le Parlement avaient recommandé aux citoyens de rejeter l'initiative au motif qu'elle empêcherait un certain nombre de traitements susceptibles d'aider les toxicomanes à sortir de leur dépendance. Selon nos autorités fédérales, les mesures restrictives préconisées par l'initiative s'avérerait par ailleurs inefficaces pour protéger la jeunesse et garantir la sécurité de notre société.

Modification soumise au référendum législatif

En date du 28 septembre 1997, le peuple a rejeté (14) la modification du 13 décembre 1996 de la loi fédérale sur l'assurance-chômage (15). Cette modification visait à assainir les finances de la Confédération et de l'assurance- chômage en réduisant les indemnités journalières versées aux chômeurs de 1 à 3 %, en fonction de leurs obligations d'entretien et de leurs revenus. Le comité référendaire s'était opposé à la baisse des indemnités de chômage au motif qu'elle placerait les demandeurs d'emploi dans une situation encore plus difficile et ouvrirait la porte à d'autres régressions.

Modifications qui n'ont pas été soumises au référendum législatif

L'Assemblée fédérale a adopté, en date du 7 octobre 1994 l'arrêté fédéral concernant l'exécution de la Convention sur les armes chimiques (16) qui constitue, avec le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, le traité multilatéral de désarmement le plus important sous l'angle de la politique de la sécurité pour la Suisse. Comme la Convention n'est pas self-executing, l'arrêté met en œuvre les diverses mesures d'application de la Convention et règle leurs conséquences financières et leurs effets sur l'effectif du personnel affecté au contrôle. L'arrêté contient ainsi des dispositions sur l'interdiction de fabriquer, d'exporter, d'importer (etc.) des armes chimiques au sens de la Convention ainsi que les sanctions en cas de violation de cette interdiction. Il fixe également les compétences des organes de surveillance et de contrôle. Enfin, il contient des dispositions destinées à faciliter l'entraide administrative tant sur le plan interne que sur le plan international (17).

Conformément à l'accord entre la Confédération suisse et la communauté économique européenne (18), la Suisse doit éliminer les droits protecteurs et les droits fiscaux sur les produits industriels. Aux termes de l'art. 4 al. 1 de cet accord, la Suisse peut cependant les convertir en redevances internes. Les droits de douane et les impôts de consommation spéciaux sont des impôts à phase unique. Les premiers sont perçus uniquement lors du passage de la douane et ne frappent que les produits importés ; les seconds visent tous les produits, quelle que soit leur origine au stade de leur commercialisation sur le marché interne. Cette conversion du régime de perception garantit l'égalité entre les marchandises importées et les marchandises

(14) A 931.457 noncontre901.361 oui ;FFI997IV1130.

(15) FF 1996 IV 1349.

(16) Arrêté fédéral concernant l'exécution de la Convention sur les armes chimiques, entré en vigueur le Ier janvier 1997, à l'exception de l'art. 6; Recueil systématique du droit fédéral (ci- après: RS) 515.08.

(17) Voir le message du Conseil fédéral in FF 1994 III lss.

(18) Accord du 22juillet 1972 (RS 0.632.401).

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suisses tant en ce qui concerne les procédures que la fiscalisation.

l'Assemblée fédérale a voté deux lois qui concrétisent cet accord.

En premier lieu, elle a adopté la loi fédérale sur l'imposition des v, automobiles (Limpauto) (l 9) en date du 21 juin 1996. Cette loi remplace impôt spécial de consommation les droits de douane fiscaux actuels gre automobiles et leurs pièces détachées. Elle fixe le cercle des personnes assu' l'impôt, l'objet de l'impôt et le calcul de ce dernier (le taux de l'impôt é 4 % de la valeur du véhicule) ainsi que des dispositions sur les voies de droit.

notamment objets de l'impôt, outre l'importation, la livraison et I'utilis propre en cas de fabrication d'automobiles sur le territoire suisse (20).

La Limpauto s'articule en neuf sections. La première définit les l'autorité fiscale, les contrôles, l'entraide administrative, le secret et applicable. L'assujettissement à l'impôt est réglé dans la deuxième secti taux de l'impôt, dans la troisième. La quatrième section décrit la proc' perception de l'impôt, surtout lors de la fabrication en Suisse. Les cinq sixième sections traitent respectivement des dispositions particulières l'impôt grevant l'importation et la fabrication sur le territoire suisse. Les sept à neuf ont pour objet les voies de droit, les dispositions pénal dispositions transitoires et celles concernant l'entrée en vigueur de la loi (21)7 En deuxième lieu, la loi sur l'imposition des huiles minérales du 21

jtJi'

(Limpmin) (22), remplace par un impôt spécial de consommation, les douane fiscaux grevant les huiles minérales et les carburants.

