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Irrigation souterraine en limons de Bresse

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Academic year: 2021

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Irrigation souterraine en limons de Bresse

RÉSUMÉ

Afin de vérifier, dans un luvisol redoxisol, les conséquences hydrologiques et les performances agro-techniques de l'irrigation souterrai- ne - qui consiste à recharger une nappe par apports d'eau à l'aide d'un réseau de drains enterrés - un dispositif expérimental a été installé en 1993 dans une exploitation agricole située sur limons de Bresse. Sur le plan scientifique, à partir de l'injection d'eau dans le sol résultant de ce mode d'arrosage, l'objectif a été d'identifier et de quantifier les transferts d'eau, notamment ceux intervenant au sein des horizons argilluviaux BTg.

Pour cela, de juin à août, des relevés tensio-piézométriques pluri-journaliers et une observation périodique de profils racinaires, ont été effectués dans une parcelle de maïs, arrosée à l'aide d'un réseau de drains installé depuis 1970. Les données recueillies montrent que l'eau apportée par les drains recharge en fait - à travers les horizons argilluviaux BTg - une nappe souterraine associée à un aquifère sableux lenticulaire, apparaissant entre 150 et 250 cm de profondeur. Début juin (maïs au stade 5 feuilles), cette nappe remonte par arrosage jusqu'à 100 cm de profondeur à l'interdrain. Elle prend alors une forme concave avec une perte de charge dépassant 40 cm entre la tranchée de drainage et l'interdrain. Les remontées capillaires atteignent 30 cm à l'interdrain et réhumidifient la base de l'hori- zon argilluvial. Durant le mois d'août, en période de forte demande climatique, la nappe, malgré un arrosage continu, s'abaisse progressivement au delà de 130 cm de profondeur et la frange capillaire n'est plus observée ; le front racinaire du maïs situé à 80 cm de profondeur ne bénéficie plus d'une alimentation hydrique optimale. Cette recharge insuffisante de la nappe provient du débit limité d'alimentation en eau du réseau, dû au diamètre trop faible du collecteur, calibré initialement pour le seul drainage. Dans la tranchée de drainage, malgré une saturation prolongée liée à la mise en charge rapide des drains après apport d'eau, il n'y a pas de dégradation apparente de la structure du sol.

Mots clés :

Sols hydromorphe - Luvisol - Redoxisol - Limon -Bresse - Drainage - Irrigation - Recharge de nappe - Irrigation souterraine.

SUMMARY

SUBIRRIGATION : WATER FLOW AND ROOT DYNAMIC IN LOAMY SOIL (LUVISOL-REDOXISOL) OF BRESSE.

In France, the use of underground irrigation, in the form of groundwater creation or recharge by the input of water using a subsurface drain network, is relatively recent. This means of watering has been successfully tested on hydromorphic alluvial soils along the Rhône and Aude rivers, as well as in the sandy, podzolic soils of the Landes and the Médoc regions. In other countries, this technique has been widely developed, notably in the United States, since the end of the 1970's, under the term 'subirrigation', and in the polders of Holland. Nevertheless, it has not yet been experimented in luvisoil-redoxisoil type hydromorphic (tabl.1 et 2) soils, widespread in France and throughout Europe. These soils, however, often drained, meet most of the conditions required for the implementation of subirriga- tion : flat topography, nearby water resources and permeable surface horizons. To check the feasability of this technique, an experimental system was set up in 1993 in a farm located on Bresse silt (fig.1). The objectives, other than the technical aspects, aimed

R. Bouzigues

(1)

, J.C. Favrot

(1)

, J.C. Chossat

(2)

, M. Khadiri

(3)

, E. Lalanne

(4)

(1) - Laboratoire de Science du Sol - Centre INRA, 2 place Viala - 34060 MONTPELLIER Cedex 01.

(2) - Division Ouvrages et Réseaux Hydrauliques - Groupement CEMAGREF de Bordeaux - B.P. 3 - 33611 GAZINET Cedex.

(3) - École Nationale du Génie-Rural des Eaux et des Forêts - B.P. 5093 - 34033 MONTPELLIER Cedex 01.

(4) - Chambre d'Agriculture de Saône et Loire - 71270 AUTHUMES.

(2)

E

n France, le recours à l'irrigation souterraine, sous forme de création ou de recharge d'une nappe par apports d'eau à l'aide d'un réseau de drains enterrés, est relativement récent (Chossat et al., 1987 ; Chossat et Favrot, 1990). Ce mode d'arrosage a été testé avec succès en sols alluviaux hydromorphes de bordure du Rhône (Meunier, 1987 ; Procopo Burian, 1991) et de l'Aude (Chow-Toun, 1990), ainsi que dans les sols podzoliques sableux des Landes (Dupin, 1981) et du Médoc (Hargous, 1987). Ailleurs, cette technique est largement développée, notamment aux Etats-Unis depuis la fin des années 1970, sous le terme de "subirrigation" (Strickland et al.,1981 ; Smith et al., 1985 ; Wright et Ademsen, 1987 ; Belcher et Kittleson, 1987 ; Skaggs, 1991) et dans les polders de Hollande (Visser, 1992).

Ce mode d'arrosage n'a toutefois, pas encore été expéri- menté en sols hydromorphes du type luvisol-redoxisol (AFES, 1992) ou lessivé à pseudogley (CPCS, 1967), largement répandus en France et en Europe (Jamagne et Begon, 1984).

Ces sols, souvent drainés, répondent pourtant à la plupart des conditions nécessaires pour la mise en œuvre de l'irrigation souterraine : topographie plane, ressources en eau proches, horizons de surface perméables,... Pour en vérifier la faisabi- lité, un dispositif expérimental a été installé en 1993 dans une exploitation agricole située sur limons de Bresse. Les objectifs recherchés débordent cependant les seuls aspects techniques.

