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Modélisation quantique et réactivité
Partie 2. Orbitales moléculaires
2.2. Introduction à la méthode des fragments
Objectifs du chapitre
→ Notions à connaître :
F Interaction de deux orbitales atomiques sur deux centres : Orbitales liante, antiliante, non liante.
F Interaction d’orbitales de fragments
→ Capacités exigibles :
F Reconnaître le caractère liant, antiliant, non liant d’une OM.
F Identifier la symétrie σ ou π d’une OM à partir de sa représentation.
F Justifier la dissymétrie d’une orbitale moléculaire obtenue par interaction d’OA.
F Justifier l’existence d’interactions entre orbitales de fragment en termes de recouvrement ou d’écarts d’énergie.
F Décrire l’occupation des niveaux d’un diagramme d’OM.
F Interpréter un diagramme d’OM obtenu par interaction des orbitales de deux fragments.
Ce chapitre s’intéresse à la méthode des orbitales de fragments dont le principe peut être résumé ainsi : Méthode des fragments
• But : Construire les OM d’une molécule
• Comment faire ? La molécule est découpée en fragments. Les OM sont ensuite obtenues en combinant les orbitales de ces fragments.
• Critères : Deux orbitales peuvent être combinées si o Elles sont d’énergies proches
o Elles sont non orthogonales (recouvrement non nul).
Pour illustrer cette méthode, la construction d’OM sera dans un premier temps limitée à des systèmes présentant exclusivement des interactions entre deux orbitales afin d’appliquer le principe de construction mis en place au chapitre précédent. Dans le chapitre suivant, seront envisagées des interactions à trois, voire quatre orbitales.
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1. Molécule BeH
2linéaire
1.1. Choix de la fragmentation
Le choix du mode de fragmentation de la molécule n’est pas anodin. On privilégie généralement des fragments possédant des éléments de symétrie semblables à ceux de la molécule à modéliser.
z x
y
Pour la molécule BeH2 linéaire, on privilégie une fragmentation avec un atome de béryllium et une molécule de dihydrogène H2.
Représenter l’opération de fragmentation.
1.2. Inventaire des orbitales à faire interagir
Fragment 1 : L’atome de béryllium a pour numéro atomique Z = 4.Ecrire la configuration électronique de Be à l’état fondamental. Quelles orbitales conserver pour la combinaison ?
Représenter les orbitales atomiques du béryllium à conserver pour la combinaison :
Fragment 2 : La molécule de dihydrogène (voir ch. 2.1.), modélisée par 2 OM :
• L’une liante σ (recouvrement en phase de 2 OA 1s)
• L’autre anti-liante σ* (recouvrement en opposition de phase de 2 OA 1s).
Représenter les orbitales du fragment 2 :
Energies des orbitales considérées :
Fragment Energies des orbitales Conclusion
Be E2s = - 9,4 eV
E2p = - 6,0 eV
H2 Eσ et Eσ* sont proches de – 13,6 eV z
x
y
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Combien d’OM seront construites par combinaison des OM de fragments ?
1.3. Détection des cas d’orthogonalité
L’étude des symétries des orbitales à combiner permet de détecter les cas d’orthogonalité.
Les opérations de symétrie (symétries planes et/ou rotations axiales le plus souvent) à choisir pour l’analyse des symétries doivent être communes aux deux fragments.
Quelles opérations de symétrie utiliser pour analyser les symétries des orbitales des deux fragments ?
Analyser les propriétés de symétrie des orbitales des fragments (A = anti-symétrique ; S = symétrique)
Be H2
Orbitale 2s 2px 2py 2pz σ σ*
Bilan
Quelles orbitales peut-on combiner ensemble ? z
x
y
-4- Représenter les orbitales obtenues par combinaison.
Quand on combine 2 orbitales χA et χB, il faut construire 2 OM : (χA + χB) et (χA – χB)
• Groupe « SSS » :
• Groupe « SSA » :
• Orbitales de symétries « SAS » et « ASS » :
1.4. Diagramme d’OM
Combien d’électrons doivent peupler les OM de BeH2 ?
Idées directrices pour la construction d’un diagramme :
• La combinaison de 2 orbitales de fragments fournit 2 OM : l’une est liante (recouvrement en phase), l’autre anti-liante (recouvrement en opposition de phase).
• L’OM est toujours plus développée sur l’orbitale de fragment dont elle est la plus proche en énergie.
