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LA LUTTE CONTRE LE FROID

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Academic year: 2022

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LA LUTTE CONTRE LE FROID

Le froid intense de ces temps derniers me rappelle un autre hiver où, dans une tranchée de la Woëvre, je soignais les pieds gelés des soldats de mon bataillon, tandis que méde- cins et infirmiers luttaient eux-mêmes comme ils pouvaient contre les rigueurs de la température. Aussi suis-je incité, dans une heure de détente, à rassembler quelques notes de physio- logie sur les moyens dont dispose l'organisme pour réagir contre un fort abaissement thermique de l'atmosphère.

Chacun sait que les oiseaux et que les mammifères pos- sèdent une thermorégulation toujours en activité, grâce à laquelle leur température centrale reste constante ; pour cette raison, on les appelle homéothermes. Alors que le froid extérieur est vif et que les nappes d'eau sont gelées, la tempé- rature de l'homme reste fixée à 37°. Quels sont donc les moyens que met en jeu l'homéotherme pour lutter contre le froid ? Deux régulations, l'une physique, l'autre chimique, seront successivement envisagées et analysées.

La régulation physique vise la déperdition de chaleur ; lors du froid, cette déperdition est diminuée par suite de l'in- fluence des téguments qui vont agir autant par leur consti- tution que par l'état de leur circulation.

L'état des téguments joue puissamment sur la déperdition de chaleur des homéothermes. Une excursion dans la série animale nous montre que la fourrure et le plumage ont un pouvoir protecteur considérable, surtout à cause de la masse d'air qui se trouve ainsi immobilisée autour du corps. Le rôle efficace de la fourrure est bien mis en évidence par l'obser- vation des animaux tondus ; après la tonte, on enregistre, malgré une énorme élévation des combustions internes,

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l'établissement d'une hypothermie capable d'entraîner la mort de l'animal. Des travaux très précis ont montré que le pouvoir protecteur de la fourrure ou du plumage est en proportion directe de son épaisseur. Ce pouvoir s'amoindrit dès que la quantité d'air emprisonnée s'affaiblit elle-même ; il en est ainsi lorsque les téguments sont mouillés, et l'on sait que la fourrure de certains mammifères, dits aquatiques, tels que la loutre, et le plumage de certains oiseaux plon- geurs, comme le canard, sont imperméables à l'eau. Rappe- lons à ce sujet une expérience démonstrative de Paul Portier et Anne Raffy sur le « bain du canard ». On ajoute à l'eau de ce bain de la bile de bœuf, qui abaisse la tension superficielle de l'eau. Celle-ci envahit alors le plumage et chasse l'air emmagasiné dans les plumes": l'oiseau sort ruisselant, avec un abaissement de sa température centrale, tandis que, norma- lement, le canard quitte l'étang sans être mouillé et ne subit pas de modification thermique du fait de son bain.

Pour lutter contre la déperdition de chaleur, l'homéo- therme peut encore modifier sa circulation périphérique ; ses pertes de chaleur se trouvent diminuées par suite d'une vaso-constriction cutanée engendrant une anémie périphérique. Le phénomène se produit par processus réflexe : les nerfs de la peau, « gardiens de l'organisme contre l'in- vasion du froid extérieur », sont excités par l'abaissement de la température et transmettent l'incitation aux centres vaso- moteurs, qui commandent une vaso-constriction au niveau des téguments. Celle-ci n'existe pas seulement au niveau de la région exposée au froid, mais encore à distance, et un sujet, dont on refroidit une main, présente, au niveau de l'autre main, un resserrement des vaisseaux et un refroi- dissement réflexes.

Dans l'étude des moyens physiques utilisés par l'orga- nisme pour maintenir sa température centrale, nous citerons le résultat des travaux poursuivis en Amérique par H. Barbour et ses collaborateurs, relatifs au problème de la concen- tration du sang au cours de la lutte contre le froid. Ils démontrent l'importance des échanges d'eau qui se font entre le sang et les tissus dans la régulation de la température centrale. Quand on refroidit un homéotherme, on enregistre, au moment où les échanges augmentent, une concentration

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LA LUTTE CONTRE LE FKOID. 741 du sang, mise en évidence par la détermination du poids sec du sang et par les numérations globulaires : l'eau qui disparaît se fixe au niveau de la peau refroidie, dans le tissu cellu- laire sous-cutané et dans les muscles. Les tissus profonds se trouvent, de ce fait, isolés du milieu ambiant par une couche liquide réalisant un matelas protecteur. Soulignons que L. Lapicque et A. Mayer, que nous-même avec H. Cardot, avons eu l'occasion de noter la forte polyglobulie de l'animal refroidi.