Il s'agit aussi d'utiliser l'injection d'eau dans les sols, propre à ce mode d'arrosage, pour mieux identifier et quantifier les transferts d'eau, de type convectif (percolation par des chemins

préférentiels) ou diffusifs (remontées capillaires). Il s'agit notamment de préciser le comportement hydrique des horizons argilluviaux (AFES, 1992) à travers la formation ou non d'une nappe estivale, comparable à celle qui provoque l'engorgement de ce type de sols en saison pluvieuse. Cette approche com- plétera l'analyse des restitutions de réseaux expérimentaux de drainage utilisée également dans les mêmes sols pour caracté- riser les transferts dans les horizons BTg (Zimmer et al.,1991).

Sur le plan technique, le but du suivi a été d'évaluer dans quelle mesure un réseau de drainage initialement conçu pour le seul rabattement d'une nappe hivernale, permettait ensuite une recharge suffisante de celle-ci en été, à la suite d'apports d'eau. La déstabilisation ou non de la structure du matériaux de remplissage de la tranchée de drainage devait être vérifiée.

Agronomiquement, il fallait contrôler qu'il était possible de conduire la recharge de la nappe et de réguler les remontées capillaires sus-jacentes, pour les adapter à la vitesse et à la profondeur d'enracinement d'une culture de maïs.

C'est en acquérant et en confrontant des données pédolo- giques, hydrologiques et agronomiques que l'on a tenté de répondre aux objectifs ci-dessus. Les démarches et les résul- tats de la campagne de mesures de l'été 1993 sont présentés maintenant.

at using the injection of water into the soils, which is characteristic of this kind of watering, to identify and quantify better the water trans- fers there, whether convective (percolation by preferential paths) or diffusive (capillary rises). The aim was also notably to specify the hydric behaviour of the argilic horizons by means of the rise or absence of rise of summer groundwater, comparable to that caused by the logging during the rainy season. From June to August 1993, tensiometric and piezometric (fig.2) readings were taken several times a day, and a periodic observation of root profiles was performed in a plot of maize, watered using a drain network installed since 1970.

The data collected (fig.4 et 8) show that the water brought in by the drains in fact recharges - through the Btg argilic horizons - ground- water associated with a lenticular sandy aquifer, appearing between 150 and 250 cm in depth. Since June this groundwater has risen by watering to a depth of 100 cm at the mid drain (5-leaf stage maize). It then becomes concave, with a loss of head exceeding 40 cm between the drainage ditch and the mid drain. The capillary rises reach 30 cm at the mid drain and rehumidify the base of the argilic horizon. During the month of August, in the period of high climatic demand, the groundwater, despite constant watering, drops progres- sively below 130 cm and the capillary fringe is no longer observed; the root front of the maize, situated at a depth of 80 cm, no longer benefits from an optimal supply. This insufficient groundwater recharge thus comes from the excessively low diameter of the network main, initially sized for drainage alone. At the time of rainy periods (mid-June), the groundwater rises up to a depth of 50 cm and, para- doxically (gate closed downstream from the main), the drains nevertheless provide its lowering. In the drainage ditch, prolonged saturation related to the rapid loading of the drains after water input, failed to reveal any apparent degradation of the soil structure.

Key words: Stagnic Luvisol - Bresse - Drainage - Subirrigation - groundwater recharge.

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Figure 1 - Schéma du réseau de drainage.

Figure 1 - Scheme of the drainage network.

MILIEU, MATÉRIEL ET MÉTHODES

Situation et caractéristiques de la parcelle expérimentale

Le site d'étude est localisé dans la petite région naturelle Bresse Chalonnaise. Celle-ci, de topographie générale plane, d'altitude 170 à 250 m, est caractérisée par un climat océa- nique atténué à forte influence continentale : pluviométrie moyenne annuelle de 790 mm ; température moyenne annuel- le de 10,6°C. Ce climat provoque dans le sol un excès d'eau printanier une année sur trois et un excès d'eau automnal deux années sur cinq. Les besoins en eau du maïs ne sont satisfaits qu'une année sur deux, avec un déficit important une année sur cinq. En juillet, l'ETM du maïs peut dépasser parfois 5 mm/jour.

Géologiquement, la Bresse Chalonnaise appartient au fossé d'effondrement bressan qui a été comblé par des maté- riaux fluvio-lacustres assez hétérogènes, avec des variations de faciès latérales et verticales importantes, sous des dépôts limoneux quasi continus.

La parcelle expérimentale est située à St Martin en Bresse (Saône et Loire), à 10 km à l'est de Chalon-sur-Saône. En position sub-horizontale, elle occupe cinq hectares, semés en maïs le 8/5/93 (variété DEA). Elle est équipée d'un réseau de drains espacés de 10 m, profonds de 0,8 à 1,2 m, implantés en

1970 à l'aide d'une draineuse-trancheuse (figure 1). Le diamètre extérieur des drains est de 50 mm, ces derniers étant surmontés d'une couche de graviers de quelques centimètres d'épaisseur. Le collecteur central a un diamètre qui croit de 80 mm à 160 mm, d'amont en aval. Un regard d'alimentation per- met d'apporter l'eau à l'extrémité amont. Au milieu de la parcelle, le collecteur est équipé d'un clapet qui permet de réguler le débit de l'eau lors des arrosages. A l'extrémité aval du collecteur, dans un autre regard, une vanne permet de blo- quer les écoulements en période d'irrigation.