La procédure d'imposition tient compte des particularités d'un consommation à phase unique et apporte, comparativement à la procédure des simplifications administratives.

La loi fixe le cercle des personnes assujetties à l'impôt, son objet, son.

calcul ; elle contient également des dispositions sur la protection · L'égalité de traitement entre les marchandises importées et celles qui sont ··

en suisse est notamment atteinte par une des particularités centrales· de;

spécial de consommation qui réside dans les entrepôts dits agréés, qui · d'entreposer, de raffiner, de fabriquer et d'extraire des produits non fi procédé entraîne que le moment de la naissance de la créance fiscale est celui où la marchandise est mise à la consommation. Un délai de raisonnable est en outre prévu. La base de calcul est fixée par 1000 température de 15 degrés celsius. Parallèlement à la charge fiscale, obligatoire des redevances sur les carburants demeure inchangée (23).

La Limpmin s'articule en douze sections. La première définit l l'objet de l'impôt et la naissance de la créance fiscale. L'assujettissement est réglé dans la deuxième section et les dispositions tarifaires dans la trci:' quatrième section traite des allégements fiscaux tandis que la cinqu"' procédure de perception. Les sections six à huit contiennent des

(19) RS 641.51 ; le délai référendaire s'est écoulé sans avoir été utilisé. La loi est entré:

le 1er janvier 1997. ·

(20) Voir le message du Conseil fédéral in FF 1995 IV 1632ss.

(21) Voir le message du Conseil fédéral in FF 1995 IV 1637ss.

(22) RS 641.61 ; le délai référendaire s'est écoulé sans avoir été utilisé. La loi est entr le Ier janvier 1997.

(23) Voir le message du Conseil fédéral in FF 1995 III 133 ss.

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particulières pour les entrepôts agréés, le commerce dans l'enclave douanière suisse ainsi qu'en matière de statistique. Finalement, les voies de droit, les dispositions pénales ainsi que les dispositions transitoires et finales sont exposées dans les sections neuf à douze.

La loi sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA) (24) a été adoptée le 21 mars 1997. Au cours des dernières décennies, la fonction de l'État a évolué en ce sens que ce dernier ne se contente plus de régler les relations entre les personnes et la sécurité extérieure mais devient dispensateur de prestations et doit satisfaire des exigences de plus en plus sévères. La LOGA actualise le système de direction de l'État ainsi que les structures administratives (25).

La LOGA se divise en cinq sections.

• La première établit les principes régissant l'organisation du gouvernement et de l'administration fédérale. Ils précisent notamment le rôle conféré par la Constitution fédérale au gouvernement en relation avec les autres autorités et déterminent les principaux objectifs qui lui sont fixés.

• La deuxième traite du gouvernement et de ses fonctions. Sont décrites les obligations du gouvernement et ses autres fonctions, telles que la législation, la direction de l'administration fédérale, l'exécution, la juridiction et l'information. Le législateur indique aussi de manière détaillée les fonctions du président et du chancelier de la Confédération.

•La troisième section détaille l'administration fédérale et sa direction. Elle renferme des dispositions sur l'organisation de l'administration, en particulier sur la compétence du Conseil fédéral en la matière ; elle introduit la notion de « mandats de prestation » que le Conseil fédéral pourra confier à certaines unités administratives, qui fonctionneront d'ailleurs selon les principes de la nouvelle gestion publique.

• La quatrième section règle l'exercice des compétences gouvernementales. Elle assure la décentralisation du pouvoir de décision en faveur de différentes unités administratives en habilitant le Conseil fédéral à déléguer les affaires de moindre importance aux départements, aux groupements ou aux offices. Finalement, elle règle les deux instruments que sont la planification et la coordination, sans lesquels un gouvernement ne saurait agir de manière cohérente.

• La section cinq contient des prescriptions diverses et les dispositions finales.

On y trouve entre autres une nouvelle réglementation transitoire concernant la dérogation aux règles spéciales d'organisation d'autres lois fédérales ou d'arrêtés Jédéraux de portée générale (26).

En date du 13 décembre 1996, !'Assemblée fédérale a adopté la loi sur le ontrôle des biens utilisables à des fins civiles et militaires et des biens militaires pécifiques (LCB) (27). Cette loi, qui doit permettre l'application d'accords

· ernationaux, constitue la base légale du contrôle de tous les biens (marchandises, hnologies et logiciels) utilisables à des fins civiles et militaires (biens à double

RS 172.010; le délai référendaire s'est écoulé sans avoir été utilisé. La loi est entrée en vigueur le 1er octobre 1997.

Voir le message du Conseil fédéral in FF 1996 V 2.

Voir le message du Conseil fédéral in FF 1996 V 17.

RS 946.202. Le délai référendaire s'est écoulé sans avoir été utilisé. La loi est entrée en vigueur le Ier octobre 1997.