Mais en même temps qu'il met un frein à la déper- dition de chaleur, l'organisme qui lutte contre le refroi- dissement augmente la production de celle-ci ; la régula- tion physique se double d'une régulation chimique. Le froid, chez l'homéotherme, provoque une augmentation compensatrice de la thermogénèse. Dans ses travaux sur la respiration, Lavoisier, déjà, avait attiré l'attention sur l'élévation de la consommation d'air vital sous l'influence du froid. Les travaux ultérieurs ont précisé le siège de ces combustions exagérées. Elles se produisent au niveau des muscles, dont la réponse au froid aboutit à un état phy- siologique particulier, le frisson.

Bien étudié par Charles Richet, le frisson thermique est aisément analysé sur le chien ; on en reconnaît deux variétés : le frisson réflexe, provoqué par l'action du froid sur les nerfs sensibles et qui se déclenche en dehors de toute modifica- tion de la température interne ; le frisson central, dû à un abaissement de la température du corps (33° ou 34°), qui s'observe chez le chien anesthésié et qui s'est refroidi. Tout se passe comme si l'organisme, menacé par le froid, avait deux moyens, deux tactiques de résistance : la première est repré- sentée par le frisson réflexe ; la seconde, qui intervient en cas de fléchissement de la première, est réalisée par le frisson central.

D'une façon générale, le frisson touche surtout les muscles extenseurs et les muscles inspirateurs. L'observation montre qu'il est d'abord intermittent, se produisant au moment de l'inspiration, disparaissant à l'expiration ; ensuite, il peut devenir continu, mais avec une amplitude plus considé- rable à l'inspiration qu'à l'expiration. Chez l'homme, il est bien établi que les muscles masticateurs sont souvent les premiers à intervenir : quand on a froid, on tremble, et on

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sait alors la précocité et l'intensité du claquement des dents.

Voyons maintenant les conditions qui font varier l'impor- tance et l'efficacité de cette réaction de défense.

Pour que le frisson s'installe, il faut que la respiration se fasse librement. On a montré que, si la respiration est gênée chez un chien qui frissonne, le tremblement s'arrête aussitôt. Pour que le frisson apparaisse chez un chien anes- thésié, il ne faut pas que l'anesthésie soit trop poussée ; sinon la température baisse progressivement et aucune réaction ne se produit. L'homéotherme trop anesthésié se comporte comme un animal à sang froid ; soumis à un refroidissement, il va « faire » de l'hypothermie, et cette hypo- thermie serait mortelle si l'on ne réchauffait pas l'organisme artificiellement. Cette donnée est primordiale : l'homme anesthésié a besoin d'avoir chaud.

Envisagé chez le nouveau-né, le frisson est absent durant les premiers jours de la vie et, quand il apparaît, il est inefficace pour lutter avec succès contre un refroidissement.

Il nous a été donné de voir que, apparaissant vers le quatrième jour, le frisson n'est pas suffisamment intense pour lutter contre l'hypothermie durant les quatre premières semaines de la vie. Enfin, la saignée diminue l'intensité du frisson, et le blessé qui a saigné doit être réchauffé artificiellement, car il est dans de très mauvaises conditions biologiques pour se réchauffer lui-même par le frisson.

La réaction musculaire, qui est à l'origine du frisson, pro- duit un réchauffement rapide ; elle engendre une augmenta- tion parfois considérable des échanges ; mais, à côté de cette

« thermogénèse de couverture », il faut, comme l'a démontré André Mayer, reconnaître encore une thermogénèse profonde dont le seul jeu permet à l'organisme de rétablir dans l'immo- bilité une température centrale effondrée ; cette trfermo- génèse profonde correspond à un réchauffement plus long, mais continu.

A l'heure où les problèmes des glandes à sécrétion interne retiennent l'activité de tant de chercheurs, il importe de savoir si la thermorégulation n'appelle pas le secours de l'appareil endocrinien, et nous retiendrons ici la part que prennent dans cette lutte le foie, les glandes surrénales et le, corps thyroïde.

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L A L U T T E GUINTKfc L K F R O I D . 743 Des recherches, les unes anciennes, d'autres récentes, ont démontré le rôle du foie dans le réchauffement de l'organisme précédemment soumis à l'épreuve du bain froid. Quelle est la nature de cette réaction hépatique ? On sait bien que le glycogène du foie diminue, et on a décrit, parallèlement, une élévation du glucose dans le sang sous l'influence du froid.

