• Aucun résultat trouvé

Le lac de Barberine réservoir d'énergie et bassin de pêche

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Le lac de Barberine réservoir d'énergie et bassin de pêche"

Copied!
5
0
0

Texte intégral

(1)

LE LAC DE BARBERINE RESERVOIR D'ENERGIE ET BASSIN DE PECHE

par Urbain Pignat

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, chers Murithiens, Permettez-moi, puisque nous sommes réunis aujourd'hui dans cette belle vallée du Trient, de vous entretenir pendant quelques instants du lac de Barberine comme réservoir d'énergie et comme bassin de pêche.

Le premier projet d'utilisation des eaux de Barberine dans un but industriel a été établi il y a une cinquantaine d'années déjà, par M.

Boucher, ingénieur à Prilly-Lausanne, qui avait auparavant, en véritable spécialiste, étudié et mis à exécution de nombreux autres projets, en particulier ceux du lac de Tanay et du lac de Fully, dont les chutes respectives de 920 et de 1650 mètres ont été pendant longtemps les plus hautes du monde. D'après ce premier projet, il s'agissait de créer sur l'emplacement d'un ancien lac naturel qui recouvrait autrefois le plateau

d'Emosson, un bassin d'accumulation artificiel, en érigeant à l'emplace- ment le plus resserré constitué par le verrou du Bouqui, un barrage massif qui aurait enjambé la frontière franco-suisse. Les complications qui surgirent de cette situation et les prétentions exagérées de nos voisins français firent malheureusement échouer ce projet. Actuellement, un nouveau projet, le Grand Emosson, établi par M. l'ingénieur Albert Maret à qui l'on doit déjà le projet du barrage du Mauvoisin, est sur le point de se réaliser avec la participation de l'Electricité de France. On parle même d'une mise en chantier prochaine des travaux.

Revenons maintenant à Barberine où les Chemins de fer fédéraux ont fait construire de 1919 à 1926, parallèlement à l'électrification de leur réseau, le barrage actuel. Ce barrage-poids mesure 78 m. de hauteur, 58 m. 60 d'épaisseur à la base et 3 m. 20 au couronnement. Sa longueur est de 285 m. et son volume de béton 206 000 m3. Son poids est évalué à près de 500 000 tonnes. Pour le transport des 50 000 tonnes de ciment utilisé pour sa construction, l'entreprise a établi un téléférique allant de Châtelard-village jusqu'au barrage. A côté de cela on a dû aménager un chemin d'accès et percer de nombreux tunnels au-dessus des gorges

(2)

— 26 —

d u B o u q u i . Ce c h e m i n long de 3 k m . 500 a l l a n t de la station s u p é r i e u r e d u funiculaire j u s q u ' a u p i e d d u b a r r a g e , a été é q u i p é d ' u n e voie é t r o i t e sur l a q u e l l e circulaient des t r a i n s de m a t é r i a u x m u s p a r de p e t i t e s locomotives à v a p e u r et des t r a c t e u r s à essence. P o u r loger les 500 ouvriers et les installations de l ' e n t r e p r i s e il a fallu construire sur le p l a t e a u d'Emosson u n e vingtaine d e b a r a q u e m e n t s .

Les t r a v a u x é t a i e n t suspendus p e n d a n t l'hiver q u i est très r u d e dans cette région. C h a q u e p r i n t e m p s , avant de r e p r e n d r e les t r a v a u x , il fallait d ' a b o r d d é b l a y e r u n e é n o r m e masse de neige a l l a n t de 50 000 à 100 000 m3 suivant les années. E n ce m o m e n t on n e disposait p a s encore de moyens m é c a n i q u e s tels qu'ils existent a u j o u r d ' h u i . Aussi, la construction du b a r r a g e de B a r b e r i n e , l e p r e m i e r d u genre et de cette i m p o r t a n c e en Suisse, a, vous le pensez b i e n , r e n c o n t r é d'énormes difficultés. Ce b a r r a g e massif a n c r é dans le r o c h e r et érigé en a r c de cercle de 350 m . de r a y o n , a é t é revêtu sur son p a r e m e n t aval de moellons en pierres taillées qui l u i d o n n e u n e impression de force et de g r a n d e u r . L e revête- m e n t du p a r e m e n t a m o n t , côté lac, n ' a é t é e n t r e p r i s q u e b e a u c o u p p l u s t a r d et dans sa p a r t i e s u p é r i e u r e seulement. M a l g r é les difficultés ren- contrées, les t r a v a u x de construction d u b a r r a g e ont été m e n é s à b o n n e fin p a r l ' e n t r e p r i s e M a r t i n et B a r a t e l l i de L a u s a n n e , sous la surveillance p e r m a n e n t e des ingénieurs et techniciens attachés à la D i r e c t i o n géné- r a l e des C F F à B e r n e et a y a n t à l e u r t ê t e M. l ' i n g é n i e u r B o l o m e y de L a u s a n n e .