Le sol de la parcelle (tableau 1) est typique des luvisols- redoxisols largement développés régionalement. Il comprend, au sommet, des horizons Ap et Eg limoneux, poreux (activité biologique), de teinte claire, tachetés de rouille, reposant vers 50 cm sur des horizons argilo-limoneux, bariolés gris et ocre, B1Tg, B2Tg, BCg. La structure de ces derniers est nettement prismatique au sommet (B1Tg, B2Tg) avec pénétration racinai- re verticale, entre les parois très peu poreuses, car comprimées, des prismes. La sous-structure est polyédrique.

Vers 60-70 cm apparaît l'horizon B2Tg qui peut être considéré comme le plancher quasi- imperméable, au sens hydraulique du terme, du fait de sa faible porosité en période humide. En profondeur, (horizon BCg) vers 100-110 cm la structure devient progressivement lamellaire, avec encore une forte diminution de la porosité. Entre 150 et 250 cm apparaît un aquifère fine- ment sableux, à distribution spatiale lenticulaire, de couleur rosée caractéristique.

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La densité apparente du sol (tableau 2) passe de 1,3-1,4 dans l'horizon cultivé Ap, à 1,5-1,6 dans les horizons argillu- viaux BTg. La réserve utile en eau (R.U.) est de 165 mm pour 100 cm d'épaisseur, selon les valeurs de capacité de rétention et de point de flétrissement mesurées sur presse à plaque en laboratoire sur échantillons remaniés. Des mesures hydrodyna- miques, effectuées par la méthode de l'essai de pompage de Guyon (Guyon, 1983) dans le même type de sol en Plaine Dôloise, avaient donné des valeurs de conductivité hydraulique à saturation de 0,09 à 0,14 m/j, et une valeur de porosité de drainage de 0,03 (Bouzigues et Favrot, 1978).

L'eau d'irrigation de la parcelle provient d'un forage distant de 1 200 m, profond de 32 m, au débit exploitable de 55 m3par heure.

Protocole expérimental

Pour caractériser les transferts d'eau dans le sol, deux sites de mesures ont été installés dans la parcelle, à l'aval (site 1) et à l'amont (site 2) de la vanne centrale. Au site 1, les horizons limo- neux sont légèrement plus épais (50 cm contre 40 cm) et les drains sensiblement moins profonds (85 cm contre 120 cm) qu'au site 2. Chacun des deux sites a été équipé de quatre batteries de tensiomètres à mercure et de piézomètres qui ont été implantées : sur le drain, à 1,0 m du drain, à 2,50 m du drain et à l'interdrain (5,0 m). Chaque batterie comprend quatre tensiomètres et trois piézomètres, posés à des profondeurs variant de 30 à 140 cm (figure 2). Ces appareils ont été relevés (manuellement) de trois à six fois par jour, entre le 8 juin et le 30 août 1993. Des pié- zomètres à enregistrement automatique (capteurs à ultra sons), de 90 cm de profondeur, ont été également installés.

Des profils racinaires ont été observés à trois dates succes- sives : à la floraison mâle du maïs et à deux reprises autour de la floraison femelle. Pour cela, une paroi verticale a été taillée Profondeur Tranchée de drainage Sol en place

en cm 3/6/93 22/9/93 3/6/93 22/9/93

5-10 1,39 - 1,39 -

22-28 1,25 -

26-31 1,39 -

35-40 1,50 1,46 1,54 1,58

52-57 1,47 1,46

57-62 1,47 - 1,51 1,53

62-67 1,54 -

72-77 1,51 1,47

80-85 - 1,61 1,65

Tableau 2 - Valeurs des densités apparentes sèches mesurées au site 1 dans la tranchée de drainage et dans le massif de sol adjacent, au début et à la fin de la période d'étude. Chaque valeur représente la moyenne de trois mesures (cylindre de 130,09 cm3).

Table 2 - Bulk density measurements on the site 1, in the trench and in the undisturbed soil near the trench at the beginning and the end of the studyied period (each value = average of 3 measurements, for volume of the cylinder = 130,09 cm3).

Profondeur Horizon Granulométrie MO pH N Complexe Absorbant Fe Mn P

% % eau total meg/100g total total Olsen

en cm SG SF LG LF A 0/00 CEC Ca Mg K Na % % 0/00

0-35 Ap 1,8 19,3 29,6 34,5 14,8 1,63 6,2 0,97 7,1 6,6 0,39 0,51 0,03 1,61 0,35 0,12 35-40 Eg 1,6 16,2 27,6 34,9 19,7 0,86 6,2 0,52 7,4 6,8 0,53 0,45 0,03 1,88 0,47 0,30 50-65 B1Tg 0,8 10,6 22,8 31,2 34,6 0,52 7,2 0,39 12,9 13,5 1,37 0,35 0,05 3,27 0,33 0,01

65-100 B2Tg 0,6 11,2 22,3 31,3 36,6 7,0 16,2 17,5 2,47 0,23 0,12 3,11 0,18

100-140 BCg 0,5 14,4 19,6 29,7 35,8 7,1 16,7 18,5 2,82 0,18 0,18 3,13 0,23

140-170 C1g 0,8 22,8 18,5 22,7 35,2 7,1 17,0 20,6 2,87 0,20 0,18 2,82 0,17

170-200 C2g 1,4 39,6 16,0 16,4 26,6 7,2

Tableau 1 - Caractéristiques physiques et physico-chimiques du sol de la parcelle étudiée.

Table 1 - Physical and chemical characteristics of soil.