D'autre part, les méthodes biochimiques et les examens microscopiques (poursuivis par F. Rathery) montrent des variations très précises du tissu hépatique sous l'effet du refroidissement. L'étude des mammifères hibernants nous fournit, dans le même sens, des renseignements utiles. La mar- motte, on le sait, tombe, en hiver, dans un état de torpeur qui s'installe au-dessous de 10° : on note alors une hypo- thermie centrale très accentuée. Lorsque l'animal se réveille, il se réchauffe très rapidement ; en trois ou quatre heures, sa température s'élève de 30°, et les belles études de R. Dubois ont abouti à la conclusion suivante : « Les foyers de réchauf- fement se trouvent dans la partie antérieure du corps. La réaction est dirigée par le foie, puis, secondairement, par les muscles, spécialement par ceux du thorax et de la respiration. »

Le rôle de la capsule surrénale a été bien établi par W. B. Cannon. On introduit une quantité connue d'eau froide dans l'estomac ; on met ainsi l'organisme dans la nécessité de produire une quantité de chaleur définie ; il y a une « dette de chaleur », et l'organisme y répond ; or, dans ces conditions, on constate une décharge adrénalinique dans le sang. Les expériences précises de l'auteur ont bien démontré que, si la dette de chaleur est grande, elle est habi- tuellement compensée par deux mécanismes calorigéniques : un frisson et une augmentation de la sécrétion d'adrénaline.

Mais les deux réactions pourront être dissociées et ne sont pas dépendantes l'une de l'autre.

Enfin, le rôle de la glande thyroïde a été clairement défini : on soumet des lots de rats blancs à des températures variant de — 1° à — 4° pendant dix à vingt-cinq jours, et on note, en même temps que l'hypertrophie et l'hyperplasie de cette glande, une augmentation de la hauteur des cellules épithéliales, une diminution de la substance colloïde, une augmentation de la vascularisation.

Ainsi, diverses réactions) =-- physiques et chimiques- .—

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d'une extrême délicatesse, d'une étonnante précision, répondent à l'agression du froid, et l'organisme, toujours en alerte, maintient rigoureusement fixe sa température centrale.

Dans certains cas, cependant, la thermorégulation t ne subit-elle pas de graves perturbations ? Nous l'avons vue fléchir sous l'effet de conditions internes capables d'entraver son action, de diminuer son efficacité : l'anesthcsie trop poussée, l'asphyxie partielle, la saignée, auxquelles nous ajouterons la fatigue musculaire excessive, peuvent entraîner son effondrement.

Il existe au surplus un facteur externe particulièrement redoutable, soit à l'alpiniste en temps de paix, soit à l'avia- teur déjà menacé en temps de guerre, dans leur lutte contre le froid : c'est la dépression barométrique, qui nuit à la thermo- régulation et en affaiblit les réactions. Associée au froid intense dans les vols à haute altitude, elle en accroît le danger, et l'on conçoit l'intérêt de cette question, plus actuelle que jamais. L'École de Belgrade a montré que la résistance au froid chez le rat est notablement entravée déjà par une dépression correspondant à l'altitude de 2 000 mètres ; l'animal se refroidit alors à la température ambiante de 17°, et, dans, la zone du froid, l'oxygène consommé diminue au fur et à mesure que la pression barométrique s'abaisse : ainsi, les troubles de la thermorégulation doivent-ils être comptés parmi les premiers effets de la dépression barométrique. Mais, si l'organisme est protégé contre le froid, de façon à main- tenir sa température par sa production calorifique de fond, les troubles n'apparaissent qu'aux fortes dépressions corres- pondant à environ 6 000 mètres.

Tel est, rapidement esquissé, le problème physiologique de la lutte contre le froid. Il importe d'examiner mainte- nant les moyens pratiques que l'homme peut utiliser pour combattre le froid en favorisant cette lutte par des actes de volonté. L'être humain, volontairement, par un choix de ses aliments, par des exercices musculaires, peut résister plus efficacement au froid. Abordons ces deux problèmes.