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usage). A relever que le contrôle des biens d'armement reste du domaine de la loi fédérale sur le matériel de guerre tandis que celui des biens nucléaires au sens propre

de la loi sur l'énergie atomique. '

L'objectif de la LCB est de faire échec à la course aux armements en autorisant le Conseil fédéral à prendre des mesures de contrôle adéquates (28). La principale mesure prévue est le régime du permis appliqué aux exportations de bien. Ainsi, le permis est refusé si l'activité envisagée contrevient à des accords internationaux ou aux objectifs prévus par des mesures internationales de contrôle non obligatoires en vertu du droit international.

A côté des mesures de contrôle, la loi sur le contrôle des biens oblige ceux qui déposent une demande de permis ou sont d'une autre manière soumis aux mesures de contrôle de la loi, à fournir des renseignements ou à accepter des contrôles.

II. ARRÊTS MARQUANTS DU TRIBUNAL FÉDÉRAL (29)

A - CIRCULATION ROUTIÈRE

En matière de circulation routière deux arrêts du Tribunal fédéral ont retenu notre attention dans la mesure où ils introduisent et précisent un changement de jurisprudence.

- Le premier arrêt concerne la question de savoir si, en cas de dépassement de 25 km/h ou plus de la vitesse maximum de 50 km/h autorisée dans les localités, il y a objectivement grave mise en danger du trafic, respectivement violation grave règles de la circulation (30). En substance, K. a dépassé la vitesse autorisée de 50 km/h dans une localité de 26 km/h (après déduction de la marge de sécurité de 5 km/h). K. s'est vu infliger une amende administrative et retirer son pennis .de conduire pour une durée d'un mois par le département de l'intérieur du canton de Soleure. Suite au recours déposé par ce dernier, le Tribunal administratif de Sole1.1te a annulé la décision attaquée et prononcé un simple avertissement en lieu et place du retrait du permis de conduire. Le département de justice et police et des transp9rts, ,,;

agissant par la voie du recours de droit administratif, a demandé au Tribunal fédé1:ar.::~

d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif et de confinner le retrait de penn:is• 'I'

prononcé en première instance. ;:;~

- Le deuxième arrêt tranche la question de savoir si le permis doit être retiréou~f~

si un simple avertissement est suffisant lorsque la vitesse maximum autorisée strÇf~~

l'autoroute est dépassée de plus de 30 km/h (31). Les fait à l'origine de cette~~~

sont les suivants. C. s'est vu retirer son permis de conduire suite à un dépasseinent~~

de 32 km/h (après déduction de la marge de sécurité de 7 km/h) de la vit~ss~,'~1;

autorisée de 120 km/h sur l'autoroute et condamner à une amende administrative.~ i"i

l'instar de l'affaire précédente, il a obtenu gain de cause devant la commission recours du canton de Berne qui a prononcé un simple avertissement en lieu et plâ

(28) Voir le message du Conseil fédéral in FF 1995 II p. 125lss.

(29) Ci-après : TF.

(30) Arrêté du Tribunal fédéral (ci-après: ATF) 123 II 37.

(31) ATF 123 II 107.

(8)

du retrait de permis de conduire. Le département de justice et police et des transports, agissant par la voie du recours de droit administratif, a demandé au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif et de confirmer le retrait du permis prononcé en première instance.

Le Tribunal fédéral a admis les deux recours en se fondant sur le raisonnement suivant. En vertu de l'art. 32 al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR) (32), la vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité. Aux endroits où son véhicule pourrait gêner la circulation, le conducteur est tenu de circuler lentement et, s'il le faut, de s'arrêter notamment aux endroits où la visibilité n'est pas bonne, aux intersections qu'il ne peut embrasser du regard, ainsi qu'aux passages à niveau. La vitesse maximale à atteindre, lorsque les conditions de la route, de la circulation et de visibilité sont favorables, est de 50 km/h dans les localités et de 120 km/h sur les autoroutes (art. 4a al. 1 lit a et d de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière (OCR) (33). Selon l'art. 16 al. 2 LCR, le permis de conduire peut être retiré au conducteur qui, par des infractions aux règles de la circulation, a compromis la sécurité de la route ou incommodé le public (art. 16 al. 2 première phrase). Un simple avertissement pourra être donné dans les cas de peu de gravité (art. 16 al. 2 deuxième phrase). Le permis de conduire doit être retiré si le conducteur a compromis gravement la sécurité de la route (art. 16 al. 3 lit. a LCR). Celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, aura créé un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en aura pris le risque, sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende. La loi distingue dès lors les cas de peu de gravité (art. 16 al. 2 deuxième phrase), les cas de gravité moyenne (art. 16 al. 2 première phrase) et les cas graves (art. 16 al. 3 lit. a LCR).