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Construire le diagramme d’OM de BeH2 et en déduire sa configuration électronique.
1.5. Comparaison des tracés « à la main » et par ordinateur
Il est intéressant de comparer les représentations des OM utilisant les orbitales de fragments et les surfaces d’isodensité obtenues par un logiciel de modélisation. On remarquera que les OM σ sont de symétrie de révolution autour de l’axe reliant les atomes.
Liantes Anti-liantes Non liantes
σ1 σ3 nx
σ2 σ4 ny
En général, le nombre de surfaces nodales augmente avec l’énergie des OM.
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1.6. Coefficients de la combinaison linéaire
Toute OM construite s’exprime comme combinaison linéaire des orbitales de fragments.
Alors que le programme porte sur une construction « à la main » des OM, les logiciels de modélisation sont capables de calculer les coefficients des différentes orbitales des fragments dans chacune des OM construites.
Pour les OM de BeH2, ces coefficients sont donnés dans le tableau :
OA σ1 σ2 nx ny σ3 σ4
Be
2s 0,69 - - - 0,72 -
2px - - 1,00 - - -
2py - - - 1,00 - -
2pz - 0,56 - - - 0,83
H(gauche) 1sgauche 0,51 0,59 - - -0,49 -0,40
H(droite) 1sdroite 0,51 0,59 - - 0,49 0,40
Les données du tableau sont-elles en accord avec les OM construites ?
1.7. Comparaison avec le modèle de Lewis
L’indice de liaison est une grandeur introduite dans le modèle des OM pour le rapprocher de la représentation de Lewis :
Indice de liaison :
L’indice de liaison est défini comme la moitié de la différence entre le nombre d’électrons occupant des OM liantes et le nombre d’électrons occupant des OM anti- liantes.
Calculer l’indice de liaison de BeH2 et comparer avec l’information donnée par le schéma de Lewis.
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Quelle est la principale différence dans la modélisation de la liaison covalente entre le modèle des OM et celui de Lewis ?
2. Molécule H
4« plan carré »
Il peut paraître surprenant de chercher à construire le diagramme d’OM d’un édifice comme H4. Cependant, vous découvrirez plus tard que H4 peut constituer un fragment intéressant pour l’obtention des OM de complexes de métaux de transition à géométrie « plan carrée ».
2.1. Fragmentation
Séparons la molécule H4 en deux fragments diagonaux H2.
H =
H H
H H H
H H
H
+
On sait que les OM d’un fragment H2 sont les suivantes :
Représenter les OM des deux fragments envisagés.
Les énergies des orbitales des fragments sont naturellement proches ce qui permet d’envisager leur combinaison.
2.2. Etude des symétries
Quels sont les opérations de symétrie à envisager pour discriminer les orbitales et détecter les cas d’orthogonalité ?
-8- Analyser les propriétés de symétrie des orbitales des fragments :
Fragment 1 Fragment 2
2.3. Diagramme d’OM
Construire le diagramme d’OM de H4 et en déduire sa configuration électronique.
Des OM interchangeables par une opération de symétrie sont nécessairement dégénérées.
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On retrouve un résultat précédemment observé : plus les OM sont hautes en énergie, plus elles possèdent de surfaces nodales.
OM par énergie croissante Nombre de surfaces nodales σ1
σ2 et σ3
σ4
Commenter.
3. Molécule CH
4carrée
A partir des documents suivants, établir le diagramme d’OM du méthane CH4 si sa géométrie était carrée.
Doc 3 : Combinaison de niveaux dégénérés
Soient χa1 et χa2 deux orbitales dégénérées du fragment (a), et χb1 et χb2 deux orbitales dégénérées du fragment (b). Les OM construites par interaction de χa1 et χb1 d’une part, χa2 et χb2 d’autre part, forment deux groupes de deux orbitales dégénérées.
χa1 et χa2
χb1 et χb2
Doc 1 : Diagramme d’OM de H4 carrée
Doc 2 : Données relatives à l’énergie des orbitales
• Fragments
o OM de H4 : -16,6 eV, - 13,6 eV et – 9,6 eV.
o OA de valence du carbone : -19,4 eV et – 10,7 eV.
• Molécule résultante CH4 carrée :
Les OM anti-liantes de CH4 carrée ont des énergies supérieures à -9,6 eV.