Quels sont les meilleurs aliments pour lutter contre le froid ? Il est classique de souligner la valeur calorifique des

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LA LUTTE CONTRE LE FROID. 745 matières grasses, et l'on sait que les habitants des pays froids en font une abondante consommation. On doit cependant tenir compte des récentes recherches effectuées par l'École de Belgrade sur la valeur du régime sucré dans les circonstances qui nous occupent. Des rats soumis à une température de — 4° et — 14° sont nourris uniquement soit par des protides (blanc d'oeuf et viande maigre), soit par des lipides (lard), soit par des glucides (empois d'amidon). Or, la résis- tance la plus longue s'observe incontestablement chez les animaux nourris d'hydrates de carbone.

D'autre part, le problème de l'alcool est fréquemment posé. Dans une série de recherches particulièrement précises, Ëliane Le Breton a bien montré que les animaux soumis au froid intense n'utilisent pas l'excès d'alcool qui leur est expérimentalement fourni, soit par la voie digestive avec leur ration alimentaire normale, soit par injection sous- cutanée. Enfin, une absorption exagérée de liquide nuit à l'efficacité de la thermorégulation. Ch. Kayser a prouvé qu'en augmentant la dilution du sang on met l'organisme dans l'impossibilité de lutter contre le froid ; ses échanges se trouveront peu modifiés si la température extérieure s'abaisse.

Le problème musculaire présente un intérêt qu'on ne saurait négliger et il est d'usage de répéter qu'il n'y a pas de meilleur moyen de se réchauffer que l'exercice physique ; toutefois, il importe de ne pas confondre travail musculaire et fatigue. Bien intéressante, à ce point de vue, l'expérience de Giaja, qui montre que la fatigue musculaire entraîne un défaut de résistance au froid : des rats au repos supportent une agression du froid ; des rats placés dans une cage d'écu- reuil se fatiguent et font bientôt de l'hypothermie. On sait que le froid est particulièrement pénible à l'homme lorsque la fatigue s'y ajoute ; l'exercice musculaire, capable de pro- duire une calorification intense, n'est efficace que dans une lutte de courte durée. De sorte qu'en pratique le grand problème reste la lutte contre la déperdition de chaleur.

Il est évident que l'homme civilisé protège son organisme contre la déperdition de chaleur soit par le chauffage de son habitation, soit par des vêtements appropriés. La question du vêtement est trop importante pour ne pas être abordée ici, et nous voudrions exposer rapidement les travaux déjà

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anciens de l'École de Bordeaux et les recherches plus récentes de l'École de Belgrade.

A Bordeaux, J. Bergonié avait réalisé un buste de cuivre rouge noirci extérieurement et rempli d'eau à la température voisine de 37°, rayonnant dans une chambre à la tempé- rature de 25°. On l'observe nu, puis revêtu de divers vête- ments, et on compte le temps qu'il met à se refroidir. Vêtu au maximum, dans les conditions de l'expérience, la déper- dition est dix fois moindre que s'il est nu.

En établissant une différence de 25°5 entre la température du buste et la température extérieure, on a mesuré le temps mis par le buste à se refroidir de 1° centigrade : 1° nu t ;

t' . 2° couvert de divers vêtements t', d'où le coefficient — qui permet de comparer le pouvoir isolant des divers tissus. Les chiffres obtenus ont été les suivants :

Coefficient d'utilité.

Chemise de coton cellular 1,35

Chemise de laine 1,50 Chemise de flanelle 1,75

Gilet de chasse 1,66 Veston de cuir noir doublé de flanelle, dit de chauffeur. 1,6

Veston de gros drap 1,9

Macfarlane 2,1 Pardessus d'hiver 2,50 Pelisse de fourrure en gros drap et vison d'Amérique . . 4,50

De ces chiffres, choisis entre beaucoup, on peut tirer quelques conclusions. Le veston de cuir est très médiocre pour protéger du froid au repos. Le tissu en laine des Pyrénées a un coefficient des plus élevés. Enfin, la pelisse de fourrure permet d'affronter une forte différence de température.

Plus récemment, J. Giaja et L. Markovic ont poursuivi, sur ce pouvoir protecteur du vêtement, d'intéressantes recherches. Ils ont employé des ballons de verre à long col, revêtus du vêtement à étudier, puis ont suivi la marche du refroidissement de la masse d'eau chaude contenue dans le ballon. Comme valeur comparative, on a pris le temps néces- saire à une chute de température de 5° à partir d'une tempé- rature de 30° à la température ambiante. On commence par déterminer la marche du refroidissement de la masse d'eau

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LA LUTTE CONTRE LE FROID. 747 du ballon sans revêtement, puis on mesure, dans les mêmes conditions, la vitesse de refroidissement du même ballon revêtu du tégument (peau avec poils ou plumes). Le rapport entre ces deux valeurs donne le coefficient de protec- tion. Ainsi, tandis qu'il faut 33 minutes pour que le bal- lon non revêtu se refroidisse de 5°, il en faut 53 pour le ballon revêtu d'une couverture de laine intimement appli- quée contre lui : le pouvoir protecteur de ce tissu est donc égal à — = 1,60. Les auteurs ont ainsi obtenu les valeurs 5 3

suivantes pour le pouvoir protecteur de quelques téguments : peau d'agneau, 2,66 ; peau de lièvre, 2,22 ; plumage de coq, 2,54 ; plumage de poule, 2 ; couverture de laine, 1,60.