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entre deux pieds consécutifs de maïs sur la ligne de semis, et perpendiculairement aux quatre lignes d'un même passage de semoir. L'observation consiste à compter la présence de racines (avec trois options : 0 = absence, 1 = 1 racine, 2 = 2 racines ou +) au sein de mailles de 2,2 cm d'une grille appli- quée contre la paroi verticale, préalablement rafraîchie au couteau. Les points d'observation sont choisis dans une station au peuplement homogène, de 25 m x 25 m de cotés, autour des sites 1 et 2. Un écart minimum de trois mètres est respecté entre ces points, et également avec les placettes réservées aux mesures des composantes du rendement (nombre de pieds levés/ha, nombre d'épis/ha, nombre de rangs/épi, nombre de grains/épi et poids de mille grains). Sur chaque sta- tion, ces placettes, au nombre de quatre, représentent chacune 1/1000° d'hectares et sont disposées en diagonale sur les lignes du même passage de semoir.

Des suivis tensio-piézomètriques et agronomiques compa- rables ont été réalisés dans une parcelle adjacente, drainée (écartement : 10 m) et irriguée par aspersion (trois arrosages de 40 mm en août 1993).

Pour estimer l'évolution de la structure et de la porosité du sol dans la tranchée de drainage, des mesures de densité apparente (méthode du cylindre) et des observations morpho- logiques ont été effectuées sur des profils ouverts début juin et à la mi-septembre 1993.

Les hauteurs de pluie ayant affecté la parcelle étudiée ont été mesurées à l'aide d'un pluviomètre installé au site 1. Durant la période d'observation, il est tombé 149 mm. Un bilan hydrique climatique a été établi pour cette même période (figu- re 3). A noter que des cycles d'irrigation souterraine avaient déjà été effectués en 1972 puis en 1992 dans la parcelle expé- rimentale.

Les volumes d'eau apportés à chaque arrosage ont été comptabilisés gràce à un compteur débit métrique placé sur la conduite d'amenée. Au total, compte tenu des précipitations assez abondantes des mois de juin et de juillet, trois cycles d'arrosage par drains enterrés ont été suivis : du 8 au 13 juin (155 m3/ha au total), du 17 au 23 juillet (247 m3/ha), du 26 juillet au 26 août (1042 m3/ha). Le débit maximal d'injection d'eau dans les drains, par suite du diamètre limité du collecteur à l'amont, n'a été que de 8 m3/h, soit 3,84 mm/jour en pleine phase d'irrigation (figure 3).

RÉSULTATS

Seront abordés successivement dans ce chapitre les résul- tats concernant la métrologie utilisée, les suivis hydrologiques, les observations sur les tranchées de drainage et la dynamique de l'enracinement du maïs.

Comparaison entre données piézométriques et tensiométriques

Les valeurs de profondeur de nappe en un point et à un instant donnés, déduites de relevés piézométriques et tensiométriques, ne sont pas toujours rigoureusement concordantes, compte tenu des milieux et des conditions de mesures (Bouma et al, 1980 ; Zimmer, 1989). Une vérification de cette variabilité éven- tuelle a donc été effectuée sur la parcelle expérimentale.

La confrontation des relevés de tensiomètres et de pié- zomètres effectués sur un même site a révélé alors une bonne concordance d'ensemble pour l'évaluation de la profondeur de la nappe. En particulier, lorsque la remontée de la nappe est provoquée par l'irrigation souterraine, à l'interdrain et sur le drain, le décalage est faible, de l'ordre de quelques centimètres (figure 4) entre données tensiométriques et piézométriques.

Par ailleurs, pour vérifier la variabilité à courte distance des données tensiométriques, une batterie de cinq tensiomètres distants de quelques décimètres a été implantée à 80 cm de profondeur, au sein de l'horizon argilluvial BTg, dans chacun des sites 1 et 2 (figure 2). Comme précédemment, alors que les écarts sont très faibles à la suite d'une irrigation souterrai- Figure 2 - Dispositif piézo-tensiomètrique des sites 1 et 2.

Figure 2 - Schematic of piezometry and tensiometry devices on sites 1 and 2.

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Figure 3 -Précipitations (P), apports d'eau d'irrigation (I) et bilan climatique cumulé (BC) en mm. BC = ETP (évapotranspiration potentielle) - (P + I).

Figure 3 - Rainfall, irrigation water supply and PET during the studyied period.

Figure 4 - Évolution du niveau de la nappe mesurée par piézomètrie (p) et par tensiomètrie (t), selon la séquence drain-interdrain, lors du premier arrosage.

Figure 4 - Piezometric and tensiometric measurements of the water level movement according to the transect drain-middrain during the first period of irrigation.

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ne, des différences temporaires de -10 à -15 mb sont observées entre tensiomètres à la suite d'une pluie.

Par la suite, les profondeurs de nappe indiquées seront déduites des données tensiométriques, plus sensibles aux mouvements instantanés de l'eau dans le sol.

Cinétique de la nappe

Pour simplifier la présentation des résultats, seules les données acquises au site 1, le plus représentatif du contexte pédologique et hydrologique régional, seront exposées (figures 3 à 8).

Au cours de la période étudiée, en fonction du cycle végéta- tif du maïs et des conditions climatiques, trois phases principales ont été distinguées (figure 3) :

ζla première, du 8 au 13 juin, marquée par une faible demande climatique du maïs, est celle du premier cycle d'arro- sage par les drains,

ζla seconde, du 14 juin au 15 juillet correspond à une suc- cession d'épisodes pluvieux rapprochés,

ζla troisième, enfin, coïncide avec une période très sèche au cours de laquelle l'irrigation souterraine a été menée prati- quement en continu du 17 juillet au 26 août.

Les résultats des suivis tensiométriques vont être présentés maintenant, en fonction de ces trois phases.

Premier cycle d'arrosage

Avant la mise en œuvre du premier arrosage, les relevés (figure 4) montrent que la nappe se situait vers 130 cm de pro- fondeur, avec un profil drain-interdrain quasi horizontal.