Le bassin d ' a c c u m u l a t i o n a u n e c o n t e n a n c e de 40 millions de m3

d o n t 39 millions de v o l u m e utilisable. Le lac artificiel ainsi formé a u n e l o n g u e u r de 2700 m. u n e l a r g e u r m a x i m u m de 800 m . et u n e p r o f o n d e u r m o y e n n e de 30 m . Sa p l u s g r a n d e p r o f o n d e u r est de 69 m . près d u bar- rage. Le lac a c o m m e n c é à se r e m p l i r en 1922 a p r è s avoir p r o c é d é au b é t o n n a g e d e la galerie de vidange et à la pose des vannes de fond. Les e a u x d u lac ont a t t e i n t p o u r la p r e m i è r e fois la cote m a x i m u m 1888,80 q u i est celle du déversoir, à fin s e p t e m b r e de l ' a n n é e 1926. On a com- m e n c é à soutirer l'eau d u lac en d é c e m b r e 1923 lors de la mise en service de l'usine de C h â t e l a r d .

Le bassin d ' a c c u m u l a t i o n est a l i m e n t é p a r la fonte des neiges et des glaciers e n v i r o n n a n t s ainsi q u e p a r les p r é c i p i t a t i o n s recueillies sur toute l ' é t e n d u e d u bassin de r é c e p t i o n q u i m e s u r e environ 32 k m2 d e p u i s q u e les eaux de la p a r t i e s u p é r i e u r e du vallon d ' E m a n e y ont été captées et amenées au lac à travers u n e galerie creusée dans le r o c h e r sur u n e l o n g u e u r de 3800 m. et cela depuis la fin de l ' a n n é e 1950. Afin de pou-

(3)

voir emmagasiner sans perte ce complément d'eau, deux solutions avaient été envisagées. L'exhaussement du barrage de Barberine ou la création d'un nouveau bassin d'accumulation au Vieux-Emosson. C'est finalement à cette deuxième solution qu'on s'est rallié et on a entrepris de 1952 à 1955 la construction d'un nouveau barrage au sommet de la gorge du Nant de Drance, à 2200 m. d'altitude, Ce barrage du type poids-voûte a été construit par l'entreprise Heller & Cie à Berne. Son volume de béton est de 62 500 m3, sa longueur de 170 m., sa hauteur de 50 m. et son épaisseur maximum de 42,5 m. Pour amener les matériaux, les machines de chantier et le ciment sur place, une route asphaltée de 2 m. 20 de large a été construite depuis Emosson en continuation de celle qui part de la station supérieure du funiculaire.

La contenace du bassin d'accumulation du Vieux-Emosson est de 11 millions de m3 qui peuvent venir s'ajouter aux 39 millions du lac de Barberine par l'intermédiaire de l'ancienne galerie du Nant de Drance, ce qui porte le total de l'accumulation à 50 muions de m'.

Disons pour terminer, qu'un m ' d'eau de Barberine produit 1,53 kWh dans l'usine de Châtelard qui constitue le premier palier avec une chute moyenne de 747 m. et 1,30 kWh dans l'usine de Vernayaz qui constitue le deuxième palier avec une chute moyenne de 644 m., soit au total 2,83 kWh. A part l'eau de Barberine, l'usine de Vernayaz utilise encore les eaux de l'Eau-Noire et du Trient ainsi que celles de plusieurs torrents captés le long de la vallée et dont le plus important est le Triège, dans les gorges duquel se trouve le déversoir de la galerie d'amenée et du bassin de compensation des Marécottes.