L'application de l'art. 16 al. 3 LCR est subordonnée à la double condition que le conducteur ait objectivement compromis gravement la sécurité de la route en violant une règle de la circulation et subjectivement commis une faute grave, intentionnelle ou par négligence (34).

De manière objective, les conditions de l'art. 16 al 3 lit. a LCR sont remplies lorsque le conducteur viole d'une manière objectivement grave une règle essentielle de la circulation et met concrètement ou abstraitement en danger la sécurité d'autrui (35). Dans l'appréciation de cette condition, le juge doit, en particulier, tenir compte de l'importance de la règle violée. Dans ce cadre, il examinera notamment si la règle enfreinte est de celles dont la violation est souvent à l'origine d'accidents ou si elle s'avère importante pour assurer la circulation routière. D'un point de vue subjectif, la violation grave suppose soit une faute grave du conducteur,

(32) Du 19 décembre 1958; RS 741.01.

(33) RS 741.11.

(34) Compromet gravement la sécurité de la route au sens de l'art. 16 al. 3 lit. a LCR celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, met en danger la sécurité d'autrui au sens de l'art. 90 ch. 2 LCR. Ces dispositions s'interprètent de manière similaire; ATF 123 II 38; ATF 120 lb 285 : pour savoir si l'atteinte à la sécurité de la route est grave au sens de l'art. 16 al. 3 lit. a LCR, on ne doit pas obligatoirement se rapporter à la notion de « violation grave d'une règle de la circulation »au sens de l'art. 90 ch. 2 LCR. Toutefois, l'interprétation de ces deux dispositions très voisines, dont la teneur est semblable, ne peut être différente sans un motif important.

(35) Pour un exposé détaillé de ces notions, voir A TF 122 II 228.

(9)

ou, en cas de négligence grave, un comportement sans scrupule et contraire aux règles de la circulation.

Les règles fixant la vitesse maximale sur les routes sont considérées comme d règles de circulation fondamentales, garantes de la sécurité routière. Selon

~

jurisprudence, un dépassement d'au moins 15 km/h de la vitesse maximale autorisé:

ne justifie qu'un avertissement en application de l'art. 16 al. 2, deuxième phrase tandis qu'un dépassement de 35 km/h sur l'autoroute appelle impérativement u~

retrait de permis selon l'art. 16 al. 2 première phrase (36). Dans ce dernier cas les conditions objectives de la violation de la LCR sont considérées comme remplies nonobstant les circonstances du cas d'espèce (37). En outre, un tel dépassement~

vitesse fera présumer que la violation est subjectivement grave. Entre ces deux limites, plus précisément dans les cas de gravité moyenne, l'autorité administrative dispose d'un pouvoir d'appréciation quant au principe même du retrait de permis.

elle doit en particulier respecter le principe de la proportionnalité dans le choix de l~

sanction. Ainsi, le Tribunal fédéral a admis qu'un simple avertissement était suffisant lorsque le conducteur qui a commis une infraction de gravité moyenne a déjà été « sanctionné » suffisamment par les atteintes à sa propre santé (38).

Le dépassement de vitesse de 32 km/h commis par C. dans le deuxième arrêt présenté constitue un cas de gravité moyenne. En application des principes qui précèdent, le Tribunal fédéral a dès lors conclu qu'en absence de circonstances particulières similaires à celles de I 'A TF 118 lb 229, le retrait de permis doit être prononcé en vertu de l'art. 16 al. 2 première phrase.

Dans le premier arrêt, le dépassement de vitesse a eu lieu dans une localité et non pas sur l'autoroute. Par conséquent, le Tribunal fédéral a commencé par poser les principes qui sont applicables à cette situation. Il a tout d'abord relevé que la conduite dans une localité demande plus de concentration que celle sur l'autoroute puisque les impulsions externes sont fréquentes (panneaux de circulations, feux, risques de collision latéraux etc.). En plus, il doit tenir compte du fait que les piétons, et surtout les enfants et les personnes âgées, ainsi que les cyclistes, constituent des groupes à risques particuliers vu labsence de protection dont ils jouissent, contrairement aux automobilistes. Ils font généralement non seulement moins attention à leurs faits, mais ils peuvent aussi surgir inopinément sur la chaussée (39). En plus, ces personnes ne doivent pas compter avec un éventuel dépassement de vitesse exagéré, contrairement aux automobilistes sur l'autoroute qui peuvent s'attendre à ce que la vitesse moyenne dépasse de l 0 km/h la vitesse autorisée (40). Finalement, le Tribunal fédéral a retenu que les risques de lésions corporelles graves ou mortelles sont plus élevés en cas d'accident entre une voiture et un piéton/cycliste qu'entre deux voitures.