La mise en eau provoqua alors une nette remontée de cette nappe, avec une cinétique contrastée entre le matériau rema- nié de la tranchée de drainage et le sol en place : alors qu'au dessus du drain la nappe remonte très rapidement de 130 à 75 cm de profondeur (vitesse de 50 cm/jour), puis plus lentement de 75 à 60 cm (6 cm/jour), à l'interdrain la nappe ne remonta que de 130 à 105 cm, avec une vitesse initiale de 21 cm/jour et une vitesse finale de 4 cm/jour.

La forme de la nappe rechargée est nettement concave, avec notamment une forte perte de charge (40 cm) constatée dès le premier mètre à partir de la tranchée de drainage (figure 4). Entre 1 m et 5 m (interdrain) la perte de charge n'est plus que de quelques centimètres.

Phase pluvieuse

Lors des fortes précipitations de juin et juillet 1993, la nappe a pris une forme convexe totalement inversée par rapport à celle obtenue lors de la phase de remontée acquise à la suite de l'irrigation (figure 5). Durant la première décade de juillet, le sommet de la nappe a subi des fluctuations nombreuses et rapides à l'interdrain. Les vitesses de remontées ou de rabatte- ment de la nappe, entre 70 et 105 cm de profondeur, ont été de l'ordre de 20 à 30 cm/jour.

Phase de forte demande climatique

Au cours de l'irrigation souterraine continue, et notam- ment entre le 27 juillet et le 27 août, la cinétique de la nappe a présenté certaines analogies avec celle observée lors du premier arrosage, la remontée étant en particulier

Figure 5 - Forme de la nappe selon la séquence drain-interdrain après les pluies du 29/06 au 30/07/93 (tensiomètrie).

Figure 5 - Water table shape according to the transect drain-middrain during rainfall period from 29th june to 3rdjuly.

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toujours nettement plus importante au dessus du drain qu'à l'interdrain.

Toutefois, durant cette période sèche, l'ampleur de la recharge a été beaucoup plus faible. En effet, à l'interdrain, le niveau de la nappe n'est remonté qu'à 120 cm de profondeur, pour redescendre ensuite progressivement à 140 cm. A la ver- ticale du drain, la saturation du sol n'a été maintenue que jusqu'à 95-100 cm de profondeur.

Remontées capillaires

Gràce aux profils tensiométriques, il a été possible de suivre l'évolution des remontées capillaires au cours des deux phases climatiques sèches.

Premier arrosage

Lors de la période du 8 au 13 juin, à l'interdrain (figure 6), seul le tensiomètre situé à 140 cm de profondeur a affiché des pressions positives (chiffre de la pression observé sur le ten- siomètre supérieur à la profondeur de ce dernier), traduisant la présence de la nappe dont le sommet se situait vers 105 cm . Les tensiomètres moins profonds ont révélé des pressions néga- tives matérialisant un milieu non saturé. Toutefois, alors que le potentiel total des tensiomètres posés à 30 et 50 cm décroît avec le temps, pour les tensiomètres situés à 80 et 100 cm, l'évolution des pressions a été très comparable à celle constatée pour le ten-

siomètre 140 (courbes parallèles). A ces deux profondeurs, avec des valeurs voisines de -150 et -180 mb, les potentiels mesurés sont restés constants ou ne se sont élevés que très légèrement durant la période d'apport d'eau. Cette évolution concomitante tra- duit l'existence d'une frange capillaire qui, pour une profondeur de la nappe de 105 cm, a dépassé 25-30 cm de hauteur.

Période sèche

Malgré un apport d'eau continu dans le sol à partir du 26 juillet, on a constaté un abaissement progressif du potentiel total des tensiomètres, ordonné selon la profondeur. Ainsi à l'interdrain (figure 7), le tensiomètre posé à 30 cm a décroché le premier lorsque le potentiel s'est abaissé au dessous de - 800 mb. Ensuite, ont décroché successivement les ten- siomètres installés à 50, 80 et 100 cm. En revanche, le tensiomètre situé à 140 cm a affiché toujours des pressions positives malgré un léger abaissement du potentiel total, syn- chrone du rabattement de la nappe. L'évolution ordonnée des tensiomètres supérieurs a donc résulté de l'épuisement pro- gressif, de haut en bas du profil, des réserves en eau du sol.

Le faible abaissement du potentiel à 140 cm de profondeur a traduit un transfert ascendant de l'eau par diffusion capillaire vers le système racinaire du maïs. Ces mouvements ascen- sionnels sont confirmés par le gradient vertical négatif de potentiel total constaté durant toute la période entre les ten- siomètres situés à 100 et 140 cm de profondeur.

Figure 6 - Évolution du potentiel total à l'interdrain, durant la première irrigation.

Figure 6 - Middrain total potential variation during the first period of irrigation.

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Saturation et stabilité structurale dans la tranchée de drainage

Les relevés tensiométriques effectués dans la tranchée de drainage du site 2 (drain à 120 cm) ont montré que durant les 37 jours d'arrosage, les matériaux de remplissage de la tran- chée de drainage (graviers au contact des drains et sol remanié) ont été constamment saturés entre 100 et 120 cm de profondeur. Au site 1, où le drain est moins profond (85 cm), il y a eu saturation permanente pendant une dizaine de jours sur plusieurs cm d'épaisseur au dessus du drain.

Malgré ces durées, qui excèdent largement le seuil de tolé- rance pris en compte pour le dimensionnement des réseaux de drainage (de l'ordre de 48 h/an), les examens morphologiques visuels, effectués avant et après la période de suivi hydrolo- gique, n'ont pas relevé de colmatage de pores dans le matériau terreux, ni d'aggravation de la contamination argileuse du rem- blai graveleux. D'autre part, les valeurs de densité apparente (tableau 2) sont restées les mêmes, avant et après irrigation.

