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Hors des lignes directrices, point de salut! Vraiment?

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Vol 56: june • juin 2010 Canadian Family PhysicianLe Médecin de famille canadien

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Hors des lignes directrices, point de salut! Vraiment?

Roger Ladouceur

MD MSc CCMF FCMF, RÉDACTEUR SCIENTIFIQUE ADJOINT

Éditorial

This article is also in English on page 510.

U

n médecin de famille, peut-il pratiquer une bonne médecine sans suivre les lignes directrices?

Évidemment, vous seriez en droit de rétorquer,

«Qu’entend-on par bonne médecine?» Définissons donc, pour les fins de l’exercice, celle promue par les quatre principes de la médecin familiale, soit: le médecin de famille est un clinicien compétent; la médecine familiale est une disci- pline communautaire; le médecin de famille est une res- source pour une population définie de patients; la relation médecin-patient constitue l’essence du rôle du médecin de famille1; lesquels principes peuvent être amendés des com- pétences transversales contemporaines.

La question peut alors sembler triviale, voire saugrenue, tellement les lignes directrices sont répandues et couramment employées. Pourtant, elle mérite d’être posée comme l’ont fait les docteurs David Gass et Ross Upshur qui en débattent en pages 522-3. Le premier opine qu’un médecin de famille peut difficilement exercer une bonne médecine sans elles. Il évoque l’augmentation phénoménale des connaissances médicales, la difficulté voire l’impossibilité pour quiconque de revoir et éval- uer toutes les recherches publiées, tout en tablant sur le fait que les recommandations sont rigoureuses et crédibles. Le second pense le contraire en alléguant que les lignes direc- trices n’englobent pas l’ensemble des champs d’exercice de la médecine familiale, que les données empiriques évaluant l’utilisation de celles-ci sont non convaincantes et finalement, que la définition même de bonnes lignes directrices soulève de nombreux problèmes conceptuels.

Accorde-t-on trop d’importance aux lignes directrices?

Sans vouloir prendre partie dans ce débat, il n’en demeure pas moins qu’il est vrai qu’on accorde aujourd’hui beau- coup d’importance et de crédibilité aux lignes directrices.

Peut-être même trop! Il suffit d’imaginer un désaccord entre deux praticiens sur des soins à prodiguer pour que l’un d’eux avance l’argument massue «En tout cas, telle ligne directrice le dit» pour qu’aussitôt le débat s’éteigne. L’autre n’a alors d’autre choix que trouver de solides arguments pour défendre sa position. Sinon, il a perdu l’échange et est considéré comme ayant tort jusqu’à preuve du contraire;

tout comme si les lignes directrices constituaient la seule et unique vérité, la vérité «absolue». Gare au «pôvre» médecin qui ne les suit pas! Il devra répondre de ses actes et justifier sa conduite, particulièrement si les choses tournent mal et qu’on questionne sa pratique. Face à ses collègues, face aux comités de l’acte, face aux instances gouvernementales ou professionnelles. Et ultimement, face à ses patients.

Pourtant, comme le souligne Upshur, les lignes directri- ces ne sont pas sans reproches. On conviendra avec lui qu’il

y en trop; si on tape « clinical practice guidelines » sur Google, on obtient 3 000 000 entrées. Quelle belle démonstration par l’absurde! De fait, il y a davantage de sujets reliés aux lig- nes directrices que de maladies elles-mêmes. Il y en aurait cent fois, voire mille fois moins, qu’elles seraient encore trop nombreuses. Pas surprenant que dans l’assortiment, il y en ait de bonnes et des moins bonnes. C’est un secret de polichinelle que les lignes directrices représentent sou- vent de véritables mines d’or pour l’industrie pharmaceu- tique qui en fait largement la promotion. Puis, les lignes directrices changent trop souvent. Le temps d’assimiler les premières que déjà une nouvelle version voit le jour. Aussi, il n’est pas rare que les recommandations sur un même sujet diffèrent les unes des autres. Il n’y a qu’à observer les recommandations sur le dépistage du cancer de la prostate où on y trouve des avis contradictoires.

Des recommandations basées sur les données probantes

D’ailleurs, le plus acerbe reproche qu’on peut formuler à l’égard des lignes directrices est qu’elles ne sont peut- être pas autant fondées sur des données probantes qu’on l’a toujours prétendu. Récemment Tricoci et coll2 procé- daient à une revue systématique de toutes les lignes directrices émises par the American College of Cardiology (ACC) et the American Heart Association (AHA), de 1984 à 2008—on conviendra que ce ne sont pas des organ- ismes de broche à foin!—avec l’intention d’évaluer la rigueur scientifique. Ils ont découvert que dans les 16 lignes directrices rapportant un niveau d’évidence sci- entifique, seulement 245 des 1305 recommendations de niveau I étaient supportées par des évidences A, soit 19%

en médiane. Les auteurs concluaient que les recomman- dations émises par l’ACC/AHA étaient basées sur des évidences scientifiques de bas niveau ou des opinions d’experts. Tout un constat!

Finalement, l’autre irritant avec les lignes directrices est certainement le vocabulaire utilisé, universellement basé sur des «recommandations». Ainsi, plutôt que d’énoncer des recommandations bidons faisant appel à un charabia épidé- miologique lorsqu’on ne connaît pas la réponse, serait-il pos- sible simplement de dire «nous ne le savons pas»?

Tout compte fait, exercer la médecine familiale est cer- tainement beaucoup plus que de connaître et d’appliquer un ensemble de lignes directrices.

intérêts concurrents Aucun déclaré References

1. Le Collège des médecins de famille du Canada. Les quatre principes de la médecine familiale. Mississauga, ON: Le Collège des médecins de famille du Canada; 2006. Accessible à: www.cfpc.ca/French/cfpc/about%20us/

principles/default.asp?s=1. Accédé le 5 mai 2010.

2. Tricoci P, Allen JM, Kramer JM, Califfe RM, Smith SC Jr. Scientific evidence underlying the ACC/AHA clinical practice guidelines. JAMA 2009;301(8):831-41.

Références

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