Au vu de ces considérations, le Tribunal fédéral a donc admis que lorsque la vitesse maximum autorisée dans les localités est dépassée de 25 km/h ou plus, il y a objectivement mise en danger du trafic au sens de !'art. 16 al. 3 lit. a LCR, sans

(36) ATF 123 II 39; ATF 123 II 111 ; ATF 121 IV 230; ATF 113 lb 143.

(37) ATF 123 II 41 : ce constat vaut pour en cas dépassement de 25 km/h de la vitesse maximale autorisée dans les localités (exposé ci-dessous).

(38) ATF118Ib229.

(39) ATF123II40;ATF121II127.

(40) ATF 118 IV 277.

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égard aux circonstances concrètes du cas d'espèce. D'un point de vue subjectif, un tel dépassement de vitesse fait aussi présumer que la violation est grave.

En l'espèce, K. avait dépassé la vitesse autorisée de 26 km/h; le Tribunal fédéral a, par conséquent, annulé la décision du Tribunal administratif et ordonné le retrait du permis de conduire en lieu et place de l'avertissement.

B - ORGANISATION MILITAIRE

Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de rappeler à quelles conditions la Confédération suisse pouvait être tenue responsable en cas de dommage causé à un tiers par un fonctionnaire fédéral(41). Suite à une collision en vol d'un avion civil et d'un avion militaire, ayant entraîné la mort des deux occupants de l'avion civil, le Département militaire fédéral ( 42) a été saisi d'une demande en réparation du dommage subi intentée par les proches d'une des deux victimes. Cette action en responsabilité de la Confédération était fondée sur l'ancien art. 22 al. l de la loi fédérale sur l'organisation militaire (OM) - aujourd'hui, art. 135 de la loi fédérale sur l'armée et l'administration militaire (LAAM) (43). Le Département militaire fédéral ayant rejeté la demande, l'affaire a été portée devant la Commission de recours du Département militaire fédéral, qui a admis que si la responsabilité de la Confédération était bien fondée sur l'organisation militaire - à présent la LAAM -, ses conditions n'étaient en l'espèce pas réalisées. Le Tribunal fédéral a été saisi d'un recours de droit administratif contre cette décision.

Le Tribunal fédéral a confirmé l'avis de la Commission de recours du Département militaire fédéral, selon lequel la responsabilité de la Confédération pour un dommage causé par la collision en vol d'un avion militaire suisse et d'un avion civil doit s'apprécier au regard de l'organisation militaire (actuelle LAAM), à l'exclusion de l'art. 106 al. 1 de la loi fédérale sur l'aviation (44), qui ne s'applique qu'en cas de dommages au sol.

Sur le fond, le Tribunal fédéral a rappelé qu'en vertu de l'art. 22 al. 1 OM - nouvel art. 135 LAAM - la Confédération répond du dommage causé sans droit à un tiers par des militaires lorsqu'il résulte d'une activité de service. En matière de responsabilité de la Confédération pour des actes commis par ses agents publics, constitue un acte illicite la violation d'une règle de droit ayant pour but de protéger un droit subjectif absolu appartenant au lésé, comme par exemple la vie et l'intégrité corporelle. A cet égard, la règle violée peut être une règle de droit quelconque.

La Commission de recours du Département militaire fédéral avait nié l'existence d'un acte illicite au motif que le pilote de l'avion militaire n'avait commis aucune infraction à ses devoirs de service. Or, le Tribunal fédérai s'appuyant sur la doctrine majoritaire, a considéré que l'illicéité de dommages corporels résultait déjà de l'atteinte à un droit absolu, sans qu'une violation d'une disposition spéciale soit nécessaire.

(41) ATF 123 II 577ss.

(42) Ci-après: DMF.

(43) Du 3 février 1995; RS 510.10.

(44) Du 21décembre1948; RS 748.0.

(11)

Les autres conditions posées par l'art. 22 al. 1 OM - nouvel art. 135 LAAM - étant remplies et aucune faute du lésé ou d'un tiers n'ayant au surplus été retenue, le Tribunal fédéral a, par conséquent, admis la responsabilité de la Confédération.

C - DROIT DES ÉTRANGERS

Dans un premier arrêt ( 45), le Tribunal fédéral s'est penché sur les conditions d'application de l'art. 13 lit. f de l'ordonnance fédérale limitant le nombre des étrangers (ci-après: OLE) (46) aux demandeurs d'asile. Les époux K ... et leurs trois enfants, ressortissants zaïrois arrivés en Suisse en 1990, ont déposé des demandes d'asile qui ont été rejetées en première instance. Un recours contre ces décisions est actuellement pendant. L'Office cantonal vaudois des demandeurs d'asile a informé

!'Office fédéral des étrangers qu'il entendait délivrer à la famille K ... une autorisation de séjour hors contingent au sens de l'art. 13 lit. f OLE. L'Office fédéral des étrangers a cependant refusé d'exempter la famille K ... des mesures de limitation du nombre des étrangers. Les intéressés ont formé recours contre cette décision.