Elles correspondent à une porosité totale de 42 à 45 % en des- sous de l'horizon labouré. Dans le sol en place adjacent, la porosité totale passe de 42-43 % dans l'horizon BTg à 38-39 % dans l'horizon BCg.

Ce même constat a été fait dans des sols alluviaux hydro- morphes de texture comparable (Meunier, 1987 ; Visser, 1992).

A l'intérieur des drains, un dépôt argilo-limoneux de 1,6 cm d'épaisseur au site 1 et de 0,7 cm au site 2 a été observé, sans variation significative d'épaisseur après irrigation. Ce dépôt était absent dans d'autres drains de la parcelle.

Cinétique d'enracinement et composantes du rendement du maïs

Le tableau 3 montre l'évolution dans le temps des profon- deurs maximale et moyenne d'enracinement (densité racinaire supérieure à 5 %) du maïs arrosé : après un accroissement rapide, cette profondeur augmente peu au delà de la floraison femelle et se situe alors autour de 80 cm au site 1. Par ailleurs, la profondeur d'apparition, sous les pieds de maïs, de zones vides de racines sur 20 cm de largeur - révélatrice de la réparti- tion spatiale de la colonisation racinaire - varie de 70 cm au site 1 à 62 cm au site 2. Dans les deux sites, il y a donc coloni- sation partielle de l'horizon argilluvial B2Tg.

Concernant les valeurs des composantes du rendement (tableau 4), il apparaît que la valeur de 3500 grains par m2- qui est considérée comme optimale dans le milieu régional - a été dépassée alors que le poids de mille grains est très en des- sous de l'optimum de la variété DEA qui est située à 300 g dans le contexte régional.

Figure 7 -Évolution du potentiel total à l'interdrain, en phase de forte demande climatique, lors de l'irrigation souterraine.

Figure 7 - Subirrigation period : middrain total potential variation during a high-rate PET period.

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pieds levés épis/ rangs/ grains/ grains/ grains/ PMG à Rendement humidité

103ha-1 m2 épi épi rang m2 15% à 15% moyenne %

Site 1 109,0 103,5 13,0 340 26,1 3518 257,3 90,5 35,6

Site 2 110,2 108,5 13,1 353 26,9 3828 236,1 90,4 30,8

Tableau 4 - Composantes du rendement du maïs relevées sur des placettes proches des sites 1 et 2.

Table 4- Corn yield components on plots near the site 1 and 2.

PMG à 15% : poids de mille grains à 15% d'humidité

Date 1erjuillet 1993 13 juillet 1993 22 juillet 1993

Stade végétatif panicule male sensible début floraison 3j post floraison femelle (Flo. Fem. + 35°.base 6°C)

Taille des plantes 2,10 m 2,50 > 2,70 cm

Densité racinaire % cases avec % cases avec % cases avec

Profondeur 0 racine 1 r. 2 r. 0 racine 1 r. 2 r. 0 racine 1 r. 2 r.

de 0 à 31 cm 66 15 19

de 31 à 45 cm 86 8 6 75 15 10 77 17,5 5,5

de 45 à 55 cm 97,5 2 0,5 92,5 4,5 3 81,5 15 3,5

de 55 à 68 cm 95 4 1 85,5 12 2,5

de 68 à 79 cm 91,5 8 0,5

Racine la plus profonde 53 cm 70 cm >79 cm

Profondeur d'apparition

d'une densité racinaire 48 cm 64 cm > 79 cm

supérieure à 5%

Profondeur d'apparition

d'une densité racinaire 40 cm 44 cm 66 cm

supérieure à 10%

Tableau 3 - Caractéristiques de l'enracinement du maïs au site 1, à trois dates successives Table 3 - Root zone characteristics near the site 1 at three successive dates.

(11)

DISCUSSION

Effets des horizons argilluviaux sur les transferts hydriques

L'interprétation des données hydrologiques conduit à plusieurs constats.

Le premier est que l'apport d'eau dans le sol en période estivale ne se traduit pas par la création d'une nappe perchée mais par la recharge et la remontée de la nappe contenue dans les matériaux sableux apparaissant entre 150 et 250 cm de profondeur. La conductivité hydraulique des horizons BTg et BCg est en effet suffisante pour cela, comme le montre la vites- se de remontée de la nappe entre 140 et 80 cm qui peut atteindre 20 cm/jour. L'horizon B2Tg ne constitue donc pas un niveau strictement imperméable comme le laisseraient suppo- ser les observations de sa porosité apparente. De telles possibilités d'oscillation d'une nappe au sein des horizons argil- luviaux avaient déjà été constatées dans des luvisols - redoxisols du Faux Perche et des terrasses de la Garonne, avec des nuances liées aux faciès structuraux de ces horizons (Zimmer et al, 1991).

Le second constata trait aux résultats des piézomètres automatiques (relevés à pas de temps horaire) obtenus durant

la période de pluies (14 juin - 15 juillet). Ces derniers ne met- tent pas non plus en évidence de formation d'une nappe perchée au sommet de l'horizon B2Tg.

Le troisième constat, est, qu'en période humide comme lors des irrigations par les drains, il y a continuité hydrau- lique entre les couches de surface saturées et les couches profondes occupées initialement par la nappe souterraine.

Comme en période d'irrigation, malgré une charge hydrau- lique accrue, un équilibre hydrostatique est constaté dans cette nappe ; le même potentiel tensiométrique étant en effet noté sur les divers tensiomètres. Ceci traduit aussi l'absence d'infiltrations profondes.