Et maintenant, si vous le voulez bien, entrons dans le domaine des poissons.

Permettez-moi, tout d'abord, de rendre hommage à la mémoire d'un fidèle et distingué Murithien que nous regrettons tous, je veux parler du Dr Charles Linder, ancien professeur, décédé le 24 janvier 1955 à Lausanne. De nature modeste et d'un abord agréable, cet homme de sciences et de bien s'est acquis l'estime de tous ceux qui ont eu le bonheur de l'approcher. Les pêcheurs de Barberine en particulier, ont largement bénéficié de son savoir et de son inépuisable bonté.

Aussi, en témoignage de reconnaissance pour ses travaux de recher- ches sur le plancton du lac qu'il avait entrepris dès 1927 et poursuivis régulièrement chaque année jusqu'en 1946, la Société des pêcheurs de Barberine lui avait décerné en 1937v le titre de membre d'honneur.

Le résultat de ses travaux ayant été publiés dans les Bulletins de la Murithienne, je n'y reviendrai pas. Je dirai seulement que l'intro-

(4)

duction de poissons dans un lac nouvellement créé, doit être précédée d'une étude systématique des organismes indispensables à l'alimen- tation de ces poissons. C'est à cette étude que M. Linder s'était voué, d'abord à ses frais, et ensuite avec l'appui de la Commission d'hydro- biologie de la Société suisse des sciences naturelles.

Les premiers poissons ont été introduits dans le lac de Barberine le 7 septembre 1929 à la suite des démarches de M. Linder et en plein accord avec M. le conseiller d'Etat Maurice Troillet, duquel dépen- dait alors le Service valaisan de la pêche. Ce premier contingent de poissons comprenit 1626 estivaux de truites canadiennes (Salmo namaycush) appelées aussi Cristivomer. Leur immersion a été faite avec toutes les précautions d'usage par M. Vouga, inspecteur général de la pêche du canton de Neuchâtel, en présence de M. Linder et d'un délégué de l'Etat du Valais. Ces jeunes poissons issus d'oeufs embryonnés importés du Canada et élevés à la pisciculture du Per- voux dans le canton de Neuchâtel, se sont très bien acclimatés aux eaux froides du lac de Barberine mais, en raison de la pauvreté de la nourriture renfermée dans ce lac neuf, ils n'ont pas eu la possibi- lité de se développer aussi rapidement que leurs congénères intro- duits en 1922 déjà dans le lac de Fully, lac naturel riche en nourriture.

On attendit donc en haut lieu que les poissons de Barberine aient atteint un développement suffisant, pour livrer le lac aux pêcheurs.

C'est le 12 août 1936 que l'Etat du Valais afferma le droit de pêche à une société de pêcheurs amateurs nouvellement fondée à Finhaut avec un effectif de 26 membres, sous la présidence de M. Alphonse Lonfat, le distingué président de la municipalité, que je suis heureux de saluer ici. La pêche fut ouverte à Barberine le 2 septembre 1936, à l'aube d'une magnifique journée. On dénombra à la fin de celle-ci une bonne centaine de truites, d'un poids moyen de 300 grammes, qu'une quinzaine de pêcheurs eurent la bonne chance de capturer. Le lendemain, ce fut une autre histoire. Dérangées dans leur quiétude, les truites refusèrent résolument toutes les amorces. Ce n'est qu'après quelques jours d'accal- înie que les « belles de l'onde » se laissèrent à nouveau tenter.

Par la suite, la pêche fut ouverte régulièrement chaque année de juin à septembre avec plus ou moins de succès, car on enregistra des résultats très variables d'une année à l'autre.