Le Tribunal fédéral a rappelé que les mesures de limitation visent à assurer non seulement un rapport équilibré entre l'effectif de la population en Suisse et celui de la population étrangère résidente, mais encore un équilibre optimal en matière d'emploi. L'art. 13 lit. f OLE, selon lequel un étranger n'est pas compté dans les nombres maximums fixés par le Conseil fédéral, a pour but de faciliter la présence en Suisse d'étrangers qui, en principe, seraient comptés dans ce contingent, mais pour lesquels cet assujettissement paraîtrait trop rigoureux par rapport aux circonstances particulières de leur cas, ou pas souhaitable du point de vue politique. Cette disposition dérogatoire présentant un caractère exceptionnel, ses conditions doivent être appréciées restrictivement. II est en effet nécessaire que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle au cas où il est renvoyé de Suisse.

A cet égard, un long séjour en Suisse de même qu'une bonne intégration ne suffisent pas à constituer un cas d'extrême gravité; il faut encore que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine.

Le Tribunal fédéral a relevé que ces principes sont aussi valables pour les étrangers qui sollicitent l'octroi d'une autorisation de séjour dans le cadre d'une procédure d'asile.

La reconnaissance d'un cas personnel d'extrême gravité au sens de l'art. 13 lit. f OLE ne tend pas à protéger l'étranger contre les conséquences de la guerre ou contre des abus des autorités étatiques, ces considérations relevant en effet de la procédure d'asile. Sont seules déterminantes dans la procédure d'exemption des mesures de limitations, des raisons purement humanitaires.

Le Tribunal fédéral a rappelé qu'il n'y avait aucune définition particulière d~

cas personnel d'extrême gravité pour les requérants d'asile. Il a toutefois ajouté qu'il convenait de tenir compte de la situation particulière des requérants par rapport au;c:

autres étrangers. Ainsi, la situation des requérants de retour dans leur pays devait être plus grave que celle de leurs autres compatriotes appelés à quitter la Suisse terme de leur séjour. L'art. 13 lit. f OLE n'a en effet pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine.

(45) ATF 123II125ss.

(46) Du 6 octobre 1986; RS 823.21.

(12)

Enfin, le Tribunal fédéral a ajouté qu'il convenait d'examiner la situation de chacun des membres d'une famille sollicitant l'exemption non pas isolément mais en relation avec le contexte familial global.

En l'espèce, le Tribunal fédéral a relevé que le fait pour les époux K. de vivre depuis plus de six ans en Suisse et d'y être normalement intégrés n'était pas suffisant pour admettre que leur renvoi de Suisse constituerait un cas personnel d'extrême gravité au sens de l'art. 13 lit. f OLE. Dès lors qu'il avaient passé la plus grande partie de leur existence au Zaïre et qu'ils n'entretenaient pas de liens particuliers avec la Suisse, ils ne pouvaient prétendre à être exempter des mesures de limitations de l'art. 13 lit. f OLE. Quant aux enfants du couple, le Tribunal fédéral a considéré qu'ils étaient suffisamment jeunes pour pouvoir s'adapter à un nouvel environnement. En conséquence, le Tribunal fédéral a jugé qu'on pouvait attendre de la famille K. qu'elle s'adapte ou se réadapte à la situation, même difficile, à laquelle elle pourrait être confrontée si elle retournait au Zaïre, à l'instar de ses compatriotes qui y sont restés.

Dans un deuxième arrêt (47), le Tribunal fédéral a examiné la légalité de la transformation d'une autorisation saisonnière en une autorisation à l'année, au regard du nouvel art. 28 al. 1 lit. a OLE, en vigueur dès le 1er janvier 1995. Cette disposition prévoit qu'une autorisation saisonnière peut, sur demande, être transformée en autorisation à l'année pour des ressortissants d'États de !'Association Européenne de Libre-Échange (AELE) et de ! 'Union Européenne, lorsque le saisonnier a travaillé en Suisse régulièrement comme saisonnier pendant 36 mois au total au cours des quatre dernières années consécutives. En l'espèce, un ressortissant yougoslave avait déposé auprès des autorités compétentes, le 15 mai 1995, une demande tendant à la transformation de son autorisation saisonnière en autorisation à l'année, ce qui lui avait été refusé. Saisi d'un recours de droit administratif, le Tribunal fédéral avait confirmé ce refus. En substance, le Tribunal fédéral rappela que si, sous l'ancien droit, tous les saisonniers - indépendamment de leur nationalité - pouvaient effectivement solliciter la transformation de leur autorisation saisonnière en autorisation à l'année, à partir du Ier janvier 1995, seuls les ressortissants des États de l 'Association Européenne de Libre-Échange ou de l'Union Européenne pouvaient bénéficier de ce régime. Les ressortissants d'autres pays, comme par exemple la Yougoslavie, devaient ainsi remplir les conditions nécessaires pour la transformation de leur autorisation le 31 décembre 1994 au plus tard.