Le quatrième constat concerne l'existence de transferts hydriques en milieu non saturé. Ces transferts se traduisent soit par la frange capillaire de 25 à 30 cm d'épaisseur constatée lors du premier arrosage, soit par des mouvements diffusifs ascensionnels mis en évidence lors de la période très sèche. Cette ascension capillaire apparaît entre le front racinai- re située à 80 cm de profondeur et le sommet de la nappe, lequel s'abaisse progressivement de 120 à 140 cm de profon- deur au cours du mois d'août (figure 8).

Le dernier constat est que la structure des horizons argillu- viaux explique la double possibilité de transferts convectifs et diffusifs (Bouzigues et Favrot, 1984). En effet, les premiers

Figure 8 -Évolution de la profondeur de la nappe, sur le drain et à l'interdrain, en phase de forte demande climatique.

Figure 8 - Water level variation on the drain and middrain during a high-rate PET period.

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sont autorisés par les vides fissuraux et biologiques (lombrics, racines), même très modestes, existant à l'interface des blocs structuraux prismatique. Les seconds sont rendus possibles par la microporosité constatée au sein des prismes, microporo- sité également d'origine biologique (radicelles) et physique, celle-ci étant liée à l'ajustement fort des polyèdres constituant la sous-structure. La réalité des transferts convectifs peut être déduite notamment des écarts, de l'ordre de 10 à 15 mb, relevés entre tensiomètres de même profondeur (80 cm) lors des pluies, écarts s'expliquant par la localisation de ten- siomètres à la fois au centre des unités structurales prismatiques et à leurs interfaces, lesquelles constituent les zones de transferts préférentiels. Le même phénomène a été signalé par Bouma et al (1980) en sols argileux.

Pérennité de la tranchée de drainage

L'un des risques importants pouvant découler de l'irrigation souterraine en luvisol-redoxisol est la déstabilisation de la structure des matériaux de remplissage de la tranchée de drai- nage, avec diminution de la porosité, par suite de leur saturation prolongée. Les valeurs relativement élevées des indices d'instabilité structurale (tests Henin) constatées dans ces sols vont dans ce sens (log 10 Is # 1,3-1,5).

Toutefois, malgré les cycles d'arrosage opérés en 1970, 1992 puis 1993, nos observations et mesures de 1993 n'ont pas révélé d'altérations structurales et porales visibles. Des observations périodiques sont néanmoins nécessaires pour confirmer ce premier constat favorable. Trouche (1981) consta- te toutefois, en laboratoire, que malgré un tassement progressif du matériau de remplissage de la tranchée après des phases périodiques de saturation, il n'y a pas de modification significa- tive du débit du drain par rapport à une tranchée non soumise à une saturation prolongée.

Concernant le colmatage minéral interne des drains, les cycles d'irrigation souterraine ne semblent pas aggraver ce phénomène. En fait, dans la parcelle étudiée, compte tenu de la grande variabilité de l'épaisseur des dépôts constatée d'un drain à l'autre, il semble bien que le colmatage soit attribuable à la technique de pose des drains utilisée en 1970 (guidage par nivelettes), technique conduisant à une certaine irrégula- rité de la profondeur des drains. La technologie actuelle (guidage laser) limite heureusement les imperfections de pose et les éventuels risques de colmatages en luvisol- redoxisol et évite donc les inconvénients liés à ce phénomène (accroissement des pertes de charge et réduction de la sec- tion efficace).

Recharge de la nappe et dynamique racinaire.

Techniquement, l'objectif de l'irrigation à partir de drains enterrés est d'adapter la recharge de la nappe à l'abaissement progressif puis à la stabilisation du front racinaire du maïs, compte tenu de l'importance des remontées capillaires. Il s'agit

en particulier d'assurer une alimentation hydrique optimale lors de la levée puis de la floraison mâle du maïs.

En 1993, par suite des épisodes pluvieux, cet objectif a été pratiquement atteint. En effet, le système racinaire du maïs, descendu progressivement à 80 cm de profondeur a partielle- ment colonisé les horizons argilluviaux B1Tg et B2Tg et a coïncidé à la floraison avec une profondeur de nappe pas trop élevée. De même, lors du premier arrosage, le front racinaire peu profond (moins de 50 cm) a pu bénéficier néanmoins d'une alimentation hydrique suffisante, gràce à la frange capillaire importante (25-30 cm) surmontant la nappe et aux flux ascen- tionnels susjacents, révélés par l'existence d'un gradient et potentiel vertical négatif.

Cependant, l'abaissement progressif du sommet de la nappe à partir de la mi-juillet n'a pas permis une alimentation hydrique optimale. Il montre que malgré des apports d'eau continus, certaines périodes ou années très sèches, il ne sera pas possible de remonter la nappe à une hauteur compatible avec une faible profondeur d'enracinement. Cette impossibilité est ici conjoncturelle car liée au dimensionnement insuffisant de la partie du réseau étudié, lequel limite le débit d'injection d'eau à 38 m3/ha/jour.

Modes d'irrigation et rendement du maïs

Par rapport à la parcelle adjacente arrosée par aspersion, les volumes d'eau mis en jeu pour l'irrigation souterraine sont supérieurs : 1 440 m3/ha contre 1 200 m3/ha. La comparaison des rendements bruts n'est toutefois pas possible à cause d'un écart de semis de 18 jours et surtout d'une phytotoxicité acci- dentelle de désherbage.

L'analyse des composantes du rendement montre que si le nombre de grains par mètre carré, élevé, indique que l'alimen- tation en eau du maïs a été bien assurée dans la parcelle subirriguée jusqu'au seuil d'avortement des grains (200° en base 6°C post floraison femelle) intervenu le 3 août 1993, en revanche, le poids de mille grains est très en dessous de l'opti- mum de la variété DEA. Ce dernier constat traduit un déficit d'alimentation hydrique du maïs à partir de début août et un écart important du régime d'alimentation en eau entre les phases floraison et remplissage des grains. Alors que le poten- tiel de rendement se situait à la floraison à 110 qx/ha, l'alimentation hydrique incomplète en fin de cycle, due au débit d'apport d'eau insuffisant, a limité le rendement final à 90 qx/ha.