Pour satisfaire aux exigences du contrat d'affermage et pour combler les vides laissés par les pêcheurs, la société des pêcheurs de Barberine, s'interdisant tout profit, sacrifia annuellement toutes ses ressources pour assurer le repeuplement rationnel du lac. Dans l'impos-

(5)

sibilité de se p r o c u r e r des j e u n e s Cristivomers, elle p o r t a son choix p e n d a n t les p r e m i è r e s années, sur les truitelles arc-en-ciel élevées à la pisciculture de B r u n n e n . A p a r t i r de 1941, elle i n t r o d u i s i t , en forçant m ê m e le n o m b r e imposé, des truitelles fario de r a c e indigène. Alors q u e la t r u i t e arc-en-ciel disparaissait t o t a l e m e n t et on n e sait c o m m e n t au bout de quelques années en laissant u n é n o r m e déchet, la truite fario s'acclimata si bien à B a r b e r i n e q u ' o n décida de c o n t i n u e r à r e p e u p l e r le lac avec des truites de cette espèce, sauf en 1949 et en 1955 où il fut de n o u v e a u possible d ' o b t e n i r des Cristivomers. E n o u t r e en 1945, on introduisit en s u p p l é m e n t et à t i t r e d'essai, u n millier d'estivaux d'om- bles-chevaliers. Cette espèce de poissons a b i e n proliféré, sans d o n n e r toutefois les résultats q u ' o n a t t e n d a i t .

I n c o n t e s t a b l e m e n t , c'est l'espèce Cristivomer q u i convient le m i e u x aux lacs de m o n t a g n e dans lesquels elle p a r v i e n t à se r e p r o d u i r e avec u n bon r e n d e m e n t et dans les conditions les plus avantageuses. E t a n t d o n n é qu'elle fraye au d é b u t de l ' h i v e r à u n e c e r t a i n e p r o f o n d e u r d u lac, les baisses successives de niveau qui se p r o d u i s e n t à cette é p o q u e , sont sans danger p o u r la m a t u r a t i o n des œufs déposés p a r cette espèce de poissons.

M a l h e u r e u s e m e n t , il n ' e n est pas de m ê m e p o u r les t r u i t e s fario qui déposent leurs œufs à u n e très faible p r o f o n d e u r dans les b o r d s d u lac, les exposant ainsi à u n e destruction c e r t a i n e p a r assèchement.

Le lac de B a r b e r i n e r e n f e r m e encore des vairons, v a r i é t é de poissons blancs i n t r o d u i t e en 1938 déjà, p o u r servir de n o u r r i t u r e a u x truites.

Si l'on considère q u e les p ê c h e u r s n ' o n t réussi à r é c u p é r e r j u s q u ' à m a i n t e n a n t que le 16 % des poissons mis à l'eau, on est obligé de recon- n a î t r e que la p ê c h e au lac de B a r b e r i n e n'est p a r r e n t a b l e et q u ' e l l e doit ê t r e p r a t i q u é e dans u n b u t essentiellement sportif.

E l l e constitue m a l g r é t o u t u n a t t r a i t de p l u s dans cette b e l l e région de la vallée d u T r i e n t fréquentée p a r de n o m b r e u x touristes et amis de la n a t u r e .

Références

Documents relatifs

avec dérive mais sans limon, entre les étables et Tanneverge : Daphnia assez nombreuses, adultes ovigè- res et embiyonnées, jeunes ; un Nauplius ; Synchaeta ; Polyarthra avec œufs

E n août, la pêche n'a plus « donné » et pendant notre séjour du 10 au 17, pendant lequel l'absence de poissons mouchant en surface a été manifeste, il n'a été pris qu'un

tatum (Stein) vivant, avec kystes verts ; le fond littoral ayant été accidentellement touché au retour, il en résulte d u détritus avec les Euchlanis ? vus la veille, mais cette

pour le libre parcours sur le funiculaire, la Société vaudoise des Sciences naturelles pour le prêt du microscope de voyage, les tenanciers de la cabane-restaurant pour leur

Dans le filet, les fins débris minéraux l'emportent sur le plancton pauvre : absence de Daphnies pourtant présentes dans les autres récoltes ; quelques Polyarthra, une

Cette année nous avons mis à l'eau 101 truitelles Arc-en-ciel en provenance de la pisciculture cantonale du Bouveret, ce qui porte à 2185 le nombre de truites Arc-en-ciel

Matière abon- dante mais fine et amorphe, presque sans insectes (leurs débris fins et membraneux, un Diptère de 1 cm.) étuis membraneux et gneissiques, écrasés, de

Nous avions, au filet fin et dès 1929, récolté quelques Daphnia pulex isolées (tableau dans fasc. LV, années 1937-38), mais il est inté- ressant de voir qu'une truite de 25 cm.,