D - PROCÉDURE

Saisi d'un recours de droit administratif(48), le Tribunal fédéral a examiné si la réglementation cantonale genevoise en matière d'aménagement du territoire était conforme aux art. 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) (49) et 98a al. 1 de la loi fédérale d'organisation judiciaire (OJF) (50).

Dans son raisonnement, il a admis que l'application directe de l'art. 98a al. 1 OJF

(47) ATF 123 Il 472ss.

(48) ATF 123 Il 231.

(49) Du4novembre1950;RS0.101.

(50) Du 16 décembre 1943; RS 173.110. Cette disposition stipule que« les cantons instituent des autorités judiciaires statuant en dernière instance cantonale, dans la mesure où leurs décisions peuvent faire directement l'objet d'un recours de droit administratif devant le Tribunal fédéral».

(13)

peut fonder la compétence d'une autorité judiciaire cantonale nonobstant l'absence de normes cantonales à ce sujet. Ceci implique que l'administré ne peut pas faire un recours de droit administratif direct contre la décision du Grand Conseil, mais qu'il doit au préalable épuiser les instances cantonales en s'adressant au Tribunal administratif cantonal (art. 98 lit. g et 102 lit. d OJF).

In casu, le World Wide Found For Nature - WWF Suisse, représenté par le WWF - Section de Genève (51), a, conformément aux dispositions légales en vigueur, formé opposition contre un projet de changement de plan d'affectation élaboré par le département des travaux publics et de l'énergie de la République et canton de Genève auprès du Grand Conseil. Ce dernier a rejeté l'opposition du WWF et adopté le changement du plan d'affectation. Le changement du plan d'affectation est entré en vigueur le 21 mars 1997. Dans son recours déposé dans les délais, le WWF a demandé au Tribunal fédéral de déterminer si la réglementation genevoise, attribuant au Grand Conseil, qui est le parlement et non pas une autorité judiciaire, la compétence de statuer sur les recours (oppositions) au sens de l'art. 33 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT) (52) contre les plans d'affectation, est conforme aux art. 6 CEDH et 98a al. l OJF.

Selon l'art. 97 al. l OJF, le Tribunal fédéral connaît en dernière instance les recours de droit administratif contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative (PA) (53), qui ont été prises par l'une des autorités mentionnées à l'art. 98 OJF et qui ne tombent pas sous le coup des exceptions énumérées aux art. 99 à 102 OJF. Conformément à l'art. 102 lit. d OJF, le recours de droit administratif« n'est pas recevable lorsqu'est ouverte la voie de tout autre recours ou opposition préalable». L'art. 98 lit. g OJF dispose du reste que le recours est ouvert contre « les décisions des autorités statuant en dernière instance cantonale ». Ainsi, un recours dirigé contre la décision d'une autre autorité cantonale est donc irrecevable (54). En droit genevois, le Grand Conseil statue sur les oppositions aux projets de modification des plans d'affectation (art. 16 de la loi cantonale genevoise d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LALAT) (55) (56). Cette loi ne prévoit pas de recours devant le Tribunal administratif cantonal, ni devant une autre autorité judiciaire d'ailleurs. Notons qu'à Genève, le Tribunal administratif ne dispose pas d'une clause générale de compétence en matière de juridiction administrative ; au contraire, ses attributions sont énumérées exhaustivement à l'art. 8 de la loi cantonale sur la juridiction administrative et le Tribunal des conflits (LTA) (57). Or, les décisions du Grand Conseil en matière de plans d'affectation ne sont pas mentionnées dans cette liste, de sorte qu'aucune juridiction cantonale ne se prononce sur les oppositions formulées contre les changements de plans d'affectation. Cette réglementation cantonale est contraire à l'art. 98a al. 1 OJF (58).

(51) Ci-après: WWF.

(52) Du22juin 1979; RS 700.

(53) Du 20 décembre 1968; RS 172.021.

(54) ATF 122 I 72ss.

(55) Du 4 juin 1987; RS/GE L 1 30.

(56) En effet, la création et la modification de zones ordinaires (art. 18ss LALAT) sont en droit genevois soumises à une procédure de type législatif (art. l 5ss LALA T).

(57) Du 29 mai 1970; RS/GE E 5 0.5.

(58) Cette disposition est entrée en vigueur le 15 février 1992. Les cantons disposaient toutefois d'un délai de cinq ans - soit jusqu'au 15 février 1997 - pour adapter leurs procédures administratives respectives aux nouvelles exigences.