Conception des réseaux

A l'image du réseau étudié, le dimensionnement actuel des anciens réseaux de drainage ne garantit pas une alimentation hydrique suffisante du maïs, par irrigation souterraine, lors de périodes très sèches. Pour remédier à cela, deux modes d'ac- tion sont à envisager :

ζpour les réseaux en place, il conviendra de réaménager les dispositifs existants, soit en installant plusieurs regards

(13)

d'alimentation en eau le long des collecteurs principaux, soit en reliant les extrémités amont des drains à de gros collecteurs de ceinture ;

ζ pour de nouveaux réseaux, il faudra prévoir dès la conception des regards d'alimentation et un dimensionnement des collecteurs adaptés à la double fonction d'irrigation et de drainage. En l'absence de démonstration contraire, il apparaît prudent de recourir à un remblai poreux (graviers) au dessus des drains.

Concernant le diamètre extérieur de ces derniers, certains auteurs préconisent des valeurs plus élevées que 50 mm, pour réduire les pertes de charge qu'ils attribuent à une superficie linéaire insuffisante des perforations, augmentant la résistance de sortie de l'eau des drains (Bounival et al,1987 ; Mohamad et Skaggs, 1984). La rapide remontée de l'eau de saturation dans les tranchées de drainage après apport d'eau nous per- met de penser qu'en luvisol redoxisol le diamètre habituel (50 mm) sera suffisant.

CONCLUSION

Dans les luvisols redoxisols de Bresse, l'irrigation souterrai- ne à l'aide de réseaux de drains posés à la draineuse trancheuse est possible techniquement. Elle repose sur la recharge d'une nappe souterraine associée à un aquifère sableux et bénéficie de la structure favorable des horizons argilluviaux qui autorisent à la fois une ascension rapide de la nappe et des remontées capillaires.

Moyennant des adaptations des réseaux en place ou des nouveaux, ce mode d'arrosage peut s'avérer intéressant au plan régional. Par rapport à l'irrigation par aspersion, il com- pense des exigences en eau sensiblement plus élevées par de moindres frais d'investissement (le drainage est de toutes façons nécessaire) et de main d'œuvre. En outre, la portance des sols pour les interventions culturales n'est pas affectée par les cycles d'arrosage. Enfin, cette technique limite les risques de pollution des nappes par entraînement des nitrates et pesti- cides (Kalita et al,1992).

Néanmoins, en vue d'une meilleure conception et d'une conduite optimale de réseaux à la double fonction d'irriga- tion et de drainage, des travaux expérimentaux sont à poursuivre lors des années qui viennent, dans aux moins trois directions :

ζla réalisation d'essais au champ avec des réseaux posés à la draineuse trancheuse garantissant des apports d'eau suffi- sants pour remonter la nappe à une profondeur adaptée à l'alimentation en eau des racines et - si nécessaire - jusque vers la surface du sol,

ζla réalisation d'essais au champ avec des réseaux posés à la draineuse sous-soleuse et sans remblai poreux, technique la plus répandue actuellement,

ζet l'adaptation de modèles tels que SIDRA (Lessaffre, 1988 ; Zimmer, 1992), Drainmod (Tang et Skaggs, 1977 ; Skaggs, 1991) et Swadre (Van Bakel, 1973), facilitant une généralisation de la conception et de la mise en œuvre de cette technique dans d'autres régions françaises.

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R

EVUES

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CIENCE DU

S

OL

Revue scientifique disponible de 1952 à 1993.

Elle comporte 300 à 400 pages par an. Un index est présenté tous les ans dans le quatrième numéro.

A cessé de paraître fin 1993. Disponible.

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ETTRE DE

L’A

SSOCIATION

Publiée quatre fois par an, ce journal annonce les nouvelles de l’association, les réunions nationales et internationales ; il donne des critiques d’ouvrages, de thèses, de la documentation, etc.

La Lettre est envoyée à chaque adhérent de l’association : elle accompagne l’adhésion.

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TUDE ET

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ESTION DES

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Nouvelle revue trimestrielle, francophone traitant de la connaissance et de l’usage des sols ; création en juillet 1994.

Rédacteur en chef : M. Jamagne.

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Le Comité Éditorial est composée de trente membres de France et de pays francophones.

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UVRAGES

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IVRE

J

UBILAIRE

(1984) :

point sur les acquis récents en matière de science du sol et de pédologie.

F

ONCTIONNEMENT HYDRIQUE ET COMPORTEMENT DU SOL

(1984).

P

ODZOLS ET PODZOLIZATION

,

par D. Righi et A. Chauvel ; ouvrage publié en coédition par l’AFES et l’INRA, avec le concours du CNRS, de l’ORSTOM, et de la région Poitou-Charentes.

M

ICROMORPHOLOGIE DES SOLS

/S

OIL MICROMORPHOGY par N. Fédoroff, L.M. Bresson, Marie Agnès Courty ; publié par l’AFES avec le concours du CNRS, de l’INAPG, de l’INRA, du Ministère de l’Environnement et de l’ORSTOM.

C

ARTE MONDIALE DES SOLS ET SA LÉGENDE

,

présentée sous forme de deux diapositives.

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ÉFÉRENTIEL

P

ÉDOLOGIQUE

:

principaux sols d’Europe, édition 1992. Ouvrage collectif publié par l’AFES et l’INRA.

P UBLICATIONS ET DOCUMENTS PUBLIÉS PAR L ’AFES

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