Après avoir mesuré le pouvoir protecteur, comme il vient d'être dit, dans une atmosphère calme, on le mesure dans un violent courant d'air produit par un sèche-cheveux élec- trique. Puis on suit le refroidissement lorsque le tégument est rendu humide par de l'eau vaporisée à sa surface pour imiter la pluie ; enfin, on combine « le vent et la pluie ». E E attribuant au pouvoir protecteur du tégument sec, dans une atmosphère calme, la valeur 100, on obtient les valeurs suivantes dans les autres conditions :

Peau Peau Plumage Couverture d'agneau, de lièvre. de coq. de laine.

Calme 100 100 100 100 Vent 65 71 100 68 Pluie 74 76 97 21 Vent et pluie 62 63 97 21

Comme on le voit, la pluie et le vent ne changent presque pas le pouvoir protecteur du plumage, tandis qu'ils diminuent de 40 pour 100 environ celui des deux pelages étudiés ; leur effet sur la couverture de laine, dont le pouvoir protecteur est réduit par l'effet du vent et de la pluie à 1 /5 de sa valeur, est encore plus prononcé. Enfin, on s'est demandé si le pou- voir protecteur de la toison variait selon que le poil est placé à l'extérieur ou utilisé comme doublure à l'intérieur. Avec la peau d'agneau, on a noté que, lorsque le poil est à l'intérieur et comprimé contre le ballon, le pouvoir protecteur est plus faible que lorsque la peau est appliquée contre le ballon avec le poil à l'extérieur. Dans ce dernier cas, et en laissant une

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couche d'air entre la peau et le ballon, le pouvoir protecteur est d'environ quinze fois supérieur.

D'autre part, l'absorption d'aliments chauds n'est pas négligeable. On sait que W. B. Cannon a fait baisser la température centrale de ses animaux en leur administrant de l'eau glacée par la voie gastrique. On a montré, enfin, que l'organisme perdait une grande quantité de chaleur par la voie pulmonaire en respirant un air glacé. La respiration d'un air suffisamment réchauffé augmente considérablement la résistance au froid ambiant, et nous ne pouvons mieux faire que de mettre en lumière à ce sujet l'expérience de Giaja.

Une poule est placée dans une caisse rectangulaire à double paroi, maintenue à la température de — 50°, son cou passant à travers le couvercle, de sorte que l'animal respire un air normal à la température de 18°. Dans ces conditions, elle n'accuse qu'une hypothermie de 1° après un séjour de deux heures. Si elle rentre la tête, elle manifeste en cin- quante minutes une hypothermie de 7°.

Dans la lutte qu'il entreprend contre l'épreuve du froid, l'organisme peut être définitivement vaincu, l'agression peut être telle que son pouvoir de thermorégulation cède, mais il ne iè-le que par paliers. L'École de Belgrade a montré les réactions de cette ultime défense. A des agressions de — 30°, — 40° pour divers animaux, de — 50° chez la poule, de — 85° chez le pigeon, l'animal répond en fixant sa température centrale à un niveau inférieur, pour un temps plus ou moins prolongé. L'homéotherme n'abandonne pas d'emblée sa thermorégulation dans la lutte extrême contre le froid, mais il abaisse sa température à un autre niveau sans avoir de ce fait perdu la faculté de la régler. C'est un recul par étapes ; c'est, suivant l'expression de Lefèvre, une

« tactique de défense » ; ce n'est pas encore une rupture de la fonction régulatrice. Lorsque la limite de la résistance est dépassée, l'hypothermie est envahissante, mais cette défaite est rare, et une mise en œuvre incessante de merveilleux moyens permet à l'organisme de défendre sa température cen- trale, son foyer de vie, et de la maintenir au degré fixé, en dépit des conditions atmosphériques les plus rigoureuses.

PROFESSEUR LÉON BINET*

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