(14)

Se posait alors la question de savoir si la compétence du Tribunal administratif pouvait se fonder directement sur l'art. 98a OJF. Dans l'arrêt exposé, le Tribunal fédéral a eu l'occasion de stipuler pour la première fois que cette règle était directement applicable depuis le 15 février 1997 et, par conséquent, qu'elle pouvait fonder la compétence d'une autorité judiciaire cantonale nonobstant l'absence de

normes cantonales (59) (60).

L'application directe de l'art. 98a al. 1 OJF depuis le 15 février 1997 permet ainsi à l'administré d'exiger que le Tribunal administratif cantonal ou une autre autorité judiciaire se prononce sur un recours qu'il a déposé après cette date contre une décision le concernant et ne pouvant plus faire l'objet d'un recours devant un organe de l'administration ou le parlement, lorsque la voie du recours de droit administratif est ensuite ouverte. Si le justiciable n'utilise pas cette possibilité de recours cantonal, son recours de droit administratif au Tribunal fédéral dirigé contre la décision du parlement ou d'un organe de l'administration est irrecevable en application des art. 98 lit. g et 102 lit. d OJF.

En l'occurrence, l'art. 98a al. 1 OJF était déjà directement applicable à la date de publication de l'arrêté de promulgation du changement du plan d'affectation. Le recours de droit administratif a donc été déclaré irrecevable car le WWF n'a pas épuisé les instances de recours cantonales ouvertes en vertu de l'art. 98a al. 1 OJF (61).

C'est un principe général du droit, exprimé notamment à l'art. 107 al. 3 OJF, que lorsqu'il existe une obligation de mentionner dans une décision les voies de recours, son omission ne doit pas porter préjudice au justiciable. De même, le justiciable ne doit pas souffrir d'une indication incomplète ou inexacte sur ce point.

Ce principe découle du principe de la bonne foi qui impose aussi certaines obligations à l'autorité dans la conduite d'une procédure (62). Le justiciable ne doit notamment pas pâtir d'une réglementation légale peu claire ou contradictoire des voies de droit; il est alors dans une situation comparable à celle où l'autorité donne, dans sa décision, des indications erronées à ce sujet (63). La solution permettant au requérant de subir un préjudice peut varier : le délai de recours peut être considéré comme observé ou il peut être restitué ; une transmission de l'affaire à l'autorité compétente peut aussi être ordonnée (64).

En l'espèce, la question de la voie de recours cantonale contre une décision du Grand Conseil en matière de plans d'affectation était (65) réglée de manière

(59) ATF 123 II 236 consid. 7 et les références citées.

(60) L'application directe de l'art. 98a OJF présente certaines analogies avec la mise en œuvre du droit au contrôle judiciaire de certaines décisions garanti par l'art. 6 § 1 CEDH. En effet, dans Je champ d'application de cette dernière disposition, la jurisprudence considère que, même à défaut de dispositions expresses du droit cantonal, une voie de recours devant une autorité judiciaire cantonale doit être ouverte. Si cela n'est pas possible, il convient alors d'adopter un règlement transitoire, voire de désigner de cas en cas l'autorité judiciaire compétente (ATF 121ll219 consid. 2c).

( 61) Notons que, depuis la publication de !'arrêt exposé ci-dessus, Je canton de Genève a pallié Je défaut de la réglementation en matière de recours contre les plans d'affectation avec l'art. 98a al. 1 OJF en attribuant la compétence de statuer sur les décisions sur opposition du Grand Conseil au Tribunal administratif cantonal.

(62) ATF 123 II consid. 8b; ATF 119 IV 330 consid. Je; ATF 117 la 297 consid. 2.

( 63) A TF 123 II consid. 8b ; A TF 117 la Il 9 consid. 3.

( 64) A TF 123 II cons id. 8b ; A TF 117 la 297 consid. 2.

(65) Voir ci-dessus note 18.

(15)

particulièrement peu claire dans le canton de Genève. En vertu du principe de la séparation des pouvoirs, les décisions du parlement ne peuvent pas faire l'objet d'un recours auprès d'un tribunal cantonal, c'est pourquoi l'application directe de l'art. 98a al. 1 OJF pose divers problèmes. Comme les autorités n'avaient pas résolu ces questions dans le délai de cinq ans prévu pour la mise en œuvre des exigences de l'art. 98a OJF, il n'était pas certain que le Tribunal administratif soit l'autorité compétente.

En l'espèce, on ne pouvait donc pas raisonnablement laisser le soin au WWF d'examiner les différentes interprétations possibles des règles pouvant fonder la compétence d'une autorité judiciaire cantonale. Par conséquent, l'application du principe de la bonne foi, qui veut que le justiciable ne subisse aucun préjudice à cause de cette réglementation particulière des voies de droit, confère en l'occurrence au Tribunal fédéral la compétence de transmettre l'affaire au Tribunal administratif cantonal et lui impose, le cas échéant, de transmettre l'affaire à l'autorité compétente.

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